Transnistrie : le secret militaire de Cobasna — Alexandre LEMOINE

Transnistrie : le secret militaire de Cobasna — Alexandre LEMOINE

Récemment, des négociations ont eu lieu à Chisinau entre les présidents Volodymyr Zelensky et Maia Sandu. Les négociations se sont déroulées à huis clos, il était question de l’avenir des dépôts d’armes de la 14e armée des forces armées russes.

Mais il y a eu une fuite d’information. Après quoi, une campagne résonante a commencé dans la presse. La raison en était l’étrange idée des politiciens de la Moldavie de céder à l’Ukraine le village frontalier de Cobasna, situé en Transnistrie, en échange d’un petit morceau de la région d’Odessa. Cette nouvelle aurait à peine eu un tel écho s’il n’y avait pas eu une circonstance.

Le fait est que c’est précisément à Cobasna que se trouvent les plus grands dépôts d’armes d’Europe. Il ne s’agit même pas du fait que l’Ukraine rêve d’obtenir tout cet arsenal, mais plutôt de ce qu’elle finira par obtenir, et quelles pourraient être les conséquences à la fois pour l’Ukraine et pour la Transnistrie.

Lorsque, dans les années 1980, a commencé le retrait progressif du groupe des forces Ouest de l’armée soviétique des anciens pays du Pacte de Varsovie, tous les arsenaux étaient stockés précisément à Cobasna. Dès que le conflit transnistrien a commencé, les canons de ces dépôts ont commencé à figurer dans les conflits bien au-delà de la Transnistrie et même de la Moldavie.

Cette question a été soulevée en 1995 au parlement transnistrien par le général Alexandre Lebed. À l’époque déjà, lui et un groupe d’experts ont établi que l’arsenal d’artillerie de Cobasna avait expiré et que les obus pouvaient détoner à tout moment. Selon le général Lebed, « 2 600 wagons de munitions y sont entreposés. La capacité de l’entrepôt est dépassée presque du double. Environ 500 wagons d’explosifs. Si cela explose, ce sera le Sahara pour le reste de la vie ». Personne n’a écouté le général en Transnistrie à l’époque.

Personne à Tiraspol n’a prêté attention à la recherche de l’Académie des sciences de la Moldavie non plus, or elle présentait l’image d’une apocalypse totale, comparable pratiquement à Hiroshima. La force de l’explosion lors de la détonation sera d’environ 10 kilotonnes, ce qui causera des destructions dans un rayon de 50 km sur les territoires de la Transnistrie et de l’Ukraine.

De 2000 à 2004, la Russie a tout de même recyclé une partie des munitions d’artillerie dans les dépôts. Mais l’affaire s’est arrêtée là. Compte tenu du fait que la Russie prétend avoir une influence en Transnistrie et que le dépôt est protégé par la 14e armée des forces armées russes, qu’est-ce qui a empêché de poursuivre le recyclage ?

La question semble être rhétorique. Ou alors personne au ministère de la Défense russe ne veut savoir ce qui pourrait arriver en Transnistrie.

Que peut-il arriver en cas de réalisation du plan de Sandu et Zelensky ? Le contingent qui protège l’arsenal de Cobasna compte environ 1 000 personnes. Si vous combinez les deux bataillons spéciaux moldaves Fulger (éclair), l’un militaire, l’autre policier, et les renforcez avec des carabiniers, le nombre sera à peu près le même.

Ajoutez à cela les forces armées ukrainiennes, et la 14e armée n’aura aucune chance de défendre l’arsenal.

Mais ce n’est pas le plus dangereux. C’est que tout combat à proximité peut entraîner la détonation de munitions. Les armes à feu y ont apparemment déjà toutes été volées. Mais ce qui reste est une mine à retardement pour la Transnistrie et les régions voisines de l’Ukraine.

Aujourd’hui, ni Zelensky, ni Sandu, qui n’ont pas servi dans l’armée, ni les experts du ministère de la Défense russe ne semblent comprendre tout le danger d’un tel conflit.

Considérons un autre scénario. Supposons que, n’ayant pas la possibilité d’obtenir Cobasna, l’Ukraine organise un sabotage dans les dépôts afin qu’il n’y ait pas d’attaques depuis là sur les régions voisines, en particulier la région de Vinnytsia.

Compte tenu du contingent limité de militaires des forces armées russes qui gardent la base, cela est tout à fait possible. Mais cela détruirait des villages dans les régions de Vinnytsia et d’Odessa, principalement peuplés d’Ukrainiens de souche.

Les Ukrainiens constituent également la majorité de la population de Cobasna, qui sera probablement tout simplement rayée de la surface de la terre dans ce cas.

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