Pierre-Emmanuel Barré (PEB) fait partie de la nouvelle génération d’humoristes qui tapent fort, à l’instar de Blanche Gardin et Gaspard Proust. Gaspard a une fenêtre de tir sur Europe 1, la station qui se droitise ; Blanche se risque au cinéma et à la série ; Pierre-Emmanuel, lui, joue sur les RS et son appartenance à la mélenchonosphère. À chacun sa rampe de lancement.
Gaspard fait dans le sniper d’actualité, Blanche dans la défonce du sociétal et Barré dans le politico-trash. Catalogué anti-Système avant et pendant le covidisme, PEB a pris un virage à l’extrême gauche, élargissant ainsi son public. Il a pu faire un Zénith, qu’il a mis en ligne gratuitement (mais on donne ce qu’on veut) le 22 juin 2023.
Las, en première partie, il a donné la parole à la gauchiasse Giedré, qui fait dans la chansonnette scato, le degré zéro du transgressisme. On dirait Philippe Val sans Font mais avec une chatte et une voix de gamine, ce qui est raccord.
Avec Guillaume Meurice en guest, PEB achève sa mutation et son coming out LFIste. Pour la nouvelle scène, on a droit à Benjamin Tranié et Aymeric Lompret (à 35’47 et 57’29), deux autres sous-gauchistes du clan Charline, l’aboyeuse de France Inter remisée à la niche. Le message est clair : PEB roule pour Mélenchon, ou alors Ruffin, le dauphin bègue autoproclamé. Reconnaissons toutefois que l’humour LFI est de meilleure qualité que l’humour PS. Même à gauche, ce temple de l’égalité, il y a une hiérarchie.
À la 40e minute, PEB lit un texte et fait siffler McKinsey, les méchants qui nous gouvernent dans l’ombre des cabinets. Il critique la politique gouvernementale en matière de pénibilité au travail, mais rate une vanne facile à 42’08 [Erratum : PEB frôle la vanne interdite à 44’12 ! NDLR], une vanne qu’il ne peut plus assumer aujourd’hui, depuis qu’il a signé avec le diable gauchiste, surtout devant un Zénith :
« Il y a en France toutes catégories confondues 6 millions de chômeurs »
Il s’agit d’un discours politique dans un meeting déguisé en spectacle, nous avons donc le droit de l’analyser politiquement. Le problème, quand on fait de l’humour de gauche classique, c’est qu’il n’est pas drôle. On le voit avec des Philippe Val ou des Stéphane Guillon : ceux qui applaudissent applaudissent leur propre opinion, pas les vannes qui n’en sont pas, d’ailleurs.
A contrario, le gauchisme vu de l’extérieur est drôle :
On peut et on doit rire du gauchisme car, en réalité, il est au pouvoir, il est le pouvoir. En conséquence, l’humour est juif quand les nazis sont au pouvoir, et réciproquement. Un spectacle gauchiste en pays dominé par le gauchisme ne peut donc fondamentalement pas être drôle. On peut rire gentiment quand on se moque des riches ou des méchants, par exemple des macronistes, qui en prennent plein la gueule. Mais objectivement, macronistes et mélenchonistes sont dans le même camp, puisque les gauchistes, terrorisés par le fascisme, ont voté Macron en masse contre la terrible Marine au second tour 2022.
« L’ENA c’est un peu comme la prison : quand on en sort on a appris à enculer les plus faibles »
Le problème, il est là. L’humour – qui est indéniable – de PEB est donc bridé par l’injonction gauchiste, qui interdit d’aller plus loin que l’aspect superficiel et manichéen des choses. On peut se moquer des ultralibéraux, des milliardaires, des escrocs au gouvernement (ils le sont tous, quasiment), mais pas des réseaux de pouvoir occultes, comme le faisait Dieudonné, avant qu’il ne tombe en grâce devant la vierge sioniste, une vierge équipée d’un taser et d’un Uzi gun.
BHL et le CRIF avaient raison, on peut leur concéder cela, quand ils criaient que les spectacles de Dieudonné étaient des « meetings politiques », parce qu’il s’attaquait ou faisait rire aux dépens du pouvoir profond, cet l’ennemi sans visage. Cela ne devait pas le faire interdire pour autant, mais notre justice franc-maçonne a suivi. Il reste donc une énorme place à prendre – avec des coups à prendre aussi – dans l’humour profond, c’est-à-dire authentiquement politique. Et par là, on n’entend pas les sketchs anti-Giscard du père Bedos ou les leçons de platitudes du blaireau Guillon, mais bien l’inverse des sketchs sur la vie quotidienne, les séries télé, la drague et le cul, le sociétal, quoi.
Pour synthétiser, nous dirons que coexistent trois formes d’humour : l’humour dépolitisé, celui de Gad Elmaleh et consorts, souvent les interprètes de leurs « confrères » anglo-américains ; l’humour politisé des nouveaux arrivants révélés par le covidisme, un humour de résistance et de lucidité, à des degrés divers (Alwest, Tabibian, Toussaint, Duval, Franjo, Naïm) ; et l’humour gauchiste qui fait semblant de s’attaquer au Système mais qui s’arrête toujours à la ligne rouge, avec parfois quelques intrusions calculées. Soit, en gros, les flippés (ou les larbins), les couillus (ou les fous) et les malins (ou les escrocs).
Aymeric Lombret : l’entre-soi antifacho
« Il faut reconnaître que c’est quand même pratique de pas réfléchir : Aymeric, y a plus de café. C’est à cause des Noirs ! Aymeric, Véro qu’est partie. C’est à cause des Arabes ! Y a pas de jus dans ta chronique. C’est à cause des juifs ! »
Benjamin Tranié : le beauf antibeauf
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