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source originale : Celia Izoard pour  https://reporterre.net/Un-enjeu-cache-de-la-guerre-en-Ukraine-les-matieres-premieres?

Via : http://coordination-antinucleaire-sudest.net/2012/index.php?post/2022/12/08/Mais-que-fait-EDF-et-la-nucleocratie-francaise-en-Ukraine

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L’Union européenne a conclu en juillet 2021 (avant l’intervention Russe)  un partenariat avec l’Ukraine pour les métaux stratégiques et les batteries, une coopération amorcée et progressivement renforcée depuis 2014 après l’arrivée au pouvoir des gouvernements pro-occidental de Porochenko puis de Zélinsky.

crayons-combustible-produits-de-fission-en-zirconium.jpgCe partenariat UE/Ukraine permet d’assurer des importations de zirconium utilisé aux trois quarts pour le nucléaire tel par EDF et Areva-Orano comme matériau dans la fabrication des réacteurs nucléaires, le gainage (crayons) des pastilles de fission atomique utilisés dans les réacteurs atomiques à eau pressurisée (REP) participant à la réaction atomique lors du bombardement neutronique, et l’arsenal atomique militaire (sous-marins, blindage,…)

Dans un crayon ce sont plusieurs centaines de pastilles d’uranium enrichi qui sont empilées dans un tube en alliage de zirconium. Le zirconium et ses sels sont généralement considérés comme ayant une toxicité systémique (granulomes cutanés, alvéolites cutanées, fibroses pulmonaires, atteintes de la cornée et irritations oculaires, hypersensibilité allergique; de plus il traverse la barrière placentaire et passe dans le lait maternel).

Cet alliage de zirconium purifié (notamment épuré de l’hafnium qui est un « poison » pour le bombardement neutronique) représente 90 % de la production minière de zirconium métal mais ne représente qu’un faible pourcentage de l’élément zirconium (de l’ordre de 1 %) au final.

Toxicité civile et militaire

Le transport des « crayons » usagés après avoir servit dans les réacteurs atomiques est un des transports les plus dangereux du cycle nucléaire qui s’effectue dans des containers blindés spéciaux. Selon l’ASN, ces emballages sont susceptibles de transporter des crayons aux gaines fissurées et donc « inétanches ».  Or la présence de fissures et donc d’eau « accélère la production d’hydrogène » avec un risque en cas de dépassement du seuil d’inflammabilité de l’hydrogène (comme lors de la catastrophe nucléaire de Fukushima-DaÏchi).

La fiche toxicologique internationale du zirconium recommande d’éviter de disperser les poussières, de prendre en revanche de sérieuses précautions contre l’incendie et l’explosion, affirme l’obligation du port de gant et lunette de protection pour les travailleurs manipulant le zirconium, l’interdiction de manger ou boire ou fumer durant sa manipulation.

Le zirconium (1) est aussi utilisé sous forme d’alliages tels que le Zircaloy (avec de l’étain, du fer et du chrome) ou de verre de zircon employé pour le confinement des déchets radioactifs en sarcophage, tel du plutonium, dont la nucléocratie assure mensongèrement qu’il pourrait contenir la radioactivité au moins durant 2 000 ans, ce qui est encore loin du minimum de 100 000 ans requis pour les déchets radioactifs les plus dangereux.

sous-marin_Barracuda.pngLe site Techniques de l’ingénieur rappelle la synergie entre nucléaire militaire et nucléaire civil : « La volonté de construire des sous-marins à propulsion nucléaire a conduit à retenir le zirconium comme seul élément de structure pouvant convenir pour la construction d’un réacteur (embarqué) compact. » La technologie des réacteurs nucléaires REP a dés le début été développée par la firme états-unienne Westinghouse pour les sous-marins de l’US Navy, et elle équipe désormais 93 % des réacteurs nucléaires français.

Chaque année, la France importe près de 23 000 tonnes de zircon – minéral « lourd » classé hautement critique pour sa fabrication du « combustible » nucléaire. En 2018, ce zircon provenait à 59 % d’Afrique du Sud ( 2ndproducteur mondial derrière l’Australie), à 20 % du Mozambique et à 6 % du Sénégal. Autant de pays pollués à tout jamais.

Et difficile de trouver un chiffre sur les dizaines (centaines ?) de millions de tonnes de matières à extraire pour obtenir une tonne de zirconium. Selon l’US Geographical Service (USGS), la quantité de roches déplacées chaque année pour l’extraction des 25 minéraux dont le zirconium correspond à environ 7.000 pyramides de Gizeh. A présent l’industrie nucléaire française veut élargir les contaminations à l’Ukraine et à l’Europe.

Pollution et destruction de l’environnement, et risque pyrophorique

L’extraction du zircon contenu dans des sables spécifiques saccage les paysages naturels, accélère la désertification et anéantit la vie de milliers de personnes aux confins de l’économie-monde, loin des centres de pouvoir.

2021_afrique-zircon-extraction.jpgDans la mine l’attaque du minerai est effectuée par du chlore en présence de carbone à 1 200 °C. Puis le chlorure de silicium est séparé des chlorures de zirconium et hafnium par condensation. La séparation zirconium hafnium s’effectue suivant les procédés soit liquide mettant notamment en œuvre la réaction de Kroll utilisant le magnésium liquide à 800 °C, soit le procédé par distillation extractive mis au point en France. Autant d’étapes polluantes et destructrices de l’environnement. Le produit de séparation obtenu est une masse métallique spongieuse appelé « l’éponge de zirconium » (tel effectué par Framatome à Jarrie dans l’Isère) qui constitue le point initial du raffinage ultérieur du métal.

Dans la suite des étapes industrielles, l’usinage du zirconium requiert de grandes précautions car il est instable, inflammable, pyrophorique, explosif: la température d’auto-inflammation est inférieure à la température ambiante et la matière peut donc s’enflammer spontanément aux températures ambiantes. On se souvient de l’alerte incendie conduisant à l’évacuation du personnel qui a eu lieu chez Framatome (ancienne propriété d’Areva devenue filiale d’EDF) à Romans-sur-Isère (Drôme) le 21 septembre 2022 vers 16h30.

Au terme de leur terrifiant usage au coeur des réacteurs nucléaires, les gaines de zirconium font partie des déchets radioactifs à vie longue (qui émettent pendant plusieurs siècles ou plusieurs millions d’années des rayonnements ionisants à raison de 1 térabecquerel par gramme) et ne sont pas recyclables.

Les appétits de EDF en Ukraine : zirconium et hydrocarbures

« Au large de la Crimée en 2013/2014, à la suite de la découverte d’importants gisements pétroliers et gaziers en mer Noire, Exxon Mobil, Shell et Chevron ont obtenu en 2012 des permis d’exploration de la part du gouvernement ukrainien. Fin novembre 2013, l’Ukraine a également signé avec EDF et l’italien ENI un accord pour l’exploitation d’hydrocarbures à l’est de la Crimée visant à produire 3 millions de tonnes de pétrole par an ».

« L’Ukraine étant aussi sixième productrice mondiale de titane, métal stratégique pour la production aéronautique et militaire, recèle d’importants gisements de lithium, de cuivre, de cobalt et de terres rares, utilisés aussi bien dans le domaine énergétique que dans l’électronique et la défense ».
« En amont du partenariat UE/Ukraine, l’Ukraine s’était engagée à privatiser ses mines et son industrie métallurgique, à collaborer avec les services géologiques européen (EuroGeoSurveys) et étasunien (USGS) et à réaliser en anglais un « Atlas de l’investissement » cataloguant les gisements de métaux critiques disponibles. Selon Ukraine Invest, il recensait 8 761 gisements en 2021″.

« À partir de 2016, le gouvernement a commencé à vendre ses permis miniers par le biais d’enchères électroniques. »

Depuis 2004 la population s’oppose à l’exploitation du gisement de zirconium d’Azov en raison des risques de pollution radioactive
2021-02_Ukraine_manifestation-contre-mine-zirconium.jpg« Qu’en pense la population ukrainienne ? Depuis 2004, les habitants de la région de Marioupol, dans le Donbass, s’opposent à l’exploitation du gisement de terres rares et de zirconium d’Azov en raison des risques de pollution radioactive et ont obtenu deux fois l’interruption de la délivrance d’un permis. La dernière mise aux enchères du gisement en janvier 2021 a déclenché de grandes manifestations dans les districts de Manhoush et de Nikolske. Une fois la guerre terminée, les Ukrainiens n’auront-ils pas la mauvaise surprise de découvrir que pendant qu’ils tentaient de survivre aux assauts et aux bombardements russes et ukrainiens, leurs régions ont été vendues aux entreprises minières, gazières  et nucléaires? »
« L’Ukraine rêve d’indépendance, et c’est la raison pour laquelle bon nombre d’Ukrainiens ont soutenu son rapprochement avec l’UE. Mais quelle marge de manœuvre restera-t-il aux dirigeants du pays quand il faudra rembourser les dizaines de milliards d’euros de prêts contractés auprès de la BERD, de la Banque mondiale, des États-Unis et des pays européens qui convoitent ses ressources naturelles ? »
« Nous allons non seulement reconstruire l’Ukraine, mais nous allons la reconstruire en mieux, en plus vert », a assuré le commissaire européen et initiateur du partenariat sur les métaux avec l’Ukraine, Maroš Šefčovič, aux ministres ukrainiens lors de la rencontre du 16 novembre 2022 à Bruxelle. Mais peut-on reconstruire l’Ukraine « en plus vert » en faisant du pays le paradis minier de l’industrie européenne ? On sait pourtant que l’extraction minière – dont celle du zirconium – est le secteur industriel le plus polluant et le premier producteur de déchets au monde.

Chaque réacteur nucléaire à eau pressurisée (REP) français contient autour de 29 tonnes de zirconium.

(1) les propriétés physico-chimiques du zirconium sont : résistance à la corrosion, résistance à l’irradiation, grande pénétrabilité des neutrons lents, conservation des propriétés à haute température

Comment le gouvernement ukrainien brade les ressources énergétiques du pays à l’occident, comment il détruit l’environnement et la nature, et comment les populations s’y opposent
« Dans les années précédentes, en 2010, d’importants gisements de gaz de schiste ont été découverts en Ukraine. Le plus considérable se situe à Yuzivska dans la région de Kharkiv, à l’est du pays. Ses réserves correspondraient à un tiers de la consommation annuelle de gaz de l’Ukraine. En 2013, les permis d’exploitation ont été attribués aux sociétés étasuniennes Shell et Chevron. Sur fond de corruption : le ministre des Ressources de l’époque, Mykola Zlochevsky, était aussi président de la Burisma Holdings, l’une des plus grandes sociétés gazières privées d’Ukraine. Ce groupe, réputé proche de Joe Biden, a recruté son fils Hunter Biden à son conseil d’administration en 2014. »
« Le gigantesque projet d’extraction de Yuzivska a déclenché l’opposition des habitants de la région, qui se sont mobilisés contre les pollutions des eaux qui résulteraient de la fracturation hydraulique, technique interdite en France. » Au même moment les populations locales de Transcarpatie entraient en opposition au projet de destruction de la plus grande forêt d’Ukraine par l’ami personnel du Pst Zélinsky, (épinglé dans les « Pandora Papers« ) l’oligarque ukrainien Igor Kolomoïski, ( le financeur du bataillon d’extrême-droite Azov) et qui souhaite y implanter une station de ski haut de gamme.
« Le partenariat UE/Ukraine permet d’assurer également des importations de  titane, décisives pour Airbus et Safran ;  de scandium, sous-produit de la métallurgie du titane utilisé dans les piles à combustible et les alliages ultralégers de l’aéronautique ; ou encore de molybdène, employé dans les superalliages, les écrans et les puces électroniques. (Dans la fabrication de semi-conducteurs, l’industrie étasunienne est par ailleurs dépendante à 90 % du néon de qualité ultrapure produit à Odessa à partir du gaz issu des acieries). »

Un des ministres de Zelinsky : nous sommes « au service des investisseurs qui se présenteront après la guerre, et même avant la victoire »

« Le 16 novembre 2022, à Bruxelles, le Premier ministre ukrainien, Denys Shmyhal, et le ministre des Ressources naturelles, Ruslan Strilets, ont participé à la Semaine des matières premières en présence de Maroš Šefčovič, commissaire européen et initiateur du partenariat sur les métaux avec l’Ukraine.

Ce dernier a rappelé à cette occasion les termes du partenariat : « Il aidera l’Ukraine à intégrer l’UE, et il représente pour l’Union européenne un élément essentiel pour consolider notre approvisionnement en matières premières et notre statut géostratégique. » Le ministre de Zelinsky, Ruslan Strilets, a assuré que la réforme du Code minier était presque terminée et que le cabinet qui délivre les permis était opérationnel, « au service des investisseurs qui se présenteront après la guerre, et même avant la victoire ». Jürgen Rigterink, vice-président de la Banque européenne de développement, a précisé que celle-ci était le principal investisseur dans le pays, à hauteur de 19 milliards d’euros, des fonds grâce auxquels « l’Ukraine pourrait devenir une superpuissance des ressources ». »

 

Privatisation des mines et de l’industrie en collaboration avec l’UE et les USA et pour leurs entreprises privées

Les mines de graphite de la région de Mykolaïev, dans le sud du pays, ont été attribuées à l’entreprise australienne Volt Resources.  »

Après le passage de la Crimée sous drapeau russe après le référendum que l’occident ne reconnu pas, le géant russe DFa été dessaisi et expulsé de ses mines de titane, au même moment ou le gouvernement ukrainien interdisait l’enseignement du russe sur son territoire, la fermeture des écoles/collèges/lycées proposant des cours de langue russe, la destruction des oeuvres artistiques et statues de poètes et artistes d’origine russe..

Les autres gisements miniers du pays sont désormais exploités par l’entreprise ukraino-étasunienne Velta Resources.

Ces gisements dont ceux de zirconium sont aussi stratégiques pour les pays de l’Otan (notamment les 3 pays nucléarisés USA, France, Grande-Bretagne) qu’ils le sont pour la Russie. La dépendance des acheteurs occidentaux à ces matières premières est telle que la bourse des métaux de Londres a renoncé à interdire la vente de métaux russes.

Celia Izoard

Image en vedette : zircon
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et aussi : https://greenwashingeconomy.com/zircon-lindustrie-nucleaire-participe-au-carnage-en-afrique/