Petite histoire de la dévotion au Sacré-Cœur

Petite histoire de la dévotion au Sacré-Cœur

On connait tous les petites images en carton représentant le Sacré-Cœur de Jésus qui ornaient jadis presque chaque chaumière canadienne-française. Au-delà de cette pratique de piété populaire et du côté un peu kitch de la chose, Le Verbe a pensé profiter de la fête liturgique du Sacré-Cœur de Jésus pour découvrir les origines de cette dévotion typiquement catholique.

Le cœur est le muscle qui a pour rôle de réguler la circulation sanguine en pompant le sang partout dans notre corps. Même ceux qui n’ont pratiquement aucune notion de médecine (incluant l’auteur de cet article) savent que le cœur est essentiel à notre survie.

Côté philosophique, Aristote considérait le cœur comme le siège des sensations. La médecine démontrera que c’est plutôt dans le cerveau que le tout se joue, mais l’idée antique gardera toute sa valeur sur le plan symbolique. Qui, encore aujourd’hui, n’a jamais eu le cœur brisé en amour ?

Dans la Bible, le cœur est présenté à la fois comme le symbole de la vie ultime, par son rôle biologique, et comme le siège de l’âme. Les auteurs bibliques désignent le cœur comme le lieu de l’intériorité humaine : c’est dans le cœur des hommes, par l’action de l’Esprit saint, que le dialogue s’instaure entre Dieu et sa créature.

C’est la raison pour laquelle plusieurs passages de l’Ancien Testament présentent le cœur comme le lieu de l’Alliance entre Dieu et les hommes. Le livre de Jérémie (31,33) mentionne : « Voici donc l’alliance que je conclurai avec la communauté d’Israël après ces jours-là, oracle du Seigneur : je déposerai mes directives au fond d’eux-mêmes, les inscrivant dans leur être. »

À nouvelle Alliance, nouveau cœur !

Le prophète Ézéchiel (36,26), quant à lui, révèle encore plus le lieu d’Alliance : « Je vous donnerai un cœur neuf et je mettrai en vous un esprit neuf, j’enlèverai de votre corps le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. » La réponse humaine à cette promesse divine se trouve au psaume 40, 8 : « Je veux faire ta volonté, mon Dieu ! Et ta loi est au fond de mon cœur. »

L’Ancien Testament nous enseigne donc que la notion du cœur en tant que siège de l’âme et lieu d’Alliance est présente dans le plan divin bien avant la venue du Christ.

Le Nouveau Testament reprend l’idée du cœur comme siège de l’Alliance. L’épitre aux Galates (4-6) l’explicite clairement : « Et parce que vous êtes fils, Dieu a envoyé dans nos cœurs l’Esprit de son Fils, lequel crie : Abba ! Père. »

L’épisode de la lance de Longinus qui transperce le cœur de Jésus sur la croix, rapporté par l’évangile de Jean (19, 34), est le symbole ultime de cette nouvelle Alliance.

Au-delà de l’horrible plaie physique qu’elle cause, la lance, qui transperce le cœur du Christ, incarne avant tout le mal des hommes qui meurtrissent le Sauveur. Symboliquement, c’est donc le sacrifice du cœur du Christ, en tant que siège de l’âme, qui obtient la rédemption des péchés pour l’humanité.

La première fête officielle à être consacrée au Cœur de Jésus l’est d’ailleurs en lien avec cet épisode : en 1353, le pape Innocent VI proclame la fête de la sainte Lance dans l’Empire romain germanique.

Les écrits et les apparitions

Une longue lignée d’auteurs chrétiens ont écrit à propos du Sacré-Cœur de Jésus : Anselme de Cantorbéry, Bernard de Clairvaux, Albert le Grand, Catherine de Sienne, François de Sales, Pierre de Bérulle, Vincent de Paul, Jean Eudes et Bossuet, pour ne nommer que les principaux. La réflexion théologique sur le sujet est donc très vaste et couvre toutes les périodes historiques depuis le Moyen-Âge. 

Il faut également souligner les multiples visions et apparitions du Sacré-Cœur qui ont été reconnues par l’Église. Les premières visions remontent à 1199, alors que le Sacré-Cœur se manifeste à Lutgarde de Saint–Trond. Suivront des manifestations à sainte Marguerite de Cortone, Gertrude la Grande, Pierre Canisius et, surtout, à Marguerite-Marie Alacoque en 1675.

C’est lors de ces dernières apparitions auprès de la sainte française que le Sacré-Cœur lui déclare la très célèbre phrase : « Voici ce Cœur qui a tant aimé les hommes […] jusqu’à s’épuiser et se consumer pour leur témoigner son amour. »

C’est également lors de ces apparitions que le Sacré-Cœur fait douze promesses à l’humanité, dont la promesse numéro neuf : « Je bénirai moi-même les maisons où l’image de mon Sacré-Cœur sera exposée et honorée. » D’où les petites images accrochées au-dessus des portes d’entrée des foyers catholiques qu’on a mentionnées en introduction !

Il faudra cependant attendre en 1856 pour que le pape Pie IX officialise à toute l’Église la fête du Sacré-Cœur de Jésus, déjà soulignée de diverses manières depuis le Moyen-Âge. Trois de ses successeurs écriront des encycliques sur le sujet, confirmant de cette manière l’attachement de l’Église à cette dévotion toujours célébrée aujourd’hui, 19 jours après la Pentecôte.

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