La Chine sous les restes de Merkel

La Chine sous les restes de Merkel

La Chine sous les restes de Merkel

• Notre commentateur célébré, Alexander Mercouris, n’a pas été sans remarquer la réaction particulièrement vive des Chinois dans leur publication favorite pour le baston, – ‘Global Times. • L’idée est bien celle-là : que peut-on faire avec des gens pareils, qui se choisissent une idole d’une personne dont la gloire est d’avoir trahi de bout en bout. • On irait même jusqu’à penser qu’arrivée à ce stade de la réflexion, les Chinois pourraient prendre raisonnablement des mesures extrêmes… • Qu’on y prenne garde : ils pourraient agir de façon inattendue.

Un commentaire du journal chinois ‘Global Times’ (GT), du 12 décembre, est présenté par Alexander Mercouris comme particulièrement important. Le commentateur, tout en le citant d’une façon détaché, s’attache surtout à en détailler la signification profonde après avoir noté que GT, s’il est une publication du Parti Communiste Chinois (PCC), profite d’une beaucoup plus grande liberté que les publications habituelles pour s’avancer dans l’analyse et l’hypothèse. GT dit souvent tout haut ce que les dirigeants chinois pensent tout bas.

Le titre lui-même signaler qu’il s’agit d’une retombée de plus des déclarations d’Angela Merkel sur les accords de Minsk, décidément grand événement historique (les déclarations de Merkel) :

« Les véritables intentions derrière les accords de Minsk détruit encore plus la crédibilité de l'Occident. »

Mercouris (à partir de 40’00” sur sa vidéo) s’appuie donc sur ce texte pour présenter, par référence aux informations dont il dispose, ce qui apparaît comme une révision remarquable de la position chinoise sur les relations avec la Russie, dans tous les cas sur la présentation de cette position par les Chinois eux-mêmes. Mercouris nous dit aussi que les Chinois affirment déceler souvent une erreur fondamentale que l’on fait des relations entre la Chine et la Russie. La Chine présent ainsi une position fondamentalement méfiante, sinon hostile, à l’Europe dans ses relations avec la Russie, mais dans l’Europe en général.

« C’est une interprétation fondamentalement fausse chez les Occidentaux de croire que c’est la Russie qui rechercha un rapprochement avec la Chine après la fin de la Guerre Froide, spécialement au début de l’ère Poutine. Tout au contraire, c’est la Chine qui poursuivit avec entêtement l’argument de persuader les Russes que les Européens ne sont pas les amis de la Russie, qu’ils ne le seront jamais, que les intérêts stratégiques de la Russie, au contraire, sont de construire une relation stratégique avec la Chine… »

Mercouris observe que ce point de vue, qu’on trouve exprimé dans GT, est souvent communiqué par les Chinois à leurs homologues russes d’une façon confidentielle bien entendu. L’argument est aujourd’hui puissamment étayé, et remis au  premier plan, à cause de l’affaire Merkel qui produit un effet absolument dévastateur : “Regardez, regardez comment les puissances occidentales vous traitent, le cas de la chancelière Merkel est une démonstration extrêmement convaincante.”.

Cette absence de confiance dans l’Ouest, qui paraît parfois bien plus grand en Chine qu’en Russie fait que le conseil constant des Chinois, aujourd’hui exacerbé (Merkel), est de ne faire aucune confiance aux Occidentaux. Ceux-ci sont considérés comme essentiellement sinon exclusivement opportunistes, uniquement intéressés par leurs seuls intérêts et nullement par des accords, qui établissent un équilibre de paix en donnant satisfaction à tous les partis. Et c’est dans la logique de ce constat que Mercouris arrive au point principal de l’argument développée dans cet article, – point qui laisse à penser lorsqu’on se rappelle les prudentissimes jugements que l’on portait sur la non moins prudentissime attitude de la Chine par rapport à la position des Russes lors du commencement du dans sa phase extrême, le 24 février

« Et le point principal de l’article, c’est que, dans ce conflit, les Chinois arrivent à la conclusion que la Russie est la victime et non l’agresseur. Elle a été impliquée dans un conflit qu’elle voulait éviter, et elle a été traîtreusement manœuvrée pour y être impliquée…

» Quelle puissance dans cet article pour développer une vision que, j’en suis sûr, nombre de pays hors de l’Ouest, partagent absolument ! »

Et bien entendu, Mercouris précise que cet article et ces divers constats surviennent alors que des rumeurs commencent à se répandre sur l’attitude de la Chine vis-à-vis de la Russie à propos du conflit ukrainiens ; et des murmures sur des actes clairement opérationnels qui, soudain, élargissent démesurément la champ de la guerre

« Je ne peux le confirmer, mais simplement en faire état, il y a plusieurs rumeurs selon lesquelles de nombreux avions russes font des rotations vers des aéroports chinois où ils embarquent des charges qu’on ne peut identifier … Cela peut être de la nourriture, mais cela peut être aussi des obus de 155mm… 

» Si les Chinois décident, à tel ou tel moment dans ce conflit… Je n’en ai aucune indication, aucune précision, mais si, – si les Chinois décidaient de le faire, et lançaient leurs lignes de production pour des munitions, des chars, des canons, des cruise missiles, des drones, tout ce qu’on veut, les problèmes d’équipement que les Ukrainiens ont en ce moment, que les Occidentaux ont en ce moment, deviendraient ridicules par rapport à ceux qu’ils auraient… Cela serait comparable à ce qu’il arriva durant la Seconde Guerre mondiale lorsque le flot des équipements américains se mit à se déverser sur les belligérants… »

Il faut prendre toute la mesure de la possibilité de l’évolution de ces divers sentiments et de ces événements, et de ces développements techniques et opérationnels, pour mieux avoir l’idée qui convient concernant “la trahison de Merkel” et ses conséquences possibles. Il est incontestable que les confidences de Merkel on servi de détonateur et ont ouvert un nouveau chapitre sur cette voie de, disons, “désaméricanisation” ou “désoccidentalisation” de nombreux pays hors de la sphère du bloc-BAO, que ce soit des pays du ‘Grand Sud’ ou d’autres, jusqu’alors encore hésitants à prendre trop nettement position.

C’est bien notre conviction que cette étrange affaire Merkel a tous les caractères pour devenir, constituer un événement quasiment historique, dont les causes restent toujours inconnues et du seul domaine de l’hypothèse. Fiodor Loukianov, intellectuel plutôt centriste pas loin d’être libéral dans l’élite politique russe, donc un “modéré” qui, dans certaines circonstances, a été parfois soupçonné d’être un peu trop Atlanticiste, ne cache pas une seconde sa stupéfaction au départ, notamment sur la cause de cette étrange initiative de la “confession-trahison” de Merkel

« Comment expliquer les révélations fracassantes d'Angela Merkel sur l'accord de paix en Ukraine ? Longtemps femme politique dominante en Europe occidentale, l'ex-dirigeante de la CDU prend peut-être une licence artistique pour s'adapter à l’humeur du jour… »

Car, finalement et effectivement, Loukianov trouve une explication, très clairement comme allant de soi, qui est l’urgent besoin de conformisme, de conformité qui s’est emparé d’elle comme d’autres, pour complaire à la narrative dominante, comme si une sorte de terrible Lucifer avait discrètement toussoté et rappelé qu’il s’agissait de la fin de la récréation. Il est tout à fait concevable que notre monde, ses dirigeants essentiellement, fonctionnent actuellement de cette façon, comme des mécaniques qu’on remonte pour qu’elles reprennent le rythme convenable… Fort bien, tut cela, pour terminer par ces remarques : “Que faire alors ? Il n’y a plus rien à faire…”

« La raison pour laquelle Angela Merkel tient maintenant de tels propos est claire. Dans le cadre de référence occidental actuel, la diplomatie avec Poutine, même rétrospectivement et avec des intentions apparemment bonnes, est considérée comme une collusion criminelle. Frank-Walter Steinmeier, qui depuis l'époque de la chancellerie de Gerhard Schröder avait beaucoup investi dans le “rapprochement [avec la Russie] par la dépendance mutuelle", s'est simplement excusé : il a dit qu'il avait tort et qu'il était désolé.

» Merkel, elle, cherche des excuses rationnelles, ou plutôt les invente, en remodelant la situation d'alors pour l'adapter à celle d'aujourd'hui. Mais elle le fait d'une manière qui soutient en fait ce que Poutine a souligné : Comment pouvons-nous négocier alors ? Mais cela ne présente déjà plus aucun intérêt pour personne.

» Les accords de Minsk appartiennent au passé car ils ont mis fin à une phase du conflit, alors qu'une autre, qualitativement différente, fait rage. Il est très difficile d'imaginer qu'elle se terminera par quelque chose de similaire aux négociations de 2014-2015. En effet, jusqu'à présent, ce que l'on entend même lorsqu'il est question de négociations n’a aucune espèce de signification. Négocier sur quoi ? Toutes les parties dans la guerre l'ont déjà déclarée existentielle, – alors quels compromis peut-on faire ? »

Nous laisserons là pour aujourd’hui ce carnet de doléances concernant cette catastrophique intervention d’une dame qui fut, pour toute la bonne société des élitesSystème, le parangon (ou la parangonne, pourquoi pas ?) de la vertu politique. L’influence de cette catastrophe se fera sentir par la voie de l’inconscient, sur le fondement même de l’équilibre du système du bloc-BAO qui perd ainsi sa principale régulatrice, son poids de ralliement.

Note de PhG-Bis : « J’ai demandé son sentiment à PhG. Il a haussé les épaules et a tourné les talons en hochant la tête. “Le Stasi, avec l’aide des forces cachées, n’oublie jamais de régler ses comptes”, marmonna-t-il sur un ton énigmatique. »

 

Mis en ligne le 15 décembre 2022 à 16H45

Source: Lire l'article complet de Dedefensa.org

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« La crisologie de notre temps » • Nous estimons que la situation de la politique générale et des relations internationales, autant que celle des psychologies et des esprits, est devenue entièrement crisique. • La “crise” est aujourd’hui substance et essence même du monde, et c’est elle qui doit constituer l’objet de notre attention constante, de notre analyse et de notre intuition. • Dans l’esprit de la chose, elle doit figurer avec le nom du site, comme devise pour donner tout son sens à ce nom.

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