La nouvelle Europe est née d’une immense défaite qui n’a pas sa pareille dans son histoire; pour la première fois l’Europe a été vaincue, l’Europe en tant que telle, toute l’Europe. Vaincue d’abord par la folie de son propre mal incarné dans l’Allemagne nazie, libérée ensuite par l’Amérique d’un côté, par la Russie de l’autre. Libérée et occupée. Je le dis sans ironie. Ces mots, tous les deux, sont justes. Dans leur réunion réside le caractère unique de la situation. L’existence des résistants (des partisans) qui s’étaient battus partout contre les Allemands n’a rien changé à l’essentiel: aucun pays d’Europe (l’Europe depuis l’Atlantique jusqu’aux pays baltes) ne s’est libéré par ses propres forces. (Aucun? Quand même. La Yougoslavie. Par sa propre armée de partisans. C’est pourquoi il a fallu bombarder en 1999 des villes serbes pendant de longues semaines: pour imposer, a posteriori, même à cette partie de l’Europe le statut de vaincu.)
— Milan Kundera, Une rencontre.
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