Tempête glaciale devenue stationnaire, y compris en ce Péloponnèse des oliviers et des orangers. Par ce mauvais temps, les chalutiers sortent peu et le poisson devient cher et plutôt rare. En Thessalie, la neige est de retour, pour ne pas dire qu’elle ne s’est jamais vraiment effacée depuis janvier. Le… front grec est également embourbé, et pour preuve, le monument dédié à la mémoire du soldat Soviétique à Athènes a été souillé samedi 19 mars, par les adeptes du Régiment Azov, agissant en Grèce et en local. La réaction de l’Ambassade de la Fédération de Russie a été à son tour immédiate.
Car cette profanation d’un monument historique qui symbolise la résistance contre le nazisme ne pouvait être que dénoncée, tout comme elle n’a pas pu être ignorée par les médias, mainstream d’ailleurs ou pas.
Rappelons que ce monument situé dans les quartiers sud d’Athènes, fut l’œuvre du sculpteur Vyacheslav Klykov que l’artiste a offert à la municipalité de Kalithéa.
Pour l’Ambassade de la Fédération de Russie à Athènes, les enjeux sont évidents et les faits bien trop graves, si ce n’est qu’à travers l’hystérie antirusse du moment.
“Les partisans des nationalistes du bataillon Azov, cette unité d’assassins froids, dont les victimes depuis tant d’années sont les habitants de l’Ukraine de l’Est, ont également attaqué la mémoire sacrée du soldat soviétique en Grèce, ce combattant qui par son sacrifice a libéré l’Europe du fascisme pendant la Seconde Guerre mondiale. Nous condamnons sans équivoque cette tentative immorale d’insulter l’histoire ; autant acte il faut rajouter de vandalisme inacceptable”.
“Cette profanation, de même que les innombrables révélations des habitants de Marioupol et du Donbass quant aux crimes d’Azov sur place, rappellent alors et sans même avoir besoin de preuves supplémentaires, l’ampleur de la nature nazie de ceux d’Azov et des autres bataillons similaires parmi les nationalistes extrémistes en Ukraine. Nous appelons les autorités grecques à faire le nécessaire pour enquêter sur cette attaque barbare et de punir les vandales”.
On se souviendra à l’occasion, du regretté Marc Ferro comme de son Histoire si bien parallèle d’il y a près de 30 ans déjà. Il répétait alors souvent combien l’essentiel de l’effort de guerre des Allemands nazis portait sur l’Union Soviétique, plus de 80% dans le potentiel de la machine de guerre d’Hitler d’ailleurs y opérait.
Qu’on se le dise encore, à l’instar de Thierry Messian. “Il faut garder à l’esprit que la Seconde Guerre Mondiale a été vécue différemment à l’Ouest et à l’Est. En Europe de l’Ouest, le nazisme était une dictature qui s’en est prise à des minorités, les Tsiganes et les Juifs, qu’elle a enlevé et exterminé par millions dans des camps. En Europe de l’Est, le projet était tout autre. Il s’agissait de libérer un espace vital en exterminant la population slave”.
“Il n’y avait pas besoin de camp. Il fallait tuer tout le monde. La seule URSS a compté 27 millions de morts. La Russie moderne s’est construite sur le souvenir de cette Grande Guerre patriotique contre le nazisme. Pour les Russes, il est inacceptable de porter des croix gammées et de voter une loi raciale. Il faut agir sans attendre qu’elle soit appliquée”.
Rien ne s’oublie manifestement en cette terre des frictions dans la tectonique des cultures et de la géopolitique, allant même jusqu’aux cultures de guerre et du sang ; spécialement sur cette bande territoriale allant de l’Ukraine à la Grèce… en passant par les Balkans.
Et en Grèce, sous les Allemands nazifiés, le “projet” était bien proche de l’extermination de la population, tout comme chez les Slaves. Ainsi, les villages et les bourgades qu’en Grèce ont connu le sort d’Oradour-sur-Glane se comptent alors par quelque centaines, dont l’histoire de près de 150 d’entre eux, est depuis peu rappelée sur un seul site Internet, dédié à la mémoire des holocaustes grecs.
Guerre ou pas d’ailleurs, et toujours en cette ville d’Athènes de la décrépitude, on constate alors avec amertume que les bustes des poètes, des écrivains et des philosophes manquent parfois à l’appel, soit parce qu’ils sont systématiquement détruits par les nazis de type… antifa, soit parce qu’ils sont retirés suite aux actes de vandalisme subis.
Tel début mars entre tant d’autres, le buste de Yórgos Katsímbalis, devenu par la grâce et par la plume d’Henry Miller une figure mythique des lettres grecques contemporaines, le Colosse de Maroússi. Cet ardent patriote ayant combattu durant les guerres grecques des années 1919 à 1941, était aussi un homme des lettres, bien à sa manière.
Sans avoir écrit de la littérature lui-même, si ce n’est que des bibliographies exemplaires d’écrivains contemporains, il fut, près de cinquante ans durant, une véritable éminence grise de la littérature grecque et ce n’est pas sans raison qu’il fut l’ami de Yórgos Séféris, comme il fut surtout, l’âme de plusieurs revues littéraires. On se souviendra à ce propos de cette photo des années 1950, réalisée on dirait pour l’éternité des lettres et de l’histoire. Y figurent, Yórgos Séféris, Yórgos Katsímbalis et Patrick Leigh Fermor. Ou sinon, la guerre, la paix, les écrivains et même… certains agents du SOE en Grèce.
Dans une lettre d’il y a 90 ans, datant du 5 mars 1932, Katsímbalis écrivait alors à son ami Séféris, suite à la défaite électorale du camp de Venizélos qui fut alors le leur.
“Le Pirée, cette place forte, pour ne pas dire l’Acropole du Vénizélisme, a été emportée, coulée. Ce n’est plus un mauvais rêve de bouleversement social, voire, le crépuscule de notre culture par exemple, mais quelque chose de terriblement familier hélas ! Représailles, terrorisme, massacres et effondrement économique définitif… Il ne restera plus qu’à chacun d’entre nous, que de s’occuper pour alors sauver sa tête… J’espère néanmoins que les choses n’en arriveront pas là, qu’au dernier moment une grande partie du monde s’en remettra”.
Tempête devenue stationnaire siècle après siècle, souillure et toujours profanation. Dans le vieux Péloponnèse, nous allumons nos cierges pour se tourner vers Saint-Nicolas et vers Sainte-Marina, déjà que le chauffage nous l’allumons enfin si peu.
En attendant la réponse des Cieux, nous avons du reste offert un abri à notre petit Volodya, bien à nous, après Mimi et après Hermès. Le temps décidément est bien dur pour les poètes, les soldats… et même parfois pour nos chats, desposés comme adespotes.
Représailles, terrorisme, massacres et effondrement économique définitif… Il ne restera plus qu’à chacun de s’occuper pour alors sauver sa tête. Entre soldats… et poètes.
source : Greek Crisis
Adblock test (Why?)
Source : Lire l'article complet par Réseau International
Source: Lire l'article complet de Réseau International