-
Campagne de dons Mai-Juin 2023
Chers amis lecteurs. Réseau International continue à avoir besoin de vous pour accompagner les changements révolutionnaires qui se déroulent actuellement dans le monde. Nous avons besoin de votre soutien pour continuer à vous fournir un point de vue large et multipolaire sur les évènements mondiaux, pour un travail de réflexion et de réinformation de qualité.
Total de dons 3 199,00 € sur un objectif de 25 000,00 €
par Martial Cadiou
« L’Église n’est pas à Constance, elle est ici. C’est ici l’Arche de Noé. » Benoît XIII
Dans un chapitre consacré au Grand Schisme d’Occident, Jean Robin, Le royaume du Graal : introduction au mystère de la France, Éd. G. Trédaniel, pp.499-520, nous laisse entendre que le pape Benoît XIII aurait été le premier titulaire de la Papauté cachée inaugurant ainsi l’ « Église d’Avignon », pierre d’achoppement de l’Église de Rome.
Pedro de Luna naquit en 1328 à Illueca, petite ville aragonaise de la province de Saragosse. Il est issu d’une famille de la haute noblesse, apparentée aux rois d’Aragon. Par sa mère, il descendait du roi maure de Majorque, Saïd-ben-Alhaken, baptisé par le roi Jaime Ier le Conquérant, artisan de la Reconquista. Le royaume d’Aragon exerçait alors sa puissance et son influence sur le Roussillon, la « Grande Catalogne », les Baléares, la Sicile, la Sardaigne et la Corse.
Benoît XIII était cardinal de Santa-Maria-in-Cosmedin. Sa famille avait pris des armes parlantes : un croissant de lune dans son blason. La célèbre prophétie des papes attribuée à saint Malachie, publiée à Venise (un des sièges de la « contre-initiation » jusqu’en 1896 selon Jean Robin), due au bénédictin Arnold de Wion en 1595 lui attribuait la devise : « Luna Cosmedina », annonciatrice de schisme au sein de l’Église !
Proclamé antipape par l’Annuaire Pontifical, Arnold de Wion ne considère nullement Benoît XIII comme un antipape. Pas plus que Félix V alias Amédée VIII ! (cf. Jacques Halbronn, Papes & prophéties : décodages & influence, p.75, Éd. Axiome, 2005)
Dans son ouvrage, Gérard Touzeau, a réhabilité cette grande figure papale injustement bannie de la généalogie papale car inventoriée antipape dans l’Annuaire Pontifical. L’auteur nous livre ici des informations capitales pour la compréhension du mystère de Jeanne d’Arc.
Ainsi, p.9 : « Seuls le Comte d’Armagnac et quelques évêques de Catalogne sont restés, jusqu’au bout, fidèles à Benoît XIII. Reclus dans sa forteresse de Peniscola (…) Le château de Peniscola, entre Barcelone et Valence, fut élevé par les Templiers et appartint ensuite à l’ordre de Montesa.»
L’obédience du pape Benoît XIII se matérialisait dans le Midi aux terres du Comte d’Armagnac, principalement le diocèse de Rodez et l’archidiaconé de Rivière dans le diocèse de Tarbes. Selon Gérard Touzeau – opus cité – p.231 – on remarque que les restes de l’obédience avignonnaise formés du Comté d’Armagnac (incluant Rodez) et des régions limitrophes correspondent curieusement aux terres habitées deux siècles plus tôt par les Cathares aussi appelés Albigeois, c’est-à-dire Blancs (du latin Albus, blancs).
Son légat en pays de Rouergue futJean Carrier, cardinal de Saint-Étienne-au-Mont-Caelius, lieutenant-général de Jean IV d’Armagnac.
Condamné par contumace en 1420 par les commissaires de Martin V, il se réfugia dans les gorges du Viaur au château de Tourène, près du village de Crespin, au sud de Rodez, surnommé ” Péniscolette ” en raison de l’analogie de topographie avec celle de Peniscola. Le nonce de Martin V, Géraud de Brie tentera en vain pendant près de trois ans de le déloger. Le siège de Tourène se terminera en décembre 1423 par la fuite de Jean Carrier à Peñiscola.
Benoît XIII ne choisira pas la forteresse de Peniscola par hasard. L’ordre de Montesa fut créé sur les décombres de l’ordre du Temple, car le roi d’Aragon, Jacques II le Juste, s’opposera aux décisions pontificales de transfert de biens de l’ordre du Temple à l’ordre de Malte. Jacques Ierd’Aragon octroiera même à Jacques de Molay la place forte de Peniscola, près de Valence.
Le roi Jacques II le Juste arrivera à persuader le pape Jean XXII de regrouper ses biens en Aragon et à Valence et de créer un nouvel ordre militaire qui ne différerait pas beaucoup de celui des Templiers, et qui serait chargé de protéger la frontière contre les Maures et les pirates. La nouvelle commande fut dédiée à la Vierge Marie et établie à Montesa. Le pape Jean XXII l’endossera le 10 juin 1317 et lui octroiera le statut de monastique.
Lors de sa retraite forcée, il sera entouré néanmoins de quelques fidèles, dont le frère de Vincent Ferrier, Boniface Ferrier, prieur général des chartreux. Benoît XIII aimera à comparer le rocher de Peniscola, où il vit abandonné et renié de tous, à l’arche de Noé qui portait le salut de l’humanité. Pedro de Luna y établira sa résidence, procédant à de nombreux aménagements pour transformer le château en palais pontifical. Cependant, le château décline une architecture au caractère roman pur et de style cistercien, austère et martial. Par son état de conservation et sa typologie constructive, il s’agit du plus important vestige architectonique de l’ordre du Temple dans tout l’occident.
Jacques Rolland, Le lourd secret des Templiers, p.73, Éd. Trajectoire, 2015, émet l’hypothèse que l’ordre du Temple ait été fondé prioritairement pour la péninsule ibérique, déjà reconquise, même si créé dans le royaume de France.
Dès le début du XIIe siècle, les rois d’Aragon s’intéressèrent à l’ordre du Temple, ou plutôt l’ordre du Temple s’intéressa à eux. Dans les faits, la couronne d’Aragon dépendait politiquement des Templiers.
Ce spécialiste de l’ordre du Temple nous laisse entendre que les Templiers auraient pu décider de faire du royaume d’Aragon, avec ses deux ports d’importance : Barcelone et Valence, la maison cheftaine, c’est-à-dire la résidence principale de l’ordre comme Jérusalem. Paris étant une place-forte financière, et en aucun cas la maison cheftaine.
Les préoccupations ésotériques, oraculaires et astrologiques furent vives et prononcées à la Cour d’Aragon. (cf. Martin Aurell, Messianisme royal de la Couronne d’Aragon, Éd. Annales, Histoire, Sciences Sociales, Armand Collin, 52e année, n° 1, 1997, pp.119-155)
La Charte d’Alaon, de fabrication espagnole, encensée par Jérôme Vignier, mais considérée fausse par de nombreux auteurs, notamment, Henry Leclercq et le chartiste Jean Louis Quantin, ne faisait-elle pas descendre les rois d’Aragon de Clovis par les Mérovingiens d’Aquitaine ?
C’est au XIe siècle, en Aragon, royaume indépendant, qu’apparaît pour la première fois, l’emblème qui associe la rose et la croix.
Les rois d’Aragon puisaient leurs emblèmes dans les plus redoutables bêtes de l’Apocalypse : sauriens, chiroptères et rapaces surplombaient leur heaume et occupaient même le champ de leurs armes. Le dragon ailé fut un de ces emblèmes chers à la royauté aragonaise.
La ressemblance phonétique « dragon », « d’Aragon » en fait une figure parlante toute prédestinée pour ses armoiries. Au milieu du XIVe siècle où la mode des cimiers venue de France se répand dans la péninsule ibérique. Pierre IV dit le Cérémonieux place ce saurien sur son heaume.
Au cours des XIVe et XVe siècles, les rois d’Aragon feront objet de multiples prophéties qui leur attribuaient une fonction messianique. Certains manuscrits accordent même à Pierre IV, grand-père de Yolande d’Anjou une note antéchristique. En 1282, la Maison de Barcelone prenant possession de la Sicile s’appropria des oracles venus d’Orient et réélaborés par les disciples de Joachim de Flore (1130-1202) .
Célébré en 1262, le mariage entre Pierre III dit le Grand (1245-1285) et Constance II de Sicile associant la Maison Aragon à la destinée apocalyptique des Hohenstaufen est central dans ces oracles. Grâce à cette union, les Barcelonais s’appropriaient les attributs messianiques de Frédéric II de Hohenstaufen. Ils devenaient la race maudite des gibelins, élément central du système eschatologique des joachimites de la fin du XIIIe siècle.
Ennemis de la papauté dans leur expansion italienne, ils tirent profit du caractère subversif du prophétisme joachimite récupéré au service d’une dissidence d’État.
Les souverains aragonais accueillirent de nombreux devins et astrologues. Ils prêteront une oreille attentive aux plus exaltés des franciscains spirituels aussi bien catalans qu’italiens, qu’ils reçoivent volontiers dans leurs palais. Loin d’être des marginaux ou des fanatiques de l’Apocalypse voués aux marges d’une hétérodoxie incertaine, ces futurologues avant la lettre auront leurs entrées à la cour de Barcelone.
Au XIVe siècle, la Maison de Barcelone est profondément attachée à l’ordre franciscain. Plusieurs de ses rois choisissent d’être enterrés dans ses couvents plutôt que dans le monastère cistercien de Poblet, nécropole dynastique depuis la fin du XIIe siècle. Ses reines fondèrent des communautés de clarisses où elles prirent le voile au cours de leur veuvage.
J. Garcia Font, Histoire de l’alchimie en Espagne, Éd. Dervy-Livres, 1980 rapporte qu’Eximenis ou Fransec Ximenez (1330-1409), une des figures les plus extraordinaires de l’alchimie catalane du XIVe siècle, fut le conseiller et le confesseur du père de Yolande.
Pendant le Grand Schisme de 1378, ce même Eximenis fut au service du pape Benoît XIII, dont il reçut de nombreuses distinctions : Patriarche de Jérusalem et évêque d’Elne. C’est à Perpignan – où s’était réfugié Benoît XIII – que mourut notre personnage le 23 janvier 1409. Il fut enterré au couvent des franciscains de la ville.
Benoît XIII nous est connu pour sa très grande culture livresque et une immense érudition ainsi qu’une obstination frisant l’irréductibilité. jusqu’à Peniscola. À sa mort, le vil cardinal Pierre de Foix s’appropriera ce qui subsistait de manuscrits au moment de l’abdication de Clément VIII. Il conservera par devers lui 600 manuscrits récupérés à Peniscola, dont le Procès des Templiers et autres récits apocryphes tels l’Évangile de Nicomède ou l’Épître de Clément de Rome à Jacques, frère de Jésus.
Cependant, comme le reconnaît Gérard Touzeau au sujet du trésor de Benoît XIII, p.338 : « Enfin, plusieurs indices laissent penser que des livres et des biens ayant appartenu à Benoît XIII ont franchi, peu après 1430, l’actuelle frontière franco-espagnole. Une poignée de survivants de l’ « Arche de Noé », parmi lesquels Antoine De Camps, les auront entreposés dans quelque cachette oubliée de la région de Perpignan. »
Dans la région du Razès ?
L’influence catalane et aragonaise en Languedoc s’affirmera déjà au XIe siècle, lors du mariage de Ramon Bérenger Ier (1023-1076) avec Almodis de la Marche, dame de Lusignan et l’acquisition des comtés de Carcassonne et du Razès.
Benoît XIII put compter sur le soutien indéfectible d’un certain Comte Ramon III de Périllos, seigneur et vicomte de Rodès en Aragon et de Périllos en France, seigneur de Millas, de Céret et d’Argelès sur mer (66), Chambrier du Roi Jean d’Aragon et de Majorque (ca 1325-1408..1419)
Le nom de Ramon de Périllos est quasiment inconnu des historiens médiévistes français. Périllos était considéré comme le berceau d’une famille qui a donné aux Rois d’Aragon des conseillers très influents. En 1391, le fief de Périllos est érigé en Vicomté, Ramon de Périllos – vassal du Comte de Barcelone – devient gouverneur du Roussillon, de la Cerdagne, du Capcir et du Vallespir, mais également Maréchal d’Aragon et de Sicile.
C’est dans cette famille que quelques années plus tard, un autre Ramon de Périllos accéda aux fonctions de Grand-maître des Chevaliers de Malte (1697-1720) mais on avance que ce fut le seul des grands Maîtres à ne pas être enterré à La Valette.
Au cœur de la lande aride des Corbières, se dresse le village déserté d’Opoul-Périllos, l’un des lieux les plus énigmatiques des Pyrénées-Orientales. Périllos appartint dans un temps reculé à la puissante famille narbonnaise des Procula, dont une fille, Claudia, native de Narbonne, devint l’épouse de Ponce Pilate. Celle-ci fut la protectrice du couple Jésus et Marie-Madeleine et favorisera l’arrivée de Marie-Madeleine en Provence. Précisons que Claudia Procula est vénérée dans les Églises orthodoxes et orientales pour avoir tenté de sauver Jésus, mais pas dans l’Église de Rome !
Les Mérovingiens – à la fois descendants de Mérovée/Merouweg, et les premiers bénéficiaires de l’ ” initiation royale ” – furent les gardiens attitrés du site mystérieux de Périllos. On en déduira que les vraies origines de la royauté, sur lesquelles le chartreux Polycarpe de la Rivière, l’auteur de l’Histoire des évêques d’Avignon (1638) , membre de la Société Angélique, se flattait d’avoir des lumières se situent dans la « Sépulture Royale » où sont réunis les corps éthériques du Couple Sauveur (Jésus-Marie-Madeleine).
Quand Benoît XIII rencontra quelques difficultés à Avignon, Ramon III de Perellós deviendra son lieutenant pour aller à Paris et obtenir pour le pape la protection des troupes du duc Louis d’Orléans, de 1398 à 1401. Celui-ci passera quelques années au service du souverain pontife.
Chambellan du roi Juan Ier d’Aragon, il dut suite à la mort du roi dans des circonstances mal élucidées, prouver son innocence en accomplissant un pèlerinage en 1397 en Irlande au « Puits de saint-Patrick » associé par l’écrivain fantastique Gustave Meyrink dans son dernier roman, L’ange à la fenêtre d’Occident, membre de la Confrérie des Sages du Nord, à l’apparition d’Isaïs.
En 1397, Ramon et son escouade quittèrent Avignon où il résidait alors au service du pape Benoît XIII. Il indiquait vouloir s’assurer de ses propres yeux que son ancien et bien-aimé roi, Jean Ier d’Aragon, était au purgatoire. Les autres raisons du voyage ne sont pas dites. Ramon est allé, il a vu et il sait. De son voyage aux confins du monde, de ses épreuves et de sa vision dans la grotte, Ramon, comme d’autres avant lui, a fait un récit fabuleux. N’oublions pas qu’en ces temps, merveilleux et véracité sont indissociables. Le manuscrit original en langue catalane (du XIVe siècle) est perdu ou caché. On en possède une copie manuscrite en langue romane (occitano-catalan) datée de 1466. (cf. Voyage au Purgatoire de Saint-Patrice, publié par Jeanroy et Vignaux, Toulouse 1903, [Bibliothèque méridionale, Tome VIII])
Dès le XIIe siècle, courait en Europe une légende d’outre-tombe selon laquelle il existait en Irlande, sur une île du lac Derg, une grotte appelée « Purgatoire de Saint Patrick ». Ramon de Perellós, accompagné du chevalier Guillaume de Courcy fit le voyage en Irlande où il fut aimablement reçu par le roi Nelan O’Neill. Doté d’un sauf-conduit et d’une escadre de vingt hommes, il se rendit sur l’île, à l’entrée de la grotte. Il fit son testament, assista à une messe pour le salut de sa propre âme et adouba chevalier ses deux fils Thomas et Pere. Ensuite, il entra dans la grotte avec Guillaume de Courcy. Il en ressortira tout émerveillé, racontant qu’il s’était rencontré lui-même.
Ce lieu d’initiation souterrain restera fort en honneur jusqu’à l’époque de Christophe Colomb. Le Purgatoire de Saint Patrick sera bouché sur ordre des autorités ecclésiastiques le 17 mars 1497, jour de la fête de saint Patrick, alarmées de voir se perpétuer des mystères dont l’origine était bien antérieure au christianisme.
De cette légende apparemment anecdotique, l’on pourra constater que le symbolisme du « Trou de Périllos » rattrape celui de la Lance graalique et du Méridien de Paris ou méridien de Saint-Sulpice, figure de l’Axe du Monde que l’on retrouve associé mystérieusement à la Société Angélique.
André Douzet, en bon connaisseur de l’affaire de Rennes-le-Château, note le rapprochement entre l’aventure de Ramon Perillos et la « chapelle périlleuse » dans le cycle du Graal. D’autre part, dans La Croisade contre le Graal, Otto Rahn établira un rapprochement tout aussi judicieux entre Parilla, le premier roi du Graal selon Wolfram d’Eschenbach et Ramon de Perella, le seigneur de Montségur assimilé au Montsalvage. Ce dernier tenait le château de sa suzeraine, Esclarmonde de Foix, fille du comte de Foix, Roger Bernard Ier, convertie au Catharisme. L’architecte chargé de la construction du château de Montségur fut Arnaud de Baccallaria, seigneur de Villars, dont l’origine se situe du côté d’Alet, près de Limoux dans le Razès. L’un de ses descendants, l’abbé Montfaucon de Villars publia au XVIIe siècle un ouvrage sur les Rose-Croix, Le Comte de Gabalis ou entretiens sur les sciences secrètes qui lui valut d’être assassiné sur la route de Lyon.
Toujours selon Wolfram von Eschenbach, ce sont les représentants de la Maison d’Anjou alliés aux Templiers, qui détiendront le manuscrit original de Flégétanis.
Le mythe du Graal, mythe solaire et viril, procède de la Tradition primordiale d’origine polaire et hyperboréenne. Ce mythe est symbolique et initiatique. Cette saga se veut intemporelle, mystique voire initiatique (Wolfram Von Eschenbach), universelle. La quête du Graal n’est pas autre chose que la quête de la transcendance, de la présence de la Shekinah, la Shakti miséricordieuse. Le Graal dissimule des vérités incendiaires. Le Graal est le voile du feu créateur, le deus absconditus. Le Graal est effrayant. Il crée et recrée le monde. Le Graal est une sorte de concentration d’énergie, un bouquet de force, composé de toutes les fréquences qui constituent la trame des mondes, des univers.
L’une de ces versions, en fait la plus magistrale, mais aussi la plus ambiguë, car aristocratique, fut le Parzifal du poète allemand Wolfram Von Eschenbach (1180-1225). Ce mythe s’ordonne sur un parcours initiatique et alchimique réservé à une élite de moines-guerriers, constitué d’ « avancées » spirituelles, de « chutes » puis de nouvelles « avancées » pour finalement parvenir à l’ « Éveil » et à la « purification » (catharsis) par le fracassement de l’ « illusion » (la Maya indo-bouddhique) du héros. L’élément principal de la quête de Parzifal n’est pas tellement de découvrir le Graal, mais de panser le roi blessé afin que le royaume retrouve sa fécondité et son équilibre. La folkloriste anglaise Jessie Weston suggère que le personnage du Roi pêcheur est issu des anciens rites païens. Lorsque le Roi pêcheur est blessé, la terre devient aride, lorsqu’il guérit, elle devient fertile. Weston avance que le Roi pêcheur trouve ses origines dans les cultes initiatiques païens et dans le conte irlandais de Finn Mac Cumaill et le Saumon du savoir.
L’ordre du Temple est une référence constante dans Parzifal. Il induit dans ses thèmes l’idée naturelle et traditionnelle d’une élite et de groupe d’élus préposés à remplir une tâche spécifique, notamment à maintenir une tradition secrète. Des éléments « hétérodoxes » fort gnostiques composent cette quête, de ce fait le Parzival de Wolfram est la plus païenne des versions.
Nous trouvons dans le récit de Wolfram deux figures essentielles du monde de la Tradition. La première est Lohengrin, fils de Parzival et de Condwiramur. Lohengrin, le Chevalier au Cygne, n’est autre que le lorrain Garin… sous l’armure de laquelle chevaucha la Pucelle. Jeanne fut la dernière incarnation virginale de Perceval. Sa mission, comme celle de Du Guesclin lui avait été désignée dès son enfance. La seconde, la plus importante, n’est autre que le mythique Prêtre Jean.
La présence des Templiers dans le récit de Wolfram s’explique par un idéal plus élevé que celui de la chevalerie séculière et mondaine de la Table Ronde puisqu’ils étaient choisis parmi les plus purs de la Table Ronde. La notion de pureté comme la notion de vengeance est primordiale chez Wolfram. Cette notion de pureté dérange nos contemporains perclus d’égalitarisme n’en comprenant plus la raison ni la nécessité.
Ici, la Quête est essentiellement une démarche alchimique. La Quête est un cheminement purificateur qui transmute la nature pécheresse des humains pour leur permettre d’approcher ce mystère. Le propre de l’Initiation étant la réalisation de la Pierre philosophale, le passage de la pierre brute (état profane) à la pierre taillée (état d’Éveil ou initié). Wolfram l’appelle Lapsit exillis.
Selon Wolfram, les fameux « Templiers » qui gardent le Graal, non seulement font barrage devant tous ceux qui voudraient venir à Montsalvage, mais qu’ils éliminent impitoyablement – en les tuant – tous ceux qui tentent de franchir les limites interdites. C’est plutôt ici le triomphe de l’élitisme.Tout ce que raconte Wolfram au sujet du Château du Graal et des gardiens du Graal, lesquels constituent une élite recrutée par une inscription mystérieuse qui apparaît sur le Graal, prouve la tendance élitiste et franchement raciste du poète bavarois. C’est le seul transcripteur de la légende du Graal à expliquer la blessure et la déchéance d’Anfortas par un manquement aux règles de la pureté du lignage. La connotation raciste est évidente, et ne manquera pas d’être exploitée plus tard par les zélateurs de l’idéologie national-socialiste. Tout est déjà contenu dans le récit de Parzival : le choix mystérieux des gardiens du Graal, le corps d’élite qu’ils constituent et qui préfigure les SS, la purification ethnique qu’ils opèrent autour de Montsalvage pour éviter que le Graal soit vu ou touché par des mains indignes ou impures, le refus de s’unir à une femme qui ne serait pas de la lignée, la pureté de cette lignée, autrement dit la pureté de la race et l’élimination des « sous-hommes ». Bref, tout y est, ce qui rend une œuvre comme Parzival particulièrement ambiguë et inconfortable à l’homme ordinaire.
Wolfram louange la Maison d’Anjou dans son récit. Wolfram appelle Béalzenan la « capitale de l’Anjou » ce qui évoque irrésistiblement le Baucéant des Templiers que Jeanne arborait lors du sacre de Charles VII à Reims.
La Maison d’Anjou fut définitivement concrétisée par l’affiliation de Foulques V le Jeune, comte d’Anjou à l’ordre du Temple. Nous ajouterons qu’à l’époque ou Wolfram rédigeait son Parzival, le Grand-Maître du Temple (élu en 1201) était l’Angevin Philippe de Plessiez qui se signalera par sa lutte contre les Maures d’Espagne. Le vocable « Anjou » rappelle Gamuret l’Angevin, père de Parzifal dont la figure héroïque évoque irrésistiblement Richard Cœur de Lion, fils de la très ambiguë Aliénor d’Aquitaine, avec comme symbole héraldique la panthère, symbole des plus primitifs des Plantagenêts issus de la Maison d’Anjou.
La tradition du Graal nous entretient du concept de Gaste pays, du « Pays désolé » par la perte du Graal, de ce pays stérile qui ne redeviendrait fertile qu’avec la guérison de la blessure du Roi pêcheur, autrement dit Jésus. On considérait que cette blessure se transmettait de génération en génération dans la lignée des rois méhaignés (blessés):les desposynes jusqu’à l’arrivée du 515 dantesque. La blessure emblématique de la tradition du Graal désignait en réalité la perte de la Tradition primordiale du fait de la persécution et de l’éviction des héritiers spirituels par l’imposition d’une souche royale pervertie (les Carolingiens) grâce à l’appui de l’Église de Rome se donnant une succession apostolique aussi imaginaire que frauduleuse. Pour cela, il fallait disqualifier Marie-Madeleine ! Ce qui fut réalisé en 591 par le pape Grégoire Ier. Fusse un stratagème de l’Église visant à ruiner la réputation de Marie-Madeleine et, ce faisant, à détruire les derniers vestiges des influences des cultes rendus à une déesse païenne et au Féminin sacré aux premiers temps de l’Église ?
Revenons à Périllos. Son frère Pons de Périllos, fut le chambellan et le confident de Yolande de Bar, mère de Yolande d’Anjou.
Colette de Corbie, Grande-Maîtresse de l’ordre des Clarisses, tiers-ordre franciscain lui sera très favorable et réciproquement. Celle-ci aurait, selon Philippe de Forceville, historien ” conformiste “, préparé les étapes de Jeanne entre Vaucouleurs et Chinon dans des maisons franciscaines.
L’ abbaye de Corbie, d’obédience colombanienne, entretenait des liens avec l’abbaye de Saint-Victor de Marseille. Colette, accompagnée par Henry de Baume, Blanche de Genève, sœur de Clément VII et d’Isabeau de Rochechouart, baronne de Brissay, sera reçu en par le pape Benoît XIII, le 14 octobre 1406, à Cimiez petit village sur le territoire actuel de Nice alors administré par la Maison de Savoie. Dès 1406, Colette de Corbie était l’objet d’une véritable vénération de la part de Benoît XIII, au point que le pape catalan lui donnant audience se levait de son trône en sa présence et se prosternait même à ses pieds, selon ses hagiographes.
Cimiez, quartier de Nice est un haut-lieu de l’hagiographie des saints Celse et Nazaire, patrons de l’église de Rennes-les-Bains et de la cathédrale de Carcassonne.
Ces saints furent maltraités à Cimiez où Nazairebaptisa et initia Celse, grand pourfendeur de Chrétiens.
En janvier 1409, le pape Benoît XIII confie à Colette le monastère des clarisses urbanistes à Besançon. Les vocations aflluent… De 1410 à 1447, Colette fondera seize monastères. Des familles nobles se lieront avec elle et l’aideront dans sa tâche.
Colette de Corbie était surtout connue comme la « Grande Maîtresse » de l’ordre des Clarisses – qui possédait près de Domrémy, à Neufchâteau, un couvent –, la ” section féminine ” de l’ordre de Saint François. Elle fut élevée au rang d’abbesse générale de tous les monastères de clarisses par Benoît XIII.
Bien qu’elle eût établi son quartier général à Besançon, Colette de Corbie, grande voyageuse, ne dédaignait pas sillonner le royaume, ainsi que les terres d’Empire, ainsi la Lorraine, pour tenir des ” séminaires “. Et, Jacques Guérillon, Mais qui es tu Jehanne d’Arc ? Éd. La Pensée Universelle, 1972 d’écrire : « Cette même Colette de Corbie, voyageuse infatigable, ne manquait jamais, à chaque fois que ses pérégrinations la conduisaient dans les parages, d’effectuer une halte à Domrémy et logeait à l’ermitage du Bois-Chenu où elle convoquait ses adeptes régionales du tiers ordre franciscain qu’elle introduisait dans la règle et l’esprit de l’ordre. Parmi ces adeptes, Jeanne […] reçut, à 18 ans, le grade de ” grande dame discrète “. »
Assiégé dans son palais d’Avignon, Benoît XIII fera face à l’expédition militaire montée contre lui. Il réussira à tenir cinq ans de la sorte, ravitaillé par les Avignonnais.
Dans la nuit du 11 au 12 mars 1403, Benoît XIII réussira à s’évader du palais d’Avignon et à rejoindre, par bateau, Barbentane où une troupe de séides de Louis d’Orléans le conduisit à Châteaurenard, sous la protection du roi de Sicile, comte de Provence, Louis II, époux de Yolande d’Anjou !
En décembre 1403, il séjournera à Tarascon où il recevra Louis d’Orléans avec lequel il conclura un traité d’alliance perpétuelle. Marseille lui ouvrira ses portes et il résidera par deux fois à l’abbaye fortifiée de Saint-Victor.
Entre 1403 et 1407,Benoît XIII séjourna à l’abbaye de Saint-Victor de Marseille. Benoît XIII s’y installa le 9 février 1404 et y restera jusqu’au 3 décembre de la même année. Il quitta définitivement Saint-Victor en 1407.
Cette abbaye recelait une importante bibliothèque médiévale qui contenait un nombre impressionnant de documents précieux sur les origines du Templisme (hiérarchie occulte de l’ordre du Temple). Elle se volatilisera curieusement pendant la Révolution française.
Selon un érudit marseillais, J.A.B Mortreuil, L’ancienne bibliothèque de l’abbaye de Saint-Victor, 1854, une partie importante de la bibliothèque fut donnée par le cardinal Julien de Médicis, abbé de Saint-Victor entre 1570 et 1578 à sa parente Catherine de Médicis. Il semble plus que probable que les livres et manuscrits essentiels du Templisme ont disparu chez les moines de Saint-Maur à laquelle appartenait Rabelais et Dom Pernéty. (cf. Alfred Weysen, L’île des Veilleurs p.260-261, Éd. R.Laffont)
Par contre, pour Augustin Fabre, Observations sur la dissertation de M. Mortreuil sur l’ancienne bibliothèque de Saint-Victor, une partie des livres de l’ancienne bibliothèque de Saint Victor fut confiée à Richelieu par son frère aîné Alphonse-Louis (1582-1683), chartreux et abbé de Saint-Victorde Marseille de 1639 à 1653. Tous les deux s’entendaient fort bien. Il paraîtrait que le frère de Richelieu ait joué un rôle ésotérique de premier plan. En 1635, il se rendit à Rome et y rencontra le mystérieux Nicolas Poussin, lui aussi membre de la Société Angélique, auteur du tableau crypté « les Bergers d’Arcadie ». À partir de là, la carrière de Poussin s’envola. (cf. Arnaud de l’Estoile, Le véritable secret des rois de France, p.95, Éd. J’ai Lu)
Est-ce pour ces raisons que Gabriel Naudé (1600-1653), bibliothécaire et espion du couple Richelieu et Mazarin (qui en savaient long par leurs attaches avec l’abbaye Saint-Victor de Marseille), ira jusqu’à penser que Jeanne n’avait été brûlée « qu’en effigie » ? : « Or ce coup d’État ayant si heureusement réussi que chacun sait, et la Pucelle n’ayant été brûlée qu’en effigie, (…) » (cf. L’estat et succès des affaires de France – Paris 1570 – 1 – II – règne de Charles VI, ad. ann. 1427- 1430 et Histoire générale des rois de France – Paris 1576 – 1 – XXI, règne de Charles VII. )
En 1366, le pape bénédictin Urbain V (Guillaume Grimoard 1310-1370) réunira à la congrégation de Saint-Victor le monastère de Saint-Honoratde Lérins. La situation de cette abbaye est exceptionnelle à l’époque, elle est un des principaux foyers religieux dans le midi de la France. Elle fut liée de façon organique avec les comtes catalans de Provence. Plusieurs monastères d’obédience victorine apparaîtront en Catalogne vers l’an mil. C’est sous le pontificat de Boniface VIII (1294-1303) que les moines de Saint-Victor furent remplacés par des Dominicains de la Maison d’Anjou.
Cette abbaye avait des dépendances à Saint-Flour, Mende, Rodez, où se perpétua la lignée des papes de l’Église d’Avignon, Barcelone, Nîmes, Albi, Toulouse, Narbonne, Agde, Tolède, un des principaux centres de la vie monastique dans le Midi.
Plus tard, la Congrégation de Saint-Maur reprendra Lérins. N’oublions pas que Dom Pernety, célèbre ésotériste alchimisant, membre de la Congrégation de Saint-Maur affranchira Daniel Polluche (1689-1768) auteur de Problème historique sur la Pucelle d’Orléans, Orléans, 1749, in-8 sur la survie de Jeanne.
Daniel Polluche recevra le 31 décembre 1750 une lettre de Dom Pernéty qui est une copie du Mercure de France de février 1725 et qui reproduisait la lettre de Jérôme Vignier, l’oratorien. Le Père Jérôme Vignier, ex-chartreux devenu janséniste de l’Oratoire, mort à Paris en 1661, aurait découvert en fouillant les archives des Armoises, le contrat de mariage en 1645 (aujourd’hui disparu, comme le Livre de Poitiers !) ; son frère Benjamin Vignier, gouverneur du château de Richelieu de 1662 à 1684, relata cette trouvaille dans le Mercure Galant en novembre 1683 et à nouveau en 1725 un extrait aux pages 39 à 60 de la Revue (lettre à M. de Grammont).
À propos de La chronique de Metz rédigée par un curé de Saint-Sulpice et publiée par Dom Calmet dans les Preuves de l’Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine sur le mariage de Jeanne d’Arc, Benjamin Vignier écrivait :
« Après la mort du P. Vignier, l’Original de cet ancien Manuscrit eut la même destinée que tous ceux dont il est parlé dans l’éloge que le P. Dachery a fait de lui ; mais comme il pourroit faire découvrir ceux qui se sont emparez des autres à mon préjudice, je ne m’attends pas qu’on le mette en lumiere tant que je serai vivant » (lettre du 2 novembre 1683 à M. de Grammont, publiée dans Mercure de France, février 1725, p.249).
L’original de ce contrat de mariage entre Jeanne et Robert des Armoises se trouvait encore à Fresne-en-Woëvre avant 1914, chez le notaire successeur de Maître Marty. Albert Bayet, sociologue et président de la Fédération nationale des de la Presse française libre, affirmera l’avoir eu entre les mains en 1907. Ce contrat a été compulsé par des personnalités tels Anatole France, le président Édouard Herriot et le comte de Labessières.
Bernard Chérin (1715-1785) généalogiste et historiographe de Louis XV, réputé pour sa méticulosité et son incorruptibilité, confirmera l’union de Robert des Armoises et de Jeanne : « Robert des Armoises, mort sans génération. Femme Jeanne de la Pucelle, de France. »
Évidemment, Vignier comme Polycarpe de la Rivière sont considérés comme faussaires par la maffia « orthodoxe », notamment par l’Abbé Henry, Maurice Garçon, le comte Arthur de Marsy, Jean Louis Quantin, Dom H. Leclercq.
Un autre homme d’État d’envergure lié à Saint-Victor est Mazarin, disciple de Richelieu et donc au fait de certains des plus hauts secrets d’État.
Mazarin fut abbé de Saint-Victor de 1653 à 1661. Toujours d’après Jean Robin (cf. – Ibid – p.197), Mazarin fut un contre-initié notoire. Celui-ci possédait toutes les versions du Songe de Poliphile dont nous parlons dans notre article sur Béroalde de Verville car élevé chez les Colonna. Le père de Mazarin était au service de Philippe Colonna, grand connétable du royaume de Naples. Mazarin était féru de belles lettres, fréquentant les grands et leurs œuvres. À commencer par les descendants des Médicis dont certains font partie de la cour royale de France. L’une de ses nièces, Marie Mancini, amour de Louis XIV, épousera Laurent Colonna, prince de Castiglione. (cf. Jacques Rolland, Versailles, le rêve maçonnique d’un roi, Éd. Trajectoire, 2014)
En1973, Pierre de Sermoise découvrit à la Bibliothèque Mazarine un curieux document. Il s’agit du manuscrit n°1999 (clin d’œil au 666 apocalyptique ?!), pièce 1, transcrit par un des secrétaires de Mazarin. En voici le passage : « Tout le fait de la Pucelle d’Orléans n’estoit qu’une finesse politique, inventée par les Courtisans de Charles VII, pour retirer ce Prince de ses amours avec Agnès Sorel ; & dautant que cela se fit au nom de la Religion, & comme par miracle, tout le peuple de France y accourut comme au feu […]. Tout ce qui se lit dans les historiens ordinaires de la Pucelle d’Orléans, n’est qu’un Romant : en, quoy il n’y a pas plus d’apparence de vérité qu’en tout ce qui se dit de la Papesse Jeanne » (cité par Robert Ambelain, Drames et secrets de l’Histoire, p.177, Éd. R.Laffont)
Benoît XIII se réfugiera à Perpignan, alors en terre aragonaise. Il tint un concile en l’église de La Réal du 15 novembre 1408 à Perpignan au 26 mars 1409 avec treize sessions et trois cents pères. La quatorzième session se tint elle le 26 mars 1409 au Palais des rois de Majorque. Ce concile ne fut officiellement pas scellé, comme si une ultime session restait à opérer.
On trouvera la présence des plus hauts-dignitaires de l’ordre de Malte (successeur de l’ordre du Temple) au concile de Perpignan. Parmi les Français du Nord qui assisteront au concile, deux prélats lorrains, l’évêque de Toul (Domrémy dépendait ecclésiastiquement de l’évêché de Toul) et le procureur de l’évêque de Metz. (cf. Gérard Touzeau – opus cité – p.75)
En déposant Benoît XIII, l’illégitime concile de Constance opérera une mutation importante de la chrétienté latine. Ce concile ne fit qu’accroître la confusion. Il était d’autant plus illégitime qu’il n’avait strictement aucun titre à faire valoir pour déposer et nommer des papes, puisque la théologie catholique enseigne expressément que le Pape est supérieur aux conciles.
Le concile de Constance se crut même obliger de rédiger les « Quatre Articles » qui proclamaient la supériorité du concile sur le Pape. Les docteurs en théologie proches de l’Université favorables au conciliarisme, Guillaume Fillastre, Pierre d’Ailly, Jean Gerson se sentant « coupables » envoyèrent une délégation à Benoît XIII à Perpignan et le reconnurent publiquement comme vrai et unique pape de la chrétienté, mais l’adjurèrent néanmoins de renoncer à la tiare pour ramener l’unité ! C’était faire prévaloir les intérêts politiques sur les décrets de l’Esprit-Saint et Benoît XIII ne pouvait évidemment accepter cette proposition parfaitement hétérodoxe au regard de la Tradition universelle de l’Église, et cela, d’autant plus que l’assemblée qui l’avait formulée n’avait même pas le caractère de concile œcuménique, et que les votants n’avaient pour la plupart aucun pouvoir délibératif régulier. Les « Quatre Articles » étaient donc à tous les égards frappés d’une absolue nullité.
L’Église s’est tirée du 22e schisme en violant trois règles : l’autorité d’un pape canoniquement élu est supérieure à celle d’un concile. La démission d’un pape est canoniquement illégale, nulle (pas même un concile) ne peut juger un pape canoniquement élu. Ces trois règles sont des fondements de la réforme grégorienne. Le fait que l’Église elle-même ait du violer ces règles donnera naissance au conciliarisme qui sera la terreur des papes au XVIIIe siècle.
Au début du XXe siècle, le théologien Louis Salambier, écrira au sujet de la théorie conciliaire qui avait prévalu à Constance : « Cette doctrine nouvelle n’est pas autre chose qu’une machine de guerre et de ressentiment créée par un vote hâtif, dans une heure de trouble, par une assemblée incompétente qui n’y voyait peut-être qu’un expédient passager, mais qui, en tout cas, se déclarait œcuménique sans aucun droit et qui n’a jamais reçu sur ce point l’approbation du Souverain Pontife. »
En 1678, le Père Louis de Mainbourg, auteur d’Histoire du Grand Schisme d’occident, Paris 1678 & 1681, fustigera « Ces écrivains emportés qui traitent encore de schismatiques […] ceux qui étaient dans une obédience qu’ils n’approuvent pas [ne sont] que de faibles déclamateurs, qui osent décider de leur autorité particulière […] ce que l’Église même n’a pas jugé qu’elle dût déterminer… »
Le Grand Schisme prit fin avec l’abdication de Clément VIII, l’ « élu simoniaque » protégé du roi d’Espagne, et finalement abandonné par ce dernier. Restait alors en lice, Martin V de Rome, officiellement du moins, mais dans l’ombre, se survivait Benoît XIV qui lui n’avait pas abdiqué. Mieux, il avait nommé des cardinaux secrets qui, à sa mort, donnèrent à l’Église un nouveau représentant.
Ainsi en fut-il jusqu’à nos jours, et en sera-t-il jusqu’à la fin des temps.
Car le Christ-roi a dit de son Église, de sa véritable Église, que les portes de l’Enfer ne prévaudraient pas sur elle. Et si tout laisse penser que Rome doit être détruite… C’est bien qu’Avignon est toujours fidèle…
Adblock test (Why?)
Source : Lire l'article complet par Réseau International
Source: Lire l'article complet de Réseau International