Comment peut-on proférer de telles âneries ? Les dirigeants russes ont toujours su exploiter l’imaginaire européen à leur profit, afin de vendre aux masses la « sainte Russie » comme le refuge mythique de la civilisation chrétienne qui aurait succombé aux assauts philosophiques des Lumières depuis la Renaissance. A ceux qui voient dans la Russie le refuge ultime, l’arche de Noé des temps post-modernes, il faut rappeler que la Russie moderne est justement une pure création de l’Occident. La Russie moscovite est allée chercher des souverains à l’étranger, en Saxe et dans le Brandebourg, tellement les boyards étaient incapables de mettre un terme à leurs rivalités, sauf à se mettre sous la tutelle d’un prince étranger qui les raccrocherait à l’Europe civilisée en les sauvant de leurs origines asiatiques mongoles et altaïques. Cet ancrage à l’Occident européen a été imposé de force aux Russes traditionnels, qui ne voulaient pas démordre de leurs coutumes, au nom même de la préservation des démons de l’Occident perçu déjà à l’époque comme l’empire du mal. Il suffit de relire les récits des voyageurs pour se rendre compte à quel point la Moscovie était un pays fermé, où le visiteur devait se munir d’un passeport contresigné par les tsar en personne pour s’assurer qu’il ne représentait pas un danger de contamination culturelle. Pierre le Grand va importer des cours européennes tous les talents nécessaires à la création d’une administration d’État et d’une armée adaptées aux dernières techniques européennes dans l’art de la fonderie des canons et de la construction des navires. Cette importation des idées de l’Occident se perpétuera jusqu’à Catherine II et Alexandre Ier séduits par les Jésuites et les idées à la mode de la monarchie parlementaire à l’anglaise. Lénine lui-même se situe dans la droite ligne des manichéens gnostiques qui s’imaginent que l’homme et l’humanité se divinisent en accordant leur volonté à l’ordre de la cosmogonie idéologique, qu’elle soit hégélienne ou socialistes peu importe. Poutine en tant que haut fonctionnaire de l’administration soviétique perpétue les mêmes schémas idéologiques qui voient dans les constructions intellectuelles traduites en actes par la loi, la recette du salut de l’humanité par la Raison et la Science. Les successeurs de Poutine ne peuvent que s’inscrire dans cette tradition intellectuelle héritées des Lumières européennes et de leur vision gnostique de la société idéale.
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