Justice pénale internationale : « Un bélier dans la mise en œuvre de la politique des États-Unis et de l’OTAN »

Justice pénale internationale : « Un bélier dans la mise en œuvre de la politique des États-Unis et de l’OTAN »
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par Robin Philpot.

Cette citation sur la justice pénale internationale n’est ni du président Poutine de la Russie ni du président Xi de la Chine. Elle vient de David Scheffer, ancien ambassadeur américain pour les crimes de guerre de l’administration Clinton (1992-2000) et principal négociateur pour les États-Unis lors de la création de pas moins de 5 tribunaux internationaux, soit pour l’ex-Yougoslavie, le Rwanda, le Sierre Leone, le Cambodge et la Cour pénale internationale (CPI).

C’est en parlant du premier tribunal pénal international mis sur pied en mai 1993, soit le Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie, que David Scheffer a comparé le tribunal à un bélier au service de Washington et de l’OTAN :

« À ce moment-là le tribunal était une outil juridique puissant, et je jouissais d’un appui suffisant du président Clinton, de la secrétaire d’État Madeleine Albright et du secrétaire à la Défense William Cohen, et d’autres autorités supérieures à Washington pour pouvoir le manier comme un bélier dans la mise en œuvre de la politique des États-Unis et de l’OTAN ».

Il est utile de rappeler cette citation aujourd’hui car il ne se passe pas une semaine sans qu’on n’entende résonner des appels à poursuivre devant des tribunaux internationaux des autorités et citoyens russes dont le président Poutine. Ces appels viennent des pays de l’OTAN, de l’Union européenne mais aussi de certaines ramifications de l’ONU et des très obéissants médias occidentaux.

La stratégie de l’OTAN et de l’Union européenne devient de plus en plus claire : transformer la justice pénale internationale et la question des droits de l’Homme en armes militaires, aujourd’hui contre la Russie, demain contre la Chine ou contre tout État qui ose dire non à l’ordre mondial que les États-Unis et ses alliées ou vassaux tentent de sauver. En voici quelques exemples.

La CPI se déclare compétente même si la Russie n’en fait pas partie, ce qui selon le procureur de la CPI, Karim Khan, ne pose pas de problème. Ce procureur voyage en Ukraine sous la bienveillante et impartiale protection de l’Armée ukrainienne, dont on passe sous silence les crimes commis depuis 2014. 

Le haut-commissariat pour les droits d’homme de l’ONU, organisme par ailleurs surchargé de ressortissants américains ou de ses proches alliés, a déjà mandaté en mars 2022 le juge Erik Mose pour diriger la Commission d’enquête de l’ONU en Ukraine qui devait enquêter sur les allégations de crimes de guerre en Ukraine en vue d’éventuelles poursuites. Mose est l’ancien juge du Tribunal pénal international pour le Rwanda. (voir ci-dessous)

La Commission dirigée par Mose a réalisé son enquête grâce, elle aussi, aux attentions bienveillantes des forces armées ukrainiennes. Elle a accouché d’un rapport le 23 septembre qui conclut, ô surprise, que les Russes ont commis des crimes de guerre. Sans surprise aussi, elle a conclu que les Russes ont commis des crimes sexuels et que les victimes étaient âgées de 4 à 82 ans. Également sans surprise, il n’y a aucune mention des crimes documentés de l’Armée ukrainienne depuis 2014, notamment dans le Donbass.

L’Association du barreau international travaille étroitement avec le Barreau de l’Ukraine en vue de poursuites criminelles en Ukraine ou à la CPI. Son directeur général, Mark Ellis, a déclaré récemment que le fait que la Russie ne fait pas partie de la CPI ne pose aucun problème, car des poursuites pourraient être lancées contre des autorités politiques russes, qui, advenant une condamnation et un changement de régime, risqueraient d’être arrêtés où qu’ils soient.

La représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU chargée des questions de violences sexuelles, Pamela Patten, a déclaré en conférence de presse à Paris le 14 octobre que les viols, actes de mutilation et agressions sexuelles constituaient une stratégie militaire des Russes. Elle n’ajoute aucune preuve mais cite comme un perroquet le rapport de la Commission d’enquête du juge Erik Mose citée ci-dessus.

Josep Borrell, haut représentant de l’UE qui n’a pas d’armée, ne manque pas une occasion de menacer la Russie de représailles militaires tout en faisant l’éloge de la justice pénale internationale. Josep Borrell est celui qui prétend que l’Europe est un jardin tandis que le reste du monde est une jungle qui menace d’envahir le jardin et qui appelle les « jardiniers » européens d’aller montrer la voie aux arriérés qui vivent dans la jungle.

Le produit d’un ordre mondial unipolaire

Que les seuls tribunaux pénaux internationaux après Nuremberg à voir le jour ont été créés dans les années 1990 n’est pas un fait anodin. Avant 1990, il aurait été impossible.

Selon Ramsey Clark, ancien ministre de la Justice des États-Unis, qui était présent à Nuremberg en 1945 : « Il n’y aurait même pas eu d’ONU si la Charte avait fait la moindre référence à un pouvoir de la future organisation de créer une Cour pénale habilitée à poursuivre n’importe qui sur la base des faits. La réunion à San Francisco n’aurait jamais eu lieu, et les États-Unis auraient été le premier pays à se retirer. Le pouvoir n’aime pas être jugé, et s’il est assez fort, il ne le sera pas. » (cité dans « Rwanda and the New Scramble for Africa », p. 171)

En effet, ces tribunaux établis dans les années 1990 sont un pur produit du nouvel ordre mondial déclaré par George Bush père au lendemain de la chute du Bloc soviétique. Ce serait un ordre mondial unipolaire dirigé par Washington, qui contrôlerait les institutions internationales, qui ferait la loi, qui identifierait les coupables, qui les poursuivrait et les punirait, mais qui serait exempté de toute poursuite. C’est l’administration Clinton qui prend le relais de Bush père pour créer ces tribunaux que son négociateur a candidement qualifiés de « bélier dans la mise en œuvre de la politique des États-Unis et de l’OTAN. »

Ramsey Clark insiste : « il ne faut pas sous-estimer le pouvoir que l’on a donné à ceux qui déterminent qui sera inculpé. Dans ce cas-ci, ce sont les ennemis qu’il choisissent. C’est une guerre qu’ils livrent, mais par d’autres moyens, et c’est extrêmement cruel. » (Ibid, p. 185)

Et c’est comme cela que ces tribunaux ont fonctionné. En ex-Yougoslavie, on a inculpé des Serbes, surtout, mais pas un mot sur le bombardement massif et la destruction l’ex-Yougoslavie par l’OTAN. 

Quant au Rwanda, il s’agit probablement du pire cas de justice des vainqueurs : alors qu’il y avait guerre, on n’a poursuivi que des gens de l’ancien gouvernement ou des opposants au Front patriotique rwandais (FPR) et à son chef Paul Kagame, aujourd’hui au pouvoir. Malgré les preuves accablantes contre le FPR et contre Paul Kagame personnellement, le président Kagame et l’ensemble de son armée, étant des alliés étroits de Washington, jouissent d’une impunité totale.

Ainsi, c’est vers un juge issu du modèle du TPIR, Erik Mose, que le haut-commissariat pour les droits d’homme s’est tourné pour enquêter en Ukraine. On aurait pu s’attendre que cette auguste ramification de l’ONU passe en revue la carrière de juge Mose au TPIR de 1999 à 2009.

Qu’est-il arrivé aux personnes acquittées, condamnées ou condamnées et libérées à la fin de leur sentence ? En bref, des acquittés ou des gens « libérés » sont maintenus en résidence surveillée au Niger, sans pays, sans papiers et sans le droit de rejoindre leurs familles, abandonnés par le simili justice internationale. D’autres sont envoyés dans des sortes de colonies pénales du XXIe siècle, qui au Bénin, qui au Mali, qui au Sénégal, mais pas à la Haye, siège de la CPI. Cela ressemble à un apartheid judiciaire pour Africains. Comment a-t-on pu confier l’enquête en Ukraine à un juge qui a laissé dans sa foulée une violation flagrante des droits de l’Homme et qui n’a jamais dit mot pour corriger la situation ?

Du déjà vu

Aujourd’hui ce qu’on tente de faire à l’égard de la Russie, de ses citoyens et de son président ressemble beaucoup à ce que l’OTAN a fait en 2011 en Libye contre feu Mouammar Kadhafi.

En mars 2011, peu après l’ambassadrice américaine à l’ONU Susan Rice a déclaré que Kadhafi fournissait à ses troupes du Viagra pour les aider à violer des femmes, le très obéissant procureur de la CPI à l’époque, Luis Moreno-Ocampo, a renchéri en accusant Kadhafi d’avoir ordonné à des troupes de violer des centaines de femmes et d’avoir lui-même décidé de violer des femmes. Aucune preuve n’a été présentée.

Aussi, le Conseil des droits de l’homme a rapidement dépêché des enquêteurs sur place pour identifier les crimes commis, dont le viol et l’utilisation de Viagra par les forces armées libyennes. Quand, en 2012, l’équipe d’enquêteurs du Conseil a conclu qu’il n’y avait pas de preuve d’une politique de violences sexuelles systématiques et qu’il n’a même pas mentionné le Viagra, le procureur de la CPI Moreno-Ocampo a tout de même insisté qu’il y en avait et que les nouvelles autorités libyennes étaient en possession de preuves irréfutables. L’idée étant de fournir encore plus de matière à propagande pour justifier la destruction de la Libye et l’assassinat de Mouammar Kadhafi le 31 octobre 2011.

La Russie n’est plus la Libye

La Russie n’est heureusement pas la Libye et le monde unipolaire n’existe plus. Toutefois, les vieilles habitudes ont la vie dure et elles peuvent continuer à faire mal. Si les promoteurs de la soi-disant justice pénale internationale auront de la difficulté à réaliser leurs rêves, ils peuvent tout de même réussir à compter les points en termes de propagande, d’autant plus que les médias occidentaux continuent à faire le perroquet de l’OTAN et de l’UE. 
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À propos de l'auteur Réseau International

Site de réflexion et de ré-information.Aujourd’hui nous assistons, à travers le monde, à une émancipation des masses vis à vis de l’information produite par les médias dits “mainstream”, et surtout vis à vis de la communication officielle, l’une et l’autre se confondant le plus souvent. Bien sûr, c’est Internet qui a permis cette émancipation. Mais pas seulement. S’il n’y avait pas eu un certain 11 Septembre, s’il n’y avait pas eu toutes ces guerres qui ont découlé de cet évènement, les choses auraient pu être bien différentes. Quelques jours après le 11 Septembre 2001, Marc-Edouard Nabe avait écrit un livre intitulé : “Une lueur d’espoir”. J’avais aimé ce titre. Il s’agissait bien d’une lueur, comme l’aube d’un jour nouveau. La lumière, progressivement, inexorablement se répandait sur la terre. Peu à peu, l’humanité sort des ténèbres. Nous n’en sommes encore qu’au début, mais cette dynamique semble irréversible. Le monde ne remerciera jamais assez Monsieur Thierry Meyssan pour avoir été à l’origine de la prise de conscience mondiale de la manipulation de l’information sur cet évènement que fut le 11 Septembre. Bien sûr, si ce n’était lui, quelqu’un d’autre l’aurait fait tôt ou tard. Mais l’Histoire est ainsi faite : la rencontre d’un homme et d’un évènement.Cette aube qui point, c’est la naissance de la vérité, en lutte contre le mensonge. Lumière contre ténèbres. J’ai espoir que la vérité triomphera car il n’existe d’ombre que par absence de lumière. L’échange d’informations à travers les blogs et forums permettra d’y parvenir. C’est la raison d’être de ce blog. Je souhaitais apporter ma modeste contribution à cette grande aventure, à travers mes réflexions, mon vécu et les divers échanges personnels que j’ai eu ici ou là. Il se veut sans prétentions, et n’a comme orientation que la recherche de la vérité, si elle existe.Chercher la vérité c’est, bien sûr, lutter contre le mensonge où qu’il se niche, mais c’est surtout une recherche éperdue de Justice.

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