En général, quand une politique est claire, le peuple sait à peu près où vont son ou ses dirigeants. Avec Macron, on navigue à vue, parfois même sans vue, et on se cogne partout. Ne parlons même pas de vision : si notre président a tendu la main à Poutine en l’invitant à Versailles en grand chef d’État en 2017, aujourd’hui, il n’a d’yeux que pour Zelensky, qui est un clown, et un clown dangereux. Alors, théâtre ou realpolitik ?
Pourtant, si le monde entier n’a pas sombré dans la soumission à l’Empire depuis bientôt 10 ans, c’est moitié grâce à Poutine, moitié grâce à Xi. Affaiblir la Russie et désigner la Chine comme notre futur grand ennemi (l’ennemi actuel étant la Russie), c’est signer un chèque en blanc à une Amérique affaiblie, malade, fracturée, qui n’en est que plus dangereuse.
Visiblement, Macron n’a pas résisté aux faucons du quai d’Orsay ou aux pressions américaines, ce qui revient au même. Notre doctrine militaire, auparavant fondée sur l’indépendance, est désormais dépendante de l’OTAN, donc des États-Unis. La seule marge de manœuvre qui nous reste se trouve sur notre dernier terrain africain, une peau de chagrin d’où les Français se font chasser, et à raison, tant notre politique a été irrationnelle de ce point de vue. Les Russes et les Américains prennent les anciennes places fortes françaises, et les milliers de militaires sont désormais recyclés en Europe de l’est – voir le ridicule épisode roumain.
Quant à nos alliés européens, ils se sont bien gardés de nous soutenir dans cet effort néocolonialiste ! On a été abandonnés en rase campagne. Maintenant, l’Allemagne fait cavalier seul, et l’Italie durcit sa politique migratoire. La France se retrouve sans alliés (l’Europe de l’est, la Pologne en premier, s’est placée sous le giron américain), et l’Europe implose.
Chaque jour ou presque, un général vient nous expliquer la nouvelle doctrine, en vérité, une soumission honteuse aux intérêts de l’Empire. La fin de Barkhane, et son échec relatif, tiennent surtout à l’anarchie provoquée par l’opération anti-Kadhafi en 2011, un désastre sarkozien voulu par la France avec l’appui anglo-américain. Dix ans plus tard, les Anglo-Américains sont toujours là, et les Français sont chassés du Sahel. Karma…
Guerre franco-russe au Mali ?
« Il n’y a aucune raison de partir, le travail n’est pas fini… On ne voit pas bien qui d’autre peut tenir, si on ne parle pas de Wagner, autre sujet, si vous voulez, mais aucune autre puissance n’a pris la décision de soutenir les pays africains comme nous l’avons fait contre le djihadisme, contre l’extrémisme, il faut quand même s’en rappeler. Évidemment aujourd’hui c’est cruel ce qu’il se passe au Mali parce que il faut se souvenir qu’on a libéré le pays, en tout cas, on l’a sauvé de l’extrémisme en 2013, bon voilà, c’est l’histoire, il faut faire avec…
Je pense qu’on ne va pas quitter l’Afrique comme ça, il y a une lutte d’influence c’est clair, les Russes y sont, pour des raisons qui sont pas humanitaires très clairement, capter les ressources et déstabiliser ces pays. »
Sur l’autre terrain d’opposition franco-russe, à savoir l’Ukraine, un autre général intervient, cette fois-ci sur France Inter. On se croirait revenus aux grandes heures médiatiques de la coalition anti-irakienne en 1991, quand les généraux remplaçaient les journalistes… qui leur léchaient les pompes. Si nous ne sommes pas officiellement en guerre, nous sommes objectivement dans un état de guerre.
Malgré ces deux confrontations indirectes entre la France et la Russie, Macron tente toujours de proposer la paix. Il a invité au Forum de Paris des dirigeants dits du Sud (les pauvres, quoi), dont voici l’une des interventions, assez judicieuse, rapportée par Le Figaro.
Son homologue de Guinée Bissau Umaro Sissoco Embalo, qui préside actuellement la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), a lui déploré que « pour la communauté internationale, la seule chose sur l’agenda » soit « le conflit entre l’Ukraine et la Russie », alors qu’il y a de multiples guerres en Afrique. Or, « j’ai l’impression que s’il y avait un dialogue sérieux, la guerre pourrait se terminer très rapidement », a-t-il ajouté.
Il est revenu sur sa rencontre à Moscou avec Vladimir Poutine fin octobre. Selon lui, le président russe lui a dit de donner « une grande accolade » à son « frère Macron », et s’est montré prêt au dialogue. À Kiev, dans la foulée, le dirigeant de la Cédéao a rencontré le président ukrainien Volodymyr Zelensky. « J’ai dit à Zelensky “il faut que tu parles avec Poutine” », « j’ai l’impression que Poutine était sérieux », a encore expliqué Umaro Sissoco Embalo.
Macron, dans le camp occidental, est un peu tout seul à chercher une solution diplomatique au conflit, ce dont l’Ukraine ne veut pas. Pourtant, la guerre est ingagnable de leur point de vue. Les Russes, qui sont repassés de l’autre côté du Dniepr en abandonnant Kherson, tiennent la ville sous leurs canons et tiennent fermement les territoires pro-russes reconquis depuis 8 mois. Même du côté du Pentagone, l’entêtement ukrainien commence à énerver :
Ces appels à la négociation ont beaucoup agacé l’Ukraine. Récemment, le chef d’état-major américain, le général Mark Milley, a aussi dit espérer des pourparlers pour mettre fin au conflit, une victoire militaire n’étant selon lui possible ni pour Moscou ni pour Kiev.
Ce n’est pas par humanisme que le CEMA dit ça : c’est parce que le soutien américain à l’Ukraine n’est pas forcément populaire aux États-Unis, le relatif succès républicain dans les élections à mi-mandat l’a démontré.
La grande question : si toute la presse occidentale donne Poutine perdant à Kherson en particulier et dans une guerre longue contre l’Ukraine en général, les régimes occidentaux, eux, pourront-ils tenir face à la colère populaire ?
Source: Lire l'article complet de Égalité et Réconciliation