par Christelle Néant
Le 11 avril 2023, à Artiomovsk (Bakhmout) les forces ukrainiennes ont fait exploser un immeuble et sa cave où se trouvaient 17 civils. Sept dont un enfant trouveront la mort dans l’explosion. Par miracle, Ioulia, son mari, et leurs deux enfants, dont le plus jeune n’avait alors que deux jours, ont survécu.
Lorsque j’entre dans la chambre d’hôpital où se trouve Ioulia, cette dernière est en train de nourrir son nouveau né, Marik, né le 9 avril 2023 dans la cave de leur immeuble à Artiomovsk. Les conditions dans lesquelles Ioulia a donné naissance à Marik étaient cauchemardesques. Bien que les bombardements se soient miraculeusement interrompus pendant l’accouchement, elle a dû donner naissance à son deuxième fils dans la cave, dans des conditions d’hygiène catastrophiques.
De plus le peu de nourriture qu’elle avait à disposition pendant sa grossesse n’était pas de qualité (l’aide humanitaire fournie par l’Ukraine étant absolument ridicule dans ce domaine), provoquant de graves carences. Résultat, Ioulia doit rester à l’hôpital pour être soignée, laissant son premier fils à sa mère et son mari.
Ioulia est très pâle, et semble très frêle de prime abord après tout ça, et j’ai peur qu’elle ne soit pas en état de m’accorder un entretien. Mais malgré tout ce par quoi elle est passée, elle trouve la force de me raconter ce qu’elle a vécu à Artiomovsk durant l’année écoulée.
Sa famille n’a pas voulu quitter Artiomovsk pour le territoire ukrainien, car le mari de Ioulia savait qu’il serait immédiatement enrôlé de force dans l’armée ukrainienne, ce qu’il refusait catégoriquement. Alors ils sont restés, puis Ioulia a découvert qu’elle était enceinte, alors que les combats s’étaient rapprochés de la ville.
Elle m’explique alors que l’armée ukrainienne n’a pas attendu que les forces russes s’approchent d’Artiomovsk pour bombarder la ville ! Ainsi, en mars 2022, elle a vu voler au-dessus de sa tête des roquettes tirées par les forces armées ukrainiennes contre le centre d’Artiomovsk et Zabakhmoutka. Ces bombardements se sont poursuivis au printemps et à l’été 2022, alors que les forces russes étaient toujours loin de la ville.
Voir l’interview de Ioulia sous-titrée en français :
Ioulia a aussi confirmé l’information divulguée par Milania et sa mère, sur le fait que le groupe de soldats ukrainiens « Anges blancs » emmenait des enfants de force hors d’Artiomovsk. Si beaucoup de parents acceptaient d’être évacués de force avec leurs enfants, ce n’était pas le cas de Ioulia et des autres familles qui étaient avec elle dans la cave de leur immeuble.
Alors ils cachaient les enfants dans les appartements détruits pendant toute la journée lorsque ces groupes de soldats circulaient en ville à la recherche d’enfants. Si la plupart des enfants ne les intéressaient pas particulièrement, Ioulia nous raconte que les « Anges blancs » se sont acharnés à retrouver un petit garçon qui vivait dans le voisinage, nommé Maxime. Les soldats ukrainiens sont revenus cinq fois pour essayer de trouver le garçon, et ils connaissaient son prénom. Ioulia a même expliqué que deux ou trois fois, ils sont même venus dans la cave où se trouvait le père du garçon après 16 h, alors qu’il était dangereux de ressortir de la ville après cette heure là (ces groupes de soldats venaient à Artiomovsk le matin et repartaient en fin d’après-midi) !
Encore pire, elle raconte comment une femme, qui a demandé à être évacué avec ses enfants a vendu des informations sur la présence d’autres enfants dans le voisinage aux soldats ukrainiens ! Pourquoi ces derniers accepteraient-ils de payer pour cela si l’opération ne leur rapporte pas quelque chose ? Ce que raconte Ioulia ravive alors mes craintes sur d’éventuels trafics lucratifs dont seraient victimes les enfants emmenés de force hors d’Artiomovsk sans leurs parents.
Surtout que les derniers jours que Ioulia et sa famille ont passé à Artiomovsk ont montré que les forces ukrainiennes et leur commandement n’ont aucune considération pour les habitants. En effet, à peine deux jours après la naissance de Marik, les forces ukrainiennes ont fait sauter l’immeuble sous lequel ils se trouvaient après l’avoir miné. Sur les 17 habitants qui se trouvaient là, sept, dont un enfant, meurent ensevelis sous les décombres. Ioulia a été blessée aux jambes, et un autre homme, Sergueï, a eu la hanche cassée. Le fils de se dernier, Kolya, a bien failli mourir étouffé sous les décombres. C’est son grand-père qui l’a sauvé en le sortant rapidement de là. Malheureusement la femme de Sergueï et sa mère, font partie des sept victimes de ce crime de guerre de Kiev.
Cette technique a été réutilisée récemment par les forces ukrainiennes dans la partie ouest d’Artiomovsk, et l’explosion a été filmée par un drone russe.
Il ne reste qu’à espérer qu’il n’y avait aucun civil sous cet immeuble-ci, au moment où il a été détruit par les forces ukrainiennes.
source : Donbass Insider
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