Le mercredi 12 juillet 2023 le Parlement européen a adopté une résolution concernant la situation au Liban [*], sans tenir compte de l’avis de l’ensemble des partis libanais sur un point essentiel concernant le retour des réfugiés syriens vers leur mère patrie (paragraphe 13).
Par ailleurs, il a demandé d’ajouter le Hezbollah à sa liste d’organisations terroristes interdites, sans tenir compte de ses sacrifices pour libérer la terre libanaise de l’occupation israélienne et protéger ses frontières (paragraphe 15).
Globalement, il est clair que le seul point positif aux yeux du Parlement européen est l’accord du 11 octobre 2022 entre Israël et le Liban portant sur la délimitation de leur frontière maritime (paragraphe 16), car il « pourrait contribuer à la stabilité et à la prospérité des deux voisins, ainsi qu’à celle de la région dans son ensemble », alors qu’il nous faudrait croire que l’accord entre le Liban et la Syrie sur le retour volontaire des réfugiés syriens dans leur pays aurait l’effet contraire :
Paragraphe 13. souligne que les conditions ne sont pas réunies pour un retour volontaire et dans la dignité des réfugiés dans les zones de conflit en Syrie… se déclare préoccupé par la recrudescence des discours hostiles aux réfugiés de la part de partis politiques et de ministres libanais; demande instamment au Liban, en cas de mesures prises en matière de migration, de ne pas procéder à des expulsions, de ne pas imposer de mesures discriminatoires et de ne pas inciter à la haine à l’égard des réfugiés syriens…
Paragraphe 15. demande à l’Union d’ajouter le Hezbollah dans son intégralité et le Corps des gardiens de la révolution islamique à sa liste d’organisations terroristes interdites;
Paragraphe 16. salue la signature de l’accord sur la délimitation de la frontière maritime entre le Liban et Israël, et encourage les deux pays à poursuivre un dialogue constructif;
Le paragraphe 13 a suscité nombre de protestations au niveau de la majorité des acteurs politiques libanais amis ou ennemis de la Syrie. Nous traduisons ici la réaction de l’ancien député et rédacteur en chef du quotidien libanais Al-Binaa, M. Nasser Kandil. [NdT].
La décision prise à une écrasante majorité du Parlement européen de maintenir les réfugiés syriens au Liban équivaut à la déclaration d’un mandat colonial sur le Liban, à une violation flagrante de la souveraineté libanaise et à un engagement manifeste dans un plan hostile au Liban et à la Syrie à la fois. Il vise à modifier la démographie des deux pays et à faire de leurs économies l’otage de manipulations politiques par l’exploitation du dossier des réfugiés.
L’affaire est d’une gravité qui mérite une réunion immédiate du gouvernement et une réunion extraordinaire du Parlement, lesquels décideront de former des délégations gouvernementales et parlementaires afin de dénoncer cette décision, de publier des déclarations explicites divulguant son contexte ainsi que sa nature coloniale et raciste, et aussi de déposer plaintes devant les tribunaux européens et le Conseil de sécurité de l’ONU contre le Parlement européen en tant qu’institution et contre ses députés ayant soutenu la décision en tant qu’individus.
Si l’arrière-plan colonial est évident du fait qu’il y a prise d’une décision concernant deux pays non représentés au Parlement européen contrairement à leur volonté et en violation flagrante du principe du droit souverain des États ; l’arrière-plan raciste est tout aussi évident à partir du moment où le Parlement européen et les gouvernements européens s’accordent pour refuser d’accueillir ces mêmes réfugiés dans leurs pays au motif qu’il n’ont pas la capacité de les absorber, alors qu’ils considèrent que le petit pays libanais en serait capable et serait raciste s’il déclare le contraire.
Le Parlement européen fait donc fi du des modalités du retour des réfugiés convenues entre le Liban et la Syrie, alors qu’elles reposent sur l’établissement des listes de ceux qui souhaitent rentrer dans leur pays, listes ensuite examinées par les institutions syriennes avant de donner leur accord à ceux qui ne risquent pas d’être poursuivis à leur retour en Syrie.
D’où la demande conjointe libanaise et syrienne aux donateurs soucieux du bien-être des réfugiés, y compris les donateurs européens, de transférer leurs contributions au profit de ces personnes rentrées chez elles, en Syrie. Auquel cas, ces contributeurs pourront continuer à suivre leur situation et auront même le droit de la réviser devant toute information indiquant que l’une de ces personnes aurait été poursuivie.
Ce que les Européens refusent à cause d’intentions cachées consistant à garder les déplacés syriens au Liban, afin de les intégrer et de leur accorder la citoyenneté libanaise comme cela a déjà fait le titre de nombreuses déclarations [dont celles de l’ancien ministre et candidat à la présidence Souleimane Franjieh, du député Gebran Bassil, du député Ali Hassan Khalil, de l’ancien ministre des Affaires étrangères Adnan Mansour et même de l’ex-président de la République libanaise, le Général Michel Aoun ; Ndt].
Il est donc inacceptable que les responsables de cette dangereuse décision ne reçoivent pas la réponse qu’ils méritent.
Nasser Kandil
2023/07/14
Traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal pour Mondialisation.ca
Source originale : Al-Binaa
https://www.al-binaa.com/archives/375801
[*][ Résolution du Parlement européen du 12 juillet 2023 sur la situation au Liban
Source : Lire l'article complet par Mondialisation.ca
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