Phnom Penh – Le Premier ministre cambodgien Hun Sen a exhorté l’Ukraine à ne pas importer les bombes à fragmentation que les États-Unis proposent de lui fournir. Le président Je Biden a en effet confirmé l’envoi d’un programme d’aide militaire de ce type à Kiev pour “une valeur de 800 millions de dollars dans la guerre contre la Russie”. Plusieurs groupes humanitaires ont critiqué la décision du président américain Joe Biden en rappelant que les résidus de guerre peuvent rester non explosés pendant des décennies.
“Ce serait le plus grand danger pour les Ukrainiens pendant plusieurs années, jusqu’à un siècle, si des bombes à fragmentation étaient utilisées dans les zones occupées par la Russie sur le territoire de l’Ukraine”, a tweeté hier Hun Sen, citant la “douloureuse expérience” du Cambodge , où les munitions larguées par les Américains au début des années 1970 ont perduré de causer de nombreux morts et blessés graves avec mutilation. “J’appelle le président américain, en tant que fournisseur, et le président ukrainien, en tant que destinaire, à ne pas utiliser de bombes à fragmentation dans la guerre, car les vraies victimes seront les Ukrainiens”, a réitéré le premier-ministre cambodgien.
Avec le Laos et le Vietnam, le Cambodge est l’un des pays les plus minés au monde depuis que les États-Unis ont largué des millions de bombes pour tenter de frapper des bases communistes pendant la guerre du Vietnam dans les années 1960 et 1970. Rien qu’au Laos, entre 1964 et 1973, quelque 260 millions de bombes ont été larguées. À ce jour, moins de 0,5 % ont été déminées.
Zelensky ment à sa population
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a assuré que les risques pour la société civile seront minimes, mais c’est une promesse très difficile à tenir, compte tenu de l’imprévisibilité de l’arme. Les bombes à fragmentation sont des engins conçus pour exploser dans les airs et contiennent en leur sein une série de munitions fabriquées pour se répandre sur une très grande surface, qui à leur tour explosent au contact du sol. Ou du moins ils devraient : selon le Comité international de la Croix-Rouge, même dans les conflits récents, 40 % des munitions restent non explosées, aggravent les risques pour les civils et provoquent des « destructions aveugles » en violation du droit international humanitaire.
Au Cambodge, au cours des 40 dernières années, au moins 20.000 personnes sont mortes en marchant sur des mines non explosées. Au Laos au moins 11.000. Un rapport de l’année dernière du groupe de surveillance Cluster Munition Coalition a révélé en 2022 que 97% des victimes étaient des civils et 66% étaient des enfants.
En janvier, un groupe de démineurs ukrainiens a visité des champs de mines cambodgiens. Dans le conflit entre la Russie et l’Ukraine, des bombes à fragmentation ont en effet déjà été utilisées par les deux camps l’automne dernier, faisant des dizaines de morts même parmi les non-combattants.
Kiev a jusqu’à présent utilisé des munitions de fabrication turque. Aujourd’hui, les principaux pays producteurs sont le Brésil, la Chine, l’Égypte, la Grèce, l’Inde, l’Iran, Israël , la Corée du Nord, la Corée du Sud, le Pakistan, la Pologne, la Roumanie, la Russie, Singapour, la Turquie et les États-Unis. Plus de 120 pays ont signé la Convention sur les armes à sous-munitions, qui interdit l’utilisation, la production, le transfert et le stockage de ce type d’armes. Les Etats-Unis, la Russie, l’Ukraine, la Chine, l’Inde et le Pakistan ont refusé de signer le traité.
Pierre-Alain Depauw
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Source : Lire l'article complet par Mondialisation.ca
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