Le rôle des médias dans les conflits armés – Quels médias pour la paix ? — Andrea DUFFOUR

Le rôle des médias dans les conflits armés – Quels médias pour la paix ? — Andrea DUFFOUR

Colloque du 15 et 16 octobre 2022 à Soleure, Suisse, organisé par le GIPRI, Alba Suiza et l’Association Suisse-Cuba avec le soutien de la Schweizerische Friedensbewegung. Avec (dans l’ordre des interventions) : 1 Alan MacLeod (MintPressNews, UK) 2 Christian Müller (globalbridge, CH) 3 Maurice Lemoine (Mémoire des luttes, France) 4 André Scheer (ex-junge Welt, BRD) 5 Jacques Baud (ex- officier des renseignements suisses) 6 Gabriel Galice (président GIPRI) 7 Gilles-Emmanuel Jacquet (analyste au GIPRI) 8 Karin Leukefeld (correspondante au Moyen-Orient) 9 Lisa Daniell (Women’s Press Collective, USA) 10 Thierry Deronne (Terra TV, Venezuela) Modération : Natalie Benelli, (Alba Suisse et ASC)

Quel est le rôle des médias dans les conflits armés et à quoi ressembleraient des médias qui travailleraient pour les gens et pour la paix ? Une brochette de dix géopoliticiennes et géopoliticiens documentés ont esquissé à la centaine de personnes présentes le décor médiatique et géopolitique actuel. Au centre du débat : La désinformation ciblée par la presse, la télévision, la radio, les médias numériques et les réseaux sociaux au service du capital financier et du complexe militaro-industriel. Ils démontrent ce qui attend les gouvernements ou les peuples qui ne suivraient pas la politique étrangère des gouvernements du Nord et les prétentions hégémoniques de l’OTAN. On dénonce les blocus et les sanctions en cours contre une quarantaine de pays, les censures, les criminalisations, les diffamations non seulement à l’encontre de ces pays, mais aussi à l’encontre de groupes ou de journalistes qui ne servent pas les intérêts ou ne reproduisent pas le récit atlantique. On thématise cette guerre hybride dont l’objectif est notre tête.

Nous vivons une époque dangereuse, constate Karin Leukefeld, les voix en faveur du dialogue et de la paix sont diffamées… les médias préparent des crises politiques et poussent à l’escalade, qu’ils accompagnent ensuite comme les tambours de guerre et les trompettes des armées d’antan.

urant ces deux jours, il y avait bien sûr aussi des retrouvailles, des rencontres personnelles, du réseautage et pour moi en sus la découverte de petits médias indépendants suisse-alémaniques peu connus de ce côté de la Sarine.

Pour toutes ces raisons j’essaye de rapporter ma récolte de ces deux journées denses. (Les interventions ayant partiellement été préparées à l’avance pour des raisons de traductions, certaines répétitions ne peuvent pas être évitées pour rester fidèle au fil de chaque intervention). Les citations directes et les noms propres seront en italique et sans guillemets. Certains exemples et sources ont été rajoutés par l’auteure de cet article.

Il s’agit d’une initiative personnelle qui vient d’en bas, qui n’engage aucune des organisations citées plus haut et qui ne prétend à aucune prouesse journalistique, mis à part du fait d’avoir été sur place moi-même, de ne pas juste répéter en boucle d’autres médias ou agences de presse et de connaître mes sources.

Introductions

Gabriel Galice, président du Geneva International Peace Research Institute (GIPRI) ouvre le colloque en citant Alfred de Zayas :

« Le droit de la paix est un droit de l’homme » – mais les grandes puissances n’ont pas intérêt à la paix et il rappelle Einstein qui disait que « la minorité a trois instances pour manipuler la majorité : l’école, la presse et les organisations religieuses ».
Le terrorisme médiatique qui vise en particulier les pays qui s’opposent à la politique étrangère des Etats-Unis, de l’UE et de la Suisse et aux prétentions hégémoniques de l’OTAN vise à donner au grand public une image négative de ces pays et leurs gouvernements afin de légitimer les attaques économiques, politiques et militaires et l’ingérence dans leurs affaires intérieures.

Natalie Benelli, Dr es sciences sociales, co-organisatrice et modératrice de ce colloque, accueille l’audience, venant avant tout de la Suisse alémanique.

« Ce colloque aborde la désinformation au service des élites économiques. Il démontrera comment fonctionne le terrorisme médiatique mais aussi qu’il est possible de construire des médias communautaires, indépendants au service des peuples et de la paix.

Quels médias dans quels intérêts ?

1- Alan MacLeod

Dr en sociologie et journaliste d’investigation sur la presse et le journalisme. Le plus jeune des intervenants s’est fait un nom pour ses recherches sur les algorithmes et la censure dans Google search, YouTube, Facebook, etc. qui ont caché la visibilité presque du jour au lendemain des articles de toute sorte de médias alternatives, (comme l’American Herald Tribune, the Greanville Post, Black Agenda Report, Global Research, MINTPRESS). MacLeod est aussi connu pour ses écrits sur la Palestine occupée ou sur les anciens agents CIA travaillant maintenant chez google[1] ainsi que pour ses recherches fournies sur la désinformation par des ONG soi-disant défendant les DdH ou des sites du style « stop fake », « conspiracy watch » et autres qui sont souvent financés par l’OTAN ou les USA, plus précisément la NED (National Endowment for Democracy – le bras ouvert de la CIA) qui finance des révoltes, des coups d’Etats dans d’autres pays et qui ont des budgets énormes pour ceux-ci, comme par exemple les 22.4 millions de dollars dépensés depuis 2014 en Ukraine pour faire tomber le démocratiquement élu président Viktor Yanukovych pour y mettre les successeurs qui leur convenaient [2]. (A ce sujet il est aussi très instructif de voir le documentaire d’Oliver Stone : Ukraine on fire[3], longtemps banni de Youtube.) McLeod est aussi l’auteur du livre Bad News from Venezuela, Twenty Years of Fake News and Misreporting.

Une belle entrée en matière. Selon une recherche de MintPress News, Facebook, TikTok, Google et Twitter ont recruté ces dernières années des centaines d’anciens collaborateurs de la CIA, de la National Security Agency, du FBI et de l’OTAN. Ils veillent à ce que les journalistes indépendants qui s’écartent du narratif de l’OTAN soient exclus des plates-formes en ligne et que leurs comptes PayPal soient bloqués.

Nous autres en occident aimons penser que nous vivons dans une société pluraliste où tous les points de vue sont exprimés et que la « propagande » existe essentiellement dans les états autoritaires comme l’Ex-URSS ou en Corée du Nord.

Nous aimons aussi mettre en garde contre les médias d’état, mais en réalité nous vivons dans un état tombé sous la coupe des entreprises et les médias privés qui sont donc des médias d’état par défaut…

Pour comprendre le terrorisme médiatique, il faut comprendre les rapports de propriété des médias corporatifs.

MacLeod explique qu’en Grande–Bretagne, où il vit, trois agences de presse seulement contrôlent plus de 70% des journaux : News UK (propriété de Rubert Murdoch), DMGT et Trinity Mirror.

La totalité des 175 journaux appartenant en 2003 à Rupert Murdoch avaient soutenu la très controversée invasion de l’Irak par les Etats-Unis d’Amérique et la Grande-Bretagne – avec des bénéfices énormes pour l’industrie de l’armement et d’innombrables victimes parmi la population irakienne.

En Finlande, les quatre plus grands opérateurs de TV atteignent 92% du public et réalisent 97% des bénéfices.

Selon ses recherches : Même en Suisse, où les différences linguistiques contribuent à maintenir une certaine diversité des titres, les propriétaires du Groupe TX (anciennement Tamedia), qui possèdent 20 Minuti, 24 Heures et la Berner Zeitung, entre autres, contrôlent la moitié du marché. Ces groupes de médias veillent à l’orientation idéologique de leurs employés. Ainsi, la maison d’édition allemande Axel Springer (qui détient une participation dans la société suisse Ringier AG) exige de ses plus de 15 000 employés qu’ils soient fidèles à l’Union européenne, au libre marché, au néolibéralisme et au gouvernement israélien.

Le co-fondateur de Microsoft, Bill Gates, est également un important baron des médias. On a besoin de Microsoft pour un réseau social tel que LinkedIn, de matériel informatique come Microsoft Surfaces et Windows Phone, de logiciels, ou la chaîne d’information en continue, MSNBC, etc.

Les recherches de MacLeod ont permis de mettre en évidence que Bill Gates avait donné au moins 319 millions de US dollars à des médias du monde entier, notamment pour Der Spiegel, El Pais, Le Monde et The Guardian. En retour, ces médias ont fermé les yeux sur ses agissements et lui ont assuré une couverture médiatique positive. MacLeod maintient :

Les médias sont trop souvent utilisés pour aider à déclencher des guerres [4] : Avant d’envoyer des troupes, on envoie des journalistes. Nous pouvons inverser ceci. Comme proposition concrète, il cite les travaux de Robert McChesney qui propose un système de médias publics : Pour garantir une certaine indépendance de la presse, chaque citoyen recevrait par exemple 300 euros pour ensuite les attribuer au meilleur média. Piste à creuser.

« Si vous n’y prenez pas garde, les journaux vous feront haïr les opprimés et aimer ceux qui les oppriment » conclut-il en citant MalcolmX.

2- Christian Müller

Ancien rédacteur en chef de Luzerner Neuste Nachrichten (LNN) a mis en lumière l’incitation à la guerre du groupe CH-Medien et de la Neue Zürcher Zeitung (NZZ) dans le conflit entre l’OTAN et la Russie. Dans leurs commentaires, les rédactions rejettent catégoriquement les négociations de paix de l’Ukraine avec la Russie et exigent que la guerre contre la Russie soit gagnée « sur le champ de bataille ».

Ce Dr en histoire et grand voyageur avec un riche passé rédactionnel, dénonce depuis des années déjà que l’expansion de l’OTAN vers l’Est et les bases de fusées en Pologne et en Roumanie ainsi que les gigantesques manœuvres de l’OTAN à la frontière russe et le refus de donner des garanties de sécurité à la Russie sont une provocation massive contre la Russie. Ce genre d’avertissements, dit-il, auraient probablement pu éviter le déclenchement de la guerre en Ukraine mais ne sont pas tolérés par les USA, l’OTAN et leur vassaux. (Müller a effectivement perdu sa place dans le comité de direction du Infosperber, suite à son article du 26 février 2022 disant que l’OTAN est co-responsable de la guerre en Ukraine.) Il nous rappelle que c’est bel et bien l’Armée rouge en juillet 1942 (Stalingrad) – et non pas les alliés – qui a libéré l’Europe du nazisme avec des centaines de milliers de pertes humaines même si ce fait n’est pas souvent mentionné dans nos livres d’histoire. Il dénonce les journaux appelant à faire la guerre et à armer l’Ukraine :

C’est comme si deux frères se disputaient. La mère leur dit : faites la paix, puis elle donne un grand couteau au petit pour s’attaquer au grand frère….

Les journalistes devraient être traduits pour crimes de guerre, de même ceux qui suivent les consignes de leurs rédactions !

Müller rappelle qu’en 1965, le journaliste allemand Paul Sethe disait : « La liberté de presse est la liberté dont disposent 200 riches pour propager leur opinion » – c’est encore valable sauf qu’aujourd’hui, dans le monde germanophone, ils ne sont plus guère que 20.

Müller mentionne aussi que le transfert massif des recettes publicitaires, qui finançaient autrefois les rédactions et les salaires des journalistes vers des plates-formes en ligne et qui ne produisent pas elles-mêmes de nouvelles rend les conditions de travail des professionnels des médias de plus en plus précaires. Depuis 2006, les salaires des journalistes en Suisse ont baissé jusqu’à 20 pour cent. Dix pour cent des postes (environ 2100) ont été supprimés entre 2008 et 2018. Pour réduire les coûts, les rédactions en ligne utilisent des films et des photos réalisés avec des téléphones portables par des « journalistes citoyens » ou les reprennent directement des réseaux sociaux.

Christian Müller est initiateur de la plateforme indépendante globalbridge.ch et s’engage à nous livrer chaque semaine un rapport directement depuis le Donbass.

3- Maurice Lemoine

Ancien rédacteur en chef du Monde diplomatique, nous rappel la Loi Brandolini (en anglais Bullshit asymetry principle) :

La quantité d’énergie nécessaire pour réfuter les conneries est largement supérieure à celle nécessaire pour les produire.

Lemoine commence par une anecdote ironique sur un reportage qu’un journaliste de l’Obs a fait sur les « Colectivos » au Venezuela, décrivant toutes les « difficultés » que ce dernier aurait eu à traverser pour obtenir son interview avec un leader d’une de ces entités soi-disant criminelle ; Lemoine raconte ensuite avec quelle facilité il a lui-même obtenu tous les accès pour approcher ces organisations sociales[5]. Lemoine nous décrit comment les journalistes dit « d’investigation » ne connaissant ni le terrain, ni la langue ni l’histoire font de plus en plus souvent appel à des « fixeurs », lesquels choisissent à leur place les lieux, situations et interlocuteurs peuplant leurs reportages. D’où une uniformisation de l’information.

Il nous donne l’exemple de l’(auto)mise en scène médiatique de Juan Guaido, qui s’est autoproclamé « président par intérim » du Venezuela en janvier 2019.

Lemoine nous rappelle aussi l’opération Gedeon au cours de laquelle, en mai 2020, le président fantoche Juan Guaido a signé un contrat de 212 millions d’euros avec un groupe armé dirigé par des mercenaires des EU pour « capturer, arrêter ou éliminer » le président Nicolás Maduro. Cette information a été révélée dans la presse des Etats-Unis (New York Times, CNN, etc.), mais est totalement passée sous silence par les médias européens.

Rien de nouveau dans cette utilisation des médias pour mener à bien des manœuvres d’ « action psychologique », fut-ce en temps de paix. En 1954, une violente campagne sur le thème du « communisme dans les Antilles » a précédé le renversement du président démocratiquement élu Jacobo Arbenz au Guatemala. De même qu’une violente campagne de presse menée entre autres par le quotidien El Mercurio a précédé le coup d’Etat contre Salvador Allende au Chili.

Instrumentalisation de thèmes particulièrement sensibles aux secteurs progressistes

Lemoine dénonce les pseudo organismes censés lutter pour les droits de l’homme et la démocratie, comme l’Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID) ou la National Endowment for Democracy (NED) fondé en 1983 par Ronald Reagan pour se substituer à la CIA. Avec d’autres organismes – Institut républicain international (IRI), Institut national démocrate (NDI), Freedom House, Open Society, de George Soros, etc. – ces relais de la Maison-Blanche, du Département d’Etat et du Pentagone financent à l’international les mouvements, ONG et partis opposés aux gouvernements de gauche.

Entre 2010 et 2020, l’opposition et les médias et des ONG nicaraguayennes ont ainsi reçu 72 millions de dollars pour déstabiliser le président Daniel Ortega – finançant entre autres les groupes de choc qui, en 2018, ont tenté de le renverser.

Dans un autre registre, il faut mentionner la campagne menée contre la coopération internationaliste des médecins cubains (60 000 missions) par Cuban Prisoner Defenders ou l’Union patriote de Cuba, organisations « anticastristes » financées par Washington.

Lemoine attire enfin l’attention sur l’instrumentalisation des droits de l’Homme. Ainsi a-t-on pu voir, en mai 2019, Amnesty international dénoncer la répression de l’Opération Liberté menée par Juan Guaido, alors qu’il s’agissait d’une tentative de coup d’Etat : Amnesty, comme Human Right Watch ou même la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) n’enquêtent pas sur le terrain, mais s’appuient sur des ONG locales, sans se préoccuper de savoir qui les finance et si, en réalité, il ne s’agit pas d’organisations d’opposition.

De la même manière, des thèmes particulièrement sensibles aux yeux des secteurs progressistes – droits des femmes, environnement, religion – sont détournés de leurs véritables objectifs pour mettre les gouvernements non alignés en accusation. S’agissant de thèmes hautement défendables, ils sont immédiatement repris par les médias, participant ainsi largement à la désinformation de l’opinion publique.

Réseaux sociaux – multiplicateurs de propagande de déstabilisation

La numérisation a massivement renforcé les possibilités de désinformation médiatique. Des plateformes comme Facebook, Instagram et Twitter multiplient les fausses informations en quelques secondes.

4- André Scheer

Spécialiste de l’Amérique latine et ancien correspondant du quotidien Junge Welt en Allemagne, a montré, à l’exemple de Cuba, comment Twitter et Instagram sont utilisés de manière ciblée pour déstabiliser les gouvernements. Il s’est concentré sur la propagande médiatique contre Cuba en commençant par les chiffres actualisés payés par les contribuables des Etats Unis rien que pour porter atteinte à l’image de cette petite île qui dérange :

800 millions de dollars par an, c’est le budget annuel alloué par le Congrès à des médias anti-cubains !

Entre autres, Radio Swan, station gérée par la CIA dans les années 60 pour préparer l’invasion de la baie des Cochons. La station provenait de « Radio Free Europe ». Elle propageait par exemple l’information selon laquelle le gouvernement cubain voulait enlever les enfants à leur parents, action secrète des EU et de l’Eglise catholique (« Opération Peter Pan »), avec le résultat que 14’000 enfants furent envoyés aux Etats Unis, mais qui en même temps refusaient de donner des visas aux parents.

Mentionnons aussi Radio/TV Marti, lancée en 1985, complétée entre-temps par le site interne Marti Noticias, qui usurpe du nom du héros national José Marti pour tenter d’influencer l’île depuis les USA. Il y a aussi les médias sociaux : En 2018, le Miami New Times rapporta que le gouvernement des Etats-Unis recrutait des Cubains pour qu’ils diffusent des contenus crées par le gouvernement des Etats Unis sur des pages Facebook « privées ».

Alors que Twitter en particulier permet de diffuser librement des appels à la rébellion contre le gouvernement cubain, le réseau a bloqué en 2019 les canaux de Granma, Juventud Rebelde , TV Cubana et d’autres médias cubains en plein milieu d’un discours important donné par le président Diaz-Canel.

Rappelons-nous aussi des offres alléchantes qui circulaient en 2020 sur la toile offrant jusqu’à 5000 dollars à toute personne qui mettrait en scène et documenterait une « rébellion » à Cuba ou qui mettrait le feu à une voiture de police ou un magasin de devises, en filmant le tout. A ce sujet, cf. Les budgets officiellement publiés par la NED [6]

Autre exemple : L’hashtag #SOS Cuba qui génère tous les 5’’ un tweet anti-cubain avec des faux comptes, depuis l’Espagne :

En 2021, #SOS Cuba s’est répandu sur Twitter plus de 2 millions de fois pour critiquer la gestion de la pandémie par les autorités cubaines.

Rajoutons à ceci La face cachée des reporters sans frontières de Maxime Vivas, qui se lit comme un polar. On y découvre par exemple que Reporters sans frontières (RSF) n’utilise que 7% de son budget annuel pour la défense de journalistes, le reste étant absorbé par des frais de fonctionnement…et bien sûr on y découvre des financements de RSF par la NED et la CIA, qui servaient, entre autres à Robert Ménard, son ancien secrétaire général, à recruter un réseau d’une centaine de « journalistes indépendants » dans l’île rebelle, (dont à peine 2 avaient un diplôme de journalisme). Ménard leur offrait un ordinateur portable et un salaire mensuel très attractif. Il mettait à leur tête le fameux « dissident » Nestor Baguer qui est ainsi devenu « chef de l’opposition », financée par RSF (- à leur tour financés par la NED et USAID). Ménard lui dictait pendant plusieurs années ce que son équipe devait écrire – avant de découvrir qu’il s’agissait en réalité de l’agent secret de la sécurité cubaine Octavio – …seulement le mal était déjà fait dans nos médias et aucun rectificatif n’a jamais été publié en Europe.

André Scheer nous cite aussi le nouveau code des familles, qui a été voté à Cuba avec une participation de ¾ des ayant droits au vote et accepté par 2/3 des votants, donc presque 4 millions de cubains. Il s’agit du code de famille le plus moderne au monde, car il reconnaît toute forme de famille, attaquée aussitôt par l’église à Cuba et par tous les médias étrangers. Parmi les exemples récents de fake news propulsées des milliers de fois avec des faux comptes sur les réseaux sociaux, nous avons par exemple la photo avec Raul Castro sortant d’un avion, sous-titré : « Fuite de Raul Castro au Venezuela, il arrive à 11.37 aujourd’hui, 11 juillet 2021 », alors qu’il s’agit de son arrivée au sommet du CELAC en 2015 au Costa Rica.

Lors de la campagne Twitter lancée depuis l’extérieur contre Cuba invitant la population cubaine à descendre dans la rue en juillet 2021, des milliers de tweets ont été diffusés à la seconde à l’aide de « bots ». Des images utilisées comme « preuve » de prétendues manifestations de masse à La Havane ou ce tweet du 5 octobre 2022 « Journée historique au Malécon de la Havanne – le peuple proteste » n’était rien d’autre qu’ une photo d’une manifestation de 2011 – en Egypte ! [7]

Le rôle des médias dans les guerres

5- Jacques Baud

Colonel, ancien collaborateur des services de renseignements stratégiques suisses et de l’OTAN, qui a aussi été formé aux EU et GB – “ J’ai travaillé avec probablement tous les services secrets occidentaux ! ” – expert en armes chimiques et nucléaires, formé au contre-terrorisme, avec des fonctions au service des Nations unies, chef de la doctrine des opérations de maintien de la paix à New York, engagé en Afrique et à l’OTAN pour la lutte contre la prolifération des armes légères, auteur de plusieurs ouvrages sur le renseignement, la guerre asymétrique et le terrorisme. Lui aussi nous démontre comment les médias corporatifs suisses font de la propagande de guerre à grande échelle. Les faits et les vies humaines y jouent un rôle secondaire, en prenant l’exemple des reportages actuels sur le conflit en Ukraine.

Sa méthodologie de travail :

a) Analyser la fiabilité de la source (media check) en fonction de critères très précis, ensuite éliminer les médias considérés comme extrêmes (ou extrémistes), puis analyser les faits, la qualité de l’information elle-même. Les fact-checkers habituels comme la RTS, Libération, Le Monde, etc. n’analysent pas les sources, seulement les faits. D’ailleurs les fact-checkers des médias mainstream sont souvent utilisés pour crédibiliser de fausses informations.

b) Pour expliquer la crise ukrainienne, par exemple, je ne prends aucun média russe, mais uniquement des médias occidentaux, ukrainiens et de l’opposition russe. Mon but n’est pas de montrer qui est le bon et qui est le méchant, mais comment nous sommes mal informés par des médias qui modifient délibérément la réalité à des fins guerrières. J’arrive ainsi à démontrer que pratiquement tout dans la presse francophone en Europe est faux en ce qui concerne l’Ukraine.

c) Baud distingue entre diffusion de fausse nouvelles non intentionnelles, sélectives (mentir par omission), intentionnelles (avec le but de tromper et nuire), et, la plus perverse, création d’un narratif avec des éléments vrais mélangés à des éléments inventés et une logique trompeuse avec intention malveillante.

d) Pour mes infos, tout vient d’informations officielles, de services de renseignement ou de médias occidentaux reconnus (presque exclusivement américains). En me renseignant dans des sources anglophones main Stream antirusses ou en citant le Pentagone, j’arrive à contrer la quasi-totalité de la propagande uniforme de la presse francophone. Même les médias EU évoquent comment nos médias sont biaisés vers l’Ukraine.

Baud nous livre quelques éléments concernant la journaliste russo-ukrainienne Marina Ovsiannikova : Ce qu’on ne nous dit pas, c’est qu’elle a dû quitter le journal allemand « die Welt » en Allemagne, à la demande d’extrémistes ukrainiens. Elle est rentré à Odessa et a été mise sur une liste d’opposants à éliminer par l’Ukraine, c’est à ce moment-là qu’elle est allé en Russie. De même, Maria Butina qui n’était pas une « espionne russe » mais une activiste de Navalny (source le website de Navalny lui-même). Puis Baud affiche une liste de 13 journalistes ou opposants ukrainiens éliminés : on y trouve leurs adresses, leurs enfants, où ils vont à l’école, etc. Il faudrait y rajouter Daria Dugina, la fille d’Alexandre Dugin, assassinée récemment.

Il cite un journaliste d’un grand quotidien français (qui souhaite rester anonyme) :

« La politique de notre rédaction est de ne pas diffuser la vérité sur le conflit ukrainien, car ceci signifierait qu’on soutiendrait Poutine », Oct. 2022.

Selon ses recherches, la TV Suisse prend ses sources exclusivement des médias ukrainiens.

Les médias vivent du sang des autres, rien de plus, rien de moins

Baud enchaine avec plusieurs exemples de désinformation sur la situation en Ukraine ou sur la mortalité dû au Covid, sur la soi-disant incursion de 38 avions militaires chinois dans l’espace aérien du Taiwan : On crée le complot, et il enchaine sur d’autres théories de conspirations selon les définitions de Wikipédia et démontre en passant que les accusations de conspirationnisme sur sa propre personne ne répondent à aucune définition et sont basées sur des faits falsifiés. Ses analyses sur les événements de la guerre sont régulièrement déformées par les médias de masse et il est lui-même qualifié de théoricien de la conspiration, ce qui le fait plutôt rire.

Comme d’autres intervenants, Baud démontre l’uniformité totale de la presse francophone en montrant une 20-aine de journaux avec tous les mêmes titres en première page (cf. aussi les articles au sujet de cette uniformité sur Acrimed en 2019 [9]).

Selon Baud, la boutade « Comment savoir si une information est vraie ? – Elle est bloquée par Facebook, effacée par Twitter, cachée par Google, YouTube l’interdit et Wikipédia et les média l’appellent une théorie de conspiration » n’est pas si aberrante…

Cet expert en la matière nous apprend : Il y a 150 firmes de public relation USA/GB qui collaborent pour diriger des conflits. Les Britanniques ont également une organisation de manipulation de l’information appelée « Integrity Initiative », composée de clusters de « désinformateurs ». On en a un en Suisse aussi, ce sont des membres de l’administration nationale ou internationale. « Conspiracy watch » par exemple a été payé aussi. Baud dispose de quittances, il connaît les noms, la manipulation est énorme, sans parler de wikipédia où il y a des groupes organisés qui font des centaines de milliers de modifications rien qu’en 2020 Ces groupes ont été dénoncés par Haaretz. Ils modifient l’encyclopédie en ligne afin qu’elle soit compatible avec la politique israélienne, « le Guardian » en a fait un article. (cf. aussi : Le côté obscur de wikipédia [10]).

Voici en résumé ses constatations :

1) La différence entre les médias européens : Chez les anglophones, il y au moins la nuance, des petites traces d’honnêteté, contrairement à l’ensemble des médias francophones en Europe !

2) Aucun mass-média suisse ne travaille selon la Charte de Munich ! En Suisse, on confond systématiquement l’opinion du journaliste avec les faits !

3) De la manière dont nous comprenons les crises dépend la façon dont nous pouvons les résoudre.

4) La tendance à polariser les problèmes diminue notre disponibilité de les résoudre par le dialogue.

5) Le prix humain de notre façon de présenter les crises est énorme :

Il explique : La désinformation propagée par nos médias nous conduit à prendre de mauvaises décisions. Exemples : depuis le mois de mars, nos médias (en grande partie la RTS et des « experts militaires » qui ont purement et simplement affabulé) n’ont eu de cesse que de nous répéter que la Russie était à court de missile, qu’elle n’était pas capable d’en produire, que ses réserves étaient épuisées, etc. etc. On n’a donc pas donné à l’Ukraine de système de défense anti-missiles. Résultat : l’Ukraine n’est pas en mesure aujourd’hui de contrer la pluie de missiles qui détruit ses installations !… C’est la même chose avec l’idée que la Russie veut s’emparer de territoires. Ce n’était clairement pas le cas en février : les Russes voulaient – comme ils l’ont dit – détruire la menace qui pesait sur les populations du Donbass. Mais les Occidentaux ont poussé les Ukrainiens à s’accrocher au terrain au lieu de manœuvrer et détruire l’attaquant russe avec des actions mobiles. Résultat : les Russes ont détruit les forces statiques et ont par le même fait grignoté du terrain qu’ils ne veulent plus rendre. Les Ukrainiens ont donc perdu du terrain et une quantité incroyable de vies, pour donner à la Russie une victoire qu’elle n’attentait pas au début !

Pour l’anecdote Jacques Baud : nous raconte : Quand j’étais en Afghanistan, on me disait : « Nous on peut pardonner aux Nord-Américains, car ils sont des idiots, mais pas aux British, car ils nous connaissent ! » Les Britanniques sont haïs, ils ont détruit le Moyen Orient.

Baud me dédicace mon exemplaire annoté Gouverner par les FAKE NEWS qui se lit comme un polar.[8]

6 – Gabriel Galice

Gabriel Galice au Forum sur la Souveraineté des états et le droit international

Economiste et politologue, directeur du Geneva International Peace Research Institut (GIPRI), attaque directement avec les OGNM (Opérations de Guerre Non Militaires) qui constituent la substance des guerres du XXIe siècle : Ces OGNM comprennent des moyens techniques, culturels et économiques : les opérations militaires en Ukraine sont des combats, la guerre elle-même est menée à l’échelle mondiale, avec des sanctions, des slogans, des mots d’ordre, des images, de l’argent, etc.

Puis il s’en prend au « dinosaure OTAN », une machine à profit au bénéfice de l’industrie d’armement américaine sous prétexte d’homogénéité du matériel.

L’Allemagne et même la Suisse dite neutre ont décidé d’acheter des avions de combat F35. L’OTAN dispose d’un fonds d’investissement et d’un fonds d’accélération. L’OTAN est un instrument politique pour polariser les alliances dans le sens des USA, il a des think tanks, des machines de propagande. La désinformation est un point fort de l’Occident. L’OTAN est une médiocre machine de guerre, un dinosaure, un animal préhistorique de la guerre froide. Elle aurait dû être entièrement restructurée après la dissolution du Pacte de Varsovie en 1991. Elle aurait dû être placée au moins sous l’autorité du comité d’état-major, conformément aux Art. 64 et 47 de la Charte de l’ONU.

Cognitive warfare

La « Guerre cognitive » (cognitive warfare) est une expression de l’OTAN. C’est notre esprit qui devient le champ de bataille où on influence non seulement nos opinions mais aussi nos actions. Galice mentionne le classique « Propagande » d’Edward Bernay de 1928 avec ses premières théories de la publicité commerciale et politique. (Bernay avait d’ailleurs contribué à convaincre la population de l’entrée en guerre des Etats – Unis), sa doctrine de manipulation des leaders et des masses, tout comme son agence de presse Middle America Information Bureau apportèrent un soutien médiatique au coup d’état mené au Guatémala par les USA et la United Fruit Company contre le gouvernement de Jacobo Arbenz Guzmann.

Puis de rappeler les révélations d’Edward Snowden, notamment pendant ses années en Suisse au sujet des programmes de contrôle et surveillances des masses et de la guerre de l’information, la soft power, qui est aussi un combat informatique, c’est –à-dire de voler des informations à l’ennemi ou encore de saboter des machines, l’infowar est pour ainsi dire la deuxième étape. La « guerre cognitive » ne vient qu’après, quand nos cerveaux deviennent des armes et des terrains de combat. Ce terme est associé à l’expression « guerre hybride », une stratégie qui vise à la conjugaison de tous les moyens contre un pays donné sans se résumer à la simple force militaire.

Le GIPRI se bat pour la paix selon la devise « Si tu veux la paix, cultive la justice ». Mais ces combats sont difficiles, d’autant que les fauteurs de guerre agissent aujourd’hui sous le couvert des « Droits de l’homme ». Nos journaux sont truffés de fake news et désormais les réseaux sociaux sont également contrôlés et censurés.

Voix alternatives punies

Son propre institut et Galice lui-même subissent de la censure depuis la guerre contre la Syrie ou le conflit en Ukraine, comme tout le monde qui n’adhère pas à la version officielle. A mentionner aussi Alina Lipp qui a été jugée à 3 ans de prisons pour avoir appelé les russes des « libérateurs » dans un de ses textes, Graham Philips et Vanessa Beeley qui sont sur des listes de sanctions individuelles de leur propre gouvernement pour avoir investigué et rapporté des éléments différents de la version officielle compromettant les Casques blancs, ou pour avoir dénoncé les assassinats depuis 2014 dans la guerre du Donbass, etc. , ou Anne-Laure Bonnel, documentariste et reporter de guerre indépendante, enseignante à l’école supérieure de journalisme de Paris, menacée et licenciée de son université suite à ses visites dans le Donbass. Dans une émission sur France soir intitulée « J’avais prévenu que la situation dans le Donbass était explosive » elle finit par ces mots : Il faut sortir des discours de haine, il y a beaucoup de malentendus quand on arrive pas à se mettre dans la peau de l’autre, c’est la première fois que tant de personnes se font « défoncer (sic ?) » dès qu’ elles parlent de paix, c’est comme si le dialogue, la diplomatie ou le mot paix serait devenu insultants, sur certains réseaux sociaux il y à une haine déferlante qui se met en place où le dialogue n’est plus possible, il faut que les gens se ressaisissent… » [11]

Appel à la guerre

7- Gilles-Emmanuel Jacquet

Licencié en sciences politique et titulaire d’un DEA en Études Européennes, actuellement analyste au GIPRI, nous offre une précieuse compilation d’exemples historiques de campagnes de désinformation du 19ème siècle jusqu’à à nos jours visant à légitimer les interventions nord-américaines dans le monde.

La liberté des médias et l’accès libre à l’information jouent un rôle crucial dans la démocratisation des sociétés (par la formation de l’opinion publique) et la consolidation de la paix, commence-t-il.

Cependant, il documente d’innombrables cas où les médias ont joué un rôle critiquable dans la couverture de conflits armés ou de crises internationales en relayant la propagande de guerre de certains belligérants ou en fournissant une couverture partielle voire partiale de certains événements, qui pouvait et peut encore s’apparenter à de la désinformation. Il cite Noam Chomsky, La Fabrication du consentement : De la propagande médiatique en démocratie (1988), ou Serge Halimi et le Monde Diplomatique, ou encore Jacques Baud, en particulier son ouvrage Gouverner par les fake news (2019) déjà cité plus haut.

Lui aussi a constaté une nouvelle dimension problématique de la désinformation ou de la propagande politique ou de guerre.

Je me concentrerai sur ses exemples les plus récents. Le document complet de G.E. Jacquet avec toutes les sources sera édité par GIPRI en début 2023.

Selon Jacquet, une des occasions récentes d’assister à un contrôle étroit de l’information afin de conserver l’adhésion de l’opinion publique occidentale était l’invasion du Koweït par l’Iraq et la Guerre du Golfe (1990-1991). On se rappelle tous de ces « frappes chirurgicales » épargnant les civils alors que dans les faits il y avait beaucoup de morts, plus tard considérés comme des « dommages collatéraux », (On se rappelle des 500 000 enfants irakiens morts, « prix qui en valait la peine [12] » selon Madeleine Albright, alors représentante permanente des USA auprès de l’ONU).

Les cas de désinformation furent nombreux, comme sur le possible usage d’armes chimiques par l’Iraq, la possible invasion de l’Arabie Saoudite par l’Iraq, l’exécution par l’armée irakienne de pillards présentés comme des civils ou des opposants, jusqu’ à la fameuse affaire des couveuses de Koweït City quand une jeune infirmière nommée Nayirah avait affirmé devant une commission du Congrès des États-Unis d’Amérique que dans la ville de Koweït des soldats irakiens auraient arraché des nouveau-nés hors de leurs couveuses et les auraient laissé mourir sur le sol. L’infirmière qui a raconté l’histoire des incubateurs à une commission du Congrès américain le 14 octobre 1990 était en réalité la fille de Saoud bin Nasir al-Sabah, l’ambassadeur koweïtien de l’époque à Washington, et l’histoire une invention pure [13] de l’agence de relations publiques Rendon Group, cette dernière largement financée par la CIA :

Jacquet cite Lorraine Millot, « Berlin : un faux plan pour aller au Kosovo » et Jo Angerer et Mathias Wertgh : « It began with a lie » :

Lors du conflit au Kosovo, la presse occidentale relaya des informations infondées sur le plan serbe « fer à cheval » visant à expulser les Albanais du Kosovo et qui s’avéra être une campagne de désinformation relayée par le Ministre allemand de la Défense Rudolf Scharping afin de faire accepter l’intervention de l’OTAN. Les frappes de l’OTAN sur l’Ambassade de la République Populaire de Chine à Belgrade ou sur des convois de civils serbes furent présentées comme des « dommages collatéraux » mais aucunement comme des crimes de guerre. Des zones d’ombre entourent également le cas du village de Račak où des combats entre forces serbes et insurgés albanais kosovars furent présentés comme un massacre.[14]

Ensuite le soutien de la presse occidentale pour l’intervention des Etats-Unis et de ses alliés en Afghanistan après le 11 sept. 2001, les faux bunkers souterrains de Oussama ben Laden, l’invasion de l’Iraq par les EU et ses alliés de l’OTAN en 2003 où la presse masquait totalement son caractère illégal, ou la soi-disant présence d’armes de destruction massive.

Le conflit russo-géorgien d’août 2008 fut un autre champ d’exercice de la désinformation et le narratif selon lequel la Russie était responsable du déclenchement des hostilités fut mis en cause.

Les Printemps arabes ont aussi donné lieu à une massive désinformation de la part de nombreux médias du monde entier, en particulier ceux des belligérants :

Les médias occidentaux ont occulté le caractère fondamentaliste de groupes armés djihadistes en Syrie. (Selon mes sources personnelles rencontrés sur place en Syrie, des mercenaires de plus de 100 pays, dont des pays membres de l’UE, ont attaqué et complétement anéanti 31 villages. Des témoins ont aussi rapporté qu’en 2011/12 des manifestants ont été payés (2000 Liras) pour aller manifester contre leur gouvernement, que des jeunes et des femmes de ménage qui n’auraient pas gagné ça en une journée entière, auraient ainsi été embauchés pour une heure ou deux. On m’a même parlé de sandwichs distribués gratuitement qui contenaient du Captagon pour les rendre agressifs. Ces images ont ensuite fait le tour du monde et les chaines syriennes coupés par l’extérieur pour semer ainsi la confusion dans le pays même. Selon Ayssar Midani [15] et al., des snipers mercenaires ont tiré sur la foule et sur les forces de l’ordre, ce qui par la suite avait été attribué au gouvernement. Encore aujourd’hui, nos médias insistent pour parler de « guerre civile » ou de « révolution » alors qu’il s’agit d’une guerre contre la Syrie, menée par l’OTAN, les EU, Israël et certains autres pays de la région – mais surtout par nos médias !

La Grande Bretagne a mis en place une stratégie de soutien aux rebelles ou djihadistes syriens intégrant les médias et des associations comme ‘Adam Smith International’. L’existence de ces structures et de leurs stratégies portant les noms de ‘Counter Disinformation & Media Development’, de ‘Consortium’, (groupe de contractors privés dans le domaine du renseignement), de ‘Conflict’, ‘Stability’ and ‘Security Fund’, d’’opération HMG Trojan Horse’, ou d’’Access to Justice and Community Security’, furent révélés par des journalistes indépendants ou de grands médias, ainsi que les hackers d’Anonymous.

Comme Karin Leukefeld plus tard, Jacquet décrit en détail, sources à l’appui, l’exemple des attaques aux armes chimiques qui furent imputées aux forces gouvernementales syriennes.

Suivent l’exemple notable de désinformation sur le conflit libyen, l’omission presque totale des informations sur le Yémen, les projecteurs braqués durant plusieurs années sur le Venezuela avec un soutien non caché à l’opposition politique et à Juan Guaido.

Et enfin, la crise ukrainienne et le conflit du Donbass et la guerre russo-ukrainienne. Il y a un recours massif par l’ensemble des belligérants à la désinformation et à la propagande de guerre[16] un manque flagrant de mise en perspective historique de ce conflit et de ses divers enjeux, entre autres :

– L’occultation du rôle des puissances occidentales et de militants ultra-nationalistes ukrainiens dans les événements du Maidan en 2013-2014, ou d’événements comme le massacre de la Maison des Syndicats d’Odessa (2 mai 2014)

– Le massacre de civils pro-russes et de policiers ukrainiens par le Régiment Azov lors de la bataille de Marioupol (9 mai 2014 et jours suivants), ainsi que le cas des victimes civiles du Donbass bombardés depuis 2014.

– La guerre russo-ukrainienne actuelle qui a été illustrée par de nombreux cas où les médias occidentaux ont relayé la propagande de guerre des gouvernements ukrainien ou occidentaux sans aucun recul critique comme l’ont montré le cas de l’île des Serpents, du « fantôme de Kiev » ou de la centrale nucléaire de Zaporojie occupée par les forces russes qui auraient tiré sur leurs propres troupes ou dont les cheminées du toit étaient devenues des missiles russes non-explosés…

Comme en Syrie, les tensions puis le conflit ont été accompagnés par une stratégie d’influence politico-militaire incluant certains grands médias et portant les noms d’Integrity Initiative, de Counter Disinformation & Media Development, cités plus hautes.

8- Karin Leukefeld (correspondante au Moyen-Orient)

Journaliste allemande, correspondante Proche et Moyen-Orient où elle travaille et vit a souligné les dangers du journalisme citoyen en prenant l’exemple de l’attaque au gaz toxique prétendument perpétrée par l’armée syrienne à Douma, à l’est de Damas, en avril 2018. Comme Tim Anderson [17] que j’ai eu la chance de rencontrer à Damas en 2019[18], elle avance que les trois pays occidentaux ayant le droit de veto à l’ONU, à savoir les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et la France, ont lancé une « attaque de représailles » contre la Syrie sans décision du Conseil de sécurité de l’ONU, ce qui a coûté la vie à de nombreuses personnes. L’équipe d’experts de l’OIAC s’est retrouvée à Beyrouth, interdite de se rendre en Syrie « pour des raisons de sécurité » en raison des frappes aériennes. Ni les Etats-Unis, ni la Grande-Bretagne, ni la France n’ont été attaqués par la Syrie – une violation massive de la Charte de l’ONU.

Leukefeld nous illustre le glissement du rôle des médias dans les conflits armés et les instruments de propagande unilatérale de guerre. Depuis les simples témoins oculaires jusqu’au logiciel d’espionnage Pégasus, développé en Israël (que je viens de découvrir sur mon mac….). Elle nous dresse un historique sur ces reportages de guerres en commençant par la Première Guerre mondiale :

A l’époque, il y avait la radio, les journaux, les lettres, le téléphone, on filmait et photographiait (ce qu’on appelle aujourd’hui le « embedded journalism ») avec des témoins oculaires qui ont ramené des images cachées dans leurs vêtements.

Après 1945 les reportages, en particulier sur les guerres, devinrent un commerce…Une étude a montré qu’environ 5 100 journalistes de 64 pays ont séjourné au Viêt Nam. Pendant l’offensive nord-vietnamienne du Têt, ils étaient environ 600. Lors de la chute de Saigon le 30 avril 1975, ils n’étaient plus qu’une centaine. Les images de la guerre du Viêt Nam ont été diffusées sur les téléviseurs, on a même parlé d’une « guerre de salon ».

Ces images et rapports sur les actions des troupes nord-américaines au Vietnam ont provoqué des protestations si massives, surtout aux États-Unis, que le gouvernement américain a finalement dû retirer ses troupes. Par la suite une grande partie de ce qui s’est passé dans les guerres de libération nationale en Afrique, en Amérique latine et en Asie n’a pas été rapportée par les médias, pour la plupart contrôlés et orientés par l’Occident. Les informations arrivaient généralement par le biais de groupes de la société civile, de comités de soutien ou d’églises. Et ceux-ci avaient à leur tour leurs propres intérêts qui influençaient l’information.

Après la dissolution de l’Union soviétique (1991), le développement technique a de nouveau fait un bond en avant :

Lors de la deuxième guerre du Golfe en 1990/91, une transmission directe du bombardement de Bagdad a eu lieu sur CNN, sinon la plupart des images de cette guerre ont été produites et contrôlées par l’armée américaine et des agences de relations publiques.

Lors des guerres du Kosovo et de Yougoslavie à la fin des années 1990, des appareils de photos numériques ont été utilisés, dont les images pouvaient être transmises presque instantanément. Mais comme la connexion Internet était encore faible sur le terrain, le transfert de trois photos prenait parfois une nuit.

Lors de la guerre (de l’Irak en 2003) ils pouvaient désormais transmettre leurs données – c’est-à-dire des photos et des reportages – de n’importe où dans le monde.

Aujourd’hui, des milliers de satellites tournent autour du monde, les groupes armés dans les zones de guerre sont équipés de technologies numériques, à commencer par les smartphones.

Ce qui a d’abord été salué comme une conquête pour la communication mondiale est utilisé et instrumentalisé – à des fins propres – non seulement par les journalistes, mais aussi par les acteurs des guerres, y compris par les services secrets :

A titre d’exemple, je voudrais simplement mentionner le logiciel d’espionnage Pegasus, développé en Israël. En janvier 2022, on a appris que ce logiciel d’espionnage israélien avait été découvert au Liban sur des centaines de téléphones d’hommes politiques, de journalistes et d’acteurs de la société civile.

Le contexte fait défaut

Ces « questions en W » (Qui ? Quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ? D’où ? Quelles sources ?) devraient toujours être posées dans différentes directions, aux différents acteurs d’un conflit :

Leukefeld dénonce le fait qu’aujourd’hui, tout doit aller vite, que la rapidité ouvre la porte à la propagande. L’‘actualité’ ne rend pas une information ou un rapport plus sérieux. La rapidité est donc un inconvénient, tout comme les ‘journalistes citoyens’. Leur identité et leur emplacement restent généralement flous.

Avec les « printemps arabe » relayés sur Facebook, Twitter, TikTok, Telegram, les rédactions de la presse écrite, de la radio et de la télévision ont commencé à reprendre de tels messages et à veiller à leur diffusion. Un événement paraît ainsi actuel et authentique. Nous pouvons affirmer avec certitude que les informations sur la guerre en Ukraine qui parviennent aux rédactions et au public ne correspondent pas aux normes journalistiques initiales.

Voici un exemple de la Syrie cité déjà par d’autres intervenants : Il s’agit d’une prétendue attaque au gaz toxique à Douma : En avril 2018, les Casques blancs ont fait état, via les « médias sociaux », de nombreux morts à Douma suite à l’utilisation d’armes chimiques. L’armée syrienne en a été tenue pour responsable. Le gouvernement syrien a rejeté cette affirmation et a demandé une vérification par une équipe d’experts de l’Organisation pour la protection des armes chimiques, OIAC.

Des doutes ont été soulevés par des experts comme Theodore Postol du MIT au sujet de la Ghouta, de Douma ou de Khan Shaykhun [19]. Des experts de l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques (OIAC / OPCW) et son ancien directeur José Bustani ont également remis en cause le narratif lié à l’attaque chimique à Douma,

En Allemagne, elle a fait la une de tous les journaux nationaux. A Washington, Paris et Londres, cette nouvelle a été considérée comme vraie, et tant le gouvernement syrien que la Russie, alliée de la Syrie dans la guerre, ont été accusés.

Pour punir la partie syrienne, les trois pays occidentaux ayant le droit de veto à l’ONU ont lancé une « attaque de représailles » sans décision du Conseil de sécurité de l’ONU, au cours de laquelle plus de 100 missiles ont été tirés en une nuit. Pendant ce temps, l’équipe d’experts de l’OIAC était assise à Beyrouth, car elle avait été interdite de se rendre en Syrie « pour des raisons de sécurité », en raison des frappes aériennes américano-britanniques et françaises.

C’est ainsi qu’une information diffusée sur les médias sociaux par des « journalistes citoyens » ou des « activistes » a conduit à une attaque aérienne non autorisée par l’ONU. Aucun des trois pays n’avait été attaqué par la Syrie, une violation de la charte de l’ONU. Le rapport de l’équipe de l’OIAC, chargée par le Conseil de sécurité de l’ONU d’enquêter sur ce qui s’était passé à Douma, n’a pas été attendu ni entendu.

Des mois plus tard, il en ressortait que leurs recherches sur place ne pouvaient pas confirmer une attaque aérienne au gaz toxique. Mais leur rapport a été remplacé par un autre rapport de l’OIAC. Les deux scientifiques ont été accusés de mensonge et de corruption. Les journalistes qui ont rapporté ses conclusions ont été diffamés – par d’autres journalistes – et accusés de propagande russe. Jusqu’à aujourd’hui.

En tant que journaliste, je travaille depuis plus de 20 ans dans des zones de guerre et de crise de ce que l’on appelle le « Proche » et le Moyen-Orient. C’est un terme politique. Durant cette période, de nouvelles chaînes de télévision d’envergure mondiale ont vu le jour, comme Russia Today, TeleSur, CCTV de Chine ou Al Mayadeen du Liban. Elles se distinguent dans leur perspective sur les événements des chaînes à dominante occidentale comme la BBC, CNN, ABC, France 24 ou Deutsche Welle (je rajouterais Al Jazzera). Cette perspective était et reste aujourd’hui encore importante pour mon travail.

La « guerre contre la terreur » a manipulé et instrumentalisé les gouvernements, les entreprises, les médias, les organisations humanitaires, la culture, l’éducation et la justice – cette guerre a tout simplement infiltré tous les domaines de la vie sociale.

Tous les articles des mass-médias se réfèrent à des dépêches d’agences telles que l’AFP, l’AP, Reuters, DPA – qui ont toutes leur siège dans les capitales occidentales. Les médias d’autres parties du monde sont à peine perçus et, lorsqu’ils le sont – comme ceux de Russie ou de Chine – ils sont présentés comme « dirigés ». Ou ils sont même interdits.

Ne pas se laisser intimider

Je voulais construire des ponts – et je suis devenue une correspondante sur les guerres ! Déplore Karin Leukefeld. Les règles qu’elle s’est imposée en tant que journaliste indépendante :

Lire, communiquer, poser des questions, écouter, demander, regarder et toujours tout vérifier, autant que possible. Et ensuite faire un rapport et surtout : ne pas se laisser intimider. [20]

Créer des medias communautaires pour la paix

9- Lisa Daniell (Women’s Press Collective, USA)

Du Women’s Press Collective (WPC) à New York était l’une des deux oratrices* qui créent des médias alternatifs au service de la paix. Elle nous rejoint par Skype. Elle a souligné que des médias indépendants forts ne sont possibles que grâce à une organisation collective solidement ancrée dans la population. Pour pouvoir rendre compte fidèlement de la réalité de la population laborieuse, ils ne doivent pas non plus s’appuyer sur des technologies contrôlées par les riches, et rappelle que les médias corporatifs appartiennent au 0.1 % plus riches du monde. Puis elle mentionne les millions de sans-abris, sans emploi et dans l’extrême pauvreté dans son pays. Daniell confirme que aussi aux Etats Unis, les journalistes indépendants qui courageusement couvrent des sujets ignorés par les grands médias subissent des mesures de sanctions individuelles comme par exemple le fait de se faire exclure de plateformes digitales ou de se faire fermer leur compte PayPal.

Cette organisatrice bénévole à plein temps qui a laissé derrière elle une vie de salariée défend les médias communautaires de proximité pour la paix comme par exemple le magazine Collective Endeavor produit par les membres de WPC. WPC organise les moyens de production des informations dans les mains des travailleuses et travailleurs qui n’ont pas de voix dans les grands médias. L’organisation soutient gratuitement d’autres organisations de base dans la production de matériel imprimé, utilisé dans la lutte pour la justice économique et sociale.

WPC dispose encore d’une ancienne imprimante offset, ce qui leur garantit une liberté rédactionnelle, sans contrôle par des forces externes. Le magazine Collective Endeavor est distribué gratuitement par des volontaires qui l’utilisent comme instrument pour entrer en contact avec d’autres personnes qui voient la nécessité de créer des médias indépendants. Un exemple rare d’une presse de proximité, libre et produite collectivement, proche des préoccupations de ses actrices*. Le Women’s Press Collective fondé il y a 40 ans par des femmes – mais où les hommes ne sont pas exclus- organise aussi des stands d’information dans les rues et offre de l’assistance ou des workshops gratuits, entre autres pour la rédaction et la mise en page d’articles ou pour la prise de parole en public. Le WPC est ouvert 7 jours sur 7 et son magazine ouvert à la soumission d’articles, notamment sur des femmes travaillant dans le monde entier.

10- Thierry Deronne

Cinéaste, universitaire, licencié en communications sociales en Belgique vit depuis 1994 au Venezuela. Il enchaine sur la même thématique, le fait de devenir actrice et acteur de son destin. Il conclura ce colloque en nous présentant sa télévision publique, nationale, communautaire et participative, ViveTV créée par et pour des familles paysannes au Venezuela. Une télévision alternative qui fait confiance à l’intelligence collective et dont le contenu dépend de ce que les gens ont besoin de dire et qui ne réduise pas les gens à l’état de marchandises, mais qui met les moyens de production médiatique entre les mains des gens afin de créer des médias pour la paix.

Deronne dénonce la forme dominante des TJ conventionnels avec toujours les mêmes plans proches du journaliste, « la voix » aseptisée, homogène, l’image hors studio toujours plus courte, et quelques figurants loin des projecteurs qui sont juste là pour la décoration et qui doivent fermer leur bouche : Une radio déguisée en télévision :

La vraie idéologie de la TV est sa technique : Une élite qui parle, les autres se taisent. Bourdieu parlait d’une « fausse démocratie à la TV. Qu’est-ce que l’information ? Nos émissions uniformisées, où on ne prend pas le temps de faire une analyse ou alors de laisser des plans autonomes non colonisés par un commentaire et qui permettrait au spectateur de réfléchir pour lui-même ?

A ViveTV on prend le temps de dialoguer, de montrer, et chaque émission est unique. Ce n’est pas le/la journaliste qui est au centre mais les gens et leurs points de vue, la pensée populaire qui connaît mieux que personne les causes et les solutions.

Nous faisons beaucoup de documentaires, les gens ne se maquillent pas et utilisent leur langage de tous les jours. Comme dans l’intervention précédente de Lisa Danniells, la journaliste se contente de son rôle d’organisatrice et non pas de vedette. Mettre en relation ces sources sociales génère une incroyable valeur ajoutée d’information. Notre information ne se définit pas sous une logique de marché mais en fonction de la construction d’une société différente.

Tout ceci contraste avec la télévision marchande, commerciale, avec son information fragmentaire, superficielle, ou la causalité disparaît au profit d’un « sautillement d’effet en effet en effet » :

On saute d’une petite lutte à une autre petite lutte, un système pavlovien, où on est pris dans la civilisation du pixel, bombardé par des pixels. Cette stratégie médiatique a été observée lors de l’échec de la révolution socialiste au Chili, il y avait ce manque de confiance dans notre propre capacité de communication et de valorisation du projet, la gauche était toujours dans la réaction, en recyclant les arguments de l’ennemi de classe dans sa propre argumentation, en s’enfermant dans le cercle fermé de la communication bourgeoise même. Elle ne pouvait pas proposer de nouveaux contenus.

Nous voulions créer des alternatives à cela : un projet, un groupe, une usine n’est pas révolutionnaire parce que son discours est révolutionnaire, mais parce que son mode de production l’est,

Adblock test (Why?)

Source: Lire l'article complet de Le Grand Soir

À propos de l'auteur Le Grand Soir

« Journal Militant d'Information Alternative » « Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »C'est quoi, Le Grand Soir ? Bonne question. Un journal qui ne croit plus aux "médias de masse"... Un journal radicalement opposé au "Clash des civilisations", c'est certain. Anti-impérialiste, c'est sûr. Anticapitaliste, ça va de soi. Un journal qui ne court pas après l'actualité immédiate (ça fatigue de courir et pour quel résultat à la fin ?) Un journal qui croit au sens des mots "solidarité" et "internationalisme". Un journal qui accorde la priorité et le bénéfice du doute à ceux qui sont en "situation de résistance". Un journal qui se méfie du gauchisme (cet art de tirer contre son camp). Donc un journal qui se méfie des critiques faciles à distance. Un journal radical, mais pas extrémiste. Un journal qui essaie de donner à lire et à réfléchir (à vous de juger). Un journal animé par des militants qui ne se prennent pas trop au sérieux mais qui prennent leur combat très au sérieux.

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