Y a-t-il des chances que les hostilités entre la Russie et l’Ukraine se terminent en 2023? En évaluant la situation du point de vue des belligérants, dans un avenir prévisible, le conflit non seulement continuera, mais également s’aggravera. Parce que son atermoiement et sa continuité profitent à trop d’acteurs.
La seule solution pour la Russie pour mettre fin au conflit est une victoire totale contre l’Ukraine. Dans tous les autres cas (négociations diplomatiques inutiles, concessions temporaires de Moscou au profit de l’Occident, l’occupation d’une partie du territoire ukrainien, le maintien du pouvoir ukrainien même sur sa partie minime), la crise ne sera pas réglée et s’aggravera.
Cependant, la Russie n’attaque résolument sur aucune zone du front, n’inflige pas de frappes dévastatrices contre l’infrastructure militaire de l’Ukraine et n’occupe pas ses grandes villes, ce qui aurait un immense effet psychologique, aussi bien pour remonter le moral de la population et de l’armée de la Russie que pour briser la résistance des forces ukrainiennes.
Pour ces raisons parmi d’autres, les hostilités sur certaines zones du front pourraient durer éternellement au format actuel, car Kiev continuera de recevoir une aide illimitée des pays occidentaux. Alors que les pertes des troupes ukrainiennes seront régulièrement compensées par l’arrivée de mercenaires de plus de 50 pays.
Les frappes de missiles contre l’infrastructure énergétique ukrainienne sur le plan militaire ne forceront pas l’Ukraine à se rendre. Les États-Unis ne s’opposent pas à sa destruction totale (de toute façon, selon Washington, ce sera à Moscou de la reconstruire). Le plus important est qu’il reste suffisamment d’effectifs en Ukraine pour faire face à la Russie, et en ce sens Kiev est capable, avec l’aide de l’Occident, de causer de nombreux désagréments à Moscou au moins pour l’année à venir.
L’atermoiement maximal du conflit autour de l’Ukraine profite absolument à tout le monde – aux politiciens des puissances européennes et des États-Unis, de l’Ukraine et de la Turquie, à la direction des organisations internationales, aux hommes d’affaires et aux militaires. En ce qui concerne l’aspect politique, les dirigeants des pays de l’UE et des États-Unis utilisent l’aide à l’Ukraine et « l’endiguement » de la Russie pour détourner l’attention de leur population des problèmes intérieurs très graves. Et s’ils deviennent aigus, il est toujours possible d’en accuser le Kremlin et de le mettre sur le dos du conflit ukrainien qui perdure.
La Turquie jouera un rôle de médiation de plus en plus actif (notamment en prévision des élections nationales au printemps 2023), en recevant des avantages financiers et économiques à la fois de Kiev et de Moscou, mais en réalité faisant tout pour que le conflit dure le plus longtemps possible. Quant aux autorités ukrainiennes, la poursuite du conflit est le seul moyen pour elles de rester au pouvoir.
L’ONU s’efforcera de participer à la « pacification » dans la crise ukrainienne. Tous ces accords céréaliers et autres sur des engrais sont une opportunité de plus pour la direction des structures internationales de montrer leur « pertinence » et pour jouer la carte de la médiation même si une telle activité serait manifestement inutile.
Des hommes d’affaires et surtout des oligarques se font énormément d’argent sur la crise ukrainienne. Le commerce « parallèle » avec la Russie grandit avec plusieurs pays. Des échanges sans précédent de la Russie avec la Chine et l’Inde, et les importations parallèles de l’Europe passent par les pays de l’Union économique eurasiatique.
Il ne faut pas non plus oublier les immenses bénéfices des compagnies de l’industrie militaire et l’intérêt professionnel des militaires pour faire traîner au maximum le conflit. Les champs de bataille en Ukraine servent à retirer du service l’ancien matériel militaire, à tester de nouveaux armements et munitions, de nouveaux drones, avions et missiles volent dans le ciel, les soldats dotés de toutes nouvelles armes lourdes et légères s’affrontent. Les nouvelles méthodes de guerre sont testées en temps réel, de nouveaux systèmes satellites et électroniques sont utilisés dont l’efficacité ne peut pas être confirmé lors d’exercices conventionnels.
Puisque les effectifs russes sur le front ukrainien sont d’être en nombre nécessaire pour remporter une victoire définitive, toute l’année 2023 devrait être marquée par des combats locaux avec des victoires mineures d’une partie et de l’autre. Si la situation continue d’évoluer selon l’inertie actuelle et si rien d’extraordinaire ne se produit, le conflit armé en Ukraine pourrait durer au moins jusqu’en mars 2024.
Alexandre Lemoine
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Source : Lire l'article complet par Mondialisation.ca
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