Dans un communiqué officiel publié le lundi 2 mai 2022, le Gouvernement de la République du Mali « dénonce » avec effet immédiat les accords militaires avec la France. Une procédure qui ouvre la voie à l’annulation de ces accords passés avec la France et sur la base desquels les troupes françaises opèrent dans ce pays du Sahel depuis 2013, officiellement pour contrer une menace “terroriste” que la présence militaire française ne cesse d’aggraver pour des raisons géopolitiques et économiques servant les intérêts coloniaux de l’État profond français.
Bamako constate la décision unilatérale française de suspendre les opérations militaires conjointes avec les forces armées maliennes et dénonce une cinquantaine de violations de l’espace aérien malien par des aéronefs militaires français ou affrétés par l’armée française après l’instauration d’une zone d’interdiction aérienne temporaire malienne. Cependant c’est les chicanes bureaucratiques typiques de la partie française visant à faire perdurer toute tentative de révision des accords militaires avec le Mali qui semblent avoir suscité l’ire du gouvernement malien. Celui-ci y dénonce une « manœuvre dilatoire consistant à demander une réunion d’experts » pour la “relecture” du traité de défense. Ce qui risque de durer des décennies vu l’expérience de la partie française en matière d’entraves procédurières et de non-respect des dispositions.
Les opérations militaires françaises au Mali ont abouti à une impasse complète en dépit de l’apport significatif de mercenaires tchadiens et les tentatives forcenées de Paris d’y mêler les Nations Unies ainsi que d’autres pays de l’Union européenne et de l’OTAN afin de réduire un véritable tonneau des Danaïdes en termes financiers.
Si au début l’intervention française évite la chute de Bamako entre les mains de groupes armés venant du Nord du pays, elle s’ensable assez vite en raison d’une absence évidente d’objectifs stratégiques et d’une influence grandissante de l’idéologie dans la conduite des opérations militaires avec l’invention d’un ennemi imaginaire qualifié vaguement de “djihadiste” niant ainsi l’extrême complexité d’une juxtaposition de facteurs socioéconomiques et ethniques en plus de l’irrédentisme nordiste.
Le manque de résultats, la gabegie sur le terrain et l’aggravation d’un conflit de basse intensité aliènent une grande partie de populations malienne, laquelle perçoit la présence militaire française comme une initiative coloniale visant à préserver les intérêts privés de l’oligarchie au pouvoir en France. La mise en place d’hommes politiques maliens favorables aux intérêts néocoloniaux creuse un clivage grandissant entre une opinion ignorée et une caste corrompue entraînant la mutinerie et le putsch des militaires de la nouvelle génération, notamment des officiers formés dans le cadre d’accords d’assistance avec les États-Unis.
En parallèle, la mauvaise image de la France coloniale dans les pays francophones d’Afrique occidentale met en évidence l’existence d’une opposition grandissante au système d’exploitation économique qu’une partie de l’opinion africaine identifie plus ou moins avec le Franc CFA, une survivance monetaire anachroniques de l’époque coloniale en ce début du 21e siècle.
Pour le pouvoir français, il fallait préserver coûte que coûte le dernier pré-carré colonial en Afrique de l’influence économies chinoise et par dessus tout russe après la percée inédite de la firme de securité privée PMC Wagner (Prigogine) en Centrafrique, provoquant une guerre informationnelle brève mais intense entre la France et la Russie dans les pays du Sahel.
Pour le moment seuls le Mali et la Centrafrique semblent poser des problèmes à la “Françafrique”. Des pays comme le Niger, le Tchad, la Côte d’Ivoire le Sénégal et le Cameroun demeurent des modèles de ce système archaïque qui génère une pauvreté endémique et le désespoir dans des pays disposant de ressources fabuleuses et poussant des millions de jeunes africains à fuir ailleurs.
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