par Iván Hirsch.
Lors d’un sommet vide, l’Uruguay a affirmé son intention de signer un accord bilatéral avec la Chine et le Brésil a réussi à faire réduire les droits de douanes externes communs.
L’agonie du MERCOSUR, qu’on a pu constater lors du récent sommet réalisé près d’Asuncion, est la manifestation d’une crise très profonde. La réunion a été traversée par la récente annonce de la signature du traité de libre commerce entre l’Uruguay et la Chine qui rompt l’accord de base du bloc sud-américain qui veut que les accords bilatéraux soient signés en commun. Ce qui s’exprime à présent comme un démembrement est le résultat d’une longue impasse du MERCOSUR, des tendances centrifuges de la guerre commerciale et surtout de l’échec des bourgeoisies créoles à développer les pays du cône sud à cause de leur subordination à l’impérialisme.
Le président uruguayen Luis Lacalle Pou n’a pas signé le document final du sommet. Le Brésilien Jair Bolsonaro avait déjà fait savoir publiquement qu’il ne pensait pas assister à ce rendez-vous. Gabriel Boric a fait la même chose par mépris pour la spéculation d’Alberto Fernández sur le fait que le nouveau Gouvernement chilien lui apporterait plus de soutien dans la région. Lors de ce sommet vide, l’Uruguay a fait connaître son intention d’avancer dans l’accord commercial avec le géant asiatique, ce qui pose beaucoup de questions sur l’avenir du bloc.
Lacalle Pou a refusé d’apposer sa signature sur la déclaration finale en arguant qu’elle ne tenait pas compte de sa demande d’avancer dans l’assouplissement des règles du MERCOSUR. Sa volonté d’avancer dans le traité commercial bilatéral avec la Chine, principal acheteur de ses exportations, est un coup d’État au cœur du bloc. Parce qu’après trois décennies d’existence, il n’a eu aucun développement industriel et que maintenant, nous avons quatre pays qui le composent et sont en compétition pour vendre à la Chine du soja, de la viande et des produits lactés. L’Uruguay obtiendrait des avantages compétitifs pour exporter mais il lui manque un parc industriel comme l’argentin ou le brésilien qui se voient empêchés d’entrer en concurrence avec les manufactures chinoises.
Les confédérations industrielles de Sao Paulo et d’Argentine manifestent en chœur leur rejet de ces tractations car une ouverture plus importante aux importations de Chine menace de balayer des secteurs entiers sans capacité de concurrence. Plus encore, le sommet a accordé une réduction de 10% des droits de douane externes communs qui grèvent les importations de produits industriels (qui avait déjà été faite unilatéralement par le Gouvernement de Rio de Janeiro) et s’est engagé à réviser les règles d’origine, ce qui complique plusieurs secteurs manufacturier. Ce qui est explosif dans cette question a été aplani pour le moment en en exemptant une minorité de secteurs (comme le secteur automobile ou le secteur chimique).
Les poulpes de l’agro-industrie, par contre, sont parmi les principaux bénéficiaires d’un assouplissement commercial qui dégrève leurs exportations. C’est ce que cherche à stimuler l’accord commercial MERCOSUR-Singapour annoncé, une destination exclusivement de produits agraires bien que de toute manière, l’initiative promette de finir enlisée comme l’accord avec l’Union européenne auquel on a fait tant de publicité. Les États du bloc sont incapables d’organiser une réinsertion dans le marché mondial et cette impasse s’exprime dans les tendances à la désagrégation régionale comme le montrent les résolution unilatérales qui affectent les piliers de fonctionnement du marché commun.
La dislocation commerciale, d’autre part, a renversé ce qui était favorable à l’Argentine. Au premier semestre de cette année, l’échange avec le MERCOSUR a eu un déficit supérieur à 2 600 000 000 de dollars, en particulier parce que la balance commerciale avec le Brésil était dans le rouge et… à cause de l’importation de haricots de soja ! La même chose arrive avec l’échange bilatéral Argentine-Brésil des multinationales automobile qui sont également très largement dans le rouge. Les questions d’Alberto Fernandez envers le Gouvernement uruguayen et sa défense du bloc n’a aucune perspective pour sortir de ce bourbier. C’est une position défensive et de paralysie qui peut s’étendre à toute la bourgeoisie nationale.
Les propositions « d’ouverture » comme celle de Lacalle Pou ou de Bolsonaro n’ouvrent même pas une voie au développement dans un marché mondial aux portes de la récession, de la panique boursière, des affrontements commerciaux et de la guerre. Plus encore, l’augmentation des taux d’intérêt de la FED et de la Banque centrale européenne aggrave une tendance au rapatriement des capitaux qui abandonnent ce qu’on appelle les pays émergeants. Le traité de libre commerce sur le tapis entre l’Uruguay et la Chine reproduiras les règles semi-coloniales d’exportation de secteurs primaires et d’importation de produits manufacturés mais dans ce cas en brisant les accords avec les États sud-américains et fait partie de l’initiative de la Route de la Soie. En même temps que ceux-ci font pression pour les accords commerciaux du géant asiatique avec le reste du MERCOSUR, l’offensive de l’impérialisme yankee pour bloquer cette pénétration va se réchauffer.
La réunion du marché commun du Sud, tout près de l’endroit où il a été fondé il y a plus de 30 ans, un patient qui agonise. Dans les disputes pour l’assouplir et réduire les droits de douane communs, il n’y a pas de confrontation idéologique entre libéraux et protectionnistes mais des chocs entre États et même entre fractions capitaliste à l’intérieur des mêmes frontières, dans un cadre de crise et de dislocation de la région et de soumission aux pressions croisées en particulier des États-Unis et de la Chine. Une preuve en est que les tractations pour un TLC ont été communiquées de Pékin il y a six ans par le membre du Front Large Tabaré Vásquez. Seule L’intervention des travailleurs contre les Gouvernements qui veulent des ajustements peut surmonter l’échec de l’intégration régionale capitaliste. C’est la seule classe qui peut véritablement unir l’Amérique latine dans une fédération d’États socialistes.
source : Resumen Latinoamericano
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
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