Dès son retour au pouvoir, en 1958, le général de Gaulle mena un politique de défense reposant sur l’indépendance nationale, la dissuasion et la conscription. Ainsi, il s’agissait de privilégier la souveraineté et l’autonomie stratégique dans un monde alors marqué par la rivalité entre les États-Unis et l’Union soviétique, ce qui supposait d’accélérer le processus de décolonisation [et donc de mettre au pas l’armée « coloniale »].
Par la suite, le Mur de Berlin tombé et l’Union soviétique disloquée, le modèle d’armée français s’inscrivit dans une logique « expéditionnaire », avec notamment la professionnalisation, sur fond de baisse des dépenses militaires. Les capacités qui étaient autrefois indispensables furent réduites à l’état échantillonaire, avec l’argument que ce ne serait pas avec tel ou tel matériel que l’on gagnerait les guerres de demain, l’époque étant aux « opérations extérieures », menées dans des environnements permissifs.
Sauf que, et malgré des signaux pourtant difficiles à ignorer, la compétition entre puissances ne s’était jamais vraiment estompée. La guerre en Ukraine le montre actuellement… Comme les tensions dans la région Indo-Pacifique. Qui plus est, les menaces se multiplient et s’aditionnent désormais…
D’où le constat du général Thierry Burkhard, le chef d’état-major des armées [CEMA], lors d’une audition parlementaire, en juillet. « Notre capacité à être une force expéditionnaire ne nous rend pas instantanément aptes à conduire une guerre de haute intensité », avait-il lâché devant les députés.
D’où les « grandes transformations » et les « choix difficiles » annoncés par Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, à l’occasion de son ordre du jour, le 4 janvier dernier. Et lors de ces voeux aux Armées, ce 20 janvier, depuis la base aérienne 118 de Mont-de-Marsan, le président Macron en a livré les grandes lignes.
Ainsi, celui-ci a annoncé que le modèle d’armée issu de la prochaine LPM devra privilégier « la cohérence sur la masse » ainsi que la « réactivité sans sacrifier l’endurance ». En clair, a-t-il ajouté, cela signifie qu’il s’agira de « consolider notre coeur de souveraineté, là où le modèle de la précédente Loi de programmation militaire mettait plutôt l’accent sur la capacité expéditionnaire et la lutte contre le terrorisme ».
« La transformation, […] c’est être capable de passer d’un modèle fait pour assurer des opérations dans des milieux où notre liberté d’action était forte à une capacité d’évolution dans des environnements contestés, face à des adversaires aguerris, parfois technologiquement redoutables sur tout le spectre de la conflictualité », a insisté M. Macron.
Aussi, au regard de l’ampleur des menaces [qui concernent aussi les départements et collectivités d’outre-Mer, qu’il a cités à plusieurs reprises dans son discours], le président a annoncé que l’effort budgétaire de la LPM 2024-30 serait de 400 milliards d’euros. Soit 30% de plus que celle en cours [295 milliards, ndlr]. Cette somme « permettra de couvrir 413 milliards de besoins militaires » et d’amorcer « un changement profond qui sera irréversible ».
Sans surprise, la dissuasion sera confortée et « renforcée » car elle « fait de la France un pays différent en Europe ». Les postures permanentes feront également l’objet d’une attention particulière. « Cela suppose des capacités accrues de rensenseignement qui doivent nous permettre d’anticiper les crises et les menaces », a justifié M. Macron, tout en insistant sur « l’autonomie de décision et d’action ». La fonction « connaissance et anticipation » bénéficiera d’un nouvel effort substantiel de +60% au total, avec des ressources de la Direction du renseignement militaire [DRM] et de la Direction du renseignement et de la sécurité de Défense [DRSD] qui seront doublées.
Source : Opex360
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