« On se dressera nation contre nation, royaume contre royaume. Il y aura de grands tremblements de terre et, en divers lieux, des famines et des épidémies. »
Ces temps-ci, avouons-le, l’ambiance est de mort. Menaces climatiques, sanitaires et nucléaires s’accumulent. Et pourtant… rien de réellement nouveau sous le soleil du printemps.
La mythologie raconte qu’à l’origine du monde, Pandore ouvrit une boite de laquelle sortirent tous les maux qui accablent l’humanité : maladie, guerre, misère et folie. Seule Elpis (« espoir » en grec) ne put s’échapper, la jeune femme ayant refermé le couvercle à temps. Toute l’Antiquité s’est ensuite demandé pourquoi l’espoir serait une calamité.
La réponse tient peut-être en ce qui différencie l’espoir de l’espérance.
Alors que le premier, sentiment purement humain, ne compte que sur ses propres forces, la seconde, vertu qui conduit au divin, se confie en autrui. Pas étonnant que notre époque semble être en panne d’espérance, elle qui ne jure que par l’autonomie.
Mais si l’on consent à se laisser épauler par elle, la petite fille de rien du tout, comme l’appelait Péguy, prend de l’assurance. Voilà pourquoi l’enfant, tout comme le pauvre, est un maitre d’espérance. Il sait qu’il peut tout avec celui qui l’aime.
L’amour catalyseur d’espérance ! Thomas d’Aquin l’avait bien remarqué : « Quand on aime quelqu’un et que l’on sait en être aimé, il est normal de mettre en lui son espérance. » Car l’ami assiste l’ami comme un autre soi-même. Et si, par une grâce inimaginable, les hommes deviennent des « amis de Dieu », leur confiance s’élève jusqu’aux cieux.
Paradoxalement, c’est notre fragilité qui nous donne la possibilité d’espérer. Vulnérabilité de l’amour comme de la mort.
Nul besoin d’espérer pour les immortels comme pour ceux qui ignorent qu’ils vont mourir. Les dieux et les bêtes ne vivent que dans l’instant. Espérer est l’affaire des inachevés. Dante aurait tout aussi bien pu écrire à la porte du paradis ce qu’il grava sur le portique de l’enfer : « Vous qui entrez, laissez toute espérance. » Car pour les bienheureux comme pour les damnés, tout est accompli, plus rien à attendre.
L’existentialiste Gabriel Marcel considérait la mort comme le tremplin d’une espérance absolue. Pour lui, « un monde où la mort ferait défaut serait un monde où l’espérance n’existerait qu’à l’état larvé ». Fuir la mort comme la peste, c’est vivre de faux espoirs. L’obsession pour l’espérance de vie fait perdre de vue l’espérance de mort.
En refusant la dépendance de l’amour et en refoulant la limite de la mort, notre monde se condamne au désespoir. Déception assurée de son projet d’indépendance et frustration amplifiée de devoir tôt ou tard tout quitter.
Fort heureusement, Pandore n’a pas libéré Elpis sur terre ! Sa captivité nous porte encore, au milieu de tous nos malheurs, à espérer un Royaume qui n’est pas de ce monde.
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Source : Lire l'article complet par Le Verbe
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