Eugène d’Estimauville de Beaumouchel >
S’inspirant sans doute d’un personnage célèbre (son papounet?), notre professeur d’art dramatique à la retraite vient de déclarer la loi martiale pour tenter d’étouffer la crise des barbus qui chantent du Pink Floyd à Ottawa. Un pyschodrame qu’il a tout fait pour aggraver.
Cet état d’urgence viserait entre autres à permettre aux autorités fédérales de saisir l’équipement des entreprises de remorquage refusant de se soumettre au régime trudeauiste.
Notre travail à nous, c’est de remorquer un camion en difficulté technique, par exemple en raison d’une panne, d’une collision. Notre mandat n’est pas de remorquer un camion qui est une difficulté politique.
– Réjean Breton, PDG de l’Association des professionnels du dépannage du Québec
Sous prétexte d’assécher le financement international de ces terroristes domestiques, les banques devront également espionner leurs clients et pourront geler des comptes sans passer par les tribunaux. Les transactions impliquant des cryptomonnaies sont vues comme particulièrement suspectes.
Mais pour que cette mesure soit valide, il faut que le parlement soit consulté dans les 7 jours et approuve la déclaration d’urgence de l’éxecutif.
Les libéraux n’étant pas majoritaires, il n’est pas certain qu’ils aient les votes.
Déjà, il doivent éviter d’avoir trop de défections au sein de leurs rangs – on se doute que le dissident du PLC Joël Lightbound va voter contre son parti, comme il vient de le faire aux Communes. Et Lightbound n’est pas le seul élu libéral mécontent de l’intransigeance sanitaire du patron, qui est d’autant plus ridicule que l’immense majorité des gouvernements de par le monde (y compris les provinces) abandonnent les mesures covidiennes.
Les conservateurs vont s’opposer.
Les bloquistes sont contre (du moins l’application de la loi au Québec) parce que Legault est contre – et pour de bonnes raisons :
The act, established in 1988, allows the federal government to override the provinces and authorize special temporary measures to ensure security during national emergencies.
D’ailleurs, tout ça rappelle de mauvais souvenirs aux souverainistes :
Les libéraux ont donc besoin de l’appui des néodémocrates. Mais bien que ces derniers aiment aussi nazifier leurs adversaires, la rhétorique de Singh a changé au cours des derniers jours et il semble être prêt à éliminer des restrictions sanitaires – si les autorités médicales donnent leur accord.
De plus, cette loi est par définition controversée et n’a jamais été invoquée depuis qu’elle a été adoptée, en 1988. Le prédécesseur de Singh, Tommy Douglas, est devenu célèbre pour s’être opposé à l’ancêtre de l’actuelle loi (la Loi des mesures de guerre) lors de la crise d’Octobre.
En outre, la Canadian Civil Liberties Association considère que Trudeau outrepasse ses pouvoirs et que cet état d’urgence n’est pas légitime.
Le gouvernement fédéral n’a pas atteint le seuil nécessaire pour invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Si l’invocation de cette loi requiert le respect d’une norme élevée clairement définie, c’est pour une raison bien précise :
— Canadian Civil Liberties Association (@cancivlib) February 15, 2022
Certains experts en sécurité nationale se disent même choqués que le gouvernement Trudeau ose invoquer cette loi dans ce contexte :
Do the protests qualify as an emergency under the law?
Leah West, a former national security lawyer with the federal Department of Justice, takes a different view.
West told CBC News she’s not convinced that the ongoing protests rise to the level of a public order « emergency. »
« As someone who studies the law very carefully, I’m kind of shocked, to be honest, that the government actually believes this meets the definition to even invoke the act, » she said.
West said that, under the existing provincial emergency order, Ontario can already do some of the things that the federal government is now contemplating.
« It’s not clear to me why you would need the federal authorities to do that, » West said.
(Ceci ouvre bien sûr la porte à une possible invalidation par les tribunaux, mais c’est une autre question)
Si un compromis politique est nécessaire, les pouvoirs exceptionnels accordés à Ottawa pourraient aussi être restreints.
Quand bien même Trudeau arriverait à convaincre les députés néodémocrates, il faudrait également que le Sénat approuve sa déclaration d’urgence. Si les libéraux sont techniquement majoritaires à la chambre haute, il est possible qu’une minorité de sénateurs plus ou moins indépendants fassent défection, comme Lightbound à la chambre basse.
Par ailleurs, la minorité conservatrice au Sénat peut faire durer les choses éternellement puisqu’il n’existe pas vraiment de procédure pour rapidement mettre fin aux débats dans cette enceinte – les sénateurs minoritaires arrivent parfois à tuer des projets de loi de cette manière.
Un revers cuisant ou un tel degré de paralysie parlementaire dans un contexte de gouvernement minoritaire mènerait à… des élections anticipées, alors que l’opposition officielle n’a plus de chef et la cote de popularité du premier ministre s’est effondrée. Ou peut-être à une mutinerie libérale.
Bref, le plus meilleur pays du monde est plus dysfonctionnel que jamais.
Source: Lire l'article complet de Horizon Québec Actuel