par Mohamed El Bachir
Avant propos
Pour clore le sommet de Alliance de l’Atlantique Nord, le 30 juin 2022 à Madrid, le président français E. Macron a tenu une conférence de presse où il a validé la vision stratégique des États-Unis définie le 25 mai 2022 par le secrétaire d’État américain Anthony Blinken à l’université Georgetown. Tout en dénonçant la Russie pour cause de « retour de la guerre en Europe », E. Macron semble ignorer qu’en 1999, l’OTAN et sans l’aval de l’ONU a mené une guerre contre un État souverain, la Yougoslavie. Un oubli qui lui permet d’affirmer sans sourciller que « la France, ses alliés, ses partenaires européens n’ont qu’un camp : celui de la paix, de la démocratie et du respect du droit international ».
Par alliés, entendre États-Unis et puissance occupante de la Palestine. Après l’axe du mal de G. Bush, place au « Camp du bien » d’E. Macron… La paix ?… Le respect du Droit international ?
Et le terrorisme
Il est facile de démontrer le contraire de ce qu’affirme E. Macron. Il suffit de faire un « voyage » dans le passé. En effet, l’œuvre accomplie depuis 1979 par le chef suprême de l’OTAN et ses alliés – de l’Afghanistan au Yémen en passant par l’Irak, la Syrie, le Liban sans oublier la Somalie, le Soudan, la Libye… – décrit un autre visage de l’Occident. Une œuvre où le terrorisme sous l’étendard de l’intégrisme musulman, wahhabisme en tête, a joué et continue à jouer un double rôle :
1°) Instrument idéologique et militaire au service de l’OTAN pour déstabiliser et morceler des pays qui échappe à la main mise occidental. Le cas de l’Afghanistan est, à ce titre, un exemple historique…
2°) Potentiel ennemi justifiant une intervention militaire occidentale au nom de la responsabilité de protéger, avec ou sans l’aval de l’ONU. Exemple : Organisation de l’État islamique (OIE) en Irak.
Deux dates illustrent ce double rôle.
• 17 juillet 1973. Renversement du roi afghan Zaher et de l’ordre féodal par des forces progressistes afghanes et proclamation de la première République afghane ; 27 septembre 1996, le président M.Najibullah réfugié dans les locaux de l’ONU à Kaboul, prise par les talibans, fut emprisonné par ces derniers, fusillé et pendu à un réverbère. À quoi sert ce « machin » (surnom donné à ONU par Charles De Gaulle) ?
• 11 septembre 2001. Il est superfétatoire de rappeler cette date : attentats des tours jumelles du World Trade Center. Légitimation de l’intervention de l’OTAN en Afghanistan, de la destruction de l’Irak en 2003…
Concernant le premier point, nul besoin de recherche historique, l’interview donné à l’hebdomadaire Nouvel Observateur daté du 15 janvier 1998 par l’ancien conseiller du président étasunien J. Carter, Zbigniew Brzezinski suffit pour expliquer que l’instrumentalisation de l’intégrisme musulman a servi à combattre les forces progressistes dans le monde arabe et l’URSS.
En effet, à la question :
« Lorsque les soviétiques ont justifié leur intervention [24/12/1979] en affirmant qu’ils entendaient lutter contre une ingérence secrète des États-unis en Afghanistan, personne ne les a cru. Pourtant il y avait un fond de vérité. Vous ne regrettez rien aujourd’hui ? »
La réponse du conseiller Brzezinski est sans équivoque :
« Regretter quoi ? Elle a eu pour effet d’attirer les russes dans le piège afghan…Qu’est-ce qui est le plus important au regard de l’histoire du monde ? Les Taliban ou la chute de l’Union soviétique ? Quelques excités islamistes ou la libération de l’Europe centrale et la fin de la fin de la guerre froide ? »[3]
Ce qui permet de passer au 2ème point. Et c’est Bandar Ben Sultan, secrétaire général du Conseil de sécurité nationale de l’Arabie saoudite puis responsable des services de renseignement (2005-2012) qui assure être le surveillant des excités islamistes : « nous avons créé ce mouvement, et nous pouvons le contrôler. Ce n’est pas tant que nous ne voulons pas que les salafistes lancent des bombes, ce qui nous importe sur qui ils les lancent, le Hezbollah, Moqtada al-Sadr, l’Iran et les Syriens, si ces derniers continuent de travailler avec le Hezbollah et l’Iran ».
Une vision pleinement partagée par l’ancien ministre de l’Éducation israélien Neftali Bennet, en des termes sans équivoque : « Daech est un gros problème mais d’ordre tactique. Nous ne sommes pas prêts à sacrifier un intérêt stratégique consistant à interdire la création d’un empire iranien s’étendant de Téhéran à la mer méditerranéenne, pour un problème tactique ».
La marche vers une 3ème guerre mondiale ?
Ainsi l’effondrement de l’URSS n’était qu’une étape dans la « libération » de l’humanité mais sous étendard de l’Occident. Et ce qui a bien servi en Afghanistan, fut et continue d’ être instrumentalisé ailleurs. Dans l’article daté du 14 janvier 2016, intitulé : « Syrie : Foyer de la lutte contre le terrorisme ou foyer d’une confrontation militaire mondiale », l’auteur met en évidence les objectifs géostratégiques suivis par l’Occident sous le manteau des États-unis et de l’État d’Israël.
« Être maître, sans partage, de la mondialisation économique sous le règne du néo-libéralisme. Une telle domination n’est possible qu’à trois conditions.
1°) Détruire ou affaiblir les États-Nations, susceptibles de prétendre à la souveraineté pleine et entière, synonyme d’émancipation.
2°) Main mise sur les ressources des sous sols dont les hydrocarbures.
3°) Contenir les puissances régionales ou mondiales comme la Chine, la Russie et l’Iran. »
Les trois point cités ci-dessus découlent des enjeux géostratégiques définis par le haut fonctionnaire des Affaires étrangères israélien Oded Yinon en 1982 et par Zbigniew Brzezinski en 1997.
Pour Oded Yinon : « …la désintégration de la Syrie et de l’Irak en provinces ethniquement ou religieusement homogènes, comme au Liban, est l’objectif prioritaire d’Israël, à long terme, sur son front est, à court terme, l’objectif est la dissolution militaire de ces États… ».
Pour Zbigniew Brzezinski, l’Eurasie est le centre géostratégique car « les trois quarts des ressources énergétiques connues y sont concentrées… L’Eurasie demeure, en conséquence, l’échiquier sur lequel se déroule le combat pour la primauté globale… Les conséquences géostratégiques de cette situation pour les États-unis sont claires : l’Amérique est bien trop éloignée pour occuper une position dominante dans cette partie de l’Eurasie, mais trop puissante pour ne pas s’y engager… » Et pour souligner ces enjeux géostratégiques qui sont d’actualité, il ajoute : « Les États qui méritent tous les soutiens possibles de la part des États-unis sont l’Azerbaïdjan, l’Ouzbékistan et l’Ukraine car ce sont tous les trois des pivots géopolitiques ».
Les propos ci-dessus permettent de mieux comprendre la déclaration « nous nous préparons à une confrontation avec la Russie depuis 2014 » du secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg :
« Le camp de la paix n’a rien fait pour épargner à la population ukrainienne la guerre. Au contraire… »
De même, au Moyen-Orient, la colonisation sans discontinuité de la Palestine sans tenir compte d’aucune résolution de l’ONU n’a qu’un seul objectif : asseoir la suprématie de l’entité sioniste dans la région où se déroule le deuxième versant de la confrontation mondiale, à savoir : « la lutte entre deux axes géopolitiques : celui qui défend la prépondérance américano-israélienne, saoudienne et turque au Moyen-Orient d’un côté et celui qui conteste cette prédominance et qui, aujourd’hui, regroupe l’Iran, la Russie, la Chine, l’État syrien et le Hezbollah libanais et ses alliés qui se recrutent – dans toutes les communautés libanaises. C’est une bataille titanesque ». Et il ne faut pas se leurrer, la souveraineté pleine et entière du peuple palestinien comme celle du peuple yéménite s’inscrit dans cette bataille titanesque.
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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