Confinements, inégalités et psychologie des foules pendant la crise du Covid-19

Confinements, inégalités et psychologie des foules pendant la crise du Covid-19

Le 25/10/2022 par Laurent Mucchielli

Une série de mesures de restriction de la vie sociale ont été adoptées dans le monde entier de 2020à 2022 pour tenter d’empêcher la propagation du SRAS-CoV-2. Cependant, il est devenu de plus en plus clair que les stratégies les plus agressives (confinements et fermetures) pouvaient impliquer des effets secondaires négatifs tels qu’une forte augmentation de la pauvreté, de la faim et des inégalités. Plusieurs répercussions économiques, éducatives et sanitaires ont touché de manière disproportionnée les enfants, les étudiants, les jeunes travailleurs et surtout les groupes présentant des inégalités préexistantes comme les familles à faible revenu, les minorités ethniques et les femmes. Cela a conduit à un cercle vicieux d’inégalités croissantes et de problèmes de santé

Par Michaéla SCHIPPERS (Université Erasmus de Rotterdam, Pays-Bas), John IOANNIDIS (Université de Stanford, États-Unis) et Ari JOFFE (Stollery Children’s Hospital et Université de l’Alberta, Canada).

Ce texte constitue la traduction d’un article paru dans Frontiers in Public Health le 25 août 2022 sous le titre « Aggressive measures, rising inequalities, and mass formation during the COVID-19 crisis: An overview and proposed way forward ». Afin de ne pas alourdir le texte déjà long, j’ai choisi de séparer la bibliographie (403 références) qui peut être téléchargée ici, de même que les trois tableaux qui peuvent être téléchargés ici.

La traduction a été réalisée avec l’accord des auteurs par Jean-Dominique Michel, anthropologue de la santé et expert en santé publique, au titre de la licence Creative Commons. Les surlignages et mises en italique dans le corps du texte sont des précisions du traducteur. Les tournures de phrase (et souvent même de pensée) diffèrent d’une langue à une autre. Les termes relevant de la santé publique ont été traduits selon leurs correspondance usuelles en français. Seul le terme de « lock-down » a posé problème, ce vocable ayant été adopté métaphoriquement au cours la crise sanitaire pour décrire certaines NPI, mais encore une philosophie de restrictions et de fermetures au sein de la société. Le traducteur s’est donc laissé la liberté de le traduire selon le contexte et le sens propre de chaque phrase, employant par exemple les mots ou expressions « confinement », « fermeture », « verrouillage » ou « mesures de restrictions » dans l’intention de rendre au mieux la pensée des auteurs. En cas de doute, il convient de se référer à l’article original en Anglais.

Conflit d’intérêts : les auteurs déclarent que la recherche a été menée en l’absence de toute relation commerciale ou financière qui pourrait être interprétée comme un conflit d’intérêts potentiel.

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Résumé : Une série de mesures de restriction agressives ont été adoptées dans le monde entier en 2020-2022 pour tenter d’empêcher la propagation du SRAS-CoV-2. Cependant, il est devenu de plus en plus clair que les stratégies les plus agressives (confinements et fermetures) pouvaient impliquer des effets secondaires négatifs tels qu’une forte augmentation de la pauvreté, de la faim et des inégalités. Plusieurs répercussions économiques, éducatives et sanitaires ont touché de manière disproportionnée les enfants, les étudiants, les jeunes travailleurs et surtout les groupes présentant des inégalités préexistantes comme les familles à faible revenu, les minorités ethniques et les femmes. Cela a conduit à un cercle vicieux d’inégalités croissantes et de problèmes de santé. Par exemple, la sécurité éducative et financière a diminué parallèlement à la hausse du chômage et à la perte de sens à la vie (life-purpose). La violence domestique a augmenté du fait que des familles dysfonctionnelles ont été forcées à passer plus de temps ensemble. Dans le présente revue descriptive et d’examen de portée (narrative and scoping review), nous décrivons les macro-dynamiques qui se produisent en conséquence des politiques de santé publique agressives et des tactiques psychologiques visant à influencer le comportement du public, comme la formation de masse et le comportement des foules. Couplés à l’effet des inégalités, nous décrivons comment ces facteurs peuvent interagir et conduire à une aggravation par effet de diffusion (ripple effect). À la lumière des données probantes concernant leurs coûts sanitaires, économiques et sociaux, qui dépassent probablement de loin les bénéfices potentiels, les auteurs suggèrent tout d’abord que, le cas échéant, les politiques agressives de confinement soient levées et que leur réadoption à l’avenir soit évitée. Si des mesures sont nécessaires, elles doivent être non-perturbatrices. Deuxièmement, il importe d’évaluer de manière impartiale les dommages causés par les mesures agressives et de proposer des moyens d’en alléger le fardeau et les effets à long terme. Troisièmement, il convient d’évaluer les structures en place qui ont conduit à des politiques contre-productives et de chercher des moyens d’optimiser la prise de décision, par exemple en luttant contre la pensée de groupe et en augmentant le niveau de réflexivité au sein des instances décisionnelles. Enfin, un ensemble d’interventions de psychologie positive est suggéré pour contrer les dommages causés et améliorer les perspectives post-crise de l’humanité.

Introduction

Historiquement, les crises sanitaires ont incité les gouvernements et autres autorités à agir, avec des résultats différents (1-3). Des initiatives sanitaires mondiales et locales ont été mises en place depuis longtemps [par exemple (4)]. Pour la crise du COVID-19, les gouvernements et autres autorités à travers le monde (par exemple, les agences de santé publique, les dirigeants des états et des provinces en ce qui concerne les citoyens, ou les entreprises en ce qui concerne les employés) ont adopté différentes manières de gérer la pandémie. La réponse comprenait souvent des mesures restrictives à l’échelle de la population, résumées sous le nom d’interventions non pharmaceutiques (INP). De nombreux pays ont opté pour des INP strictes et agressives à long terme (5). Toutefois, rien ne prouve que les mesures les plus agressives étaient plus efficaces que les mesures moins perturbatrices et plus ciblées [par exemple (6-8)]. Certaines mesures adoptées peuvent même avoir eu de graves conséquences négatives [pour des analyses, voir par exemple (6, 9, 10)]. En outre, les décideurs se sont trop concentrés sur un seul problème, le COVID-19, au lieu d’adopter une approche plus globale (11-13). Tout ceci combiné, cette gestion de crise a conduit à une augmentation des inégalités et en a créé de nouvelles (14, 15).

Malgré cela, de nombreux pays ont opté pour des INP strictes et agressives à long terme (5). Une revue et une méta-analyse récentes ont conclu que si les restrictions avaient peu ou pas d’effets bénéfiques sur la santé, leurs coûts économiques et sociaux étaient en revanche énormes (16). Certains scientifiques estiment que les verrouillages pourraient être « la plus grande erreur de santé publique de l’histoire » (17), s’inquiétant de leurs répercussions à long terme (10, 18). Des mesures telles que la fermeture d’entreprises et la perturbation des chaînes d’approvisionnement mondiales (19-21) ont fait payer un lourd tribut à l’économie globale comme à la santé physique et mentale (10, 22, 23). Dès novembre 2020, la Banque mondiale a estimé que la crise COVID-19 ferait basculer 88 à 115 millions de personnes dans l’extrême pauvreté (24), et une forte augmentation de l’insécurité alimentaire dans le monde entier a conduit des centaines de millions de personnes supplémentaires à risquer de connaître la faim ou l’insécurité alimentaire (25-28). Ces conséquences macroéconomiques peuvent aggraver les problèmes de santé mentale (29, 30) et même provoquer une fragmentation de la société (31). Les conséquences négatives à long terme sur l’économie et la santé sont exacerbées par l’augmentation des inégalités (32). La répartition des richesses est devenue plus asymétrique, aggravant une crise pré-pandémique. Les 10 % les plus riches de la population mondiale possèdent 76 % de la richesse totale, tandis que les 50 % les plus pauvres ne se partagent que 2 % (33). En septembre 2021, 1 % de la population mondiale détenait 45,8 % de la richesse mondiale (34).

Des recherches antérieures ont montré que, tant dans le règne animal qu’au sein des populations humaines, des niveaux (extrêmes) d’inégalité tendent à donner lieu à une hiérarchisation et à des dynamiques de statut entraînant des résultats négatifs en matière de santé (35-39). Les études de Whitehall sur les déterminants sociaux de la santé à long terme ont révélé des taux de mortalité plus élevés chez les hommes et les femmes des catégories professionnelles inférieures (40). Jusqu’à 20 ans de différence dans l’espérance de vie ont été observés entre des pays présentant de grandes différences de statut socioéconomique au sein de la population et des pays égalitaires plus aisés (41). Certaines INP peuvent avoir un effet important sur l’augmentation des inégalités préexistantes et la création de nouvelles inégalités, ce qui constitue une menace pour la santé et réduit la longévité (15). De même, certaines interventions comportementales associées aux INP utilisées par les gouvernements pour faire respecter les règles ont également aggravé les inégalités. Parallèlement, la crise COVID-19 et les mesures prises semblent avoir offert une opportunité aux personnes aisées qui ont profité de l’accélération de la transformation de la vie quotidienne du physique au numérique [par exemple, (42)], et/ou ont profité de la crise (43). De nombreuses grandes entreprises en ont profité, tandis que de nombreuses petites entreprises se sont effondrées, accélérant les tendances préexistantes (44).

Les inégalités croissantes ont des conséquences qui dépassent la simple insécurité financière, du fait de cette dynamique de stratification extrême (45). D’un point de vue macro-dynamique, les politiques de santé agressives accompagnées de tactiques psychologiques visant à influencer le comportement de la population conduisent à la formation de masse et au comportement des foules, ainsi qu’à la disruption du comportement normal (46, 47). Le poids de l’insécurité financière et alimentaire et la détérioration de la santé mentale et physique pèsent de manière disproportionnée sur des groupes déjà défavorisés (48, 49), avec des conséquences prévisibles sur le capital social et la santé (50-52). L’insécurité générale et le traumatisme causé par l’insécurité et le caractère incontrôlable des événements contribuent également aux problèmes de santé mentale (46, 51, 53).

La présente revue narrative et d’examen de portée examine les conséquences des INP agressives sur l’augmentation des inégalités et leurs résultats négatifs pour l’humanité dans son ensemble (Figure 1).

Figure 1: Modèle théorique des conséquences des NPI sur l’accroissement des inégalités et des résultats pour l’humanité.

Mesures agressiveset psychologie des foules

Pendant la crise du COVID-19, les gouvernements ont pris l’initiative de gérer la crise en s’appuyant sur des INP. Cependant, les rapports de référence sur la gestion des pandémies de 2007 et 2019 avaient conclu, en évaluant une liste d’ INP en termes d’efficacité (54, 55), à l’absence de recherches de haute qualité à leur sujet. Dans le rapport de 2007, il est indiqué que la base scientifique d’études de haute qualité sur les INP est extrêmement réduite (54) et que les interventions explicitement non recommandées sont l’utilisation générale de masques et d’autres équipements de protection ainsi que la distanciation sociale (54). En outre, les experts interrogés dans le cadre de cette recherche ont indiqué que la limitation forcée des rassemblements ou des déplacements était problématique d’un point de vue juridique et éthique ; ils pensaient que les restrictions communautaires imposées à long terme et la quarantaine obligatoire entraîneraient l’opposition du public ainsi que des problèmes pratiques et logistiques. Il a été conclu que des mesures et des directives volontaires seraient plus acceptables et donc plus efficaces (54). Le rapport de l’OMS de 2019 parle d’étaler les cas sur une plus longue période afin de réduire la hauteur du pic de « cas », mais mentionne des INP telles que l’utilisation de masques faciaux en population générale, la fermeture des frontières, les restrictions de mouvement et la fermeture des écoles comme étant généralement inefficaces. Parmi les 18 INP mentionnées dans le rapport, seules des mesures telles que la ventilation et l’isolement des personnes malades ont été considérées comme efficaces (55). La qualité de la plupart des études du rapport a été jugée (très) faible, ce qui rend difficile la détermination des INP efficaces, et les éventuels effets nocifs n’ont pas été pondérés. En 2020, un rapport de l’OMS a été publié avec des considérations sur la manière d’assouplir les mesures. Ce rapport a également discuté de l’importance de la protection des droits de l’homme ainsi que des populations vulnérables (56). La mesure dans laquelle la prise de décision gouvernementale a été génériquement défectueuse fait encore l’objet d’un débat [par exemple (57)].

Plusieurs théories de psychologie sociale peuvent expliquer ce qui a pu mal tourner au sujet de ces interactions. Les processus de groupe et la psychologie des foules prédisent que, particulièrement en temps de crise, les gens seront enclins à s’en remettre aux gouvernements et aux autorités pour guider leur comportement (1, 3). Lorsque ces autorités répondent par des directives visant les comportements et des INP, cela peut conduire à la formation de masse et à la dynamique de foules, de la même manière que les molécules s’agrègent ou essaiment, avec le comportement collectif qui s’ensuit (47, 58, 59). Les membres de tels groupes développent souvent un haut degré de similarité émotionnelle, et les inhibitions conventionnelles y diminuent souvent (60). Face à la crise, on a demandé à des experts de conseiller les gouvernements, et ceux-ci ont eu recours à des interventions pour orienter explicitement le comportement de la population dans la direction souhaitée. Le débat s’est dans le même temps, fortement polarisé et politisé (61, 62). En effet, le comportement des gens a changé assez radicalement dans les premiers jours de la crise (63, 64), alors que des psychologues conseillaient les gouvernements sur la façon d’utiliser des tactiques psychologiques pour modifier ces comportement [par exemple, (65, 66)]. Un numéro spécial d’une revue a décrit les nombreuses facettes de la psychologie des groupes sociaux, comme son impact sur les sociétés, la connectivité sociale, les nouveaux comportements collectifs et les inégalités (67). Dans le domaine de la psychologie sociale, des explications sont proposées pour expliquer pourquoi le comportement d’une foule diffère de celui des individus qui la composent. Ces théories considèrent la foule comme une entité, au sein de laquelle la responsabilité individuelle est perdue (68). Dans une telle foule, les individus ont tendance à suivre les idées et les émotions prédominantes de la masse, dans une forme de conscience partagée, ou « esprit collectif ». Il devient alors relativement facile de violer les normes personnelles et sociales et de telles foules peuvent alors devenir destructrices (59). Cette théorie peut contribuer à expliquer la désindividuation et l’agressivité parfois observées dans les grands groupes (69). A l’intérieur de ceux-ci, les personnes dés-individuées font souvent preuve d’une plus grande sensibilité et d’une plus grande conformité aux normes spécifiques à la situation et soutiennent un modèle d’identité sociale caractérisé précisément par la désindividuation (69).

Dans la phase initiale d’une crise, les gens sont enclins à adopter un niveau d’identité superordonné (déterminé par un niveau supérieur à l’individu, en l’occurrence la collectivité) et à rechercher le soutien et les conseils des gouvernants (nationaux) (70). Les réactions fortes envers les membres du groupe qui s’écartent des nouvelles normes sont jugées légitimes par beaucoup (70, 71), bien que cela puisse également dépendre du statut des membres du groupe en question  (72), et changer à mesure que la crise progresse. Des fluctuations ou des changements dans les comportements de groupe tendent à se produire plus tard, lorsque les attentes des gens quant à un retour à la normale ne sont pas satisfaites, ou lorsqu’ils se rendent compte des inconvénients des mesures auxquelles ils ont adhéré (70). Lorsque le mécontentement augmente à travers le monde, les citoyens peuvent s’engager dans de l’activisme (73) et dans des procès contre les autorités pour ce qu’ils perçoivent comme une mauvaise gestion de la crise (74). En temps de crise, la responsabilité est souvent rejetée sur les groupes minoritaires, qui deviennent alors des boucs émissaires et sont persécutés (3). Cet effet s’ajoute au fait que les minorités et les plus pauvres portent déjà le plus gros fardeau des INP (10, 75, 76).

Tactiques psychologiques

Manipulation, propagande et contrôle des foules

Comme la population se tourne vers les autorités en temps de crise (77, 78), les gouvernants ont la responsabilité de prendre des décisions importantes et conséquentes (13). Ces dirigeants peuvent choisir d’intervenir de différentes manières. En général, et surtout au début d’une crise, les gens sont enclins à demander et à accepter un leadership fort (79, 80). Les autorités ont dû choisir entre adopter des politiques basés sur l’adhésion volontaire ou imposer des règles et des règlements contraignants pour gérer la crise (81-83). Bien que pendant une crise, les dirigeants aient tendance à faire respecter les règles imposées (84), un certain volontariat peut être la clé de la confiance dans le gouvernement (85). Il est prouvé que les mesures volontaires bénéficient d’un meilleur soutien que celles qui sont imposées (85), et que le volontariat peut compenser les inconvénients des politiques (5, 83). En général, l’engagement actif des citoyens présente de nombreux avantages (86). En outre, il semble que de nombreuses hypothèses sur lesquelles reposent les INP sont, au mieux, biaisées (10, 13, 57). Un examen de plus de 100 études sur le traitement de la crise COVID-19 a révélé que, dans l’ensemble, les effets nets des politiques étaient négatifs (87). Les études qui suggèrent des avantages substantiels au confinement présentent généralement des failles ou des limites qui remettent sérieusement en question leur validité, par exemple : leur contrefactuel est basé sur des hypothèses ténues dans les modèles prévisionnels (88), elles utilisent des modèles de séries chronologiques interrompues sans période stable à long terme avant et après l’intervention et sans contrôle des facteurs de confusion (89, 90), et/ou n’ont pas de groupe de contrôle sans intervention (c’est-à-dire ne disposent pas d’une approche dite de « double différence ») (89, 90), ainsi que d’autres défauts (16). En outre, il a été démontré que les confinements et fermetures étaient très coûteux économiquement, mais ne sauvaient probablement pas de vies (6, 91). Malgré cela, les citoyens ont généralement cru à de nombreuses allégations scientifiques non fondées au sujet du COVID-19, ce qui a conduit à un fort soutien des INP (92). D’autres options, telles que l’implication des communautés dans les réponses aux menaces collectives, auraient pu éviter une grande partie, sinon la totalité, des effets secondaires négatifs (63), et les mesures volontaires auraient pu être meilleures en termes d’éthique et de droits de l’homme (5, 93).

La manipulation des foules, ou l’utilisation de techniques de changement de comportement basées sur la psychologie des foules, pourrait avoir eu des conséquences à la fois voulues et non voulues (47). Bien que la théorie de la formation des masses ait été critiquée pour être trop générale (94), il s’agit d’une métathéorie qui semble être soutenue par des théories plus micro et intermédiaires sur la psychologie de la dynamique sociale et du comportement de groupe. Celles-ci incluent des théories telles que la cohésion groupale et le conflit intergroupe (47). Par exemple, de fortes augmentations de la menace perçue à l’égard d’un groupe étaient significativement liées à une diminution d’efficacité de la résolution de problèmes (95). Une méta-analyse étudiant 335 tailles d’effet provenant de 83 échantillons dans 31 pays a révélé que dans des conditions de normes populationnelles fortes, les associations norme-comportement sont également plus fortes (c’est-à-dire que les gens agissaient selon leurs normes), et que le niveau de collectivisme renforce ces effets de norme (96). Les gouvernements du monde entier ont fortement communiqué un niveau élevé de menace et fait appel aux normes de collectivisme, d’obéissance et de solidarité pour excuser les INP et les préjudices qui les accompagnent (10). Le fait de suramplifier les méfaits du COVID-19 conduit les citoyens à accepter davantage les changements de mode de vie (97). Si ces manipulations peuvent en théorie bénéficier à la population, les comportements prescrits ont eu des conséquences néfastes, notamment pour les groupes vulnérables (10, 13, 16, 98). Notons qu’il n’est pas nécessaire d’invoquer un totalitarisme malfaisant (99). Il peut y avoir des liens extrêmes entre les gens pour vaincre un ennemi réel ou imaginaire, dans ce cas, un virus (70). Une méta-analyse a montré qu’il existe une tendance à l’union du groupe (resserrement des rangs) associée à une tendance à se concentrer sur un groupe extérieur comme source de la menace (100). Même lorsque les menaces externes ne sont pas liées à un sous-groupe spécifique, l’hostilité, les préjugés et la discrimination sont dirigés vers les sous-groupes, ce qui entraîne des conséquences négatives entre les différents groupes (1). La déshumanisation ou « l’acte de refuser aux membres d’un groupe extérieur des attributs de type humain » [(1), p. 110] peut être un facteur de médiation entre une menace perçue et des comportements et attitudes négatifs envers ce groupe (101). Cette hypothèse est renforcée par la moralisation de la réponse à la crise COVID-19 qui a conduit les citoyens à croire qu’il vaut mieux imposer des restrictions que de ne rien faire (102). Dans le cas de la crise COVID-19, la crise économique superposée contribue à des niveaux plus élevés d’hostilité et de discrimination (ainsi que de déshumanisation) des groupes extérieurs auxquels on attribue la cause de la crise (1, 103-105). Il est intéressant de noter que ce préjugé à l’égard des groupes marginaux n’était pas apparent lorsque l’explication de la crise était attribuée à un niveau systémique, par exemple au système économique, (103). En outre, le statut du groupe visé modère cet effet : le préjugé est plus faible lorsque le statut du groupe extérieur est plus élevé (100).

La formation de masse en réaction à une menace extérieure combinée à l’extrême inégalité qui en résulte peut potentiellement être très nuisible (103, 105). Le comportement des citoyens peut malheureusement être orienté dans le sens d’un dommage sociétal. La formation de masses peut amener les gens à adopter des idées qui sont incompatibles avec leurs croyances antérieures. Par exemple, de nombreuses personnes aux idéologies prétendument progressistes ont soutenu des mesures sévères à l’encontre des personnes non vaccinées, telles que l’obligation pour ces dernières de rester en permanence confinées chez elles. Certains pensaient que les gouvernements devaient même emprisonner les personnes qui remettaient publiquement en cause les risques et les avantages des vaccins. En outre, ils pensaient également que les personnes non vaccinées devraient être équipées d’un dispositif de localisation, ou être enfermées dans des installations ou des lieux désignés jusqu’à ce qu’elles soient vaccinées (106). Ces convictions n’ont rien à voir avec l’amélioration de l’adhésion à des vaccins efficaces (un résultat qui serait tout à fait bienvenu) mais s’inscrivent dans d’autres priorités dont l’agression est le thème principal. Ce type de déshumanisation d’un grand groupe pourrait créer un tout nouveau type d’inégalité : un groupe privilégié de personnes suivant religieusement la réponse gouvernementale contre un groupe de boucs émissaires remettant en cause les politiques officielles.

Le clivage entre ces groupes peut avoir de nombreuses conséquences, depuis le refus de travailler avec un collègue qui ne se conforme pas jusqu’à l’approbation de la violation des droits fondamentaux d’un groupe spécifique, avec exclusion de la société (61). Un biais semble aller dans le sens des réponses du gouvernement : une étude utilisant un échantillon représentatif de 10 270 personnes interrogées dans 21 pays a montré que les personnes vaccinées ont une forte antipathie envers les personnes non vaccinées, 2,5 fois plus qu’une cible plus traditionnelle comme les immigrants du Moyen-Orient (61). Il est intéressant de noter que l’antipathie est plus forte dans les pays où la confiance sociale est plus élevée et où il y a moins de décès dus au COVID-19. Dans l’étude, aucun préjugé de la part des non-vaccinés envers les vaccinés n’a été détecté (61). Pourquoi des personnes courtoises et normales auraient-elles de telles convictions ? La réponse pourrait être que le fait de rediriger la faute vers un bouc émissaire peut aider les gens à retrouver un sentiment de contrôle, atténuant ainsi les sentiments d’incertitude (107). Par exemple, les participants « étaient particulièrement susceptibles d’attribuer à un ennemi l’influence sur les événements de la vie lorsque le système social plus large semblait désordonné » [(107) ; étude 3]. Les conséquences des comportements de foule comme la déshumanisation et la désignation de boucs émissaires peuvent être assez graves, et il serait conseillé de travailler à réduire les tensions entre les groupes au lieu de les alimenter. Cependant, de nombreuses réponses gouvernementales ont pu accroître ces effets au lieu de les réduire. Pour des raisons politiques, les gouvernements ont parfois choisi d’attribuer la faute à un « ennemi » quelconque tout en se présentant comme le sauveur (3, 108). Pour le grand public, en plus d’une fracture sociale et économique, ces INP et un tel cadrage du message peuvent entraîner des sentiments d’isolement social, de perte de sens de la vie, d’anxiété et d’agressivité (47).

Expérience d’isolement social, d’insignifiance, d’anxiété, de frustration et de sentiments agressifs

La crise COVID-19, comme toute crise, suscite des sentiments d’anxiété, de frustration et d’agressivité (109). La théorie dite de la sécurité sociale [selon laquelle le développement et le maintien de liens sociaux amicaux constituent un principe d’organisation fondamental du comportement humain et que les menaces à cette sécurité sociale sont une caractéristique essentielle des facteurs de stress psychologique qui augmentent le risque de maladie] prédit que la menace sociale a un impact considérable sur la santé et le comportement humains (109). L’isolement social a conduit à l’expérience de l’insignifiance, bien que le rôle des mentalités sur la situation du COVID-19 ait été important (110). Trois mentalités que les gens se sont forgées au début de la pandémie, à savoir considérer la pandémie comme une catastrophe, comme gérable, ou comme une opportunité, ont eu un impact auto-réalisateur certain sur les émotions, les comportements de santé et le bien-être (110). D’une manière générale, le niveau élevé d’importance attachée à la question de la mortalité a été lié à une frustration et à une agressivité accrues dans la société (109), et en particulier à l’agressivité envers ceux qui ont des visions du monde opposées (111). L’agression humaine fait référence à des comportements nuisibles intentionnels dirigés vers d’autres individus, et la violence est une agression qui a pour but de causer des dommages extrêmes. L’agression hostile est considérée comme une forme d’agression plutôt impulsive ou non planifiée, tandis que l’agression instrumentale est préméditée et constitue une forme proactive d’agression utilisée comme moyen pour atteindre une fin [pour une revue sur cette question, voir (112)]. Les pensées et sentiments agressifs sont probablement encore plus courants, car de nombreuses situations et interactions avec autrui peuvent donner lieu à des frustrations et à des agressions. Bien que les tendances biologiques et acquises préexistantes puissent jouer un rôle, la situation actuelle donne lieu à un pic d’agressivité, qu’il s’agisse d’agressivité verbale (par exemple, les personnes accusent certains groupes d’être responsables de la situation actuelle et pensent à voix haute à ce qui devrait arriver à ces groupes) ou d’agressivité réelle. Il existe des preuves que l’agressivité et la violence interpersonnelles ont augmenté avec les INP agressives, en particulier dans les endroits où il y a eu des fermetures et des ordres de rester à la maison (113, 114). Comme la crise s’est prolongée beaucoup plus longtemps que prévu, l’agressivité et la frustration ont pu s’accumuler, sans que les gens aient beaucoup d’occasions de se défouler, par exemple en allant en salle de sports.

La théorie du transfert d’excitation (Dolf Zillmann)peut expliquer pourquoi la colère peut se prolonger sur de plus longues périodes, et cela se produit souvent lorsque deux ou plusieurs événements excitants sont proches dans le temps (115). Lorsque les gens sont en mode de survie pendant des périodes prolongées, ils deviennent plus craintifs, méfiants, irritables et agressifs (116). Bien que le mode de survie puisse être une réponse adaptative à une menace immédiate de danger existentiel, à long terme, la surexposition aux hormones de réponse au stress nuit à la santé mentale et aux relations et entraîne même un traumatisme intergénérationnel (116, 117). Une agression déplacée dirigée alors vers une autre personne ou une cible, qui n’est pas la source de la frustration suscitée, peut également se produire. Une méta-analyse a montré que l’ampleur de l’agression déplacée était plus importante dans un contexte négatif (par exemple, la crise actuelle). En outre, si l’agresseur et sa cible étaient plus semblables l’un à l’autre, par exemple en termes de sexe, d’origine ethnique et/ou de valeurs, l’agression déplacée était plus élevée (118).

Une étude menée auprès de 2 799 étudiants chinois (119) a montré que la relation entre la peur du COVID-19 et le comportement agressif relationnel en ligne est médiée par le désengagement moral (c’est-à-dire le processus par lequel les gens se convainquent que les normes éthiques ne s’appliquent pas à eux dans un certain contexte, en recadrant leur comportement comme moralement acceptable). Une forte saillance de la mortalité peut également augmenter l’agressivité, souvent dirigée vers les autres qui menacent la vision du monde d’une personne (120). Il est à noter que la gestion de la terreur peut également conduire à une manière plus positive de faire face à la situation, en encourageant par exemple la réflexion sur le sens de la vie (111), ce qui peut être une manière plus efficace de faire face à une crise (46). Cependant, une étude menée auprès de 1 374 participants dans sept pays arabes a montré que le stress traumatique associé à un traumatisme identitaire collectif augmentait l’angoisse de mort. Celle-ci était à son tour liée à une réduction du bien-être, au syndrome de stress post-traumatique, à l’anxiété et à la dépression (45). Les auteurs parlent d’un cercle vicieux où les inégalités augmentent l’infection et la mort par le COVID-19 et où la crise du COVID-19 augmente encore les inégalités (45). Étant donné que de nombreux comportements visant à réduire la propagation du virus, comme le lavage des mains ou le masquage, peuvent être considérés comme des rituels de groupe (c’est-à-dire des actes que les gens répètent régulièrement ensemble de la même manière), symbolisant des valeurs importantes du groupe (par exemple, la santé et la sécurité), les personnes qui s’écartent de ces rituels provoquent la colère et l’indignation morale (10, 121). Les individus plus inquiets de contracter la maladie portent des jugements moraux plus sévères que les individus moins inquiets, même après contrôle de l’orientation politique (122). Par ailleurs, les personnes qui étaient très anxieuses sur le plan de la santé avant la crise pourraient être plus vulnérables à une anxiété excessive concernant le COVID-19 (123), et auraient besoin d’interventions thérapeutiques (124).

Il existe également des données montrant que la crise COVID-19 a augmenté la détresse psychologique qui pourrait être liée aux défenses proximales et distales contre les pensées liées à la mort (45). La crise a augmenté l’anxiété et la crainte pour son propre bien-être physique et celui de ses proches (125). À l’inverse, l’activité physique pourrait agir comme un tampon (126), mais les exutoires de l’anxiété tels que les cercles de sociabilité et les sports étaient inaccessibles pour beaucoup, laissant les gens vulnérables à l’expérience de niveaux encore plus élevés d’anxiété liée à la mort (45, 111). Il s’ensuit une « tempête parfaite », où le stress et l’anxiété augmentent et où les voies d’évacuation du stress sont obstruées pour beaucoup.

En outre, tous les déterminants sociaux de la santé ont été touchés ; aucun d’entre eux n’était réparti de manière égale avant même le début de la crise, mais la crise a accéléré cette répartition inégalitaire (127, 128). Selon Broadbent et Streicher (129), beaucoup de ces effets étaient prévisibles, en particulier les effets des fermetures et restrictions sur les Global Poor (les populations les plus pauvres à l’échelle du monde, NdT). Pendant la crise du COVID-19, les engagements à réduire les inégalités en matière de santé ont été perdus de vue, ou peu saillants pour les pays riches. Les coûts prévisibles sur la santé étaient importants en raison de la privation des moyens de subsistance, de l’interruption des services de santé pour d’autres pathologies et de l’interruption de l’éducation, alors que les avantages prévisibles en matière de santé étaient minimes (la réduction des contacts sociaux selon le modèle imposé était impossible en raison de la surpopulation et de la non-compliance nécessaire pour maintenir un moyen de subsistance, l’âge moyen beaucoup plus jeune de ces populations alors que les cas de COVID graves touchent surtout les personnes âgées) (129). Une grande partie de ces effets est le résultat de la réponse du gouvernement à la crise et des choix effectués à cet égard (128). Dans de nombreux pays, les décisions ont été prises unilatéralement et un récit officiel a été mis en avant et défendu (130).

Prise de décision centralisée et récit unique

La prise de décision lors d’une crise sanitaire est difficile car de nombreuses questions doivent être prises en compte simultanément alors que les données peuvent manquer ou alors être massives mais imparfaites (13, 131). La prise de décision et l’intelligence collectives sont les clés d’une prise de décision efficace (132). Cependant, on suppose parfois à tort que la prise de décision centralisée est la seule méthode qui puisse fonctionner. Un autre biais potentiel peut être qu’un petit groupe d’experts est écouté, au détriment des experts qui préconisent une voie différente (133). Une approche narrative officielle a été ici suivie (130, 134), les contre-récits étant systématiquement qualifiés de désinformation (135). Parfois, les experts en place acquièrent tellement de pouvoir qu’ils s’approprient même le rôle de l’opposition et les dissidents sont ostracisés (136-138). Les autorités ont utilisé les médias et la communication publique pour imposer leur discours (134). Les personnes et les groupes qui remettent en question ce discours sont souvent confrontés à des conséquences désastreuses, allant de l’exclusion sociale à l’arrestation et à l’agression lors de manifestations, tant dans les pays autoritaires que dans les pays démocratiques (134). Parallèlement, la question s’est posée de savoir si les mesures coercitives sont des réponses politiques souhaitables, car elles ont été considérées comme inefficaces et contre-productives dans le passé (139), entraînant une méfiance à l’égard des institutions, une aliénation et un évitement des soins (139-141). La combinaison de mesures coercitives et d’une culture d’annulation visant à préserver un récit officiel peut se retourner contre elle (139, 142). La communication publique persuasive peut conduire à l’effet ou au comportement opposé à celui escompté (143, 144).

Historiquement, le mélange d’idéologie politique et de science, lorsque l’État réglemente la science, a conduit à des résultats désastreux. Par exemple, un certain généticien soviétique favorisé par Staline a dominé la biologie et la science agricole, rejetant la génétique mendélienne. Les carrières et les vies des généticiens qui s’opposaient à lui ont été détruites, et beaucoup ont été arrêtés ou tués (145, 146). Lorsque les communistes chinois ont adopté la même approche, la famine a tué 30 millions de personnes (145). Favoriser une idéologie au détriment d’autres points de vue peut conduire à des résultats non désirés (10, 11, 13, 147), par exemple, utiliser la liberté d’expression pour supprimer la liberté d’expression (148, 149). La « culture de l’annulation » (Cancel Culture) qui en résulte peut effrayer d’autres universitaires qui seront alors prudents lorsqu’ils s’exprimeront et/ou publieront sur certains sujets (147). Une prise de décision extrêmement centralisée présente d’autres inconvénients, notamment une diminution de la démocratie, une réduction des libertés et des menaces pour les droits de l’homme (150-154). La confiance dans le gouvernement peut diminuer, et le soutien aux INP peut s’affaiblir (85). Bien que le COVID-19 soit un problème majeur, s’y attaquer ne devrait jamais être fait à l’exclusion de tous les autres problèmes auxquels nous sommes confrontés en tant qu’humanité (57). La prise de décision devrait servir à la plupart des humains, et la science peut y contribuer, mais il ne faut pas prétendre que la « science » est parfaite et sans erreur [cf. (155)]. Parallèlement, le journalisme et la science doivent éviter la propagande (154).

Contre-mouvements

Les collectifs et les contre-mouvements ont suscité davantage d’attention de la part des chercheurs ces derniers temps (156-161). Comme la distribution du pouvoir a été inégale tout au long de l’histoire et qu’il est généralement détenu par une élite minoritaire, permettre aux gens d’utiliser un pouvoir collectif est un objectif important de ces mouvements (162). Les actions intéressées (ou apparemment intéressées) de l’élite peuvent provoquer une forte diminution de la confiance dans les institutions pour certaines personnes, tandis que d’autres continuent à leur faire confiance. Avec la crise du COVID-19, la confiance dans les gouvernements et les institutions scientifiques a oscillé mais a surtout diminué (163). Les gens peuvent rejoindre les contre-mouvements parce qu’ils donnent un sens et l’opportunité de rétablir des valeurs et des croyances chères (164). De nombreux citoyens activistes ont le sentiment de contribuer à un monde meilleur de cette manière ; en particulier, la jeune génération peut être motivée par des questions morales plutôt que politiques (165). Cependant, ces groupes sont souvent confrontés à la stigmatisation et à la criminalisation, à l’affaiblissement de l’identité du groupe et à la subordination sociale institutionnalisée (165, 166).

L’efficacité des contre-mouvements

En termes de formation de masses, les contre-mouvements possibles ont reçu beaucoup moins d’attention scientifique (167, 168). De nombreuses personnes peuvent se rendre compte que la direction prise par la société ne correspond pas aux valeurs fondamentales, telles que le respect de l’humain (par exemple, la considération, l’empathie), la pensée critique et la liberté (169, 170). En effet, pendant la crise du COVID-19, on a assisté à une vague mondiale de mouvements de justice sociale qui attirent l’attention sur les effets négatifs d’une crise multidimensionnelle (134). Si la plupart de ces mouvements ont un caractère strictement non-violent, les tactiques utilisées par ces mouvements vont de la désobéissance civile et de la (stricte) non-violence à des stratégies anti-autoritaires et à l’auto-défense, voire à la guérilla (164). La question de savoir si ces mouvements sont efficaces ou non et quelles méthodes sont les plus efficaces reste un sujet de débat (160). Bien que les auteurs de cet article n’approuvent aucune violence, certains auteurs soutiennent même que la violence contre un État qui a le monopole de la violence est parfois justifiée et nécessaire (171). Cependant, des recherches historiques récentes montrent que les approches non-violentes sont beaucoup plus efficaces que les approches violentes (172). Quoi qu’il en soit, le bien-fondé de ces mouvements peut être débattu (173). Plusieurs auteurs ont affirmé que ces mouvements, à l’époque actuelle, sont mal informés et considèrent donc la montée de ces mouvements comme dangereuse (174). Cependant, il peut être trop naïf de prétendre simplement que ces mouvements sont mal informés et de qualifier de « théories du complot » toute information qui ne correspond pas aux directives officielles [par exemple (175)]. Certains contre-mouvements peuvent être fortement motivés pour être bien informés. L’efficacité peut dépendre de la capacité de ces groupes à créer un espace pour de nouvelles relations sociales, à sensibiliser l’opinion, à faire preuve de résilience, à bénéficier du soutien/de la permission de l’élite, de sorte qu’ils sont protégés de la répression policière et militaire, et à améliorer la vie des gens (164, 176). Une relation de cause à effet entre la pression sur les autorités et le changement de politique est difficile à déterminer, mais possible (157).

Des recherches historiques menées entre 1900 et 2006 et comparant l’efficacité de 323 campagnes de résistance violente et non violente ont montré que la résistance civile non violente était plus efficace pour produire un changement (177). Les campagnes violentes ont été couronnées de succès dans 26% des cas, tandis que les campagnes non violentes l’ont été dans 50% des cas. Au cours des dix dernières années de recherche, cette efficacité a été réduite à seulement 6% pour les campagnes violentes contre 34% pour les campagnes non violentes (178-180). Les pays dans lesquels des campagnes non violentes ont été menées avaient 10 fois plus de chances de devenir des démocraties dans les 5 ans suivant ces campagnes que les pays ayant mené des campagnes violentes. Il est intéressant de noter que ce résultat est indépendant de la réussite ou de l’échec de la campagne (178). L’efficacité était plus grande dans des conditions de participation importante, diverse et soutenue, lorsque le mouvement était capable de susciter des changements de loyauté parmi les élites au pouvoir (par exemple, l’armée, la police, les médias, les élites économiques), lorsque les campagnes comportaient plus que des protestations, lorsque les méthodes utilisées variaient et lorsque les campagnes ne sombraient pas dans le chaos ou n’optaient pas pour des méthodes violentes malgré la répression (178). La préparation semble cruciale pour le succès des campagnes, par exemple en Afrique du Sud, le mouvement anti-apartheid a organisé un boycott des entreprises blanches après s’être préparé pendant des mois à devenir d’abord autosuffisant (181).

Le récent déclin de l’efficacité des mouvements non violents pourrait refléter la taille plus réduite de ces campagnes, le recours à des manifestations plus symboliques de résistance et de non-coopération de masse (comme les manifestations de rue plutôt que les grèves) qui n’affaiblissent pas les sources de pouvoir de l’adversaire, et des actions non violentes moins disciplinées (182). Parfois même, une seule personne peut faire la différence (183, 184). Della Porta (185) affirme que trois types de ruptures peuvent être provoquées par les contre-mouvements, souvent de manière successive : le cracking, ou ruptures soudaines ; le vibratoire, reproduisant de manière contingente ces ruptures ; et la sédimentation, stabilisation des conséquences de la rupture. Si ces leçons historiques s’appliquent, des contre-mouvements efficaces pourraient peut-être contribuer à renverser les décisions de mise en œuvre d’INP inefficaces et nuisibles, et ainsi atténuer les effets négatifs à long terme.

Traumatisme collectif et conservation des ressources

Les mesures agressives ont un impact négatif sur la santé physique et mentale (10, 13, 186). Nous nous concentrerons ici sur le résultat du traumatisme collectif ou les « réactions psychologiques à un événement traumatique qui affecte une société entière » [(187), p. 1]. Ce traumatisme peut affecter la mémoire collective de tout un groupe et invoque souvent l’attribution de sens (sense-making) (188, 189). Le traumatisme collectif du COVID-19 peut être de grande ampleur (190). Quatre modèles mentaux semblent être associés au traumatisme collectif actuel, à savoir l’incertitude le danger, le grotesque et la misère, ainsi que quatre émotions primaires, à savoir le chagrin, le dégoût, la colère et la peur (190). Bien que les gens aient une propension à cacher leurs émotions négatives et traumatismes, l’expression des émotions peut apporter des avantages individuels et collectifs ; le partage peut atténuer la détresse émotionnelle et aider à obtenir un soutien social (191).

Un marqueur probant des difficultés collectives est la forte augmentation des taux de mortalité chez les adultes de moins de 45 ans, qui sont largement épargnés par les décès liés au COVID-19. Certains décès supplémentaires ont été causés par des comportements autodestructeurs tels que la toxicodépendance, les homicides et les accidents de la route (98).

La théorie de la conservation des ressources (COR) peut servir de prisme théorique intégratif pour comprendre comment les gens obtiennent et conservent des ressources (192-194). Les gens diffèrent dans leur capacité à obtenir des ressources tangibles (par exemple, de l’argent et des biens) et intangibles (par exemple, des relations stratégiques pour obtenir du pouvoir) (195). Selon COR, tant les individus que les groupes, et même les sociétés dans leur ensemble, s’efforcent d’obtenir et de conserver des ressources précieuses (194). Il peut y avoir un besoin évolutif d’acquérir et de conserver des ressources pour la survie (194). Le COR a été utilisé pour expliquer les résultats du stress dans divers contextes, y compris les milieux organisationnels, à la suite d’un stress traumatique et pour les facteurs de stress au quotidien (192, 196).

Hobfoll parle de « voies de passage de la caravane des ressources », ce qui signifie que les conditions écologiques déterminent souvent la mesure dans laquelle les gens peuvent créer et maintenir des ressources (194). Par exemple, les femmes subissaient déjà une perte de ressources avant la crise, mais la crise l’a exacerbée, et une spirale de perte de ressources peut compromettre les progrès vers l’égalité des sexes (197). Ou encore, les femmes travaillant principalement dans les secteurs des services, la fermeture de nombreux secteurs de ce type les a affectées de manière disproportionnée, entraînant le plus grand écart de chômage entre les sexes jamais enregistré [(198), voir également (197)]. Ceci, combiné à l’augmentation du nombre de facteurs de stress à la maison, pour accomplir plus de tâches ménagères et de soins, conduit à une augmentation du stress, à une diminution du temps de loisirs et à une augmentation de l’épuisement professionnel (197). Pendant la crise, les gens sont devenus plus conservateurs sur le plan social en ce qui concerne la conformité aux rôles et les stéréotypes sexuels, tandis que l’idéologie politique est restée constante (199). Le stress survient lorsque des ressources sont perdues. Dans les contextes occidentaux, 74 principales ressources communes sont décrites, notamment le sentiment de fierté, l’accomplissement d’un objectif, l’espoir, la santé personnelle, la nourriture, l’aide aux tâches ménagères et à la garde des enfants, et un emploi stable (192, 196). La perte simultanée d’un aussi grand nombre de ressources pendant la crise du COVID-19 a été sans précédent [cf. (46), voir la figure 2 pour une spirale descendante des ressources].

Figure 2. Spirale descendante de l’augmentation des inégalités résultant des NPI agressifs et prolongés.

Cela peut être traumatisant pour de nombreuses personnes, surtout si l’on tient compte de l’imprévisibilité de la durée et de l’intensité de la situation (200). La peur a été identifiée comme un facteur prédictif important du trouble de stress post-traumatique, souvent accompagné de pensées négatives sur soi, les autres et le monde (200). À cela s’ajoute un sentiment d’insécurité planétaire avec une perte de la sécurité personnelle et sociale (201), ce qui entraîne des symptômes psychologiques de deuil (200). De même, la perte d’emploi a été associée à des symptômes de deuil et à de perte du sens de la vie (202). Les injonctions de rester à la maison sont associées à une perte de liberté et d’autonomie ainsi qu’à la solitude (203), en particulier lorsque les mesures étaient perçues comme coercitives (204). Cela peut également conduire à la crainte que des politiques coercitives soient appliquées sur une période plus longue, voire indéfinie (139). Les troubles liés à la peur et à l’anxiété ont connu un pic depuis 2020 (22). Dans l’ensemble, des ressources matérielles et immatérielles ont été perdues pendant la crise, ce qui a nui à la santé physique et mentale (200, 205). Les personnes qui subissent une perte extrême de ressources (par exemple, perte de revenu, divorce, perte d’accès à des soins de santé appropriés et à des moyens de faire face à la situation) peuvent être la proie du principe de désespoir. Ce principe peu étudié du COR prédit que lorsque les ressources des gens sont épuisées, ils peuvent entrer dans un mode d’auto-préservation défensif dans lequel ils se comportent de manière de plus en plus agressive et apparemment irrationnelle (194, 206). Ils peuvent essayer de manière défensive de conserver les ressources restantes (192). Lorsque les gens sont soumis à un nombre accru d’événements stressants, les symptômes de dépression augmentent également (207), et la dépression grave est une cause majeure de suicide (208). Il faudra peut-être des années avant de constater un impact sur les taux de suicide. Les recherches actuelles indiquent que les taux de suicide peuvent effectivement avoir augmenté (186), parfois après une baisse initiale (209). Les personnes qui disposaient de plus de ressources avant la pandémie sont peut-être plus aptes à en gagner (200), ce qui favorise le bien-être, la santé et le fonctionnement psychologiques (210).

Les groupes disposant de moins de ressources dès le départ sont les groupes minoritaires, les jeunes, les femmes, les personnes ayant des antécédents de santé mentale et en situation d’insécurité économique (211, 212). Les préjudices induits par les INP peuvent également être exacerbés par le manque de stabilité de l’ordre social préexistant ou induit dans un pays ou une région donnés ainsi qu’en cas de problèmes de santé mentale préexistants (10, 213). Pendant la crise, les personnes souffrant de problèmes de santé mentale et physique préexistants ont signalé le plus haut niveau de détresse émotionnelle, bien que la détérioration de la santé mentale ait touché l’ensemble de la population (213). En outre, l’augmentation de la pauvreté dans des régions déjà vulnérables a aggravé la situation. D’autres événements extrêmes, tels que les émeutes et les guerres, peuvent ajouter une couche supplémentaire de dommages multiplicatifs (214).

Les personnes se trouvant dans des circonstances comparables peuvent différer dans leur degré de résilience face à ces circonstances (215), et certaines peuvent connaître une croissance post-traumatique (216). Les recherches de Yi-Feng Chen et al. (217) soulignent le rôle du profil de personnalité proactive et du soutien organisationnel pour faire face aux perturbations pendant le COVID-19.

Inégalités croissantes

Les inégalités sociales se produisent lorsque les ressources au sein de la société sont distribuées de manière inégale, comme les revenus, les biens, l’accès à l’information, etc. (218). Au cours des dernières décennies, les inégalités économiques ont augmenté dans la plupart des pays, se stabilisant dans les années 1990 (219), mais augmentant de façon spectaculaire depuis 2020, ce qui a incité certains auteurs à parler de « deuxième pandémie » (220). Si l’accent mis sur la réalisation de profits a créé de la richesse pour de grands groupes de personnes, les ressources ont été réparties de manière inégale au sein de la population globale. Il est prouvé que les inégalités économiques ont augmenté (15). Bien que cette tendance était déjà visible avant le début de la crise [pour une analyse, voir (219)], elle semble s’être accélérée après le début de la crise (221). Alors qu’au cours des 25 dernières années, 1,1 milliard de personnes sont sorties de la pauvreté grâce à la croissance économique (222), pendant la crise du COVID-19, l’extrême pauvreté mondiale a fortement augmenté ; en octobre 2021, on estimait que 100 millions de personnes supplémentaires vivaient dans la pauvreté (223). Très tôt dans la pandémie, des mises en garde ont été formulées quant au fait que les effets négatifs pourraient l’emporter sur les éventuels effets positifs (10-12, 57) et des moyens d’optimiser la prise de décision (13) et des voies alternatives ont été proposés (6, 224). Il convient de noter que d’autres auteurs ne sont pas d’accord et affirment que les INP sont proportionnées et présentent des avantages substantiels [par exemple, (225, 226)]. Il y a effectivement eu un débat important sur la question de savoir si les confinements offrent certains avantages en réduisant au moins les décès dus au COVID-19 et de nombreuses études ont tenté de répondre à cette question. En général, ces études présentent des limites étant donné qu’aucun essai randomisé n’a évalué cette question et que la modélisation ou les études observationnelles laissent des incertitudes substantielles en étant sujettes à un reporting et des interprétations sélectifs (227). Une méta-analyse a trouvé de très faibles bénéfices des confinements sur les taux de mortalité de la COVID-19 (16), et les analyses coûts-bénéfices montrent que les coûts des confinements (y compris ce que nous avons décrit ci-dessus) dépassent de loin tout bénéfice potentiel qui pourrait se produire (6, 228). Le débat et les désaccords vont probablement se poursuivre, étant donné que les évaluations des avantages relatifs du confinement reposent en grande partie sur des données d’observation faibles dans des circonstances très complexes.

Les inégalités ont plusieurs conséquences sur la santé, le bien-être et le bonheur, ainsi que sur la longévité (218, 229). Les pays qui laissent les inégalités augmenter ont des taux de bonheur plus faibles que les pays où l’égalité est plus élevée (230, 231). Le bien-être de la population, composé de la santé physique, émotionnelle et sociale, explique la variation de l’espérance de vie. Les communautés à haut niveau de bien-être se caractérisent par l’adoption de comportements sains, des liens sociaux et des systèmes de soutien solides (229), avec des personnes heureuses qui vivent plus longtemps (232), même si les mécanismes de causalité peuvent être débattus. Plusieurs méta-analyses ont montré une association favorable entre le bien-être psychologique et la survie (233), et le bien-être est un médiateur partiel des associations entre l‘origine ethnique, la pauvreté, l’éducation et l’espérance de vie (229). Il est important de noter que la satisfaction dans la vie et l’optimisme quant à l’avenir, l’accès au logement, aux soins de santé et la perception de la sécurité sont également associés de manière significative à l’espérance de vie (229). Les mauvaises conditions de logement ont été liées à un plus grand stress et à une réduction du bien-être pendant la crise du COVID-19 (234). Comme le bien-être psychologique est affecté à la fois directement et indirectement par la pandémie et les INP (par exemple perdre son emploi et son logement, divorcer à cause de ce qui précède, ou être en quarantaine pendant des mois), cela peut conduire à davantage d’inégalités en termes de revenus, mais aussi de bien-être (46, 235). La santé et le bien-être en général ont baissé pendant la crise [pour une revue, voir (236)], en particulier pour les groupes vulnérables et les pays défavorisés (237, 238). Ci-dessous, nous examinons tout d’abord les différentes inégalités affectées par la pandémie et les INP adoptées. Il convient de souligner qu’il est souvent difficile de distinguer la part de ces effets due à la pandémie de celle qui est due aux mesures prises. Parfois, l’interaction entre la pandémie et les mesures prises peut avoir eu des effets négatifs multiplicatifs. Nous discutons ensuite des options qui pourraient contribuer à inverser cette tendance. Dans le tableau 1 nous donnons un aperçu non exhaustif de la littérature et des résultats de recherche relatifs aux inégalités durant la crise du COVID-19.

Populations vulnérables

Nombre d’autorités réagissant à la pandémie ont souvent déclaré que leur but était de protéger les personnes vulnérables. Cependant, plusieurs mesures adoptées semblent avoir particulièrement nui à ce groupe au lieu de l’aider. Plusieurs mesures ont perturbé et contracté les réseaux de sociabilité des personnes âgées pendant la crise. Les disparités raciales/ethniques prépandémiques en matière de réseaux ont été exacerbées, avec des conséquences négatives sur les résultats de ces groupes en matière de santé physique et mentale (211). Les réseaux étant importants non seulement dans la vie quotidienne, mais surtout en temps de crise, la distanciation sociale a limité la capacité à surmonter la crise, en particulier pour les populations vulnérables (211). De nombreux pays ont choisi de placer les personnes âgées vulnérables dans un isolement complet. Cet isolement social et physique forcé est un facteur de stress important (313). La résilience a pu être encore plus compromise (314, 315), créant des effets paradoxaux (10). Les soins de santé réguliers et de routine pour les maladies non-COVID-19 ont été perturbés, ce qui constitue une menace pour les résultats sanitaires de nombreuses maladies (243, 292). Les conséquences à long terme de la négligence relative du système de santé publique, et du fait que les gens hésitaient à consulter leur médecin pour les problèmes non-COVID-19 (279, 316-319), restent insondables. Par exemple, on a estimé à l’origine qu’environ 28,5 millions d’opérations dans le monde ont été reportées pendant les 12 semaines du pic initial de la crise (320). Une fois de plus, les populations vulnérables ont été les plus durement touchées, ce qui a accru les inégalités préexistantes (321).

Inégalités économiques : les riches s’enrichissent et les pauvres s’appauvrissent

L’inégalité économique s’est considérablement accrue, exacerbant les inégalités préexistantes, et cela semble être un processus auto-renforcé, car des mesures de verrouillage continuent ou sont encore imposées (15, 49, 322-324). Des centaines de millions de personnes ont été plongées dans la pauvreté, tandis que d’autres, individus et entreprises, en ont profité (325). Cela a conduit à la situation paradoxale suivante : dans certains pays, les gens étaient plus inquiets de mourir de faim que de tomber malade à cause du COVID-19 (49). Près de 4 milliards de personnes, soit la moitié de la population mondiale, vivent avec <6,70 dollars par jour. Une étude menée sur quatre continents a montré que les INP restrictives sont particulièrement dures pour les pauvres car elles ont un impact inégal sur les moyens de subsistance et les activités socio-économiques de ce groupe (326). Un rapport de la Banque mondiale a conclu : « Pris dans leur ensemble, les COVID-19 ont directement neutralisé la réduction de l’écart [de pauvreté] entre les pays observée entre 2013 et 2017 » (324). La perte de revenu a été la plus forte pour les 20 % les plus pauvres du monde, ce qui a entraîné l’impact le plus important de la crise COVID-19 sur cette catégorie, faisant passer le taux de pauvreté mondial de 7,8 à 9,1 % à la fin de 2021 (327). Les effets sur l’inégalité et la mobilité sociale devraient se produire à long terme : les personnes qui ont perdu des revenus à cause de la pandémie ont été environ deux fois plus susceptibles de dépenser leurs actifs ou leurs économies. Elles seront donc moins à même de faire face à une perte de revenus continue ou récurrente. En outre, 57 % des personnes ayant perdu leurs revenus à cause de la pandémie ont été plus susceptibles de passer une journée entière sans manger, et la perte globale de 0,3 à 0,9 année de scolarité a également eu un impact plus important sur les familles les plus pauvres et leurs perspectives économiques. Les interventions des pouvoirs publics, au moyen de l’assurance chômage et des allocations aux travailleurs licenciés, du moins à court terme, atténuent partiellement l’effet de la perte des moyens de subsistance (14). En Espagne, on estime que sans ces interventions, les inégalités auraient augmenté de près de 30% en un mois seulement (14, 223). Cependant, les jeunes et les travailleurs nés à l’étranger profitent moins de ces interventions et subissent une perte importante d’objectifs de vie (46, 328, 329).

Inégalités éducatives

Au début de la pandémie, les fermetures d’écoles ont été généralisées. En mars 2020, les écoles ont fermé dans 138 pays, touchant 80 % des élèves dans le monde (214). Et ce, malgré un débat scientifique animé concernant l’efficacité de ces fermetures sur la transmission du virus. Sans réponse claire sur l’efficacité des fermetures d’écoles, l’éducation des élèves a souffert et le « dommage peut durer toute une vie » [(330) ; pour une revue, voir (10, 214)]. Dès avril 2020, il a été déclaré que les fermetures d’écoles affecteraient davantage les enfants les plus pauvres, car elles ont également exacerbé l’insécurité alimentaire et les facteurs extra-scolaires (par exemple, la disponibilité des parents pour l’aide et la supervision, l’accès à Internet et la disponibilité de la technologie, les espaces calmes, etc.) qui sont la principale source d’inégalités dans les résultats scolaires (214). Même si de nombreuses écoles sont passées à l’enseignement en ligne, cela n’a pas été d’une grande utilité comme substitut. Une étude menée aux Pays-Bas auprès de 350 000 élèves a montré que les élèves faisaient peu ou pas de progrès pendant la fermeture de l’école et que la perte d’apprentissage était « plus prononcée chez les élèves issus de foyers défavorisés » [(331), p. 1]. Et ce, malgré le fait que les Pays-Bas étaient considérés comme le meilleur scénario possible, avec une fermeture relativement courte, un financement équitable des écoles et l’un des meilleurs taux en termes d’accès à une connexion internet à haut débit. Si pour les enfants issus de familles à hauts revenus, l’apprentissage est possible, du moins en théorie, les enfants issus de familles à faibles revenus sont confrontés à de nombreux obstacles. En outre, comme de nombreux parents ont perdu leur emploi, ces enfants peuvent également être exposés à ce stress. Tout comme « les récessions précédentes ont exacerbé les niveaux de pauvreté des enfants avec des conséquences durables sur la santé, le bien-être et les résultats d’apprentissage des enfants » [(214), p. 243], les conséquences à long terme ne doivent pas être sous-estimées (332). Des études récentes ont montré une forte augmentation des inégalités en matière d’éducation (269, 331) et de bien-être des élèves (333). En outre, l’enseignement à domicile a entraîné des niveaux élevés de stress parental (334). Dans l’ensemble, les inégalités en matière d’éducation ont fortement augmenté et le bien-être des élèves et des parents était en jeu pendant et après la fermeture des écoles.

Inégalités de genre

Alors que l’année 2020 était destinée à la réflexion sur les inégalités de genre, elle a particulièrement vu une augmentation de celles-ci, existantes et nouvelles (278). Les inégalités de genre en hausse concernent les domaines de la santé et du bien-être, de la vie du foyer, de la violence domestique, du travail et de la pauvreté, et du leadership (278). Les femmes ont déclaré être plus stressées et anxieuses pendant les confinements  (335), en particulier les femmes avec des enfants (336) et les étudiantes (333). La santé et le bien-être des femmes ont également été affectés de manière disproportionnée, réduisant l’espérance de vie et augmentant les taux de suicide (337). En outre, les rapports d’abus, d’automutilation et de pensées suicidaires ou autodestructrices étaient plus nombreux chez les femmes (338). Les femmes étaient plus susceptibles de vivre des interactions (physiques) agressives dans le contenu de leurs rêves (339). En outre, la santé physique et reproductive des femmes a été mise en péril, car de nombreux pays ont réaffecté les soins médicaux aux patients atteints du COVID-19 (340). La violence sexiste a augmenté à un rythme alarmant [pour une revue, voir (341)]. L’anxiété et la dépression ont triplé chez les femmes enceintes et les femmes en post-partum (342). Les mères étaient plus susceptibles d’assumer davantage de tâches ménagères pendant la crise et elles étaient responsables de l’enseignement à domicile (343), et travaillaient en moyenne 5% de moins, alors que les hommes travaillaient en moyenne le même nombre d’heures (344). Les femmes ayant de jeunes enfants ont réduit leurs heures de travail quatre à cinq fois plus que les pères (344).

Dans le milieu universitaire, les inégalités préexistantes ont persisté, et de nouvelles sont apparues. Alors que les inégalités entre les sexes dans le milieu universitaire étaient déjà discutées depuis un certain temps [par exemple, (345)], la crise a accru les inégalités préexistantes entre les sexes (346). Par exemple, en termes de production académique, alors que les hommes travaillant principalement à domicile sont devenus plus productifs au cours des dix premières semaines du verrouillage, et que la productivité globale de la recherche aux États-Unis a augmenté de 35%, la productivité féminine a chuté de 13%. Cet écart de productivité a été constaté dans six autres pays (347). Alors que les femmes étaient déjà confrontées à l’inégalité en termes de charge d’enseignement plus élevée et de tâches de service, qui sont moins récompensées que la publication universitaire, cette situation a été exacerbée lorsque l’enseignement et le mentorat ont dû être effectués en ligne (347). Cette situation est aggravée par le fait que les femmes doivent assumer la plupart des tâches ménagères, l’enseignement à domicile, la garde des enfants et parfois les soins aux parents âgés et à la famille élargie (343, 348). En outre, on a prédit que le taux de pauvreté des femmes augmenterait de 10% à l’échelle mondiale à la suite des INP, car de nombreux emplois de service ont été touchés (349). Dans l’ensemble, les femmes ont connu davantage de problèmes de santé mentale, de violence domestique et une charge plus importante relative aux tâches ménagères et professionnelles.

Résultats des inégalités : Augmentation du stress

Le résultat de l’accroissement des inégalités peut être une augmentation du stress et entraîner des problèmes de santé mentale (350). Une méta-analyse a en effet montré que les inégalités de revenus étaient négativement liées à la santé mentale (351). En général, les humains provoquent du stress chez les personnes situées plus bas dans la hiérarchie, et au cours des dernières décennies, de nombreuses recherches ont étudié les causes et les conséquences de ce phénomène [pour une revue, voir (352, 353)]. Par exemple, Sapolsky a cherché à savoir pourquoi les primates (y compris les humains) se causent mutuellement autant de stress. Les grands singes et autres primates ont plus de maladies liées au stress que toute autre espèce, et cela semble être dû au fait que le temps libre de ces espèces est utilisé pour causer du stress à d’autres, généralement plus bas dans la hiérarchie (36). Les niveaux de stress des babouins de statut inférieur ont été réduits de manière significative lorsque des babouins élevés dans la hiérarchie ont été tués inopinément en raison de la consommation de viande avariée (37). La mesure dans laquelle ces études sont valables pour la société humaine est discutable. Pour des raisons éthiques évidentes, il est très difficile de réaliser une étude dans laquelle des différences hiérarchiques extrêmes sont créées et ensuite levées pour en étudier les effets. Cependant, les études de Whitehall, qui s’étendent sur plusieurs décennies, montrent que les différences et les inégalités de statut sont corrélés à la mauvaise santé et à la mortalité, même en tenant compte du mode de vie (38), et que ces différences en matière de santé et de mortalité se prolongent même après la retraite (352). Il est intéressant de noter que c’est le cas même si la santé mentale des travailleurs de statut inférieur, qui occupent des emplois stressants et peu autonomes, s’améliore après la retraite (354). Il va sans dire qu’il est impératif de minimiser les inégalités.

Réduire les inégalités

La bonne gouvernance, ou les mesures prises par les gouvernements et les organisations pour gouverner la société au moyen de lois, de normes, de pouvoir ou de langage, est essentielle pour réduire les inégalités dans la société (355). La réduction des inégalités de genre dans le monde universitaire est également importante et plusieurs politiques sont prometteuses (356). Un rapport d’Oxfam suggère de répondre à la crise par plusieurs mesures visant à accroître l’égalité (357). En général, le développement communautaire semble être une voie prometteuse à cet égard (358). La coordination et l’intégration du secteur de la santé et du développement communautaire peuvent contribuer à rationaliser les efforts visant à influencer la santé et le bien-être des groupes particulièrement vulnérables (358). L’élaboration de politiques fondées sur des données probantes peut contribuer à réduire les inégalités (359) et à atténuer les effets négatifs de la crise. À l’avenir, les citoyens et les gouvernements devraient agir pour créer un monde plus égalitaire et durable (325). Nous décrivons ci-dessous ce que les gouvernements auraient pu mieux faire et ce que l’on peut apprendre de cette crise. Cet examen ne doit pas être interprété comme un effort pour blâmer qui que ce soit – une culture du blâme ne ferait que perpétuer la crise ainsi que l’environnement toxique que nous avons décrit plus haut et qui favorise les inégalités. À l’inverse, il est important d’apprendre de nos erreurs pour les corriger et ne pas les répéter, fermer le cercle de la pandémie et se préparer à de futures pandémies sans perturber la vie (360).

Aurions-nous pu faire mieux ?

Nous aurions pu faire mieux dans notre réponse à COVID-19. Un pouvoir considérable a été accordé aux experts qui avaient (ou prétendaient avoir) une expertise sur le COVID-19. Il en a résulté une focalisation exclusive sur les maladies et les décès dus au COVID-19, avec des INP mises en œuvre et imposées d’une gravité sans précédent, et qui avaient été explicitement déconseillées dans les plans pandémiques précédents (54, 55, 141, 361). Ces INP ont également été mises en œuvre sans tenir compte de leurs effets collatéraux (comme indiqué ci-dessus et prévu dans les plans de lutte contre la pandémie précédents). La réponse n’a pas tenu compte des leçons tirées des pandémies et autres urgences passées.

La gestion des urgences (GU) consiste à prévenir et à atténuer les urgences, à s’y préparer, à y répondre et à s’en remettre, quel que soit le risque/danger (362). Une agence de gestion des urgences (AGU) est une agence de coordination qui coordonne les demandes de l’agence concernée (l’agence qui s’occupe des effets directs du danger, ici la santé publique pour le danger COVID-19), tout en s’occupant également des effets indirects du danger (ici la pandémie et la réponse) (363). L’AGU coordonne les quatre fonctions critiques simultanées de la GU (Tableau 3) lors d’une urgence publique, comme le COVID-19, avec les effets directs et indirects du virus et de toute réponse au virus sur l’ensemble de la société.

Le processus suivi par l’AGU est le même pour toute urgence publique, y compris une pandémie. En suivant ce processus, l’AGU, contrairement aux experts médicaux de la santé publique, est spécifiquement formé pour optimiser la réponse. Les sept étapes du processus de gestion de l’urgence qui doivent être suivies dans toute situation d’urgence publique, et la façon dont elles auraient dû être suivies pour cette pandémie, sont présentées dans le tableau 2 (6, 363). En ne suivant pas le processus de GU établi, il était plus probable de choisir les fausses finalité, gouvernance, analyse de la mission et cours d’action sans aucun plan pandémie publié (363). De nombreuses conséquences négatives et exacerbations de l’inégalité évoquées ci-dessus étaient prévisibles et auraient dû être prises en compte dans les analyses risques-avantages (6, 11, 54, 55, 141, 361). D’autres auteurs ont conclu que des éléments cruciaux du processus de GU ont été omis lors de la réponse à la pandémie, bien que ces auteurs n’aient pas reconnu qu’il s’agissait d’éléments du processus de GU et qu’ils réinventaient, pour ainsi dire, la roue (11, 13, 365). Dans le tableau 3, nous mentionnons certaines priorités qui, selon nous, auraient été découvertes par le processus de GU pour permettre une réponse avec beaucoup moins de dommages collatéraux, ainsi que certaines priorités actuelles nécessaires au rétablissement.

Discussion

Les gouvernements et les autorités de santé publique du monde entier ont imposé leurs décisions, tout en ayant du mal à faire usage de politiques et de processus décisionnels fondés sur des données probantes (13, 359, 366). Cela a porté préjudice à de nombreux groupes de la société (10, 367). De nombreux scientifiques se sont également ralliés à l’idée que les INP les plus agressives étaient nécessaires pour le bien de tous, en particulier les experts conseillant sur la façon de modifier le comportement de la population [par exemple, (366, 368)]. D’autres ont fait remarquer que le débat a été fortement polarisé et qu’il devrait idéalement être plus ouvert et nuancé (369). La société est devenue la proie de la pensée de groupe (11) avec la perpétuation de schémas ancrés dysfonctionnels dans la réponse à la pandémie (13). Il semble plus important que jamais de maintenir et de renouveler les valeurs importantes qui fondent les sociétés, afin d’améliorer le bien-être de leurs citoyens (370). La guérison de la société devrait se concentrer sur la dignité, les droits, les valeurs et l’humanité des personnes (370). Parallèlement, il devient impératif de recourir à des politiques et des processus de prise de décision fondés sur des données probantes (359, 371) et l’évaluation réflexive (13), telles qu’utilisés dans le processus de GU (363).

Il est essentiel de rétablir la santé et le bien-être de l’ensemble de la population, et de créer un environnement positif dans lequel les gens peuvent s’épanouir (46). Le bien-être devrait compter pour les gouvernements (230). Après avoir inversé les politiques les plus agressives et les plus inefficaces (360, 372), la façon dont les gens font face à la situation est importante (10, 373). La plupart des gens semblent être affectés négativement en termes de santé et de bien-être, les différences de personnalité pouvant également jouer un rôle (217). Les personnes qui ont un score élevé de personnalité proactive sont plus aptes à repérer les opportunités et à agir en conséquence (374). Elles sont également plus à même de prévoir les conséquences et les risques inhérents aux actions qu’elles entreprennent et de les anticiper, ce qui influe sur les changements environnementaux (375). Pour de nombreuses personnes, l’accès à des ressources intangibles telles que le soutien social ou l’appartenance sociale et l’accès à des ressources tangibles telles que les revenus, les moyens de subsistance ou l’accès à une alimentation (saine) ont été contrariés. Les spirales de pertes s’accélèrent lorsque les pertes de ressources s’accumulent, tandis que les cycles de gains de ressources s’affaiblissent (194). Il est facile de creuser les écarts d’inégalité, mais ceux-ci peuvent mettre des années et des années à se combler. Par exemple, alors que l’on estimait avant la crise que la réduction de l’écart entre les sexes pouvait prendre jusqu’à 99,5 ans, on a estimé qu’il fallait 135 ans après la crise (376, 377).

Guérison collective et restauration du sens

La situation actuelle nécessite une guérison collective (378 ; 379). Si des programmes tels que l’Eye Movement Desensitization and Reprocessing [EMDR ; (380)], le brainspotting (381) et le neurosculpting (382) peuvent être efficaces pour soulager les traumatismes (complexes) [pour des analyses, voir (383, 384)], des solutions de psychologie positive plus évolutives sont nécessaires (230). De nombreuses personnes ressentiront le besoin de redonner un sens à leur vie (46). Les solutions évolutives peuvent consister, par exemple, le design de vie (life crafting – réfléchir, fixer des objectifs et entreprendre des actions dans des domaines importants de la vie) pour trouver un sens à la vie, qui peut être effectué sous la forme d’une intervention en ligne guidée par écrit (385), ou même par l’intermédiaire d’un chatbot [par exemple, (386, 387)]. Cultiver des sentiments de gratitude et de courage peut redonner un sens à la vie et a été associé à une diminution des idées suicidaires (388). Il existe une corrélation entre la gratitude et le bien-être (389), et le lien entre ces deux éléments semble impliquer également la connectivité sociale et le sens de la vie (390). Les communautés pourraient étudier les possibilités d’aider de nombreuses personnes grâce à des solutions évolutives (10, 13, 46). Par exemple, le life crafting et d’autres interventions de psychologie positive et de santé mentale proposées en ligne ou via un chatbot pourraient constituer une solution évolutive et un « premier secours » pour les personnes souffrant de problèmes tels que l’anxiété, la dépression et la perte du sens de la vie (46, 386). La fixation d’objectifs semble également prometteuse en termes de réduction de l’écart de réussite entre les sexes et les minorités ethniques pour des populations étudiantes spécifiques (391). L’efficacité des interventions doit être rigoureusement testée et il est préférable qu’elles soient menées de concert avec d’autres interventions de psychologie positive s’attaquant aux inégalités scolaires [voir (392)]. En outre, il est conseillé d’augmenter radicalement le caractère volontaire des mesures. Donner le choix aux gens au lieu de leur imposer des politiques pourrait accroître l’efficacité des interventions. Par exemple, lorsque les gens travaillent à domicile volontairement, ils subissent moins d’effets négatifs du télétravail [par exemple, (393)].

L’augmentation de l’engagement diversifié des citoyens dans les problèmes (globaux) (86), et les mouvements communautaires (grassroot movements) peuvent aider à contrer les tendances autoritaires associées à la réponse à la pandémie, à sauvegarder la démocratie (151, 394-396), et à accroître la démocratisation des entreprises après le COVID-19 (397). Il est peut-être préférable de renforcer le sens de la responsabilité des personnes pour qu’elles agissent après avoir soigneusement considéré les avantages et les inconvénients du comportement (398). Enfin, nous devrions reconnaître que pour bon nombre des interventions proposées, il serait avantageux de disposer de preuves plus solides provenant de grands essais randomisés (de groupage – clusters), afin de comprendre si elles peuvent fonctionner dans différentes populations et contextes. Alors que la pandémie a donné lieu à des milliers d’essais randomisés de médicaments, de produits biologiques et de vaccins (399, 400), peu d’essais ont été réalisés sur les INP (401) et le programme de recherche sur les interventions psychologiques et sociales était encore plus mince. Il convient de remédier à cette lacune.

Conclusion

Étant donné que la crise du COVID-19 et les INP d’une gravité et d’une durée sans précédent sont liées à de nombreux effets secondaires négatifs et augmentent les inégalités dans le monde entier (402), il faut s’occuper du stress, de la santé et des traumatismes des populations vulnérables (403). Les retombées économiques et l’augmentation des inégalités peuvent se produire à long terme (403). Les gouvernements devraient faire du bien-être le fer de lance de leurs décisions dans les années à venir (230). Il faut espérer qu’avec des interventions efficaces, le vent pourra tourner.

Source : Quartier Général

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À propos de l'auteur Profession Gendarme

L'Association Professionnelle Gendarmerie (APG) a pour objet l’expression, l’information et la défense des droits et intérêts matériels et moraux des personnels militaires de la gendarmerie et de toutes les Forces de l'ordre.Éditeur : Ronald Guillaumont

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