par Caitlin Johnstone.
Il y a une scène dans « The Usual Suspects » où Kevin Spacey raconte la fable du mystérieux Keyser Soze et comment il est devenu un seigneur du crime.
« L’histoire que les gars m’ont racontée, une histoire que je crois, c’est celle de son époque en Turquie », dit-il. « Il y avait un gang de Hongrois qui voulait avoir sa propre mafia. Ils ont réalisé que pour être au pouvoir, vous n’aviez pas besoin d’armes, d’argent ou même d’être nombreux. Il fallait juste avoir la volonté de faire ce que l’autre ne voulait pas faire. »
Le personnage de Spacey décrit la façon dont les Hongrois s’en sont pris à Soze et à sa famille pour s’emparer de son commerce de drogue, mais la méchanceté avec laquelle ils l’ont fait n’était pas à la hauteur de celle qu’on leur a opposé.
« Puis il a montré à ces hommes de volonté ce qu’était vraiment la volonté », dit Spacey, décrivant la façon dont Soze tue sa propre famille, puis anéantit les familles et les amis de toute la bande hongroise.
Et ce qui est amusant, c’est que si vous observez attentivement la façon dont le pouvoir évolue dans le monde, vous verrez que c’est à peu près comme ça que ça fonctionne. Les plus vicieux d’entre nous sont élevés au sommet, parce que tous nos systèmes sont construits d’une manière qui valorise la méchanceté.
L’empire américain est capable de dominer le monde exactement parce qu’il a « la volonté de faire ce que les autres ne feraient pas ». Chaque fois que j’expose mes preuves que les États-Unis sont le régime le plus tyrannique de la planète, je me heurte à quelqu’un qui concède que c’est vrai mais qui affirme aussitôt que les États-Unis se comportent ainsi uniquement parce qu’ils sont les plus puissants. Tout autre gouvernement ayant la puissance des États-Unis se comporterait avec la même méchanceté, voire pire, affirment-ils.
Et je leur réponds toujours qu’ils ont tout faux. Les États-Unis ne sont pas exceptionnellement vicieux parce qu’ils sont le gouvernement le plus puissant du monde, les États-Unis sont le gouvernement le plus puissant du monde parce qu’ils sont exceptionnellement vicieux.
Les États-Unis ont mis un terme à la fin de la Seconde Guerre mondiale en lâchant deux bombes nucléaires sur le Japon, non pas parce que c’était nécessaire (ce ne l’était pas), mais parce qu’ils voulaient intimider l’Union soviétique. Elle s’est ensuite immédiatement lancée dans une succession de nouvelles guerres et d’opérations stratégiques d’une étonnante brutalité, dans le but de devenir, à terme, le dominateur mondial. Elle y est parvenue à la chute de l’URSS, après quoi elle a immédiatement institué une politique visant à s’assurer qu’aucune superpuissance rivale ne se développe jamais et a commencé à travailler à la « domination totale » de la terre, de la mer, de l’air et de l’espace. Tous les conflits internationaux majeurs de notre époque sont le résultat direct de ces politiques.
Aucune des personnes qui dirigent la structure du pouvoir impérial qui nous gouverne n’occupe son poste en raison de sa sagesse ou de sa bonté. Les oligarques parviennent au sommet de leurs entreprises et de leurs échelles financières en étant prêts à marcher sur ceux qu’ils doivent piétiner pour avancer. Les stratèges militaires accèdent à leur poste en démontrant une aptitude à la domination militaire. Les responsables des services de renseignement accèdent à leurs postes parce qu’ils savent comment faciliter les intérêts de l’empire oligarchique. Les politiciens accèdent au sommet en faisant preuve d’une volonté de servir le pouvoir impérial.
Et ce principe s’applique du haut en bas de l’échelle au reste de notre société. Le seul système de valorisation que nous ayons pour le comportement humain est l’argent, mais quel comportement humain l’argent valorise-t-il ? La compétitivité rapporte de l’argent. La guerre et le militarisme font de l’argent. L’écocide rapporte de l’argent. La maladie rapporte de l’argent. Les marchandises finies font de l’argent. L’enchevêtrement du pouvoir des entreprises et de l’État fait de l’argent. Bourrer le crane des gens en leur faisant croire qu’ils ont besoin de plus que ce qu’ils ont rapporte de l’argent.
Qu’est-ce qui ne rapporte pas d’argent ? La gentillesse. La collaboration. La paix. Une biosphère florissante. La santé. Le bien-être psychologique. Transparence et intégrité politiques. Des décisions prises au bénéfice de l’ensemble. Des sources d’énergie qui ne peuvent pas être contrôlées par les puissants. L’abondance. Des gens qui se contentent de ce qu’ils ont.
Goldman Sachs asks in biotech research report: ‘Is curing patients a sustainable business model?’ https://t.co/My7QSINDHc
— CNBC (@CNBC) April 11, 2018
Goldman Sachs demande dans un rapport de recherche sur les biotechnologies :
« Soigner les patients est-il vraiment un modèle économique durable ? »
L’argent n’a pas de sagesse. La « main invisible » du marché libre ne valorisera jamais les meilleurs anges de l’humanité.
Les entreprises pharmaceutiques ont tout intérêt à valoriser les traitements au détriment des préventions et des cures. L’industrie de l’armement a tout intérêt à attiser les hostilités entre les nations. Les industries écocides ont tout intérêt à s’assurer qu’elles peuvent continuer à violer et à piller notre planète sans intervention légale, tout en se déchargeant du coût des conséquences sur le public. Les entreprises monopolistiques ont tout intérêt à se mêler au pouvoir gouvernemental pour se protéger des procès antitrust.
Tout ce que nous souhaitons ardemment pour notre monde – la façon dont nous savons qu’il devrait être au plus profond de notre cœur – est subverti par les systèmes que nous avons mis en place, qui sont tous orientés dans la direction exactement opposée.
Le monde ne connaîtra jamais la paix tant que la guerre sera rentable. Le monde ne connaîtra jamais la santé tant que la maladie sera rentable. L’écosystème ne prospérera jamais tant que l’écocide sera rentable. Nous resterons gouvernés par des tyrans aussi longtemps que nos systèmes valoriseront la tyrannie.
Pour avoir un monde sain, nous allons devoir mettre en place des systèmes qui valorisent la santé au lieu de la méchanceté. D’ici là, l’attraction gravitationnelle de ces systèmes nous poussera continuellement vers le dysfonctionnement. Espérer que nous pourrons évoluer vers la paix et l’harmonie sans changer ces systèmes, c’est comme sauter d’une falaise et espérer ne pas tomber.
Nous devons passer de modèles basés sur la compétition à des modèles basés sur la collaboration. Des systèmes qui valorisent le travail en collaboration pour le plus grand bien, à la fois en collaboration les uns avec les autres et avec notre écosystème. Tant que nous ne le ferons pas, nous tomberons à chaque fois.
source : Caitlin Johnstone
traduction Wayan, relu par Hervé, pour Le Saker Francophone
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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