Auteurs : Patrick Provost, PhD, Christian Leray M.A.
Cet article a été aussi publié par Libre Média.
Le 26 janvier 2023, les médias publiaient une nouvelle présentant les résultats d’une étude selon laquelle « la désinformation liée à la pandémie de COVID-19 aurait causé des milliers de mort et d’hospitalisation évitables à l’échelle du pays ».
Le but était de rappeler que les vaccins anti-covid-19 sont « sûrs et efficaces », qu’ils « sauvent des vies ». Et que donc les propos négatifs à leur égard, en renforçant « l’hésitation vaccinale », conduisent à des pertes de vies humaines.
Mais peut-on vraiment se fier à cette analyse?
Le Conseil des académies canadiennes : un organisme indépendant?
Le rapport, intitulé Lignes de faille, est produit par le groupe d’experts sur les conséquences socio-économiques de la désinformation en science et en santé du Conseil des académies canadiennes (CAC). Voici ce que l’on peut apprendre à propos de cet organisme en parcourant leur « plan d’entreprise 2022-2023 » :
Le gouvernement fédéral a commencé à financer le CAC en 2005 avec un engagement de 30 millions de dollars sur 10 ans pour fournir des évaluations indépendantes et faisant autorité des données scientifiques sous-jacentes aux enjeux actuels et futurs d’intérêt public. Le CAC a reçu 15 millions de dollars supplémentaires sur cinq ans en 2015 et, dans le budget de 2018, 9 millions de dollars supplémentaires sur trois ans pour soutenir l’organisation jusqu’à l’exercice 2022-2023.
On apprend, dès les premières lignes de l’étude, que le « commanditaire » est Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE).
Le CAC est donc un organisme qui reçoit des millions de dollars du gouvernement fédéral, à qui il doit son existence et qui, comme si cela n’était pas suffisant, se fait financer ses « recherches » par ce même gouvernement fédéral. Un gouvernement qui fait la promotion de la « vaccination ». Cette position de triples conflits d’intérêts laisse planer de forts doutes et jette un discrédit important sur les analyses et les conclusions de leur rapport; on voit mal les membres du CAC mordre la main qui les nourrit.
Des experts « douteux »
Venons-en maintenant au « groupe d’experts » qui signe le rapport, dont la composition est intrigante. Parmi les 13 experts auxquels le CAC a fait appel, aucun n’est scientifique. Il n’y a pas d’immunologiste (spécialiste du système immunitaire), de virologiste, d’épidémiologiste et encore moins de spécialiste de l’ARN. Il s’agit essentiellement d’économistes, de sociologues et de spécialistes des communications. Parmi eux, on retrouve une pédiatre, une médecin de famille et une pharmacienne.
Sans doute qualifiés dans leur domaine, on peut légitimement s’interroger lorsqu’ils affirment que les vaccins sont « sûrs et efficaces » et qu’ils sauvent des vies. En fait, ils ne font que reprendre à leur compte les messages des autorités, sans aucune remise en question. Comment peuvent-ils ensuite, de manière légitime, qualifier de désinformation les arguments scientifiques contraires à leur message et qu’ils n’ont pas vérifiés?
Une analyse aussi peu rigoureuse devient insoutenable lorsqu’elle s’attaque au collectif Canadian Covid Care Alliance (CCCA), qui est, lui, constitué de nombreux experts en immunologie, virologie, maladies infectieuses, produits pharmaceutiques, analyses de données et biochimie. Que dire lorsque l’on sait en plus que les experts du CCCA sont indépendants et ne font donc face à aucun conflit d’intérêt, contrairement aux membres du CAC?
Si vous êtes intéressés à aller au fond des choses, nous vous invitons à consulter la lettre ouverte du CCCA qui contient des réfutations rigoureuses appuyées par la littérature scientifique pertinente.
Une analyse tronquée
Les « experts » du CAC partent donc du principe que les vaccins sont « sûrs et efficaces » en se basant sur le discours des autorités, sans aucun souci de vérification, et, à partir de là, bâtissent un « modèle » qui leur permet de conclure que la désinformation a causé des milliers de décès. Alors que la question de l’efficacité des vaccins est centrale, ils n’en traitent finalement pas et ne se concentrent que sur la « désinformation » qui, étonnamment, n’est même pas définie dans le rapport.
Si la prémisse de départ est fausse, quelle valeur peut avoir la suite de la démonstration?
En effet, si l’on se réfère au point 4.3 à la page 91 du rapport, on note que toutes les références utilisées par les auteurs proviennent de leur commanditaire, le gouvernement du Canada, et de l’Agence de santé publique du Canada. Pire, il ne s’agit pas de l’étude des données… mais d’une simple reprise de leurs conclusions. Par exemple, ils affirment que « les données canadiennes jusqu’au 8 janvier 2022 ont montré que ‘les personnes entièrement vaccinées chez qui l’on a diagnostiqué la COVID-19 étaient significativement protégées contre les conséquences graves’ ». Sauf que l’on sait que c’est inexact : les propres données des autorités montrent, par exemple, que le nombre d’hospitalisations pour la COVID-19 est largement supérieur en proportion chez les personnes vaccinées 3 doses que chez les non-vaccinés. S’ils avaient effectivement analysé les données, ils n’auraient jamais pu arriver à une telle conclusion.
Ils affirment effectuer une revue de la littérature scientifique. Cependant, celle-ci ne concerne pas les études publiées depuis 2020 sur la COVID-19 et les vaccins à ARN messager, mais se concentre sur la désinformation. En raison de ce choix étonnant, les auteurs ne traitent pas de recherches aux résultats qui auraient pu les amener à relativiser le discours des autorités. Par exemple, cette étude publiée dans The Lancet en février 2022 montrait un effondrement de l’efficacité des vaccins anti-covid, qui devenait négative au bout de 8 mois. Voilà qui est plutôt gênant.
Variation de l’efficacité des vaccins dans le temps. Source : The Lancet.
En revanche, ils précisent que « pour en venir à ces conclusions, le groupe s’est penché sur [entre autres] des reportages produits par les médias », qui présentent déjà une sélection biaisée d’études scientifiques et d’opinions qui appuient le narratif du gouvernement.
Le danger avec ce genre d’analyse superficielle, dirigée et à courte vue, qui relève de l’idéologie politique, est qu’elle peut semer la confusion dans la population.
Bref, cette étude produite par un organisme en conflit d’intérêt, dont les experts ont des connaissances réduites dans le domaine qu’ils traitent et qu’ils n’étudient même pas, et qui est largement fondée sur le discours des autorités, contient bon nombre « d’inexactitudes » et constitue elle-même, paradoxalement… la « désinformation » contre laquelle elle prétend lutter.
Dans ces conditions, l’empressement des médias à relayer cette « nouvelle » soulève des questionnements. Si on peut s’entendre que la désinformation s’avère coûteuse pour la santé du public, il est légitime de se demander qui, au final, désinforme la population?
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