Le sommet du 10 mars dernier entre Emmanuel Macron et Rishi Sunak à Paris a confirmé la ferme volonté du nouveau Premier ministre britannique d’abandonner les approches eurosceptiques de Boris Johnson et de laisser derrière lui les querelles qui ont caractérisé les relations du Royaume-Uni avec l’UE – et surtout avec la France – après le Brexit. Il s’agissait du premier sommet des deux grandes puissances militaires nucléaires européennes en cinq ans et, outre les dirigeants, il a réuni sept ministres de chaque côté, ainsi que des représentants d’entreprises. L’UE, a cependant, blackboulé la volonté de Londres et le feu vert donné par le président français sur une question primordiale.
Emmanuel Macron, et Rishi Sunak, anciens banquiers d’affaires, ont fait preuve d’une nature de communication résolument amicale, n’ont pas lésiné sur les mots chaleureux et les souhaits d’une coopération plus étroite. Pendant une heure, ils «ont affiché leur volonté d’en finir avec les différends qui ont opposé leurs pays depuis le Brexit», a noté Le Monde.
Emmanuel Macron a tweeté: «Les destins du Royaume-Uni et de la France sont liés. Nos défis, partagés. Préservation de notre planète, soutien à l’Ukraine, coopération en matière de sécurité et d’énergie: c’est ensemble que nous avançons». Rishi Sunak, a tweeté: «De notre nouveau partenariat énergétique à la lutte contre l’immigration clandestine, le Royaume-Uni et la France se tournent vers l’avenir, liés par des liens de famille, d’amitié et de solidarité».
Le sommet a réaffirmé la détermination mutuelle de fournir une assistance militaire à l’Ukraine et a exprimé l’intention de renforcer l’interopérabilité des forces armées françaises et britanniques, y compris le développement commun de systèmes de missiles et de défense aérienne. Deux accords de coopération dans le domaine de l’énergie nucléaire ont été signés. Des accords ont été conclus pour faciliter les échanges scolaires et culturels.
Mais, l’objectif du sommet était un nouvel accord entre le Royaume-Uni et la France pour lutter contre l’immigration irrégulière à travers la Manche. Ici, Rishi Sunak est guidé par des considérations assez pragmatiques. Le 7 mars, son cabinet a présenté un nouveau projet de loi sur l’immigration irrégulière qui priverait les migrants arrivant sur les côtes britanniques à travers la Manche dans de petits bateaux du droit de demander l’asile et de prévoir leur détention et leur expulsion rapide.
Ce projet de loi a non seulement fait l’objet de critiques morales de la part des militants des droits de l’homme, mais également de doutes quant à son efficacité future car il n’est pas clair où détenir des dizaines de milliers de migrants illégaux en attente d’expulsion et sans savoir où les envoyer.
Il est clair que Londres est intéressée par la réduction maximale du nombre de migrants illégaux arrivant de France, et cela nécessite l’aide de Paris. La Royaume-Uni verse de l’argent à la France depuis plusieurs années pour renforcer les garde-côtes. En 2022, la police française a intercepté environ 30.000 migrants à destination des côtes britanniques (45.000 y sont parvenus) et arrêté environ 500 trafiquants criminels. Le 10 mars dernier, un accord a été trouvé sur une augmentation significative de ces financements: Londres va transférer 543 millions d’euros à Paris sur trois ans.
Ces fonds permettront d’augmenter de 500 personnes le nombre de policiers français patrouillant dans la Manche, d’utiliser davantage de drones et d’hélicoptères de surveillance, de créer un centre de commandement 24h/24 avec la présence d’officiers de liaison britanniques pour coordonner les actions d’interception des bateaux avec des migrants.
Enfin, d’ici 2026, un grand centre de rétention devrait être installé dans le nord de la France pour isoler les migrants qui ont tenté à plusieurs reprises de se rendre au Royaume-Uni. On sait que Paris consacrera beaucoup plus d’argent à tous ces projets que Londres, mais les chiffres ne sont pas divulgués.
Sur une question importante, cependant, Rishi Sunak n’a pas réussi à progresser. Il entendait discuter à Paris de la possibilité de conclure un accord sur le retour des clandestins en France. «Le Premier ministre britannique Rishi Sunak espère que la récente amélioration des relations avec l’UE ouvrira la voie à un accord sur le retour des migrants sans papiers dans le bloc», a-t-il déclaré en route vers la France pour un sommet bilatéral avec Emmanuel Macron, a souligné Politico.
The Telegraph titre, après la visite de Rishi Sunak à Paris: «Bruxelles bousille les espoirs de renvoyer les migrants de la Manche vers l’Europe»; «La Commission européenne « n’envisage pas d’accord sur les retours d’asile avec le Royaume-Uni pour l’instant », malgré les appels d’Emmanuel Macron».
Ainsi, Londres n’aura toujours nulle part où envoyer les migrants illégaux qui arrivent car «la Commission européenne a rejeté l’appel du président français, Emmanuel Macron, à un accord à l’échelle de l’UE pour que les migrants traversant illégalement la Manche soient renvoyés en Europe». The Telegraph rappelle, pourtant, que «le président français a insisté sur le fait que tout accord de retour devrait être conclu au niveau de l’UE, plutôt qu’entre Paris et Londres».
Philippe Rosenthal
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Source : Lire l'article complet par Mondialisation.ca
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