par Edouard Husson.
Non seulement Elisabeth Borne est le premier « Premier ministre » à tenter de gouverner sans majorité au Parlement. Mais elle a fait une découverte bouleversante ! Saviez-vous que nos soldats « se battent quelquefois au péril de leur vie » ? Si notre nouveau Premier ministre inspirait la sympathie, on dirait : « un mot d’enfant » ! Mais une telle formule laisse songeur au moment où la France envoie des armes à l’Ukraine et encourage l’armée ukrainienne à se battre contre la Russie…
Réécoutez Madame le Premier ministre à environ 1h15 minutes de son discours. Je dois avouer que je suivais d’une oreille distraite ce qui avait précédé – tant il est vrai, comme l’explique Eric Verhaeghe dans ces colonnes – que le discours est un petit manuel d’application du Grand Reset ; mais, tout à coup, j’ai eu la chair de poule lorsque j’ai entendu les mots suivants : « La guerre aux portes de l’Europe et la menace terroriste nous le rappellent : nous devons pouvoir nous défendre, nous devons pouvoir faire entendre notre voix. Au Levant, au Sahel, sur le flanc est de l’Europe, sur terre, dans les airs, sur les mers, dans le cyberespace, partout et dans tous les milieux, nos armées se battent pour notre liberté, parfois au péril de leur vie ! » (Applaudissements)
Je vais faire une confidence. J’ai été bouleversé par cette formule ! C’est inouï : cette dame qui loge désormais, pour quelques semaines ou, qui sait ?, quelques années, à l’Hôtel Matignon, et qui nous confie que la République lui a « donné un métier », est tellement perspicace qu’elle a découvert que nos soldats pouvaient être tués à la guerre ! C’est vraiment bouleversant. Il m’a fallu quelques minutes avant de pouvoir reprendre et écouter les dix dernières minutes du discours. Et encore, j’ai fait une pause: tout d’un coup j’ai pris conscience que Madame Borne étant entrée à l’École Polytechnique en 1981 – une école militaire ! – il lui a fallu quarante et un ans pour découvrir qu’un soldat peut perdre la vie au combat. La formation des élites françaises est tout à fait remarquable, unique, sans équivalent dans le monde.
Ode au jeune scribouillard qui a servi de plume au Premier ministre !
Je l‘imagine, jeune scribouillard, qui a rédigé les versions successives du discours de politique générale de Madame Borne. Et quelque chose me dit que tu étais très fier de ta formule. Dans ce froid discours, très « techno » – mais tu as respecté les consignes – tu t’es permis une fantaisie, une formule à propos de laquelle tu as pensé que tu faisais entrer un peu d’épopée dans le texte. On passait en quelques mots à du Victor Hugo : « … nos armées se battent pour notre liberté, parfois au péril de leur vie !… »
Tu étais un peu inquiet ; non parce que tu n’as pas fait de service militaire et tu abordais une terra incognita ; mais parce que tu n’étais pas sûr que la formule serait acceptée par le directeur de cabinet. Mais si ! elle est passée ! Victoire ! Tu t’es senti presque Bonaparte ayant franchi le pont d’Arcole ! Tu t’attendais bien à ce que le Premier ministre découvre le discours un peu au dernier moment. Mais en plus, elle a mis le ton en lisant ces mots. Elle s’est appliquée.
Ce n’était pas évident ! La France soutient l’Ukraine en guerre. Et « le PR » (« président de la République », pour les non-initiés) a bien déclaré, à l’issue du sommet de l’OTAN à Madrid, que nous sommes à fond derrière l’Ukraine. Mais tu avais pour instruction de ne parler de cela qu’à la fin. D’abord parce que les affaires de défense, cela fait partie des prérogatives « du PR ». Mais aussi parce qu’il ne faut pas réveiller les Français. Il ne faut pas qu’ils se rendent compte que leur président et leur gouvernement jouent avec le feu et sont de facto en guerre avec la Russie.
Mais voilà. Tu l’as placé ! Et il y a eu des parlementaires pour applaudir ta formule. C’est presque la gloire.
Je modère mes propos parce que tu pourrais finir par remarquer qu’il s’agit de sarcasmes. Tu pourrais prendre conscience, tout d’un coup, que ta patronne, comme une grande partie du monde dirigeant français, vit dans un univers parallèle.
« Le PR » nous expliquait « nous sommes en guerre ! » au début du COVID. Et à présent que nous sommes en guerre froide voire tiède avec la Russie, il fait au contraire comme si de rien n’était. Il ne faudrait tout de même pas que les Français se réveillent et prennent conscience que, confortablement assis sous les ors des palais de la République, « le PR », et « la PM » encouragent le gars que l’on voit souvent à la télé habillé en kaki, T-shirt et treillis – je crois qu’il s’appelle Vladimir Zelenski – pardon Volodymyr Zelensky – à ordonner l’envoi à une mort très probable de dizaines de milliers d’Ukrainiens de tous âges alors que l’Ukraine a perdu la guerre depuis longtemps – et d’ici quelques semaines, il y aura des femmes aussi parmi les réquisitionnés, ta patronne doit être au courant !
Ami « plume », ne m’en veuille pas ! Mes moqueries ne te sont pas adressées. Elles vont au nouveau Premier ministre français.
source : Le Courrier des Stratèges
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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