par Bruno Bertez.
Les responsables occidentaux ne cherchent pas à faire partager leurs analyses aux citoyens.
Ils affirment, ils juxtaposent et martèlent.
Ils ne parlent pas à la tête ou à la raison, ils cherchent à déclencher des émotions, des perceptions, des adhésions, des rejets.
C’est général ; vous ne trouvez absolument personne qui tente de mettre du sens sur les évènements et à les articuler dans une logique ou une dialectique historique. C’est pour cela que, souvent, je répète que l’Histoire pour eux est un présentisme et qu’elle n’est qu’à deux dimensions.
Jamais les élites occidentales n’entrent dans la démonstration, elles se contentent de recourir aux évidences ou bien sur aux soi-disant évidences.
Je vous donne un exemple qui je crois est convaincant.
Avez vous entendu un jour une analyse correcte, non idéologique, non biaisée de la Grande Crise Financière de 2008 ? Moi jamais !
Dès 2009 non seulement la crise a été enterrée/escamotée, mais plus jamais les élites n’y ont fait référence pour expliquer les mesures que pourtant elles prenaient à cause de cette crise ! Pourquoi ? Tout simplement parce que si les diagnostics de la crise financière avaient été faits, si les évènements, les causes et effets avaient été analysés, alors les débats politiques auraient été possibles, efficaces, bien centrés et on aurait vu surgir les vraies oppositions aux remèdes apportés par les élites. Mais cela, les classes supérieures ne le voulaient pas car elles voulaient, jouant sur les évidences fausses, imposer l’austérité aux peuples pour leur faire payer la crise des riches.
Elles ont imposé l’austérité, qui fut une erreur terrible et elles ont ensuite abandonné cette austérité sans jamais rien relier aux causes premières de la crise ; le surendettement du système. Si dès le début on avait diagnostiqué correctement une crise de surendettement on aurait tout de suite vu l’absurdité qui consistait à réduire la croissance pour rendre les dettes supportables ; on se serait aperçu, plus tard que faire encore plus de dettes pour faire face à une crise d’excès de dettes c’était du gribouille !
Et encore maintenant interrogez les citoyens, vous verrez que pour ainsi dire aucun citoyen ne sait que sa vie depuis 12 ans est déterminée par ce qui s’est passé en 2008 !
Nos classes supérieures ne veulent pas que le peuple, les peuples sachent. Ils veulent qu’ils suivent, qu’ils se rallient, qu’ils acceptent, ils ne veulent pas que les peuples décident en toute connaissance de cause. Ils ne veulent pas, ils ne peuvent supporter la lumière qui éclairerait les décisions prises.
C’est une conspiration implicite, cette conspiration est intégrée dans une culture, dans un système de rapports entre les élites et le peuple ; les peuples ne doivent pas connaitre les tenants et aboutissants des décisions qui leur sont imposées.
Retenez bien ceci car c’est très important, la conspiration est implicite, elle consiste à utiliser des méthodes de gouvernements qui n’exposent pas les éléments des choix politiques les plus importants. La complicité est fondée sur l’escamotage et la création d‘un monde parallèle de fausses interprétations/de fausses constructions entretenues par la classe médiatique.
Et ceci me conduit à cette affirmation princeps : en clair les peuples ne doivent pas être éclairés ! Et j’affirme que c’est un déni de démocratie et en même temps une façon de faire passer nos régimes politiques non démocratiques pour démocratiques.
Cette pratique de ne pas éclairer le peuple repose sur la double conception d’un monde à deux vitesses et d’un monde de mystification.
En gros on ne doit pas rendre le peuple intelligent car si il l’était, il comprendrait que sur le fond tout est simple même ce qui apparait compliqué. Et il comprendrait surtout que le système le baise et qu’il est exploité, privé de ses choix, privé du sens de sa vie.
Toutes les choses essentielles doivent rester cachées, non sues parce que si elles n’étaient pas secrètes, alors la conscience les éclairerait et verrait en quoi elles sont sujettes à vrais débats.
Il est faux de dire que le peuple ne peut pas comprendre, il peut tout comprendre du moment que l’on ne cherche pas à le baiser ; j’en fais l’expérience moi qui explique des soi-disant mystères depuis des décennies ; le peuple peut tout comprendre mais, bien sur, il ne faut pas qu’il comprenne. Il saurait à qui profitent les multiples décisions qu’on lui présente comme s’imposant d’elles mêmes !
Je me souviens de mon ralliement à Chevènement au temps de sa splendeur lorsqu’il a « écrit » son ouvrage « Le pari de l’intelligence » ; quel beau programme démocratique.
Hélas lui même a progressivement perdu ce pari. Pourquoi a t-il perdu son pari ? Parce qu’il est devenu rentier de la politique, politicien professionnel, il en a fait un métier, et puis s’est laissé abuser par l’idéologie de la fameuse République. La République à deux vitesses celle des élites d’un coté et celle du peuple de l’autre.
En passant je veux vous faire comprendre, toucher du doigt qu’il n’y a pas de vraie différence entre le régime de Poutine, considéré comme autoritaire et nos régimes occidentaux.
Ni l’un ni l’autre ne sont libéraux ou démocratiques et ils résolvent simplement la question des rapports entre le Pouvoir et le Peuple de façon différente.
Poutine le résout de façon traditionnelle, encore conservatrice par le recours à l’autorité ; tandis que les occidentaux le résolvent de façon moderne et post moderne par la tricherie, le mensonge, la propagande par la disjonction entre l’esprit et la pratique de la démocratie.
Poutine résout la question des rapports entre le Pouvoir et le Peuple de façon Hard, les occidentaux le résolvent de façon Soft.
Qui est plus démocrate, Poutine qui affiche un régime autoritaire ou L’Occident qui se joue la comédie de la démocratie libérale mais qui manipule les savoirs, les connaissances, les sujets, les consentements, et finalement les sujets politiques eux même ?
Posez vous la question.
Moi je préfère encore un régime qui se donne pour ce qu’il est avec ses défauts à un régime hypocrite qui se dissimule, qui ment et qui au fond a choisi de traiter la question du pouvoir sur le peuple en manipulant le peuple voire en essayant de le reprogrammer et d’en construire un autre plus docile.
Le thème du grand remplacement est au cœur de nos sociétés et des idiots comme Mélenchon soi disant philosophe refusent de le voir, ce Grand Remplacement il n’est pas centré/limité sur la question migratoire il est centré sur la réalité ; le Grand Remplacement consiste à remplacer les sujets de la démocratie par des simplets, par des idiots désirant et consommant.
La question migratoire n’est qu’une partie du Grand Remplacement en cours.
La folie des élites est de nous remplacer par des artefacts, par des NPC, par des Non Playing Character, c’est dire des Mêmes.
L’Occident ne fait pas des guerres pour imposer sa culture, son régime libéral, il fait des guerres pour imposer le non-libéralisme soft, imposer la Mêmitude, imposer la solution au problème de la démocratie qu’ont choisie les élites, cette solution c’est le Grand Reset. Le Grand Reset bien compris bien sûr.
Le Grand Reset est structurel. Il vise vos structure de pensée, vos structures organisationnelles, vos structures de pouvoir, vos structures constitutives, il vise votre Etre. Il est Ontologique. Et croyez moi il est bien plus barbare, sans pitié et criminel que l’autorité de Poutine.
C’est un constat que je fais non seulement pour les évènements de politique étrangère et les guerres impériales mais c’est aussi un constat que je fais s’agissant des affrontements intérieurs tels qu’ils se sont manifestés lors des Gilets jaunes par exemple ou lors des rebellions anti-Covid.
Il y a une sorte de « je n’en veux rien savoir » du fond, de la profondeur, des éléments fondamentaux qui peuvent être à l’œuvre ; en tant qu’élite sure de détenir la vérité je refuse tout débat, toute discussion et j’aligne des pseudo évidences mises en forme par la Com de mes conseillers.
C’est général, faites y attention vous verrez que je ne me trompe pas. En occident on n’offre pas d’analyse des situations, des tensions, on colle une étiquette : ils ne sont pas d’accord, ce sont des nazis ! On accumule les pseudo évidences, on répète, on assène, on salit, on insulte, mais jamais on ne rentre dans le fond des sujets et le fond c’est bien sûr: le sens.
C’est pour cela par exemple que quelqu’un comme Asselineau (ou de Villepin) est irremplaçable, lui il relie les causes et les effets, ils creuse et donne du sens. Et c’est pour cela qu’il n’ a pas été autorisé à avoir une audience nationale ; il est banni, tout comme on a banni en Occident la recherche du sens.
Regardez Biden, certes il est incapable de réfléchir compte tenu de son état de sénilité mais il sait répéter ce que lui soufflent ses conseillers et son prompteur. Eh bien qu’a-t-il trouvé comme analyse de la guerre en Ukraine ? Rien il se contente de répéter que Poutine est un fou, un assassin, un criminel de guerre, il ne croit pas que la Russie existe, a des intérêts, une histoire, une spiritualité ; non il réduit la Russie à Poutine.
Je pense que c’est là que se situe l’unité profonde qui unit le camp occidental ; c’est la pensée. C’est une forme de pensée, une pensée commune, une pensée partagée, une pensée politique théorique qui évacue l’intelligence et qui la remplace par les affirmations d’autorité mises en formes par la Com et les médias.
La pensée politique occidentale ne pense plus la réalité, elle pense un réel fantasmé, elle crée sa propre réalité et ne pense qu’à une chose : l’imposer.
Saddam a des armes de destruction massive, Poutine veut reconstruire l’empire de l’URSS.
L’occident ne pense plus ni sa réalité intérieure avec son peuple mécontent, révolté, avec son peuple qui souffre et gâche sa vie, non en Occident on a tracé deux camps, le camp du bien et le camp du mal et en plus on a unifié ces deux camps en fusionnant l’intérieur et l’extérieur.
SI vous lisez le discours de Poutine que j’ai publié il y a quelques jours, si vous lisez les textes de Lavrov que je vous offre régulièrement alors vous constatez la différence avec les textes occidentaux ; ils sont historiques, logiques, didactiques, dialectiques. Ils s’adressent à la partie noble des individus, à la capacité de compréhension des auditoires; Ils sont respectueux de l’intelligence. Ils partent des situations à expliquer et remontent aux décisions et actions.
Cette forme de pensée est exactement semblable à celle des gens comme Asselineau dans ses vidéos ou encore Vedrine. Tout est expliqué tout a une cause, rien ne tombe du ciel de l’imbécilité supposée des adversaires. Non, au contraire leur rationalité profonde est démontrée et décortiquée. Il n’y a pas une affirmation à l’emporte-pièce et ensuite des torsions malhonnêtes des récits pour les faire entrer dans le cadre, non pas besoin de chausse pied, tout s’emboite.
Et je ne pose pas la question de savoir si les causes et éléments de raisonnement sont présentés d’un certain point de vue ou non ; cela je l’admets, chacun présente sa version, son point de vue, mais la différence tient au fait que certains utilisent des éléments de rhétoriques dépouillés de sens et uniquement chargés d’affects alors que d’autres utilisent des articulations logiques vérifiables.
Pour donner un exemple.
On peut faire des choix opposés et les expliquer honnêtement.
On peut choisir un monde multipolaire en disant que c’est le sens de l’Histoire puisque l’Empire Américain décline et que le bloc Chinois progresse ; mais on peut aussi choisir de vouloir un monde unipolaire dominé par les Américains parce que ce monde sera moins belliqueux, moins enclin à la guerre puisqu’il y aura un gendarme, un maitre qui imposera son ordre. Un monde comme le disent les néocons; « The World America Made ».
Je comprends les deux choix et c’est le fond du problème géopolitique mais il est tellement central qu’il mérite d’être posé et doit être explicité.
La guerre actuelle s’inscrit non dans la tête de Poutine – non cela c’est du Biden -, la guerre actuelle s’inscrit dans la problématique de la constitution des camps dans la perspective de la Grande Guerre du Péloponnèse qui opposera le camp du bien Américain au camp du mal, le camp Chinois.
La Russie est un quadruple enjeu :
– pour encercler et menacer la Chine ,
– pour piller ses matières premières
– pour forcer les Européens à s’aligner, à accepter la mutation de l’OTAN vers une alliance offensive
– pour forcer les Européens à se subordonner.
J’espère que vous avez compris ce que j’essaie de faire passer. Une fois que l’on a compris cela on voit les choses d’une autre façon. On sépare, dans les narratives ce qui est respectueux de l’interlocuteur, de ce qui est au contraire expression du mépris pour son intelligence.
Au passage je me dois de signaler un élément que peut être vous ignorez. Si nos médias n’étaient pas serviles ou affligés de la même maladie intellectuelle, de la même infirmité que les dirigeants occidentaux, cette pratique de la rhétorique de surface ne serait pas possible.
En effet nos médias utiliseraient le droit de suite dans les interviews, ils pousseraient les interviewés dans leurs retranchements ultimes, ils les mettraient face à leurs contradictions et incohérences, mais ce n’est pas le cas. Nos journaleux n’utilisent pas le droit de suite, ils se contentent quand les interlocuteurs pratiquent la rhétorique de langue de bois de baisser la tête sur leurs notes ! Ils n’utilisent le droit de suite que contre les candidats mineurs.
Une dernière réflexion qui ouvre une porte sur des articles futurs ; cette réflexion m’est inspirée par l’affirmation de Lavrov qui dit que la politique américaine actuelle vise à subordonner les Européens.
Je soutiens que les Européens ont été subordonnés en 1971 et 1973.
Je le pense également comme Lavrov et tout concourt à le confirmer. Même le grand public s’en aperçoit.
Mais je vais plus loin que Lavrov : je dis que c’est déjà fait de façon irrémédiable, les Européens ont perdu le choix de leur destin il y a bien longtemps et ce sont les banquiers qui nous ont vendu pour un plat de lentilles.
Mettez bout à bout les éléments suivants et vous comprendrez tout en raccourci.
Les Américains ont crée un système fondé sur leur déficit et son recyclage.
Ils ont appâté les banques euros qui ont exploité la mine d’or du recyclage.
Les Américains ont piégé les banques internationales et les ont rendues dépendantes pour leur refinancement de l’accès aux dollars de la Fed et de ses correspondants.
Les banques européennes sont structurellement vassales et vous n’avez pas voté pour cela, les États-Unis les tiennent par les couilles. Et vous avec.
Les banques européennes sont complètement en l’air et demandeurs en dollars, elles ont fait leur prospérité imbécile sur le développement du marché du dollar hors USA, elles ont recyclé les déficits US et sont totalement dépendantes du bon vouloir de la Fed.
La Fed à chaque crise accorde généreusement des swaps en dollars aux pays amis qui se sont mis dans cette situation de manque. La Fed a le droit de vie et de mort sur la plupart des systèmes bancaires et singulièrement le système européen. Il suffit qu’elle hausse un sourcil, qu’elle suggère que leur refinancement est en péril et elle crée un nouveau Lehman européen.
L’imbrication financière et monétaire de l’Occident fait que la Fed a le droit de vie et de mort sur tous les pays, le droit de déclencher le chaos dans tous les pays ; en particulier l’Allemagne avec la surexposition imbécile de la Deutsche Bank aux dérivés et au besoin de refinancement en eurodollars, la suisse aussi d’allieurs ;
Les Américains ont déjà annoncé la couleur en coupant l’accès des banques russes au dollar, et pourtant il s‘agissait de dollars dont la Russie était propriétaire. La Fed a été magnanime en autorisant le Trésor Russe à payer ses coupons obligataires et à éviter la mise en faillite. Mais c’était un cadeau …
C’est un coup de semonce qui devrait déciller les yeux.
Les USA ont montré le bout de l’oreille et croyez moi cela n’est pas passé inaperçu dans les très hautes sphères du pouvoir mondial.
Tout ce qui est imbriqué, interconnecté, assis sur le dollar est en mode Chaos.
source : Bruno Bertez
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