Plutôt qu’une organisation caritative qui pousse des adolescentes peu sûres d’elles identifiées comme transgenres à subir une ablation des seins, nous avons besoin d’un mouvement qui célèbre les jeunes femmes.
Par Janice Turner
Source : The Times, 30 septembre 2022
Traduction : lecridespeuples.fr
La puberté féminine, c’est comme être embarqué dans une voiture en cavale. Mettons de côté les règles, le choc du sang, le tsunami des émotions. Concentrons-nous sur une jeune fille d’une douzaine d’années qui, jusqu’à présent, errait dans le monde en pensant peu à son corps, et qui, soudain, acquiert des seins.
La possession de ces organes les plus fétichisés change tout. Elle fait naître le doute : comment vais-je me situer par rapport aux filles de ma classe ? (Ou sur TikTok ou Pornhub.) Elle attire une attention nouvelle, vorace : les voitures ralentissent, les garçons ricanent, les hommes adultes fixent. On peut se sentir puissante mais aussi terrifiante, et il est impossible d’échapper à ces choses sur votre poitrine, qui se trémousse pendant les jeux, provoque des blagues cochonnes, peut vous donner mal au dos ou un sentiment d’insuffisance.
Voir Toilettes scolaires, compétitions sportives, prisons : l’irrépressible folie transgenre
Bien sûr, des générations de filles ont essayé. Elles ont porté des vêtements amples ou sont devenues gothiques, elles se sont affamées jusqu’à ce que leur poitrine redevienne osseuse. Mais il existe aujourd’hui une autre voie, applaudie comme étant noble, progressiste et courageuse, bien qu’elle soit irréversible, douloureuse, risquée et — si vous prenez un peu de recul pour y réfléchir— totalement obscène. Les filles peuvent subir une ablation des seins.
Il existe une organisation caritative pour enfants qui normalise cette pratique en ce moment même : elle a reçu 500 000 Livres Sterling du Lottery Fund, a conclu des partenariats fructueux avec Starbucks et Wagamama, et a reçu l’appui du prince Harry et d’Emma Watson. Mermaids [Sirènes] n’insère peut-être pas le scalpel, mais elle met les filles sur la voie de la clinique.
Cette semaine —enfin— la commission des œuvres de bienfaisance a annoncé qu’elle allait enquêter sur « l’approche de Mermaids en matière de protection des jeunes » concernant sa pratique consistant à envoyer secrètement des chest binders (compresseurs de poitrine) à des filles âgées de 13 ans seulement, sans requérir le consentement de leurs parents.
Ces chest binders sont des corsets en spandex compriment les seins ainsi que les côtes et les poumons. Il est difficile de respirer dans un binder : on a des vertiges, des maux de tête. Vous ne devriez pas en porter pendant le sport : en fait, les groupes de pression transgenres conseillent aux écoles de dispenser de gym les filles qui portent un binder. Les attaches endommagent le tissu mammaire en développement, provoquent des frottements, des infections cutanées, une fonte musculaire et même des fractures des côtes. Pourtant, sur le forum de discussion Mermaids, un parent discute de l’achat d’un appareil pour sa fille anxieuse de 11 ans qui n’a que des bourgeons mammaires.
Voir Comment la propagande transgenre détruit de jeunes adolescentes
Le repassage des seins, pratiqué dans certains pays africains pour qu’une fille ait l’air trop jeune pour être mariée, est considéré comme un abus sur enfant en Grande-Bretagne et constitue un acte criminel. Pourtant, la compression des seins, qui donne une silhouette androgyne et prépubère similaire, ne l’est pas.
Pour de nombreuses filles, la compression est un engouement passager, découvert par des amies ou des influenceuses sur YouTube. (Cela rappelle la mode victorienne des lacets serrés, où les filles qui rivalisaient pour avoir la taille la plus fine devaient s’allonger sur des « divans d’évanouissement »). Mais portés pendant de longues périodes, les binders abîment vos seins, alors vous les détestez encore plus ; vous vous lassez de vous sentir essoufflée, contrainte, en sueur en été. Alors les groupes LGBT font la promotion d’un chemin vers la liberté, non pas en retirant votre corset, mais vos seins.
En 2019, une grave violation de données par Mermaids, pour laquelle elle a été condamnée à une amende de 25 000 Livres Sterling, a donné un aperçu de ses week-ends résidentiels pour parents et enfants. « Enorme respect pour les gars qui nous ont montré (sur demande) leurs cicatrices de chirurgie du haut », disait un post, « cela a épargné beaucoup de recherches douteuses sur Google ». Les filles, à qui l’on apprend dans ces camps à compresser leur poitrine, sont présentées à ceux qui ont subi des doubles mastectomies —ils se transmettent même leurs vieux binders.
En fait, vous n’avez pas besoin de « recherches douteuses sur Google » pour être témoin de cette horreur. Il suffit de chercher #topsurgery sur Instagram pour trouver des milliers de jeunes filles aux cheveux courts affichant des cicatrices latérales livides, leurs mamelons coupés pour être recousus ou tatoués plus tard. Certaines posent avec des chirurgiens souriants. Un médecin apparaît avec des bocaux de tissu mammaire dans du formaldéhyde, un Frankenstein au drapeau arc-en-ciel. Une autre, à Miami, se vante de couper 40 paires de seins par semaine ou, comme elle le dit avec désinvolture, de « supprimer les tétons » [« deleting the teets », aussi simplement qu’on supprime un Tweet].
La plupart d’entre elles se trouvent aux États-Unis, où l’ablation des seins rapporte gros et où les véritables hôpitaux pour enfants pratiquent —honteusement— des mastectomies sur des enfants de 13 ans. Aucun âge minimum n’est nécessaire, explique le Dr Johanna Olson-Kennedy, pédiatre à Los Angeles, car une patiente qui regrette l’opération peut « aller chercher [des seins] plus tard ».
Voir Comment la déscolarisation a sauvé une fille de 12 ans de la folie transgenre
Mais les jeunes filles britanniques, qui doivent attendre jusqu’à 18 ans, regardent ces vidéos de patientes post-opératoires qui parlent de « prendre la première vraie respiration que j’ai eue depuis des années ». Elles envoient des cartes de vœux pour féliciter leurs amies d’avoir « enlevé un poids de leur poitrine » ou contribuent à des collectes de fonds « pour mettre mes seins à la poubelle d’ici Noël ». Les poitrines nues se prélassent au soleil, sans être gênés par les hauts de bikini ou les regards qui les jugent. Libres, comme les hommes.
L’idée que les seins sont un fardeau ne vient pas seulement des militants transgenres. La chirurgie des seins et la chirurgie du buste sont toutes deux des réponses à la marchandisation du corps féminin : les premières tentent de gagner la partie, les secondes choisissent d’en sortir définitivement.
Où sont les voix de l’éducation sexuelle qui disent que l’entrée dans la féminité peut être ressentie comme une marche dans le feu, que l’inconfort corporel est une réponse logique aux rythmes étranges de la biologie et aux attentes intimidantes ? Des études montrent que la confiance des filles, comparée à celle des garçons, s’effondre vers l’âge de 12 ans. Le livre de Rachel Rooney, Mon corps, c’est moi, qui encourageait les jeunes enfants à se réjouir de leur glorieuse forme humaine, a été censuré parce qu’il était transphobe, alors qu’une version pour adolescents est nécessaire de toute urgence.
Au lieu de cela, on nous colporte l’idée que le corps est infiniment plastique, que l’apparence est tout et que la fonction physique, comme la capacité de nourrir un futur bébé, est jetable.
Voir Propagande transgenre auprès des enfants : progressisme ou « crime contre l’humanité » ?
Les filles autistes représentent un tiers des consultations dans les cliniques spécialisées dans le domaine du genre, et la mère de l’une d’entre elles m’a dit que sa fille aimait participer à un groupe trans parce qu’elle ne s’intégrait pas à l’école et que celle-ci était pleine de filles aussi excentriques qu’elle et non conformes au genre. J’ai été frappée par le fait qu’un nouveau mouvement de jeunes est nécessaire pour remplacer les Mermaids, un mouvement qui ne pousse pas les filles vers les hormones ou la chirurgie, mais qui dit plutôt que c’est le monde qui doit changer, pas vos seins.
Pour soutenir ce travail censuré en permanence (y compris par Mediapart) et ne manquer aucune publication, faites un don, partagez cet article et abonnez-vous à la Newsletter. Vous pouvez aussi nous suivre sur Twitter, Facebook, Youtube et VKontakte.
Source: Lire l'article complet de Le Cri des Peuples