Shia LaBeouf en Padre Pio? Je ne sais pas, mais moi, ce n’est pas Shia que j’ai vu, c’est le Padre. C’est Francesco Forgione, dit Padre Pio de Pietrelcina, qui crevait l’écran.
Je ne suis pas une admiratrice de LaBeouf, mais en Boyd Bible Swan (Fury, 2014) ou en John McEnroe (Borg/McEnroe, 2017), le jeune acteur était épatant. En Padre Pio, Shia est tout simplement éblouissant. Franchement virile, de lui émane une force peu commune, tout empreinte de tendresse et de vulnérabilité. C’est envoutant et désarmant.
En plein offertoire, à genoux, tremblant devant son Dieu, quand il verse des larmes? On y croit. Et si on s’y laisse aller un peu, on y est, et on pleure avec lui.
Essentiellement, le nouveau Padre Pio du réalisateur new-yorkais Abel Ferrara (Zeros and Ones, Bad Lieutenant) est un film sur un des aspects du mysticisme catholique et de sa contribution fondamentale au salut du monde. C’est l’histoire de ce qu’on appelle une âme victime : ces âmes réparatrices, appelées, choisies par le Christ pour collaborer avec Lui dans la rédemption, maintenant, dans leur chair.
Dès les premières notes du film, le ton est donné, et la musique de Joe Delia, jamais loin du thriller, tout de suite, nous fait sentir que quelque chose de terrible va arriver. Mais quoi?
«Je sais que tu verses des larmes, dit le Padre tout doucement à Jésus. Je sais que tu continues à verser des larmes chaque jour, à cause de l’ingratitude des hommes. Tu choisis les âmes. Et malgré mon indignité, tu m’as choisi, pour t’aider. Chaque jour, je souffre que tu ne puisses trouver de consolation à ta souffrance. En cela consiste toute ma joie.»
Cette phrase résume en elle-même toute la vie du Padre Pio.
Un serviteur souffrant
Surprenant de voir qu’un réalisateur tel que Ferrara a su exposer avec puissance la vie mystique catholique. Tout passe par les tripes. On ne l’explique pas; on le montre.
C’est d’ailleurs cette «émotion», explique Shia LaBeouf lors d’une entrevue qu’il accordait au Bishop Robert Birron (entrevue qui a eu un million de vues après une semaine), qui lui a permis de se défaire de son raisonnement, de son intellect, et d’embrasser, librement, la foi.
Cette vie mystique, si rarement exposée, et pourtant si enlevante (mais n’est-ce pas le propre de la mystique d’être cachée?), prend sa source dans l’Écriture.
Prophétisée d’abord par Isaïe avec son «serviteur souffrant» (chapitre 53 en entier), elle est vécue charnellement par saint Paul, que l’incrédulité de ses frères juifs fait souffrir au plus haut point: «j’ai dans le cœur une grande tristesse, une douleur incessante» (Rm 9, 2).
L’apôtre témoigne de son œuvre co-rédemptrice avec le Christ, en tant qu’Église, pour le salut du monde: «je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous; ce qui reste à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair, je l’accomplis pour son corps qui est l’Église» (Col 1, 24). On ne peut pas regarder Padre Pio sans penser à ce verset.
On comprend vite que le drame qui se joue dans le petit village de San Giovanni Rotondo, au lendemain de la guerre 1914-1918, se joue également dans l’âme, le corps et l’esprit du Padre. Il souffre, comme Paul (et comme le Christ!), de l’impiété de ceux qui lui sont confiés : eux qui préfèrent sauver le monde par le socialisme, le communisme ou encore le fascisme, plutôt que par leur propre conversion. Les paroissiens embrassent le drapeau rouge et refusent de communier au corps et au sang du Christ. Pio le fera, lui, pour eux tous.
Combats spirituels
Il se confesse de sa colère, de son désir de vouloir mourir plutôt que de vivre dans ce monde de haine et de souffrance; son directeur lui répond que la souffrance, à cause de l’amour, est une porte vers le ciel. Il l’encourage à la confession régulière: «Elle est la seule façon de demeurer dans le droit chemin. Ne laissez pas Satan tirer avantage de votre souffrance.»
Cette souffrance, il décide de l’assumer, librement. À la manière du Christ. Pio comprend que seul Jésus sauve le monde à la racine et lui avec.
Satan va se déchainer. Ils se battront à mains nues. Pio pleure, hurle, supplie qu’on l’aide. Et pendant ce temps, les socialistes embrigadent les femmes devenues veuves ainsi que les hommes qui crèvent de faim après avoir tout sacrifié à la guerre.
Le Padre arrive à déjouer – non sans lutter – les subterfuges de Satan. Deux scènes sont particulièrement osées et ne laisseront aucun spectateur indifférent.
Pendant les élections municipales sous haute tension, on assiste à la messe, tout empreinte de gravité. Un pauvre se convertit miraculeusement et dehors, communistes, socialistes s’affrontent et sont massacrés par un commando protofasciste.
Quand Padre Pio accueille enfin la volonté de Dieu pour lui, quand il dit oui à l’appel qu’Il lui lance, oui à sa vocation d’âme victime, il reçoit alors les stigmates presque imperceptiblement.
Le film est d’ailleurs dédié aux 11 victimes du massacre de San Giovanni Rotonde survenu le 14 octobre 1920, ainsi qu’au peuple ukrainien.
Le plus étrange, c’est que le personnage du Padre Pio se fait discret tout au long du film. Presque effacé. Les évènements politiques semblent prendre le dessus et font tant de bruit qu’on en oublie le saint homme.
Voilà qui n’est pas sans rappeler la réalité de notre monde dont les hurlements, les scandales et les images omniprésentes voilent ce qu’il y a de plus important: l’œuvre de Dieu.
***
Le film a été présenté en grande première au début septembre au festival Giornate Degli Autori, en parallèle de la Mostra de Venise. Aucun détail supplémentaire pour le moment concernant sa distribution.
D’autres films sur le Padre Pio :
Le mystère Padre Pio, documentaire de José Maria Zavala, 2021
Padre Pio: Miracle Man, avec Sergio Castellitto et Jürgen Prochnow (2000)
Padre Pio: Between Heaven and Earth, 2000, mini-série
La nuit du prophète. Padre Pio de Pietrelcina, film de Jean-Marie Benjamin, 1994
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Source : Lire l'article complet par Le Verbe
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