J’ai lu avec grand intérêt la lettre des économistes publiée par les journaux contre les baisses d’impôt de Legault. Cette lettre des économistes, essentiellement des économistes de syndicats, pourrait servir de base à une alliance entre les groupes communautaires qui militent pour renforcer le filet social et ces intellectuels.
Je milite au sein de l’Association pour les Droits sociaux de la Rive Sud à Lévis et je suis fort préoccupé de ce qui s’annonce comme lutte politique entre Legault et les travailleurs du secteur public. Je donne ici mon point de vue sur une stratégie à adopter pour les groupes communautaires.
Les groupes communautaires militent entre autres pour la transformation sociale du capitalisme. Ils ont donc tout intérêt à créer des alliances politiques avec ces intellectuels progressistes qui avertissent le gouvernement Legault qu’il erre lourdement en s’accrochant à ses promesses de baisses les taxes. Ce qui a l’air attrayant du point de vue de la lutte à l’inflation pour les couches moyennes s’avère être une stratégie catastrophique du point de vue d’un réinvestissement nécessaire dans les services publics et en direction de ce que demandent les syndicats de ce secteur.
Le filet social dont les groupes communautaires réclament la restauration pour répondre à l’appauvrissement généralisé et l’agrandissement des inégalités dans un Québec capitaliste exige des réinvestissements dans les services publics. En effet qu’y a-t-il de meilleur correctif aux inégalités engendrées par ce système que des services publics offerts à tous en toute égalité ? Même l’égalité des salaires avec l’Ontario dont se réclame Legault, qui réduirait l’oppression du Québec au Canada, sera remise sous le nez d’un Legault pris dans ses contradictions.
Les revendications salariales des syndicats poussées à leurs limites n’arriveront pas à elles seules à vaincre l’inflation si les services offerts à toute la population continuent de se dégrader. Les syndicats à eux seuls, même en restaurant un syndicalisme de combat bienvenu, n’y parviendront pas si l’État continue de réduire ses investissements en choisissant un secteur privé incapable d’une simple justice sociale ou du bien commun. Il n’y a que l’État, même au service du capitalisme et du privé, qui peut garantir une relative égalité des chances dans la population. La pauvreté n’a aucune chance de disparaitre si l’État ne s’investit pas pour la contrer.
C’est donc une lutte pour le bien commun qu’entreprendront les travailleurs du secteur public et leurs syndicats en préparant un affrontement majeur avec un Legault à la tête d’un État qu’il dit vouloir être au service de tous les Québécois pour faire dévier le débat de l’amélioration des conditions de vie et de salaires de salariés québécois.
Certains sociaux-démocrates de gauche affirment que la période du néolibéralisme, avec son État minimum, tire à sa fin à cause, surtout, de la faillite de cette idéologie à régler les problèmes engendrés par la crise du 2008 et la COVID et par une volonté des politiques actuelles de ne pas revenir à une austérité qui a valu aux Libéraux la perte du pouvoir devant le mécontentement populaire.
Legault voudrait bien calmer l’appétit des travailleurs du secteur public et de leurs syndicats, revenus à une attitude beaucoup plus combattive, mais parviendra-t-il à ne pas tomber dans les vieilles recettes du néolibéralisme pour ce faire ? Loi spéciale, réduction des investissements, austérité malgré tout… Il appelle les syndicats, représentants des travailleurs mécontents, à moins de fermeté et plus de « créativité », mais cela a peu de chance de fonctionner étant donné la sympathie de la population pour les serviteurs du public. Cela restera une chaude lutte pour garder l’opinion favorable aux travailleurs depuis la COVID.
Dans l’affrontement inévitable des économistes syndicalistes et des volontés d’un Legault de remplir ses promesses de baisses d’impôt, les groupes populaires auraient avantage à s’allier résolument derrière les syndicats dans leur offensive pour des réinvestissements dans le secteur public et dans les conditions de vie et de salaires des employés de l’État. Ensemble, ils pourraient former un front uni contre un budget qui s’annonce pauvre en garanties de réinvestissements. Ainsi un minimum de filet social pourrait être préservé pour les groupes communautaires et la transformation sociale à laquelle ils aspirent pourrait se faire à l’avantage des travailleurs pour une plus grande égalité.
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