Alors que son couronnement est prévu pour le 6 mai 2023, il a été annoncé le 3 mars dernier que le roi Charles III devait se rendre en France, notamment à Versailles et Bordeaux, à la fin du même mois pour sa première visite officielle en tant que chef d’État – pas encore couronné. Après son arrivée en France le dimanche 26 mars son voyage devait se poursuivre en Allemagne, mais ses plans ont changé car une révolte sévère sévit actuellement dans l’hexagone.
La cérémonie du couronnement sera l’occasion pour le monde entier de découvrir la Pierre du Destin (ou Stone of Scone en anglais), sur laquelle les souverains du Royaume-Uni s’assoient lorsqu’ils montent sur le trône. Scone est le nom d’une paroisse de Perth, en Écosse. Les rois d’Écosse étaient couronnés sur cet objet mythique qu’en 1296 on transporta à Westminster.
Selon la légende cette pierre serait celle que le Patriarche Jacob utilisa comme oreiller à Béthel, comme raconté dans la Genèse chapitre 28 verset 11.
Lionel Ifrah, dans son ouvrage L’Aigle d’Amsterdam. Menasseh ben Israël, explique :
« À Westminster, les monarques seraient ainsi en fait sacrés par le père des douze tribus d’Israël.
Cette pierre, on s’en doute, eut une histoire mouvementée. Selon la légende, des membres de la tribu de Dan qui avaient échappé à la captivité après la destruction du premier Temple firent naufrage sur la côte irlandaise. Leur navire transportait de précieuses reliques de leur passé, dont la pierre du Patriarche qui prit le nom de Lia Fail, la “pierre sacrée d’Irlande’’. »
Les British (en hébreu Brith–Ish signifie « Homme de l’Alliance ») seraient ainsi les descendants de la tribu perdue de Dan. Ils seraient partis du Dniep et de Crimée (région qui intéresse grandement Londres, comme l’atteste son vigoureux soutien à Volodymyr Zelensky actuellement) pour s’établir au Danemark, avant de s’installer définitivement en Grande-Bretagne.
« La tribu de Dan n’a pas très bonne réputation dans les Écritures », note Jean-Robert Armogathe dans son volume L’Antéchrist à l’âge classique. Au verset 16 du chapitre 49 de la Genèse, il est dit de Dan qu’il est un « serpent sur la route », une « vipère sur le chemin ».
De surcroît, la tribu de Dan est absente de la liste des tribus d’Israël que dresse le chapitre 7 de l’Apocalypse de Jean (versets 4-8), où sont recensés les cent quarante mille élus.
Les exégètes ont tiré de cela l’idée que l’Antéchrist sera issu de la lignée de Dan.
Par ailleurs Armogathe écrit : « Les auteurs catholiques sont unanimes sur les origines : l’Antéchrist ne peut être que Juif […], et de la tribu de Dan. » Idée que l’on retrouve dans dans cette stance lyrique des Temps médiévaux :
L’Antéchrist va venir
Il naîtra à Babylone
Il proviendra de la tribu de Dan
Par la permission divine
Conçu du diable
Parmi les juifs
Ce que reprit Juan Ruiz de Alarcón dans une œuvre parue en 1623 intitulée El Anticristo. Pièce dans laquelle l’Antéchrist est le fils d’un Juif de Babylone, Mamzer, de la tribu de Dan.
« Mais en quel temple de Dieu s’assiéra-t-il, cela est incertain. Sur les ruines du temple construit par le roi Salomon ? ou plutôt dans l’Église ? » s’interroge Augustin d’Hippone dans La Cité de Dieu.
Ce qui est sûr, c’est que son avènement est proche : il est en vie ; sa première apparition publique a eu lieu en pleine pandémie de Covid, quand la planète était confinée. Son visage est subrepticement exhibé dans le discours de feue Elisabeth II, diffusé en mondovision le dimanche 5 avril 2020 (2:20), avant que soit montré un pentacle, symbole satanique s’il en est.
Après le temps de la Queen Elisabeth, décédée le 8 septembre 2022, voici venu le temps de la Bête. Si nous devions nous risquer à lui attribuer une date de naissance, nous proposerions le 21 décembre 2012, jour qui nous avait été présenté comme correspondant au terme du calendrier maya. À cette heure il devrait donc avoir dix ans. Et l’expression de « Perfide Albion » qui a été affublée aux Anglais ne serait ainsi point usurpée. Léon Bloy, dans L’âme de Napoléon, parlait carrément de l’Île du diable.
Mais cela ne présage rien de bon pour le nouveau roi, car il se pourrait que son éminente place lui soit bientôt ôtée par ce jeune garçon que la tradition musulmane décrit comme borgne, sans que l’on sache si c’est à prendre au sens propre ou figuré.
Depuis que l’inflation commet des ravages sur la vie des ménages britanniques, le pays, si calme et besogneux d’habitude, connaît maintenant une agitation intense, qui pourrait un jour mener au renversement de Charles III par l’Antéchrist.
Ce dernier instaurerait alors une République qui serait le germe de la République universelle sur laquelle il est appelé à régner, un temps, deux temps et la moitié d’un temps.
Luc de Barochez a signé pour l’hebdomadaire néoconservateur Le Point du 8 novembre 2022 un éditorial commençant ainsi : « Vladimir Poutine est en guerre contre le diable. Il a échoué à « dénazifier » l’Ukraine ; il va la « désataniser ». Le glissement n’est pas que sémantique. Le recours à un discours apocalyptique pourrait annoncer des crimes encore plus abjects que ceux que Moscou a perpétrés depuis neuf mois. La guerre russo-ukrainienne est désormais assimilée par les propagandistes du Kremlin à une lutte entre le Bien et le Mal, entre l’archange Michel, en la personne du président russe, et l’Antéchrist, incarné par l’Occident ».
Cet Occident post-moderne, déchristianisé, est désormais en guerre contre un monde pour qui Dieu n’est pas mort, ni ses blasphémateurs, pour paraphraser l’un des plus célèbres passages d’Ainsi parlait Zarathoustra de Friedrich Nietzsche, qui d’ailleurs fut aussi l’auteur d’un livre intitulé L’Antéchrist dans lequel il s’en prit vertement à saint Paul :
« Saint Paul faussa à nouveau l’histoire d’Israël pour la faire apparaître comme la préface de ses actes : tous les prophètes ont parlé de son “sauveur”… L’Église faussa plus tard même l’histoire de l’humanité pour en faire le prélude du christianisme… Le type du sauveur, la doctrine, la pratique, la mort, le sens de la mort, même l’après la mort – rien ne resta intact, rien ne garda plus de sa ressemblance avec la réalité. Saint Paul déplaça tout simplement le centre de gravité de toute l’existence, derrière cette existence – dans le “mensonge” de Jésus “ressuscité”. »
La Parole rapportée de l’apôtre Saint Paul est au cœur du présent article : il est question ici d’examiner un sujet peu vendeur, réservé à une poignée d’irréductibles érudits qui s’intéressent autant à l’ontologie, domaine de la philosophe qui consiste à étudier l’être en tant qu’être, qu’à la géopolitique, ou science des relations internationales.
L’école d’Action Française peut s’enorgueillir d’avoir produit des œuvres faisant référence dans ces deux domaines. Respectivement : Ontologie du secret de Pierre Boutang – d’une part – ainsi que Kiel et Tanger de Charles Maurras et Les conséquences politiques de la paix de Jacques Bainville, d’autre part.
La meilleur façon de rendre hommage à ces Maîtres de la pensée française est de les lire dans une optique bien précise : mieux comprendre les grands enjeux de l’heure, donner du sens aux problèmes cruciaux contemporains et résoudre ce qui, dans le domaine des sciences sociales, relève du mystère.
Gardons-nous de transformer Maurras, Bainville ou Boutang en pièces de musée, qu’on ne pourrait toucher qu’avec les yeux, pour reprendre cette astucieuse consigne donnée aux enfants se trouvant dans un lieu riche en objets de valeur.
Il s’agit plutôt de les concevoir comme des outils, de la technologie très avancée, extrêmement solide et performative, qui attend d’être utilisée sans ménagement ni modération. Ne méprisons ni les débats qui intéressent le peuple, comme actuellement la réforme des retraites ou les pertes folles de pouvoir d’achat dues à l’explosion des prix, en particulier ceux du gaz et de l’électricité, ni les débats qui n’intéressent que les « sachants », à qui il est parfois reproché de sodomiser les mouches ou de se masturber intellectuellement.
Le mépris des couches populaires – ou « anti-« giletsjaunisme » –, de même que la haine des élites savantes – ou anti-intellectualisme – sont deux écueils.
Le philosophe Jean-Luc Marion, de l’Académie française, est aujourd’hui l’un des rares à se préoccuper d’un vieil impensé d’ordre « théologicosmpolitique », à savoir « l’énigme toujours indécidée du katehon chez Paul »
Ce vocable de katehon, ou katechon, du grec τὸ κατέχον, « ce qui retient », ou ὁ κατέχων, « celui qui retient », renvoie à la Bible, plus précisément au verset 6 du chapitre II de la seconde épître aux Thessaloniciens : Et maintenant vous savez ce qui le retient, afin qu’il ne paraisse qu’en son temps.
« Retenir » revêt un caractère polysémique : contenir et empêcher. Les Pères de l’Église ont mis en œuvre une exégèse de ce passage du Nouveau Testament traitant de l’Antéchrist, qui assimile ce katechon à l’Empire romain et chrétien, ce qui donna naissance chez les Byzantins au mythe du dernier Empereur, à partir du règne de Constantin. Selon cette doctrine l’Empereur chrétien règne pour garantir « aux fidèles la paix et la sécurité avant la manifestation de l’Antéchrist et le retour du Seigneur. »
À cet égard il convient de battre en brèche l’idée selon laquelle le christianisme serait ontologiquement fondé sur la séparation entre le politique et le religieux, à la différence de l’islam.
Jacques Lagroye, ancien professeur de science politique à Paris I Panthéon-Sorbonne, nota : « La pensée chrétienne aurait ainsi sa source dans des textes originels qui inciteraient à dissocier deux appartenances, deux sphères – du temporel et du spirituel –, alors que l’Islam se serait développé à partir d’une conception contraire : toute société serait régie par les lois immuables données aux hommes par Dieu dans la parole inspirée du Prophète établissant la confusion du sacré et du profane. L’argument des origines est bien peu convaincant : le christianisme paraît bien ignorer la dissociation du politique et du religieux dans nombre de ses formes historiques, qu’il s’agisse de la tradition orientale, de l’entreprise monastique des cisterciens tentant de réaliser au XIe siècle une société tout entière tournée vers l’édification d’un ordre divin sur terre, ou encore du puritanisme protestant. »
Il est par voie de conséquence erroné de considérer, à la suite de Marcel Gauchet, le christianisme comme la religion de la sortie de la religion et l’irruption de la modernité comme sa conséquence nécessaire.
À l’époque moderne le juriste Carl Schmitt a relancé le débat autour du katechon, dans Le nomos de la terre, publié en 1950. Il y souligne que ce concept fonde la continuité de l’Empire chrétien. Youssef Hindi, essayiste spécialisé en affaires internationales, auteur du best-seller intitulé Occident et Islam, a publié le 18 août 2022 sur Strategika un article qui reprend ses réflexions sur le katechon.
Quand on sait que saint Paul est la source de ce concept, et que ce dernier est vivement rejeté dans l’islam, l’on ne peut que louer l’ouverture d’esprit de cet écrivain de confession musulmane, en opposition diamétrale avec les jeteurs d’anathèmes (takfir en arabe) de toutes sortes. Dans cet article ayant pour titre « Guerre eschatologique : Russie/Occident » il propose une interprétation nouvelle du katechon : ce ne serait pas seulement le Saint Empire, mais aussi le Califat, lesquelles organisations politiques ont été anéanties par la modernité.
Plus précisément autour de la Première guerre mondiale : en plus du Califat ottoman, ce fut le moment où trois Empires chrétiens furent abolis, le Reich (protestant), l’Autriche-Hongrie (catholique) et la Russie (orthodoxe). Moment également de la déclaration de Lord Arthur James Balfour, adressée à la Fédération sioniste par l’intermédiaire de Lord Lionel Walter Rothschild le 2 novembre 1917. Soit une période-charnière dans l’avancée de l’Apostasie (II Th II : 3), où disparaissait ce qui lui faisait obstacle (II Th II : 7).
Ainsi, d’après Youssef Hindi, le katechon serait une « dyade », au sens où l’entendait Pierre Boutang. Voici ce qu’il écrit dans Ontologie du secret :« Ce qui paraît, les choses mêmes, paraît aussi comme “rencontre” ». Une telle rencontre est alors rencontre-entre-deux-objets. Le réel, soutient Boutang, est constitué d’une « infinité de produits engendrés, toutefois engendrés doubles » ; dans sa composition l’être se caractérise par la multiplicité de « jumeaux ».
« De ce foisonnement du paraître résultent les couples de noms, les dyades de tout sentant et de tout senti » : la notion de dyade est constitutive de la conception de l’étant proposée par Pierre Boutang, et Youssef Hindi, qui révère un livre appelé Coran dans lequel, au verset 3 de la sourate XIII appelée « Le Tonnerre », il est écrit que Dieu « a établi les deux sexes dans tous les êtres produits », écarte l’interprétation moniste du katechon, lui préférant une vision en dyade, si l’on peut dire, autrement dit dualiste : à la fois Chrétienté et Islam, ce qui revient à placer l’Europe, l’Afrique du Nord, ainsi qu’une bonne partie de l’Asie dans un même ensemble territorial.
Se superposent, selon cette approche, deux immensités : de Galway à Vladivostok d’une part, et du Maroc à l’Indonésie d’autre part. Cette puissance duale censée faire obstacle aux desseins de l’Antéchrist a vocation à transcender les fractures qui de nos jours affectent gravement cette zone de la planète : Union européenne face à la Russie et sunnites contre chiites.
Mais cela nous amène à aborder un autre point traité par Youssef Hindi : la question du Messie. Voici sa thèse en la matière : « selon les eschatologies chrétienne et musulmane le Messie qu’attendent les juifs est l’Antéchrist. […] Par conséquent, si le Messie des juifs est l’Antéchrist, l’adversaire qui cherche à renverser l’ordre de Dieu sur terre, il a logiquement vocation à subvertir tout empire chrétien ».
Il point de du doigt qu’il existe des affinités entre le messianisme eschatologique chrétien et musulman. « La conception musulmane de la fin des temps comporte quelques aspects qui rappellent le christianisme », notait également l’universitaire devenu abbé Patrick de Laubier.
Bien que saint Paul soit présenté comme un grand falsificateur par l’islam – comme l’atteste ce passage du Traité moderne de théologie islamique signé Hamza Boubakeur : « La métamorphose du christianisme s’est réalisée grâce aux écrits et au prosélytisme de Paul, celui-là même qu’on avait accusé de duplicité. […] C’est donc après une transformation interne de la doctrine de Jésus devenue paulinienne que les Évangiles qui normalement auraient dû la précéder, ont pu être composés » – les deux professent le retour de Jésus à la fin des temps.
Saint Paul en parle dans la seconde épître aux Thessaloniciens, l’appelant Avènement (II Th : II : 1) ou Jour du Seigneur (II Th : II : 2). Dans la sourate XLIII « Les Ornements » on peut lire : « En vérité le retour de Jésus sera un signal de l’arrivée de l’Heure. N’en doutez pas et suivez-moi. Là est la voie droite ! » L’islam précise que le-Jésus-du-Second-Avènement sera secondé par l’imam Mahdi, ce qui veut dire « Bien-guidé ». Du moins un certain islam : il existe également une tradition islamique qui, s’appuyant sur le hadîth (parole rapportée du prophète Mohamed) de Hasan Basrî, affirme : « Pas de Mahdi, sinon Jésus ».
Commentant les prophéties sur le « Grand Monarque », substrat sur lequel est fondé le royalisme providentialiste, René Guénon précisait ceci : « La partie relativement valable des prédictions dont il s’agit semble se rapporter surtout au rôle du Mahd’ et à celui du dixième Avatâra ». Ce qui revient à identifier et le Grand Monarque et le Mahdi à la personne du Christ.
Or si l’on tient pour acquis que le katechon est une dyade, il faut en tirer toutes les implications, en considérant notamment de manière identique le Messie, comme nous l’avons fait dans une article sur JSF paru le 28 décembre 2021 :
« La messianité […] est semblable à la création, elle est duale : aux couples ange/homme, lumière/ténèbres, espace/temps, humide/sec, nuit/jour, mâle/femelle s’ajoute le diptyque – ou « dyade » chez Pierre Boutang – machiah ben Yosef / machiah ben David, lesquelles entités existent depuis le commencement. »
Une telle dichotomie n’est pas une invention personnelle : un rabbin vivant dans la province grecque de l’Empire ottoman au XVIe siècle, Hayin Ha-Kohen, disciple de David Vital, estimait, dans Torat Hakham, que le Messie de David est un « héros victorieux » et le Messie de Joseph « celui qui tombera dans la bataille ».
Ce qui est à rapprocher de cette analyse plus récente de l’Allemand de confession protestante Albert Schweitzer, prix Nobel de la paix en 1952 et auteur de La Quête du Jésus historique. Voici comment l’historien israélien Scholem la résume : « Si lors de son premier avènement Jésus avait été le serviteur souffrant, jusque dans la mort, dans le Second Avènement […], il apparaît en vainqueur et juge du monde. » Et en tire le constat suivant : elle « présente des affinités évidentes avec la conception juive de l’âge messianique. »
Toutefois quand on sait ce qui lui est arrivé, on suppose que Jésus n’a guère envie de retourner sur terre, lui qui règne au Ciel à la droite du Père. Il est plus réaliste de notre point de vue de penser que ce machiah ben David est l’Esprit-Saint, au sens de « Paraclet », être nommé par Jésus lors de la Cène d’après l’évangile de saint Jean, et ce à quatre reprises :
1° « Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec vous : l’Esprit de vérité, lui que le monde ne peut recevoir, car il ne le voit pas et ne le connaît pas ; vous, vous le connaissez, car il demeure auprès de vous, et il sera en vous. » (Jn XIV : 15-17)
2° « Le Défenseur, l’Esprit-Saint que le Père enverra en mon nom, lui, vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. » (Jn XIV : 26)
3° « Quand sera venu le consolateur, que je vous enverrai de la part du Père, l’Esprit de vérité, qui vient du Père, il rendra témoignage de moi » (Jn XV : 26).
4° « Maintenant, je vais auprès de celui qui m’a envoyé, et aucun de vous ne me demande où je vais ? Mais, à cause de ce que je vous ai dit, la tristesse vous a envahis. Pourtant, c’est la vérité que je vais vous dire : il vaut mieux pour vous que je m’en aille. En effet, si je ne m’en vais pas, le Défenseur en justice ne viendra pas à vous. Mais si je m’en vais, alors je vous l’enverrai. Et quand il sera venu, il produira la preuve que le monde s’égare au sujet du péché, de ce qui est juste et du jugement : au sujet du péché, parce que le monde ne croit pas en moi ; au sujet de ce qui est juste, parce que je m’en vais auprès du Père et que vous ne me verrez plus ; et au sujet du jugement, parce que le prince de ce monde est d’ores et déjà condamné. J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais elles sont encore trop lourdes à porter pour vous. Quand l’Esprit de vérité sera venu, il vous conduira dans la vérité tout entière, car il ne parlera pas de lui-même, mais tout ce qu’il aura entendu, il le dira, et il vous annoncera les choses à venir. Il manifestera ma gloire, car il puisera dans ce qui est à moi et vous l’annoncera. Tout ce que le Père possède m’appartient à moi aussi ; voilà pourquoi je vous dis qu’il puisera dans ce qui est à moi et vous l’annoncera. » (Jn XVI : 5-15)
Généralement symbolisé par une colombe, l’Esprit-Saint, troisième terme de la Trinité, est en fait une personne, le Christ-du-Second-Avènement, machiah ben David.
Au lieu de considérer que le Messie des Juifs sera l’Antéchrist des chrétiens et des musulmans, il nous paraît plus juste de penser que tous, juifs, chrétiens et musulmans pourront succomber à la séduction de celui que le catéchisme de l’Église catholique présente comme « l’imposture religieuse suprême » et que seule une minorité d’entre eux est destinée à ne pas tomber dans son piège.
N’est-ce pas contradictoire de dire que le Messie des Juifs sera l’Antéchrist et en même temps que ce dernier sera tué par Jésus-Christ, dont nul ne peut contester l’identité juive ?
Dans l’émission de télévision de Patrick Sabatier « Le jeu de la vérité » du 17 mai 1985, l’humoriste Coluche a dit qu’il y a quatre preuves que Jésus était Juif : « D’abord il a vécu 33 ans avec sa mère. Faut être Juif. Il a cru qu’elle était vierge pendant 33 ans. Faut être Juif. Elle, elle a dit partout que son fils c’était le bon Dieu, ça faut être Juif. Et il a quand même monter une affaire qui est devenue multi-nationale ! » Cette blague comporte un fond de vérité tel qu’elle peut être aussi prise au sérieux.
Bien plus sérieuse est cette plaisanterie que ce passage de L’Évangile ésotérique de saint Jean, où son auteur Paul Le Cour, commentant la déclaration du pape Pie XI Nous sommes spirituellement des sémites, a écrit : « En réalité l’Église chrétienne procède bien plutôt des sources aryennes, celtiques, helléniques, et même, sans doute, atlantéennes et hyperboréennes. »
Il paraît nécessaire, en outre, de rappeler que la croyance en l’avènement d’un Antéchrist est vétéro-testamentaire, et donc totalement juive, qu’elle n’est pas apparue avec Notre Seigneur Jésus-Christ. Elle figure dans les livres de Daniel, d’Ézéchiel et de Zacharie.
Dans le chapitre VII du premier : « La petite corne est un roi différent des autres, qui blasphémera contre le Très-Haut et persécutera les saints du Très-Haut, qui seront laissés à son pouvoir “un temps, deux temps et la moitié d’un temps”. »
Dans le chapitre XXVIII du second, assimilé au prince de Tyr : « Fils de l’homme, dis au prince de Tyr : Ainsi parle le Seigneur, l’Éternel. Ton cœur s’est élevé, et tu as dit : Je suis Dieu, Je suis assis sur le siège de Dieu, au sein des mers ! Toi, tu es homme et non Dieu, Et tu prends ta volonté pour la volonté de Dieu. » (verset 2)
Dans le chapitre XI du troisième : « Car voici, je susciterai dans le pays un pasteur qui n’aura pas souci des brebis qui périssent ; il n’ira pas à la recherche des plus jeunes, il ne guérira pas les blessées, il ne soignera pas les saines ; mais il dévorera la chair des plus grasses, et il déchirera jusqu’aux cornes de leurs pieds. Malheur au pasteur de néant, qui abandonne ses brebis ! Que l’épée fonde sur son bras et sur son œil droit ! Que son bras se dessèche, Et que son œil droit s’éteigne ! » (versets 16-17)
Ainsi celui que saint Paul appelait, dans la seconde épître aux Thessaloniciens, l’Homme d’iniquité, l’Être voué à la perdition, l’Adversaire (chapitre II, versets 3 & 4), sera réduit à néant par un Juif, un circoncis, que l’Apocalypse de saint Jean appelle celui qui monte le cheval (ch. XIX, v. 20), lui qui a un glaive qui sort de sa bouche (ch. XIX, v. 19) avec lequel il détruira l’Impie, d’un souffle (II Th II : 8) ; par conséquent cela n’a pas de sens de le présenter comme le héraut des Juifs.
Le livre de l’Apocalypse (VII : 4-8) indique le nombre de ceux qui, parmi le peuple élu, seront du côté de machiah ben David : « cent quarante-quatre mille, de toutes les tribus des fils d’Israël : de la tribu de Juda, douze mille marqués du sceau ; de la tribu de Ruben, douze mille ; de la tribu de Gad, douze mille ; de la tribu d’Aser, douze mille ; de la tribu de Nephthali, douze mille ; de la tribu de Manassé, douze mille ; de la tribu de Siméon, douze mille ; de la tribu de Lévi, douze mille ; de la tribu d’Issacar, douze mille ; de la tribu de Zabulon, douze mille ; de la tribu de Joseph, douze mille ; de la tribu de Benjamin, douze mille marqués du sceau. »
Il est évident que ce vocable d’Israël mentionné par le texte johannique n’a rien à voir avec le signifiant donné à la falsification sioniste. À ce sujet nous reprenons un passage d’un article de notre composition paru sur JSF le 4 septembre 2019 :
« Simone Weil expliquait “qu’il y a quelque chose de maurrassien dans la religion nationale de Moïse”. Voilà la raison du soutien du maurrassien – et donc soupçonné d’antisémitisme – Pierre Boutang au jeune État d’Israël au moment de la Guerre des Six Jours, en 1967. Sans doute son jugement serait plus nuancé à l’heure dʼaujourdʼhui, et sa vision sur Gog et Magog serait autre. Certainement que sa conception de la fin des temps – ou eschatologie – se serait affinée à partir des enseignements qu’il aurait pu tirer des événements apparus à cause de l’avancement de la roue du temps.
Il est par conséquent “aussi absurde de faire de Simone Weil une antisémite sous prétexte qu’elle critique la religion juive” [citation de l’essai Le choc Simone Weil de Jacques Julliard, Paris, Flammarion, 2014, p. 121, N.D.A.] qu’il est inepte dʼériger Boutang en sioniste, au prétexte qu’il a pris à un moment donné la défense d’Israël. »
Cela n’a pas de sens non plus d’alerter sur un projet de domination globale juive tout en s’enthousiasmant sur la victoire à venir du Christ sur l’Antéchrist : en anéantissant l’éclat de son Avènement (II Th II : 8) il permettra la gloire d’Israël (à ne pas confondre avec l’entité sioniste), obtenue non par la coercition sur les nations mais au contraire par leur consentement, leur infinie reconnaissance même.
Elles révéreront ce peuple dont sera issu son libérateur de l’emprise tyrannique de l’Antéchrist. Car dans un premier temps doux et pacifique, aidant les pauvres et les malheureux, désintéressé par l’argent, l’Antéchrist doit ensuite devenir un être violent et menteur qui persécute l’humanité en général et les fidèles de Dieu en particulier.
Depuis la Shoah la considération des nations vis-à-vis des Juifs repose principalement sur la compassion, la pitié. Après que le-Messie-fils-de-David occira l’Antéchrist-son-clone, cette considération sera fondée sur l’estime, l’admiration, la gratitude.
« Du peuple juif, maudit qu’il faut enfin bénir » : ce vers du poème de Victor Hugo intitulé « La vie aux champs », dans Les contemplations, annonce cette révolution copernicienne pour le peuple déicide destiné à la glorification suprême à la fin des temps.
Ainsi le règne mondial et définitif d’Israël – ou Cinquième Royaume – commencera, ce que les sionistes ne parviennent pas à comprendre, eux qui essayent depuis 1948 péniblement d’agrandir un territoire peu étendu au prix du sang palestinien, suscitant la colère d’une partie importante du monde, et pas seulement musulman, nourrissant en outre le sentiment anti-juif.
Gershom Scholem avait insisté sur ce point, dans Fidélité et Utopie. Essais sur le judaïsme contemporain : « J’ai toujours pensé que le sionisme est un processus, le processus le plus légitime qui soit, mais qu’il n’est pas un mouvement messianique. Et c’est là son mystère. Car comme mouvement messianique, il est condamné d’avance à l’échec. » Le sionisme est diamétralement opposé au messianisme. L’État d’« Israël » est voué à être subsumé, tandis que l’Europe de Galway à Vladivostok doublée du Califat assis sur trois continents formeront un jour l’étau par lequel sera écrasé le chef de la gouvernance globale dont le règne provisoire est traditionnellement affublé du syntagme Abomination de la désolation.
Les bases sur lesquelles il bâtira son éphémère Pouvoir suprême sont les pays qui appartiennent à l’OTAN, soit surtout les États-Unis et le Royaume-Uni, mais aussi la Pologne et la Turquie (l’Allemagne et la France en étant aujourd’hui à la périphérie).
Laquelle Turquie est le fief de la puissante confrérie des Frères musulmans, qui sait utiliser comme force d’appoint le « takfirisme » (al-Qaïda, Daech) quand bon lui semble, avec très souvent la complicité de ses alliés occidentaux.
Vladimir Poutine a souligné cette réalité dans son discours de lancement de l’opération dite spéciale du 24 février 2022 :
« Premièrement, sans aucune autorisation du Conseil de sécurité des Nations unies, ils ont mené une opération militaire sanglante contre Belgrade, en utilisant des avions et des missiles en plein cœur de l’Europe. […] Puis vint le tour de l’Irak, de la Libye et de la Syrie. […] En fait, on a l’impression que pratiquement partout, dans de nombreuses régions dans le monde, là où l’Occident vient mettre en place son ordre, cela se termine en blessures sanglantes qui ne cicatrisent pas, en plaies que sont le terrorisme international et l’extrémisme. Tout ce que j’ai évoqué en est l’exemple le plus flagrant, mais ce n’est en aucun cas le seul exemple du mépris du droit international. »
Car l’OTAN, en plus d’être le fer de lance du projet globaliste – ou « anglobaliste » –, soit l’aspiration au Global-One Government (GOG), soutient à l’intérieur du monde musulman une entreprise similaire d’établissement d’un État-monde. Une telle entreprise pourrait s’appeler Muslim-Area Global-One Government (MAGOG).
La Turquie actuelle est la maillon qui relie ce Global One-Government (GOG) à ce Muslim-Area Global-One Government (MAGOG) : si elle continue sur cette voie elle sera nécessairement amenée à entrer un jour ou l’autre en conflit ouvert contre la Russie, dont l’armée, depuis le déclenchement du conflit, a été très sévèrement frappée par ses excellents drones Bayraktar vendus à l’Ukraine
Alors que sur les plateaux de télévision Vladimir Soloviev mène la guerre sémantique contre un État ukrainien littéralement vampirisé par l’Occident, c’est le moment ou jamais de lire et faire lire autour de soi le volume Trois entretiens sur la guerre, la morale et la religion suivis de la Courte relation sur l’Antéchrist que rédigea son homonyme, le grand penseur du tournant du XXe siècle. Ce volume est sans conteste un chef d’œuvre de la philosophie politique contemporaine.
Toujours dans le même article, Youssef Hindi écrit : « La chute de Rome est inscrite dans la tradition juive comme une des conditions de la rédemption, de l’avènement du Messie des juifs et du règne d’Israël. » En fait cette Rome dont il est question, c’est l’ennemi actuel de la Russie, c’est l’Occident.
Le Maharal de Prague, qui vécut au XVIe siècle, ne s’intéressait naturellement pas au concept de katechon eu égard à son rejet de la Parole de son coreligionnaire Saül de Tarse. Mais son exégèse, telle qu’elle a été rapportée sur TF1 le 7 décembre 1980 par Josy Eisenberg et Beno Gross, vient corroborer la conception du katechon faite par Youssef Hindi, pour qui, rappelons-le, c’est une dyade.
Commençons par ce qu’y dit Josy Eisenberg : « Il y a un chapitre du Maharal qui est particulièrement intéressant, que je voudrais résumer pour les téléspectateurs, car le Maharal pose une question vraiment très importante et prémonitoire. Il dit : dans le Talmud on nous dit qu’il y a quatre empires, d’accord, mais on nous ne parle pas de l’empire arabe. Ça existe l’empire arabe. Mahomet et les conquêtes arabes, ça existe. Comment se fait-il que les rabbins du Talmud parlent de quatre empires qui veulent détruire Israël, et jamais de l’empire arabe. Et le Maharal fait une réponse que je trouve extraordinaire, et que vous soumets : c’est parce que l’empire arabe, en réalité, n’a pas besoin de la destruction d’Israël. Et je trouve cette réponse extraordinaire. Qu’est-ce qu’elle signifie ? Elle signifie qu’il y a une opposition fondamentale entre l’avidité, l’esprit de domination, le paganisme et, enfin, l’impérialisme de ces quatre empires, ce sont les quatre défauts qui se sont manifestés dans l’histoire, et que chacun d’entre eux voit en Israël quelque chose qui le gêne. Par contre, dit le Maharal, les Arabes dans le Coran n’ont jamais dit que pour être reconnus, il faut qu’Israël disparaisse. Même sur le plan idéologique il y a un conflit entre le judaïsme et le christianisme, les chrétiens ayant longtemps prétendu qu’il fallait qu’Israël disparaisse ou se convertisse pour manifester la légitimité du christianisme. Les musulmans n’ont jamais dit cela. Et par conséquent, l’Islam ne tirera jamais sa force, dit le Maharal, de la destruction d’Israël. Il est évident que c’est un texte que je tenais absolument à citer par les temps que nous connaissons, parce que je trouve ce texte à la fois très optimiste et très encourageant, mais surtout sur le plan philosophique très fondé. Effectivement il n’y a aucune raison qu’il n’y ait pas de coexistence idéologique entre le judaïsme et l’islam. »
Puis Beno Gross d’abonder : « Les Arabes, ou le monde arabe, le royaume arabe, ne tient pas sa force de la destruction d’Israël. Il y a une mission directe qui lui a été confiée par Dieu sans intermédiaire. Et c’est pourquoi il fait partie en quelque sorte de la typologie des patriarches. Il entre, je pourrais presque dire, d’une façon parallèle à Israël dans l’histoire. Il ne tient pas sa puissance de la destruction d’Israël. »
« Alors, voyez-vous, ce conflit entre Israël et les Arabes, est probablement un faux conflit. Et ainsi nous allons arriver, nous allons pouvoir arriver au Cinquième royaume », conclue Josy Eisenberg.
Le Califat, entendu comme composante du katechon-dyade tel que l’interprète Youssef Hindi, est donc un instrument messianique, de même du coup que l’Europe-de-Galway-à-Vladivostok, ou, dit autrement, « l’“Union eurasienne”, […] grand projet poutinien » d’après la spécialiste de la Russie Anne de Tanguy, professeur à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco) et chercheuse à Sciences Po.
Le point commun de ces deux ensembles géopolitiques qui forment le truchement par lequel l’avènement du Cinquième royaume se réalisera un jour est l’attachement à la reconnaissance de la messianité de cet homme qui fut élevé par le charpentier Joseph – d’où son titre de machiah ben Yosef – contre la conjuration qui vise sa disparition des mémoires, ou du moins à lui ôter sa messianité.
Parmi ceux-là figurent les héritiers de Jean Jaurès, qui vont de Jean-Luc Mélenchon à Emmanuel Macron. Celui qui fut député de Carmaux écrivit, dans La Question religieuse (1891), ceci : « Jésus est Dieu, mais comme le sont toutes les consciences et tous les êtres, comme l’est l’univers lui-même ». Plus loin il ajoute : « J’ose même dire que l’humanité comprendra et aimera d’autant plus le Christ qu’elle pourrait à la rigueur se passer de lui. »
Tandis que la Chrétienté médiévale fut dominée par sa Divine Personne, l’irruption des temps modernes vit une autre figure juive exercer l’empire sur le continent européen, et donc sur l’ensemble de la planète : la lignée des Rothschild. Nul doute que c’est à elle que Charles III avait voulu consacrer sa première visite officielle, son homme-lige Emmanuel Macron jouant le rôle de hedge.
NOTES
Source: Lire l'article complet de Vigile.Québec