par Caitlin Johnstone.
Depuis la seconde moitié de l’année 2022, les faiseurs de l’opinion publique dominante est truffée d’articles d’opinion affirmant que les États-Unis doivent augmenter considérablement leurs dépenses militaires parce qu’une guerre mondiale est sur le point d’éclater, et ils présentent toujours les choses comme si cela était quelque chose que les États-Unis allaient subir, sans que leurs propres actions n’en soient la cause. Comme si cette guerre n’était pas le résultat direct de l’accélération continue de l’empire centralisé américain vers cet événement horrible, en refusant toutes les rampes de sortie diplomatiques possibles en raison de son incapacité à renoncer à son objectif de domination planétaire unipolaire totale.
Le dernier exemple de cette tendance est un article intitulé « Could America Win a New World War ? – What It Would Take to Defeat Both China and Russia » [L’Amérique peut-elle gagner une nouvelle guerre mondiale ? Ce qu’il faudrait pour vaincre la Chine et la Russie.] publié par Foreign Affairs, un magazine qui appartient et est géré par le suprêmement influent centre de réflexion Council on Foreign Relations.
« Les États-Unis et leurs alliés doivent prévoir comment gagner simultanément des guerres en Asie et en Europe, aussi désagréable que cette perspective puisse paraître », écrit l’auteur de l’article, Thomas G Mahnken, ajoutant que, d’une certaine manière, « les États-Unis et leurs alliés auront un avantage dans toute guerre simultanée » sur ces deux continents.
Western arms systems are among the best in the world—but to win a potential conflict against both China and Russia, the United States will also need to develop new fighting techniques, writes Thomas Mahnken.https://t.co/1xLExCQx5D
— Foreign Affairs (@ForeignAffairs) October 27, 2022
Les systèmes d’armement occidentaux sont parmi les meilleurs au monde – mais
pour remporter un conflit potentiel contre la Chine et la Russie, les États-Unis devront
également développer de nouvelles techniques de combat, écrit Thomas Mahnken.
Mais Thomas Mahnken ne prétend pas qu’une guerre mondiale contre la Russie et la Chine serait une promenade de santé ; il affirme également que pour gagner une telle guerre, les États-Unis devront – vous l’aurez deviné – augmenter radicalement leurs dépenses militaires.
« Les États-Unis ont clairement besoin d’augmenter leur capacité et leur vitesse de fabrication en matière de défense« , écrit Mahnken. « À court terme, cela implique d’ajouter des équipes aux usines existantes. À plus long terme, cela implique d’agrandir les usines et d’ouvrir de nouvelles lignes de production. Pour faire les deux, le Congrès devra agir maintenant pour allouer plus d’argent à l’augmentation de la production. »
Mais l’explosion des dépenses américaines en matière d’armement reste insuffisante, selon Mahnken, qui estime que « les États-Unis devraient travailler avec leurs alliés pour qu’ils augmentent aussi leur production militaire et la taille de leurs stocks d’armes et de munitions ».
Selon Mahnken, cette guerre mondiale pourrait être déclenchée « si la Chine lançait une opération militaire pour s’emparer de Taïwan, obligeant les États-Unis et leurs alliés à réagir », comme s’il n’y avait pas d’autres options sur la table que de se lancer dans une troisième guerre mondiale à l’ère nucléaire pour défendre une île voisine du continent chinois qui s’appelle elle-même la République de Chine. Il écrit que « Moscou, pendant ce temps, pourrait décider qu’avec les États-Unis enlisés dans le Pacifique occidental, il pourrait s’en tirer en envahissant une plus grande partie de l’Europe », démontrant le paradoxe bizarre d’une propagande occidentale digne du chat de Schrödinger disant que Poutine est toujours simultanément (A) en train de se faire détruire et humilier en Ukraine et (B) sur le point de mener une guerre chaude avec l’OTAN.
It’s crazy how many people are making entire careers out of advocating the worst thing that could possibly happen. pic.twitter.com/GfmBrNDEDg
— Caitlin Johnstone (@caitoz) October 27, 2022
C’est fou le nombre de personnes qui font carrière en prônant
la pire chose qui puisse arriver.
Encore une fois, il ne s’agit que de la dernière publication en date d’un genre de plus en plus courant dans la presse occidentale grand public.
Dans « The skeptics are wrong : The U.S. can confront both China and Russia » [Les sceptiques ont tort : les États-Unis peuvent affronter à la fois la Chine et la Russie.], Josh Rogin, du Washington Post, pointe du doigt les Démocrates qui pensent que les agressions contre la Russie devraient être prioritaires et les Républicains qui pensent que l’attention militaire et financière devrait être consacrée à la Chine, se demandant : « pourquoi pas les deux en même temps ? ».
Dans « L’armée américaine pourrait-elle combattre la Russie et la Chine en même temps ? », Robert Farley de 19FortyFive répond par l’affirmative, écrivant que « l’immense puissance de combat des forces armées américaines ne serait pas excessivement sollicitée par la nécessité de mener une guerre sur les deux théâtres » et concluant que « les États-Unis peuvent combattre la Russie et la Chine en même temps… pendant un certain temps, et avec l’aide de quelques amis ».
Dans « Les États-Unis peuvent-ils affronter la Chine, l’Iran et la Russie en même temps ? » Hal Brands, de Bloomberg, répond que ce serait très difficile et recommande une escalade en Ukraine et à Taïwan, ainsi que la vente à Israël d’un armement plus avancé pour avoir une longueur d’avance sur la Russie, la Chine et l’Iran respectivement.
Dans « International Relations Theory Suggests Great-Power War Is Coming » [La théorie des relations internationales suggère que la guerre des grandes puissances est imminente.], Matthew Kroenig, de l’Atlantic Council, écrit pour Foreign Policy qu’une épreuve de force mondiale entre démocraties et autocraties se prépare « avec les États-Unis et leurs alliés démocratiques de l’OTAN, du Japon, de la Corée du Sud et de l’Australie d’un côté et les autocraties révisionnistes de la Chine, de la Russie et de l’Iran de l’autre », et que les aspirants experts en politique étrangère devraient adapter leurs attentes en conséquence.
Quand ils ne prétendent pas que la troisième guerre mondiale est imminente et que nous devons tous nous préparer à la combattre et à la gagner, ils affirment qu’un conflit mondial est déjà à l’œuvre et que nous devons commencer à agir comme tel, comme dans l’article du New Yorker du mois dernier intitulé « Et si nous étions déjà en train de combattre la troisième guerre mondiale avec la Russie ? »
New: The skeptics are wrong: The U.S. can confront both China and Russia https://t.co/raxePmSa0T by me @PostOpinions
— Josh Rogin (@joshrogin) August 4, 2022
Nouveau : Les sceptiques ont tort : les États-Unis peuvent affronter à la fois la Chine et la Russie
Ces monstrueuses pontifications émanant des marais de la Beltway ne s’adressent pas seulement au grand public, mais aussi aux décideurs et aux stratèges du gouvernement, et cela devrait tous nous déranger que leur public soit encouragé à considérer un conflit mondial d’une horreur indicible comme une sorte de catastrophe naturelle envers laquelle les gens n’ont aucun contrôle.
Toutes les mesures devraient être prises pour éviter une guerre mondiale à l’ère nucléaire. Si cela semble être la direction vers laquelle nous nous dirigeons, la réponse n’est pas d’augmenter la production d’armes et de créer des industries entières dédiées à cette fin, la réponse est la diplomatie, la désescalade et la détente. Ces experts présentent la montée en puissance d’un monde multipolaire comme quelque chose qui doit inévitablement s’accompagner d’une explosion de violence et de souffrance humaine, alors qu’en réalité, nous n’en arriverions là qu’à la suite de décisions prises par des êtres humains, des deux côtés.
Il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi. Il n’y a pas de divinité omnipotente qui décrète d’en haut que nous devons vivre dans un monde où les gouvernements brandissent des armes de l’apocalypse et où l’humanité doit soit se soumettre à Washington, soit se résigner à une violence cataclysmique aux conséquences planétaires. Nous pourrions simplement avoir un monde où les peuples de toutes les nations s’entendent les uns avec les autres et travaillent ensemble pour le bien commun plutôt que de travailler à se dominer et à se subjuguer les uns les autres.
Comme l’a récemment déclaré Jeffrey Sachs, « la plus grande erreur du président Biden a été de dire que la plus grande lutte du monde est entre les démocraties et les autocraties. La véritable lutte du monde est de vivre ensemble et de surmonter nos crises communes de l’environnement et de l’inégalité. »
Nous pourrions avoir un monde où notre énergie et nos ressources servent à accroître la prospérité humaine et à apprendre à collaborer avec cette biosphère fragile dans laquelle nous avons évolué. Un monde où toutes nos innovations scientifiques visent à faire de cette planète un meilleur endroit pour vivre, au lieu de les canaliser pour s’enrichir et trouver de nouvelles façons d’exploser les corps humains. Où nos anciens modèles de compétition et d’exploitation cèdent la place à des systèmes de collaboration et de soins. Où la pauvreté, le labeur et la misère passent progressivement du statut de normes acceptées de l’existence humaine à celui d’archives historiques vaguement remémorées.
Au lieu de cela, nous avons un monde où l’on nous martèle de plus en plus fort une propagande nous encourageant à accepter le conflit mondial comme une réalité inévitable, où les politiciens qui expriment ne serait-ce que le plus léger soutien à la diplomatie sont rabroués et diabolisés jusqu’à ce qu’ils s’inclinent devant les dieux de la guerre, où la politique de la corde raide nucléaire est présentée comme une sécurité et la désescalade comme une mise en danger imprudente.
Nous n’avons pas à nous soumettre à cela. Nous ne sommes pas obligés de continuer à marcher vers la dystopie et l’apocalypse au rythme des sociopathes manipulateurs. Nous sommes beaucoup plus nombreux qu’eux, et les enjeux sont beaucoup plus importants pour nous que pour eux.
Nous pouvons avoir un monde sain. Nous devons juste le vouloir assez fort. S’ils travaillent dur pour obtenir notre consentement c’est que, en fin de compte, ils en ont absolument besoin.
source : Caitlin Johnstone
traduction Wayan, relu par Hervé, pour Le Saker Francophone
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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