Par The Saker – Le 29 novembre 2022 – Source The Saker’s Blog
Vous vous souvenez de l’invasion américaine de la Grenade en 1983, appelée « Opération Urgent Fury » ?
Tout a commencé le 23 octobre 1983 lorsque deux camions piégés ont fait exploser les bâtiments abritant la « Force multinationale américaine et française au Liban« . Cette attaque a fait 307 morts dont 241 militaires américains et 58 français. Après les attentats, les diplomates américains se sont livrés à leur habituelle frénésie d’agitation de drapeaux et de promesses de ne jamais céder au terrorisme. Le plus gros problème pour les États-Unis est qu’ils n’avaient aucun moyen de riposter d’une manière qui puisse satisfaire le désir de sang des agitateurs de drapeaux. Faire exploser des bâtiments au hasard au Liban n’a eu que très peu d’impact, quant aux promesses de rester aussi longtemps que nécessaire, il s’agissait de relations publiques évidentes. Il était clair pour tout le monde que le moment de faire ses bagages et de partir était venu.
Bien sûr, c’était très humiliant pour la prétendue « nation indispensable » et la « ville sur la colline« . Alors Reagan, avec son indéniable génie des relations publiques et de l’illusion d’optique, a ordonné l’invasion de la Grenade deux jours seulement après les bombardements de Beyrouth.
Pourquoi la Grenade ?
Eh bien, d’abord, elle était à peine défendue (principalement par des ingénieurs cubains et des habitants locaux munis d’armes légères) et vraiment minuscule (si minuscule, en fait, que l’écrasante majorité des Américains n’avaient aucune idée de l’endroit où elle se trouvait ni de la raison pour laquelle il y avait soudainement un besoin urgent de l’envahir.
Deuxièmement, elle était très proche des États-Unis, de sorte que tout le monde pouvait avoir une part du gâteau, dont les 1er et 2e bataillons du 75e régiment de Rangers de l’armée américaine, la 82e division aéroportée et la force de déploiement rapide de l’armée, les Marines américains, la Delta Force de l’armée, les Navy SEALs et des forces auxiliaires, un total de 7 600 hommes. En termes de matériel, les États-Unis ont amené 7 300 soldats, 4 chars, 1 LHA (USS Saipan LHA-2), 1 porte-avions, 3 destroyers, 2 frégates, 1 navire de munitions et même 27 F-14A Tomcats (source).
Tout cela contre quelques centaines d’ouvriers du bâtiment armés seulement d’armes légères !
Je ne vais pas entrer dans tous les détails ici, mais disons simplement que cette invasion a été l’une des opérations les plus mauvaises et les plus mal exécutées de l’histoire de la guerre : une force américaine vraiment ÉNORME a été amenée à frapper une petite nation insulaire fondamentalement sans défense dans le seul but d’atténuer l’effet du désastre au Liban. Mais ne vous inquiétez pas, le Pentagone a distribué plus de médailles que le nombre de participants, tandis que certaines forces spéciales américaines qui voulaient porter plainte pour lâcheté contre les pilotes d’hélicoptères (qui avaient abandonné les forces spéciales sur une piste en raison de tirs d’armes légères) ont été « conseillées » d’abandonner une telle idée.
En résumé, après le désastre épique de Beyrouth, les États-Unis voulaient une guerre rapide et facile pour restaurer le « prestige » des forces armées américaines, pour finalement aboutir à un autre désastre épique, mais au moins dans le cas de la Grenade, il était tout simplement impossible d’échouer, quelle que soit l’ineptie et l’incompétence de l’invasion.
Avance rapide de 40 ans pour examiner la situation actuelle.
Tout d’abord, il y a eu l’échec lamentable des États-Unis en Afghanistan, mais aussi en Irak, en Syrie, au Liban, en Libye et en Arabie Saoudite. Ensuite, il y a l’humiliant bombardement iranien des bases du CENTCOM que « ces couleurs qui ne fuient pas » ont dû subir sans pouvoir rien faire pour sauver la face. Ils ont quand même dû fuir
Et maintenant, un désastre se prépare en Ukraine, qui fera passer même la chute de Kaboul pour un grand succès en comparaison de l’écrasement complet de tous les efforts de l’OTAN par la Russie (rappel : il a fallu à la Russie moins d’un mois pour détruire la première version de l’armée « ukrainienne » et six mois de plus pour immobiliser les forces de l’OTAN).
Maintenant, essayez d’imaginer que vous êtes un néocon plein de haine assis à la Maison Blanche et que vous cherchez désespérément à améliorer l’image de l’administration Brandon.
Ne serait-il pas agréable de trouver une autre « Grenade » quelque part ?
De même, ne serait-il pas bon d’effacer le sourire de Poutine ?
Mieux encore, pourquoi ne pas rendre Poutine vraiment impopulaire en Russie en le faisant passer pour un faible, un indécis ou peut-être même un agent de l’Occident ?
Je pense que les États-Unis en ont plus ou moins fini avec le Moyen-Orient. Le Venezuela est une option, mais sans stratégie de sortie imaginable, ce serait le proverbial « entrée facile mais pas de sortie » que les États-Unis ont déjà expérimenté en Afghanistan et en Irak et qui pourrait, potentiellement, s’étendre à la Colombie.
Je me souviens que lors du bombardement vicieux du peuple serbe par les États-Unis, l’OTAN et l’UE, Strobe Talbott n’a pas caché que cette « exécution de la Serbie » était un « message » envoyé à la Russie : voyez ce que nous pouvons faire à votre allié ? si vous ne vous comportez pas bien, vous serez le prochain sur la liste.
Après Kaboul, les menaces contre la Russie ont l’air comique. Mais qu’en serait-il de la Serbie ?
Voici donc les raisons pour lesquelles la Serbie pourrait être attaquée (à nouveau) :
- Comme Grenade, la Serbie est complètement encerclée par l’Hégémon.
- Les Serbes (et je parle du peuple, pas de ses dirigeants) sont probablement les personnes les plus pro-russes et même pro-Poutine de la planète.
- L’Hégémon peut constamment s’engager dans des provocations (disons en Bosnie ou au Kosovo) pour humilier le peuple serbe encore et encore et le pousser à agir et ensuite obtenir un prétexte pour frapper (Par exemple, Ursula von der Leyen a déjà fait des menaces directes contre la Serbie).
- Si l’armée serbe est beaucoup plus compétente que les minuscules forces de sécurité de la Grenade, elle n’est tout simplement pas à la hauteur de l’OTAN, surtout si, comme la dernière fois, l’Hégémon choisit d’utiliser des missiles et des bombes sans mettre de « bottes sur le terrain« .
- En Russie, les Serbes sont souvent perçus comme les seuls véritables amis de la Russie.
- La Russie n’a toujours pas les moyens de protéger la Serbie, même si cela pourrait changer à l’avenir (nous y reviendrons plus loin), il est donc temps d’agir.
- La Serbie est un pays orthodoxe et la nation serbe est composée de ceux que ni les Latins ni les Ottomans n’ont pu forcer à se convertir au christianisme latin ou à l’islam. Rien que pour cela, ils sont détestés par les élites dirigeantes occidentales (sans parler des Croates et des Musulmans bosniaques).
- Bien que cela soit rarement admis en Occident, en dépit d’une corrélation des forces absolument terrible, les Serbes ont pratiquement fait match nul avec les États-Unis et l’OTAN en Bosnie et ils ne veulent toujours pas abandonner le Kosovo (je parle ici du peuple, pas des politiciens serbes).
Il existe de nombreuses autres raisons que je pourrais énumérer, mais je pense que l’image est claire.
Je voudrais également noter que je ne vois pas les États-Unis et l’OTAN envahir la Serbie, ce serait bien trop compliqué et cela nécessiterait encore plus de forces US/OTAN que celles actuellement déployées en Europe.
En outre, la 5e colonne en Serbie et au Monténégro est si puissante qu’il n’y a absolument aucun besoin d’envahir l’une ou l’autre de ces deux supposées nations (elles ne font qu’une en réalité, bien sûr !).
Au lieu de cela, ce que je considère comme le plus grand risque est que les États-Unis décident de faire avec la Serbie ce que l’entité sioniste (alias « Israël ») fait en Syrie : J’appelle cela des « frappes psychothérapeutiques« .
Les frappes psychothérapeutiques ne sont pas conçues pour obtenir un succès militaire tangible. Les Israéliens bombardent la Syrie depuis des années maintenant et toutes ces frappes ont eu exactement zéro impact militaire : les autorités syriennes, soutenues par la Russie, l’Iran et le Hezbollah, gardent fermement le contrôle de la situation. Mais cela permet aux suprémacistes juifs de se sentir bien dans leur supériorité raciale putative et cela nourrit leurs illusions sur le fait que leur armée est plus redoutable que jamais (bon sang, ils ont même des F-35 ! qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?).
Et voici le facteur clé à prendre en compte : tout comme on ne dit jamais aux Israéliens que leurs frappes contre la Syrie sont, au mieux, inutiles, la machine de propagande américaine a caché au peuple américain l’ampleur de la défaite américaine à Grenade. Hollywood a même veillé à vendre la version héroïque de cette honteuse invasion
En d’autres termes, si les États-Unis et l’OTAN devaient frapper la Serbie, ils n’auraient pas besoin d’obtenir un résultat militaire tangible. Une telle frappe ne servirait qu’à des fins de relations publiques et comme moyen de détourner l’attention du public du désastre en Ukraine.
Ensuite, il y a l’argument selon lequel le temps est compté pour l’Empire anglo-sioniste : dès que l’OTAN sera vaincu en Ukraine, vous pouvez vous attendre à une crise politique majeure pour l’OTAN et l’UE et le tristement célèbre « Camp Bondsteel » au Kosovo sera menacé (si cela vous intéresse, vous pouvez consulter mon article « Le Kosovo sera libéré » que j’ai écrit en 2017). Au moment où l’OTAN sera à court de matériel militaire et où toute l’UE sera plongée dans une crise économique et politique massive, la Russie aura les moyens d’apporter un soutien très réel à la Serbie (en supposant que d’ici là, la Serbie soit dirigée par de vrais souverainistes).
Il est évident que les projets de l’OTAN d’envahir la Crimée l’année prochaine devront être mis au placard et rapidement oubliés. Idem pour « l’Opération tempête » prévue, mais cette fois contre le Donbass (ne me croyez pas sur parole, voyez ici). Ces navires ont pris le large.
Note de l’auteur
Le fait que les nazis ukrainiens aient été tellement inspirés par les nazis croates n’est, bien sûr, pas une coïncidence. Les deux nations sont une création du Vatican et suivent l’idéologie commune à Pavelic et Bandera et, d’ailleurs, à Pilsudski, Franco ou Mussolini.
Assisterons-nous donc à une nouvelle « Grenade » contre le peuple serbe ? Si l’on entend par là une invasion à grande échelle, alors non. Mais des « frappes psychothérapeutiques » de type israélien constituent un risque très réel en Bosnie et en Serbie (y compris, bien sûr, au Kosovo).
Je dirais que tant que l’OTAN et l’UE existeront, le peuple serbe vivra avec un pistolet sur la tempe. En fait, AUCUNE nation véritablement souveraine sur notre planète n’est en sécurité tant que l’OTAN et l’Empire anglo-sioniste n’auront pas été mis hors d’état de nuire. Une fois l’Europe occidentale dénazifiée et démilitarisée, ainsi que tout ce qui reste du Banderastan, la paix et la sécurité (qui est toujours collective !) reviendront en Europe et en Serbie. Et alors la Bosnie et le Kosovo seront libérés.
Andrei
Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone
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Source : Lire l'article complet par Le Saker Francophone
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