Droit de réponse publié par Mediapart sur injonction d’Annie Lacroix-Riz.
L’article intitulé « Comment la Grande Famine ukrainienne de 1933 est venue percuter la gauche française » publié le 31 mars 2023 sur le site MEDIAPART, me met personnellement en cause à deux reprises, sans que j’aie été sollicitée pour répondre de ces accusations.
Je suis présentée comme une historienne « connue pour ses thèses aux relents complotistes ». Mais aucun élément n’est apporté à l’appui de cette imputation, dont on sait qu’elle permet d’écarter tout débat et de réduire au silence n’importe quel intellectuel dont les thèses ne correspondent pas à la Doxa amplement relayée par les grands moyens d’information. Professeure des Universités ayant validé tous les prérequis académiques (normalienne, agrégée d’histoire, docteure ès lettres) du métier d’historienne, et appliquée, depuis plus de 50 ans, à exercer mes fonctions par la consultation assidue des archives originales, je suis ainsi classée au rang des conjurés illuminés de Qanon…
Je démens évidemment tout caractère « complotiste » à mes travaux, et j’invite vos lecteurs à en prendre connaissance au fond, notamment via mes ouvrages « Le choix de la défaite » et « De Munich à Vichy », lesquels, au terme de six années de dépouillement d’archives originales, ont démontré, sur la voie tracée par le grand historien Marc Bloch, que les classes dirigeantes françaises avaient opté, dans l’entre-deux-guerres, pour la défaite militaire et la liquidation du régime républicain. Aucun de mes contradicteurs, prompts à contester mes interprétations mais refusant constamment tout débat académique contradictoire, n’a à ce jour pu remettre en cause la rigueur scientifique de ces travaux.
La seconde mise en cause est bien plus grave encore. Elle émanerait d’un de mes collègues, M. Thomas Chopard, qualifiant de « négationnisme pur », assimilable à la négation de la destruction des juifs d’Europe, ma position sur la famine en Ukraine. Les nombreux documents originaux que j’ai consultés (voir notamment mon ouvrage « Le Vatican, l’Europe et le Reich de la Première Guerre mondiale à la Guerre froide ») m’ont conduite au contraire à décrire les différentes situations de crise, de pénuries, de privation, de révoltes auxquelles le pouvoir soviétique en Ukraine et ailleurs en URSS s’est trouvé confronté au début des années 1930.
De nombreux historiens de renom (notamment Stephen G. Wheatcroft et Robert W. Davies, « Years of Hunger, Soviet Agriculture, 1931-1933 » et Mark Tauger, « Agriculture in World History ») l’ont établi : les sources originales ne permettent pas de qualifier, tant dans sa portée que dans son intentionnalité, le moindre caractère génocidaire des épisodes de famine considérés. Si l’on comprend parfaitement dans quel contexte et pour quelles raisons le politique est aujourd’hui conduit à exprimer des opinions sur cette période historique – ce qui est au demeurant l’objet de l’article -, rien dans les travaux de recherche récents, à ma connaissance, n’a apporté de nouvel éclairage scientifique sur la question.
Enfin, je ne saurais accepter d’être accusée de « négationnisme pur », non seulement en tant qu’historienne intègre et vouée à la recherche universitaire, mais davantage en tant que la petite-fille de déporté juif mort à Auschwitz, qui a choisi le métier d’historienne notamment pour comprendre les ressorts de l’extermination des juifs.
source : Librairie Tropiques
Adblock test (Why?)
Source : Lire l'article complet par Réseau International
Source: Lire l'article complet de Réseau International