par Valérie Bugault
Avec de tels amis, la « participation » n’a plus besoin d’ennemis.
À la demande expresse de la Fondation Charles de Gaulle, j’ai accepté de préciser quelque peu le contexte juridique et politique dans lequel est intervenue une nouvelle forme, juridiquement très saugrenue, d’entreprise, la « société à mission ».
Contextualisation du débat
La mission de l’entreprise résulte naturellement de son seul objet social
Il faut commencer par préciser que donner « une mission » à l’entreprise n’est en rien une innovation par rapport à l’existence de l’objet social. En effet, c’est l’objet social qui explique la mission de l’entreprise, point n’est besoin de rajouter d’autres missions ; sauf, bien sûr, à poursuivre un objectif politique qui n’a rien à voir avec l’organisation libre et honnête de l’économie via le concept d’entreprise.
Cette nouvelle « mission de l’entreprise » est en réalité une contrainte règlementaire supplémentaire destinée à peser sur les entrepreneurs – qui n’en peuvent déjà plus avec toutes celles existantes. Afin de ne pas apparaître pour ce qu’elle est, cette nouvelle contrainte se déploie sur la base du volontariat, tout au moins dans un premier temps, en période de test.
Ne doutons pas, que ce volontariat sera, un jour, transformé en forme juridique obligatoire afin de répondre, sous prétexte de changement climatique, à l’objectif écologique dit « zéro carbone », largement véhiculé au niveau mondial par des organismes tels que le GIEC, la COP 21, l’ONU et Davos.
Infiltration du droit anglo-saxon dans les pays de droit continental
Lorsque l’on a longtemps travaillé sur les méthodes d’infiltration du droit commercialo-maritime anglo-saxon dans notre droit traditionnel, il est aisé de détecter la méthodologie que les anglo-saxons appellent improprement soft law. Improprement car, si l’apparence première se présente comme étant soft – comprendre non obligatoire – le résultat final ne l’est jamais : nous sommes au contraire bien dans le dur, ou hard law.
En l’occurrence, avec la « société à mission » nous sommes dans une phase intermédiaire de droit positif facultatif autrement dit de hard law facultative… la créativité règlementaire des dominants économiques n’a décidément aucune limite.
Origine impérialiste et globaliste du droit commercialo-maritime anglo-saxon
Ce droit commercialo-maritime, fut élaboré pour les besoins de la cause impérialiste développée par Olivier Cromwell ; il fut entièrement ab initio sous le contrôle financier de la City of London.
Ce type de « droit » s’est largement répandu au niveau international, via de nombreuses institutions ad hoc. Parmi ces institutions, « la compagnie des Indes » britannique occupe une place à part : celle d’élaborer un modèle de développement extraterritorial de l’État financier britannique. Ce schéma se retrouve aujourd’hui dans le « Forum économique mondial » (FEM) qui se réunit régulièrement à Davos. Ce « FEM » n’est rien d’autre que la synthèse mondiale des « chambres de commerces internationales » agissant sous la direction de la Haute finance britannique.
Cette entité particulière, le FEM, a pour objectif de réaliser l’accaparement généralisé des richesses. Ses modes d’expression traditionnels sont le génocide et l’esclavage, sur le modèle précis de ce que furent les Compagnies des Indes, particulièrement les compagnies britannique et hollandaise ; lesquelles se sont historiquement développées autour de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler le « partenariat public-privé » (PPP).
Rappelons que ce terme de PPP signifie réellement et précisément la privatisation des profits, qui bénéficient aux seuls banquiers apporteurs de financement, et la mutualisation des pertes, qui sont exclusivement supportées par les citoyens contribuables victimes, lesquels n’ont jamais eu aucun contrôle sur les décisions ayant généré lesdites pertes.
Il faut considérer que si la France eut, au cours des XVII et XVIIIe siècles, ses propres Compagnies commerciales – des Indes et autres – ces dernières, qui rendaient compte de leurs actions au pouvoir politique français, ne furent jamais le développement extraterritorial de l’État lui-même. Tout autre fut le modèle britannique dans lequel la Compagnie projetait, à l’extérieur des frontières, la Couronne britannique elle-même.
La version nomade et intégrée d’un État sans frontière, propre au modèle hollando-britannique de Compagnie des Indes, que l’on retrouve intégralement dans le FEM, n’a jamais existé en France. Dans le cas français il ne saurait être question de gouvernement mondial alors que le modèle hollando-britannique véhicule en lui-même un modèle d’État mondial financier nomade et apatride.
La société à mission est la négation exacte du modèle de droit continental et français
Le jeu de rôle de la « société à mission »
La « Société à mission » joue le même jeu que la « fiducie » a joué en son temps : l’intégration en douceur de l’accaparement de l’économie par la petite caste des banquiers apatrides développés à partir de la City of London.
Rappelons qu’en matière de guerre, il est toujours préférable, pour ses instigateurs, de suivre le modèle de la servitude volontaire et d’avancer ses pions avec le consentement des victimes.
L’asservissement économique via l’entreprise se fait au moyen de la résiliation de tous les principes à l’origine du droit civil continental, suivi de leur remplacement par la règlementation commercialo-maritime portée par le droit anglo-saxon, tel qu’il s’est développé depuis l’époque des Compagnies des Indes.
La prééminence du droit commercial sur le droit civil, porté tant par les instances européennes que par les juristes français dévoyés à la cause commercialiste, n’est pas stricto sensu du Droit, il s’agit d’un concept de règlementation, pour et par des intérêts privés, ce qui est l’exact opposé du concept traditionnel de Droit porté par le droit continental.
La société à mission, poisson pilote de la disparition de la « liberté d’entreprendre »
La « société à mission » joue le rôle, de dupe, de poisson pilote permettant d’habituer les français à la future disparition de la « liberté d’entreprendre » puisque les appuis bancaires de ces sociétés dépendront de la future conformité de leur mission revendiquée à la cause « zéro carbone » nouvellement inventée et promue par les grands argentiers de ce monde !
Il faut remarquer, car la chose est à la fois typique et pathétique, que cette « société à mission » s’est justement parée des vertus de la nécessité de libérer l’entreprise, pour in fine avancer vers l’objectif inverse, celui de la ligoter définitivement.
La juste dénonciation de la financiarisation et de l’appropriation capitalistique par les initiateurs de cette loi n’a, en fin de compte, pour seule finalité que la disparition de la liberté d’entreprendre puisque l’existence de toute société sera désormais officiellement dépendante du « fait du prince » financier, c’est-à-dire de la banque fournisseuse de crédit et engagée dans la course au « zéro carbone ».
Ainsi, business as usual (on ne change pas une méthode qui gagne), la prétendue nécessité de libérer l’entreprise servira à faciliter l’enchaînement définitif de cette dernière au bon vouloir, aussi surréaliste qu’il est dystopique, des grands argentiers, très concentrés, de ce monde. Ce « bon vouloir » ne tournera qu’autour d’un seul objectif : celui de la décarbonisation qu’ils imposent arbitrairement au monde.
L’entreprise à mission est la négation exacte de la participation
Il est intéressant de noter que les promoteurs de la « société à mission » se prévalent également, rien de moins que, d’une filiation imaginaire avec la doctrine sociale de l’Église à l’origine du concept de société participative.
Une fois encore, il s’agit de promouvoir une image en totale décorrélation, en opposition radicale, avec la réalité. Jamais ni la doctrine sociale de l’Église, ni l’entreprise participative n’ont eu pour objectif la disparition de la liberté d’entreprendre ou son asservissement à un quelconque objectif autre que le libre choix de la détermination de l’objet social par ses créateurs.
Le seul objectif du concept de « participation », qui trouve sa source dans la doctrine sociale de l’Église du XIXe siècle, est de rendre aux gens qui agissent quotidiennement dans l’entreprise, en lui apportant leur travail et leur force créatrice, le statut qui leur a été volé en raison de l’accaparement statutaire du pouvoir décisionnaire par les actionnaires apporteurs de capitaux (shareholders).
Prétendre transformer, comme le fait la société à mission, le capitalisme shareholders en capitalisme stakeholders, dit des parties prenantes, a pour seul objectif, en l’état actuel du capitalisme, de financiariser davantage celle-ci en la mettant dans les seules mains des banquiers apporteurs de fonds, lesquels se concentrent désormais sur une seule cause : la décarbonisation.
Sur le fond, il est évident pour tout juriste formé au droit continental que l’entreprise est, en elle-même et sans autre subterfuge, une forme d’organisation sociale, par hypothèse incluse dans la Société politique. Il est tout aussi évident qu’en droit continental traditionnel l’entité publique qu’est l’État a seul la charge de règlementer l’économie, notamment en règlementant l’entreprise, et que l’objectif de cette règlementation est de développer le groupe politique, entendu comme un principe collectif.
Tout au contraire, la société à mission véhicule l’idée selon laquelle les banquiers globalistes règlementent l’entreprise et l’économie des Nations en fonction de leur seul intérêt catégoriel supranational ; cet intérêt est aujourd’hui affiché comme étant celui de la « décarbonisation ».
La société, qu’elle soit civile ou commerciale, a naturellement pour objectif spontané le développement de la collectivité, du groupe au sens politique du terme ; ce qui est également – soit dit en passant – l’objectif premier de la monnaie. Cet intérêt collectif se réalise par le moyen de l’épanouissement des entrepreneurs qui mettent à œuvre une idée, qui réalisent un projet.
Entreprise et monnaie ont été dévoyés par le non-droit anglo-saxon qui n’en finit pas de subvertir tous les concepts du Droit continental civil adossé au droit naturel, fondé sur des Nations autonomes et souveraines, qui ont fait la « civilisation européenne ». Ce principe règlementaire, qu’il ne serait être question d’appeler « Droit », a pour objectif de rendre les sociétés commerciales dépendantes des seuls objectifs de la haute banque, identifiés et diffusés par le FEM, lequel se réuni à Davos au moment même de la rédaction de ce texte.
Conclusion
À titre de conclusion, il est intéressant de noter le nom des organismes qui ont promu l’intempestive et inopportune « société à mission » : outre, bien sûr, le Parlement composé de « représentants du peuple » toujours prêts à trahir les intérêts nationaux, nous retrouvons le Collège des Bernardins, l’institut Montaigne issu du groupe AXA, l’école des mines de Paris… Tout un programme industrialo-financier sous égide d’un catholicisme qui a renié tout à la fois ses principes initiaux et le droit continental dont il était à l’origine.
Dans les coulisses de la « société à mission », on retrouve le vaste programme de disparition du libre-arbitre, de subversion de notre État, de notre Droit et de notre souveraineté, par des intérêts catégoriels, devenus supranationaux, relayés par des organismes internationaux tels que le FEM ou l’ONU.
source : Le Saker Francophone
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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