Migrants : le gouverneur de Floride décide d’enrichir culturellement les banlieues chics

Migrants : le gouverneur de Floride décide d’enrichir culturellement les banlieues chics

« C’est affreux, le peuple, je le sais : j’en ai parmi mes gens », disait Pierre Desproges. Au fond, nos élites n’ont pas beaucoup changé, depuis Voltaire : elles sont pour un libertaire qui ne s’applique qu’à elles, pendant que le peuple doit travailler pour un salaire de misère et obéir à ce qu’on lui impose. Par ailleurs, ces mêmes élites ont résolu le problème de leur haine profonde du prolétariat de souche en n’employant plus à leur service que des « gens » venus de loin : chauffeurs de taxi, livreurs Uber Eats, femmes de ménage, nounous, agents de sécurité, éboueurs… Cela leur permet commodément d’imposer le désormais célèbre « enrichissement culturel », par Zodiac™ entiers, à un peuple qui ne peut rien faire pour s’y opposer et tremble même à l’idée d’avouer son exaspération (et de passer pour un « facho »).

Aux États-Unis, l’hypocrisie atteint son paroxysme : dans les résidences sécurisées de Floride comme dans les villas blanches des Hamptons, on trouve beaucoup de donneurs de leçons, mais on ne trouve guère de migrants. Le pouvoir les entasse, comme chez nous, dans des banlieues déjà déshéritées, déjà en proie à des dizaines d’autres problèmes structurels. Le gouverneur de Floride, Ron DeSantis, a donc eu une idée : entre ces gens venus de loin et la bourgeoisie richissime qui nous vante leurs qualités, leurs diplômes, leurs capacités, l’enrichissement culturel qu’ils nous apportent, pourquoi n’organiserait-on pas, enfin, une rencontre ?

Deux avions de migrants venus de Floride se sont donc posés, le 14 septembre, sur l’aéroport de Martha’s Vineyard, sur la côte est, résidence d’été des grandes familles progressistes américaines – une ville qui a voté Biden à 80 %. Ce n’est pas si populiste que le diront les imbéciles : effectivement, ils les ont voulus, qu’ils les accueillent ! On attend quelques images de la rencontre amicale entre ces patriciens à la Kennedy, dont les rares enfants sortent de quelque université de l’Ivy League, et ces hôtes inattendus, qui ont certainement tous des diplômes de neurochirurgie, un casier judiciaire vierge et une envie folle de s’intégrer – comme on ne cesse, des deux côtés de l’Atlantique, de le raconter à la télévision.

Ce qui se passe aux États-Unis serait encore plus légitime en France. Les Américains d’aujourd’hui sont, par essence, un peuple de migrants, qui ont massacré le peuple indien pour se faire une place afin de vivre leur rêve individualiste et leur protestantisme radical. Il n’y a plus beaucoup d’Américains de souche, à part dans les réserves. Les WASP (White Anglo Saxon Protestants) qui se veulent Américains historique et se sont arrogé les bonnes places au Congrès, à la CIA, dans la haute administration ou les anciens conglomérats industriels, ont inventé une histoire qui les arrange. En France, c’est une autre histoire : le peuple français était homogène jusqu’au début du XXe siècle. Le visage des Français, celui des tableaux ou des films de l’INA, que l’on peine à reconnaître dans la rue était le même jusqu’il n’y a pas si longtemps.

Je ne peux donc m’empêcher de songer avec malice à ce petit matin d’automne où l’on verrait s’arrêter, sur la place de la mairie de Marnes-la-Coquette, dans le parc naturel du Luberon, sur les rives de La Baule ou du Touquet, devant une luxueuse résidence privée de Corse ou dans le centre de Paris, quelques bus remplis de nos nouveaux hôtes. Non loin de la place Monge, revenant de chez le primeur bio avec leurs enfants Virgile et Myrtille, Antonin, patron de start-up, et Amandine, journaliste, auraient une surprise sur le palier. Une de migrants africains au grand complet les y attendrait, avec des sacs Tati, des boubous en wax et des survêtements. Le gentil organisateur leur dirait : « Vous êtes bien signataires de la pétition « Tous.te.s mobilisé.e.s pour un accueil digne des personnes en situation de migrance » ? Eh bien, soyez heureux : nous vous avons sélectionnés parmi mille foyers pour leur offrir cet accueil digne. Ils ont un double des clés, ils vont prendre possession des lieux. Faudra se serrer, mais quel bonheur malgré tout, hein ? Vous souhaitant une excellente continuation ! »

Coup de génie pour DeSantis : cette fois, ce ne sont pas les mères célibataires sans le sou, les mamies un peu perdues ou les petits Blancs sans repères qui vont se coltiner l’enrichissement culturel. C’est la gauche morale, qui vit à deux dans 400 m2, qui vole de plateau télé en vernissage et d’avion en soirée mondaine. Et qu’ils ne se plaignent pas : ça fait des années qu’ils nous ordonnent de les accueillir. Il faut que chacun y mette du sien.

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