par Philippe Rosenthal.
Les observateurs, mais aussi de simples citoyens constatent de plus en plus la dégradation du niveau des dirigeants dans leurs pays en évoquant l’absence de l’existence de véritables responsables politiques. Les élites occidentales ne sont absolument pas préparées à une nouvelle ère de rivalités entre grandes puissances. Les raisons viennent de leur idéologie, de leur formation.
Les élites occidentales ne sont pas préparées à la réalité du monde. Le sociologue et analyste, Frank Furedi, pose dans Spiked les fondements de la structure des élites actuelles : « Soudain, le monde semble être un endroit très dangereux. Après des décennies de stabilité apparente, les rivalités entre grandes puissances ont refait surface » ; « Les hypothèses de l’après-guerre froide sont toutes remises en question » ; « Entre-temps, les tensions économiques de longue date entre la Chine et les États-Unis arrivent à ébullition, menaçant les accords de sécurité existants dans le Pacifique ». La pandémie liée à la Covid-19, la perturbation des échanges économiques et des chaînes d’approvisionnement mondiales, le conflit en Ukraine et la crise énergétique actuelle, ont pris les élites occidentales par surprise.
Alors que l’Europe est plongée dans une crise énergétique inédite, les États-Unis, étant un pays aux ressources considérables, peuvent plus facilement surmonter la crise actuelle. L’Europe est dans une position différente. Elle n’a pratiquement pas de ressources naturelles propres et il y règne une confusion dans l’Union européenne d’autant plus qu’elle n’arrive pas à sortir de la position de satellite de Washington. « L’Europe souffre depuis vingt ans d’une désorientation profonde. Le modèle sur lequel elle avait été construite dans les années 1950 – le triptyque imaginé par Jean Monnet : paix, fédéralisme et marché – s’est fracassé sur les réalités du XXIe siècle », écrit La Croix. Ce quotidien, comme Spiked, estime que la racine du mal est l’absence de dirigeants forts capables d’agir.
Le chancelier allemand, Olaf Scholz, tente de prendre la place du leadership en Europe, mais il n’y parvient pas, note le New York Times. Commentant son récent discours à Prague, où il a annoncé les projets de l’Allemagne pour jouer un rôle plus important en Europe, le média anglophone trouve que « la tentative d’Olaf Scholz de présenter une perspective grandiose a échoué », présentant « son incapacité à combler un vide dans un continent avide de leadership ».
Emmanuel Macron dans le rôle du leader européen exemplaire n’est pas du tout à la hauteur. « Emmanuel Macron s’écrase sur terre après avoir perdu son emprise sur le Parlement », « les cinq prochaines années s’annoncent désormais très différentes pour le président français qui était positionné pour être le dirigeant le plus puissant de l’UE », titrait le Financial Times. Il pousse « l’idée de la mondialisation » mais « n’atteint absolument pas le niveau d’un leader », écrit The Time, spécifiant : Sous Macron, « l’économie du pays ne croît pas, et il y a plus de contradictions dans la société », « le champion solitaire autoproclamé du mondialisme semble prêt à devenir encore plus solitaire ».
L’art de la politique semble avoir pratiquement disparu. Il est évident que l’establishment politique des États-Unis et des pays de l’UE manque de ressources intellectuelles, de clarté et d’intégrité pour diriger sur la scène mondiale. L’art de la politique semble avoir pratiquement disparu. La visite de Nancy Pelosi à Taïwan a été significatif d’un acte incroyablement imprudent qui illustre parfaitement comment les politiciens américains de haut rang ont perdu tout engagement envers la diplomatie. Avec le conflit en Ukraine, la position dogmatique et autoritaire de l’UE avec la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen et le suivisme des autres responsables politiques des autres nations européennes – mis à part la Hongrie – trahissent cette faiblesse des autorités politiques des nations de l’UE à agir en fonction de leurs intérêts géopolitiques.
Qu’est-il advenu de l’esprit d’État dans le monde occidental ? Dans son nouveau livre Leadership : six études en stratégie mondiale (Leadership : Six Studies in World Strategy), le diplomate américain de haut rang, Henry Kissinger, déplore l’absence d’un sens politique réfléchi à l’époque contemporaine et une absence de sérieux intellectuel chez les dirigeants occidentaux contemporains. Il reproche aux universités de produire des « militants et des techniciens » plutôt que des dirigeants. Henry Kissinger s’inquiète de la cohorte contemporaine de diplomates et de spécialistes des affaires étrangères formés dans les universités anglo-américaines car « beaucoup d’entre eux sont imprégnés de l’idéologie du mondialisme » qui considère la géopolitique comme étant une préoccupation démodée et dépassée qui appartient au mauvais vieux temps de l’entre-deux-guerres. Cette perspective est largement communiquée aux étudiants en relations internationales dans des universités prestigieuses.
Une doxa aveugle oriente les responsables politiques et les diplomates occidentaux. « L’idée que, dans un monde globalisé, la géopolitique n’est pas pertinente est basée sur la conviction que la rivalité entre les grandes puissances sera tempérée par la coopération économique », analyse Frank Furedi, donnant une source à ce raisonnement : « Ce point a été clairement exprimé par l’ancien président américain, Bill Clinton, qui a affirmé que la géopolitique avait été remplacée par la géoéconomie ».
L’ensemble de la caste politique et des diplomates occidentaux considèrent la politique et les événements dans le monde selon ce paragdime. Ces experts en diplomatie ont vu, par exemple, l’intégration européenne comme une solution pour offrir une « solution à la guerre » permanente. Certains chercheurs et experts en politiques internationales occidentaux sont allés jusqu’à affirmer que la guerre était devenue obsolète.
Par exemple, dans Les vestiges de la guerre (The Remnants of War), John Mueller, politologue américain dans le domaine des relations internationales, a fermement soutenu que les pays développés ont en général abandonné la guerre dans leur manière de diriger leurs relations avec d’autres pays. Selon lui, les conflits militarisés ne sont désormais plus qu’une affaire de « voyous » et de « combattants résiduels ». Le conflit en Ukraine a surpris Olaf Scholz, Emmanuel Macron ou Ursula von der Leyen, les braquant dans une logique mondialiste au lieu de considérer la force de la géopolitique et l’importance du rôle de la diplomatie.
Ces responsables politiques sont en partie prisonniers de la vision technocratique étroite qu’ils ont adoptée pendant leurs années universitaires. L’establishment occidental n’est pas seulement mal formé et éduqué sur cette vision de la politique étrangère, elle a, également, adopté, avec d’autres membres de l’élite dirigeante, une vision cosmopolite de la politique étrangère qui les a encouragées à se détacher de leur nation.
Par conséquent, les experts en politique étrangère et les diplomates, qui ont assimilé ces hypothèses mondialistes, ne sont malheureusement pas préparés à faire face aux défis géopolitiques complexes auxquels ils sont désormais confrontés.
source : Observateur Continental
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