Josée Scalabrini est présidente de la FSE-CSQ; Heidi Yetman est présidente de l’APEQ-QPAT
Depuis que le gouvernement Legault est revenu à la charge avec sa proposition de tenir des forums en parallèle des tables de négociation, les organisations syndicales ont eu le dos large auprès du gouvernement et de certains commentateurs.
Récemment, on a même entendu que les organisations syndicales avaient « peur » de participer aux forums proposés par le gouvernement, parce que les élèves devraient alors être au centre des discussions, au détriment des conventions collectives. Je me permets d’abord de mentionner que la peur n’a jamais fait partie de ma façon de travailler et que si c’était le cas, il y a longtemps que je ne serais plus porte-parole de la grande majorité des enseignantes et enseignants du Québec.
En réalité, ce sont davantage les commissions et les centres de services scolaires et le gouvernement qui craignent de parler de ce qui se passe actuellement dans nos écoles. Les profs, qui accompagnent les élèves vers la réussite et qui sont le cœur de notre système d’éducation, sont tenus au silence depuis plusieurs années. Ils ne peuvent même plus dénoncer le manque de services ou toute autre situation inacceptable sans être accusés de manquer de loyauté envers leur employeur. Alors, quand on tente de faire croire que nous avons peur de parler des élèves, c’est franchir la frontière de la réalité.
Diviser pour mieux régner
Changer les méthodes, j’y crois, et j’y travaille activement depuis des années sur tous les plans. C’est dans cet esprit que nous participons de manière enthousiaste, avec nos collègues du soutien scolaire et les professionnels, au projet pilote d’aide à la classe.
En même temps, nous devons demeurer lucides. Si le gouvernement avait voulu convier tout un chacun à une grande réflexion sur l’éducation au Québec, il avait amplement le temps de le faire avant le début de la négociation en déclenchant des États généraux ou même en soutenant, comme nous l’avons fait, les forums citoyens qui se déroulent actuellement aux quatre coins du Québec.
Il savait très bien ce qu’il souhaitait faire. Plutôt que de trouver avec nous des solutions à la crise que vivent le personnel scolaire et les élèves, le gouvernement cherche plutôt à retourner l’opinion publique contre les « méchants » syndicats. Ça n’a rien d’innovant, l’histoire ne fait que se répéter. C’est tout dire! Même nos employeurs directs, les commissions et les centres de services scolaires, ont été cinglants à l’égard de la manœuvre.
Le gouvernement ne devrait pas chercher à faire déraper la négociation de la fonction publique, en tentant de faire croire que c’est collectivement qu’on va négocier le contrat de travail pour chacune des catégories d’emploi. L’idée aurait sans doute été qualifiée de farfelue par la présidente du Conseil du trésor à l’époque où elle était le visage des procureurs de la Couronne.
Accélérer les négos
Ça fait des années que l’on connait les problèmes en éducation. Tous gagneraient si le gouvernement acceptait d’écouter les solutions des gens sur le terrain. On veut négocier au bon endroit, maintenant, sans perdre de temps et sans déchirements.
Preuve de notre bonne foi, nous avons proposé plus de 50 dates pour des rencontres de négociation pour janvier, février, mars et avril. Quant à elle, la partie patronale ne s’est rendue disponible que pour 8 d’entre elles. Contrairement au discours à peine voilé du gouvernement, la partie syndicale ne joue pas le jeu de la chaise vide.
Ce n’est pas en démonisant les organisations syndicales, comme le fait le premier ministre depuis son arrivée au pouvoir, qu’on pourra changer les mentalités et les façons de faire. C’est en acceptant de respecter l’expertise des gens du terrain, en négociant de bonne foi, au bon endroit, et en traduisant les beaux discours sur l’importance de l’éducation par des gestes concrets, qu’on y arrivera.
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