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par Mike Whitney.
« Je suis convaincu que nous avons atteint le moment décisif où nous devons sérieusement réfléchir à l’architecture de la sécurité mondiale. Et nous devons procéder en recherchant un équilibre raisonnable entre les intérêts de tous les participants au dialogue international » ~ Le président russe Vladimir Poutine, Conférence de Munich sur la sécurité, 2007
Que savez-vous de la crise en Ukraine ? Voyez si vous pouvez répondre à ces 7 questions.
Question 1 – La volonté de l’administration Biden de faire entrer l’Ukraine dans l’OTAN viole-t-elle les accords que les États-Unis ont signés précédemment ?
1-Oui
2-Non
La réponse est « Oui ». À Istanbul (1999) et à Astana (2010), les États-Unis et les 56 autres pays de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) ont signé des documents « qui contiennent des principes interdépendants visant à garantir l’indivisibilité de la sécurité ».
Qu’est-ce que cela signifie ?
Cela signifie que les parties à l’accord doivent s’abstenir de toute action qui pourrait affecter les intérêts de sécurité des autres membres. Cela signifie que les parties ne peuvent pas installer des bases militaires et des sites de missiles dans des endroits qui constituent une menace pour les autres membres. Cela signifie que les parties doivent s’abstenir d’utiliser leurs territoires respectifs pour mener ou aider une agression armée contre d’autres membres. Cela signifie qu’il est interdit aux parties d’agir d’une manière contraire aux principes énoncés dans le traité. Cela signifie que l’Ukraine ne peut pas devenir membre de l’OTAN si son adhésion constitue une menace pour la sécurité de la Russie.
Tout cela est-il difficile à comprendre ?
Non, c’est parfaitement clair.
Ainsi, lorsque le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, affirme que « chaque pays a le droit de choisir ses propres arrangements de sécurité », il est délibérément trompeur. Stoltenberg sait que l’OTAN et les États-Unis ont convenu qu’ils « ne renforceraient PAS leur propre sécurité au détriment de la sécurité des autres ». Il sait également que l’OTAN et les États-Unis sont légalement tenus d’agir conformément aux accords qu’ils ont signés dans le passé.
Naturellement, la Russie défie Washington sur cette question. Voici ce que le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a déclaré lors d’une conférence de presse la semaine dernière :
« Aujourd’hui, nous envoyons une demande officielle à nos collègues des pays de l’Alliance et de l’OSCE par l’intermédiaire du ministère des Affaires étrangères avec une demande pressante d’expliquer comment ils ont l’intention de respecter l’engagement de ne pas renforcer leur sécurité au détriment de la sécurité des autres… Cela va vraiment miner les relations avec la Fédération de Russie car ce sera une violation flagrante des obligations prises par les présidents des États-Unis et des autres États membres de l’alliance ».
Et voici une citation similaire de l’ambassadeur russe Anatoly Antonov, mardi :
« Les États-Unis se concentrent sur le droit des États à choisir leurs alliances, inscrit dans les déclarations des sommets de l’OSCE d’Istanbul (1999) et d’Astana (2010). En même temps, ils ignorent le fait que ces documents particuliers conditionnent ce droit à l’obligation de ne pas renforcer sa sécurité au détriment de celle des autres. Le principal problème est que les pays de l’OTAN renforcent leur sécurité en affaiblissant la Russie. Nous ne sommes pas d’accord avec une telle approche ». (TASS)
Conclusion : Les États-Unis et l’OTAN s’affranchissent de leurs obligations pour atteindre leurs objectifs géopolitiques. Ce n’est pas surprenant, aucun média occidental ne s’est penché sur cette question, alors que des preuves irréfutables soutiennent la position russe.
Question 2- L’administration Biden a fait pression sur le président ukrainien Volodymyr Zelensky pour qu’il exagère la probabilité d’une invasion russe afin d’alimenter l’hystérie du public et d’intensifier la haine de la Russie ?
1- Vrai
2- Faux
C’est « Vrai ». Jeudi, de hauts responsables ukrainiens ont déclaré à CNN qu’un appel entre Zelensky et Biden « ne s’est pas bien passé ». Ils ont déclaré que Biden a affirmé qu’« une attaque russe pourrait être imminente, disant qu’une invasion était maintenant pratiquement certaine ». Zelensky a cependant réfuté cette affirmation en disant que la menace de la Russie reste « dangereuse mais ambiguë », et « il n’est pas certain qu’une attaque aura lieu ».
« Avons-nous des tanks dans les rues ? » demande Zelensky. « Non. Quand vous lisez les médias, vous avez l’image que nous avons des troupes dans la ville, que les gens fuient… Ce n’est pas le cas ».
Le président ukrainien a également exhorté Biden à « calmer la pagaille … Nous ne voyons pas d’escalade plus importante que l’année dernière ». Il a ensuite ajouté qu’« il prenait le danger à bras le corps ».
Les tentatives de Zelensky de minimiser les rapports hyperboliques des médias confirment que l’actuelle « atmosphère de crise » est en grande partie une invention des médias occidentaux. En ce sens, la couverture médiatique est très similaire au canular du « Russiagate ».
Question 3- L’Ukraine est en état de crise depuis le coup d’État soutenu par les États-Unis en 2014. Les parties belligérantes se sont-elles entendues sur un moyen de mettre fin au conflit ?
1- Oui
2- Non
La réponse est « Oui », ils l’ont fait. L’accord de Minsk a été signé en février 2015. Malheureusement, le gouvernement ukrainien n’a fait aucune tentative pour respecter les termes du traité.
« La signature a été précédée par le sommet des dirigeants de l’Ukraine, de la Russie, de la France et de l’Allemagne, qui ont convenu d’un ensemble de mesures visant à atténuer la guerre dans le Donbass ». En d’autres termes, tout le monde a convenu que ces mesures mettraient fin aux combats et mettraient un terme au conflit.
Les deux parties ont convenu d’un cessez-le-feu, du retrait des troupes et des équipements militaires de la zone de guerre et de la reconnaissance de l’autonomie de fait (alias « statut spécial ») de la région du Donbass. Ces mesures seraient suivies d’un désarmement général et d’un rétablissement du contrôle ukrainien sur sa frontière russe.
Au fil des ans, Poutine a demandé à plusieurs reprises que Minsk soit pleinement mis en œuvre, mais Kiev a obstinément refusé. Même si le gouvernement ukrainien a signé l’accord, il est déterminé à intensifier les hostilités et à prolonger la guerre.
Le mercredi 2 février, les autorités ukrainiennes ont une nouvelle fois démontré leur opposition à l’accord conclu. Selon les rapports des médias russes :
« Le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmitry Kuleba … a exclu d’accorder un statut spécial et un droit de veto au Donbass …
“Aucune région ukrainienne n’aura un pouvoir de droit pour les décisions de l’État national. C’est gravé dans le marbre ! Il n’y aura pas de statut spécial, comme l’imagine la Russie, ni de pouvoir de vote”, a-t-il déclaré ». (TASS News Service)
N’oubliez pas qu’il n’y a pas d’accord de Minsk sans la disposition relative au « statut spécial », qui équivaut à une autonomie de facto conférée aux russophones des Républiques populaires de Donetsk et de Lougansk. Le statut spécial est le ciment de l’accord car il garantit aux habitants de ces provinces qu’ils ne seront pas arbitrairement et vicieusement persécutés par des éléments hostiles du gouvernement. Ainsi, lorsque le ministre des Affaires étrangères exclut le statut spécial, il supprime en fait la pierre angulaire sur laquelle repose l’ensemble du traité.
La déclaration du ministre ukrainien des Affaires étrangères a-t-elle été rédigée par des fonctionnaires du département d’État américain ?
Probablement. Après tout, une Ukraine unifiée, prospère et en paix avec ses voisins ne cadre pas avec les ambitions impériales de Washington. Ce que veut l’administration Biden, c’est un État défaillant, éclaté et en faillite, déchiré par des animosités ethniques qui peuvent être facilement manipulées par des outsiders politiques qui considèrent l’Ukraine comme un élément essentiel de leur stratégie géopolitique.
Washington ne cherche pas à mettre fin aux hostilités. Washington veut perpétuer le statu quo.
Question 4- Poutine s’attendait-il à ce que les États-Unis et l’OTAN répondent sérieusement aux préoccupations de la Russie en matière de sécurité ?
1- Oui
2- Non
La réponse est « Non, il ne s’y attendait pas ». Comme le dit Ray McGovern, observateur du Kremlin, dans un article récent :
« Il est difficile d’imaginer que Poutine ait réellement pensé qu’il pourrait amener les États-Unis et l’OTAN à signer un document limitant l’adhésion à l’OTAN. Non moins incrédule est l’impression répandue… dans les médias de l’Establishment, que Poutine prévoyait d’exploiter un rejet occidental anticipé pour “justifier” une frappe militaire sur l’Ukraine ».
McGovern a raison sur les deux points. Poutine a plus de 20 ans d’expérience dans les relations avec les États-Unis. Il sait certainement que Washington n’acceptera jamais de céder ou de capituler devant les exigences d’un rival, en particulier d’un rival qui figure en tête de sa « liste d’ennemis » depuis dix ans. En outre, comme le souligne McGovern, il n’y a aucune chance que l’Ukraine soit admise dans l’OTAN de sitôt. Même « le président Joe Biden… l’a reconnu lorsqu’il a déclaré : “La probabilité que l’Ukraine rejoigne l’OTAN à court terme est faible” ».
Quant aux « préoccupations de sécurité » de la Russie, elles sont à la fois légitimes et urgentes. Poutine ne peut pas permettre que des armes nucléaires soient déployées sur des sites en Roumanie et en Pologne où elles ne sont qu’à quelques centaines de kilomètres de leurs cibles dans la Russie voisine. Il doit trouver un moyen de convaincre Washington que cette violation flagrante de la sécurité régionale (et des engagements antérieurs) n’est vraiment dans l’intérêt de personne, et que si le problème ne peut être résolu par des négociations pacifiques, la Russie sera contrainte de recourir à d’autres options.
Question 5- La Russie utilise-t-elle le battage médiatique autour de l’Ukraine pour amener Washington à négocier sur les sites de missiles américains en Roumanie et en Pologne ?
1- Oui
2- Non
La réponse est « oui ». L’analyse de McGovern semble suggérer que les Russes sont plus préoccupés par les sites de missiles que par l’Ukraine, et ce pour de bonnes raisons. Voici la citation de Poutine (à ses officiers supérieurs) qui souligne l’urgence de la situation :
« Il est extrêmement alarmant que … les lanceurs Mk 41, qui se trouvent en Roumanie et doivent être déployés en Pologne, soient adaptés au lancement de missiles de frappe Tomahawk. Si cette infrastructure continue à progresser, et si les systèmes de missiles des États-Unis et de l’OTAN sont déployés en Ukraine, leur temps de vol vers Moscou ne sera que de 7 à 10 minutes, voire de 5 minutes pour les systèmes hypersoniques.
C’est un énorme défi pour nous, pour notre sécurité ».
Il est clair que Poutine est inquiet de ces développements, bien que de nombreux Américains n’en entendent parler que pour la première fois. Il y a six ans, Poutine a plaidé en faveur de l’abandon de la défense antimissile lors d’une présentation passionnante qu’il a faite à des membres sélectionnés de la presse qui ont essentiellement fait « disparaître » ses commentaires d’Internet. Les grands médias n’ont jamais rapporté sa déclaration. Voici une partie de ce qu’il a dit :
« Une fois que le système de défense antimissile sera mis en place, il fonctionnera automatiquement avec l’ensemble de la capacité nucléaire des États-Unis. Il fera partie intégrante de la capacité nucléaire des États-Unis. Pour la première fois dans l’histoire, il y aura des éléments de la capacité nucléaire des États-Unis sur le continent européen. Cela change tout simplement toute la configuration de la sécurité internationale… Bien sûr, nous devons y répondre ».
Comme nous l’avons dit précédemment, l’avertissement de Poutine n’est jamais apparu dans les médias occidentaux. Pourtant, le système américain dit de « défense antimissile » représente un danger évident pour la sécurité nationale de la Russie. Il intègre le système nucléaire des États-Unis (notamment les opérations spatiales) à des systèmes qui se trouvent dans la sphère d’influence traditionnelle de la Russie. Il donne également à Washington une longueur d’avance sur la capacité de première frappe, qui sonne le glas de la sécurité russe. En réponse à ces développements, la Russie a créé un régime entièrement nouveau d’armes nucléaires et de missiles intercontinentaux hypersoniques Avangard à la pointe de la technologie. Cela a permis de rétablir l’équilibre essentiel des forces entre les deux nations, mais a également ouvert la voie à un autre cycle féroce de développement d’armes qui pourrait intensifier les hostilités et conduire à une reprise de la Guerre froide.
Question 6- Pourquoi Washington est-il si hostile envers la Russie ? La Russie représente-t-elle une menace pour les objectifs stratégiques à long terme des Etats-Unis ?
1- Oui
2- Non
La réponse est « Oui ». En fait, la Russie est devenue le principal obstacle au projet ambitieux de Washington de projeter sa puissance en Asie centrale afin de tirer parti de la croissance explosive de la région. Poutine a déjoué cette stratégie en renforçant l’économie russe et en reconstruisant les défenses du pays. N’oubliez pas que le plan mondialiste pour la Russie consistait à créer un système fragmenté et fédéralisé qui ouvrait ses vastes ressources à l’exploitation étrangère tout en affaiblissant le centre du pouvoir politique à Moscou. Voici comment l’expert en politique étrangère Zbigniew Brzezinski résume la situation dans un article intitulé « Une géostratégie pour l’Eurasie » :
« Compte tenu de la taille et de la diversité (de la Russie), un système politique décentralisé et une économie de marché libre seraient les plus à même de libérer le potentiel créatif du peuple russe et les vastes ressources naturelles de la Russie. Une Russie faiblement confédérée – composée d’une Russie européenne, d’une République sibérienne et d’une République extrême-orientale – aurait également plus de facilité à entretenir des relations économiques plus étroites avec ses voisins. Chacune des entités confédérées serait en mesure d’exploiter son potentiel créatif local, étouffé pendant des siècles par la lourde main bureaucratique de Moscou. En retour, une Russie décentralisée serait moins sensible à la mobilisation impériale ».
Naturellement, l’effet transformateur de Poutine sur l’économie russe (et les défenses) a complètement fait dérailler le plan de Brzezinski. Il a également bloqué le plan de Washington de « pivot vers l’Asie » qui a été résumé par l’ancienne secrétaire d’État Hillary Clinton dans un discours qu’elle a prononcé en 2011. Voici une partie de ce qu’elle a dit :
« L’avenir de la politique se décidera en Asie, pas en Afghanistan ou en Irak, et les États-Unis seront au centre de l’action … L’une des tâches les plus importantes de la politique américaine au cours de la prochaine décennie sera donc de s’assurer d’une augmentation substantielle des investissements – diplomatiques, économiques, stratégiques et autres – dans la région Asie-Pacifique…
Exploiter la croissance et le dynamisme de l’Asie est au cœur des intérêts économiques et stratégiques américains et constitue une priorité essentielle pour le président Obama. L’ouverture des marchés asiatiques offre aux États-Unis des possibilités sans précédent en matière d’investissement, de commerce et d’accès aux technologies de pointe … Les entreprises américaines (doivent) exploiter la vaste base de consommateurs en pleine expansion de l’Asie… La région génère déjà plus de la moitié de la production mondiale et près de la moitié du commerce mondial. Alors que nous nous efforçons d’atteindre l’objectif du président Obama de doubler les exportations d’ici 2015, nous recherchons des possibilités de faire encore plus d’affaires en Asie ».
Ce que l’on peut déduire de cet extrait, c’est que les planificateurs de la politique étrangère des États-Unis prévoyaient que l’encerclement, l’affaiblissement et l’éclatement éventuel de la Fédération de Russie permettraient aux bases militaires américaines de s’étendre en Asie centrale (« forger une présence militaire à large assise »), ce qui rendrait possible le contrôle de la croissance de la Chine et permettrait aux entreprises occidentales d’occuper une position dominante dans la région. C’est ce que Clinton a appelé avec désinvolture le « rééquilibrage », c’est-à-dire l’émergence présumée des sociétés occidentales en tant qu’acteurs principaux dans la région la plus peuplée et la plus prospère du monde. Jusqu’à présent, Poutine a empêché ce plan de se concrétiser.
À l’inverse, les États-Unis et leurs alliés ont fait dérailler le projet de Poutine d’une Grande Europe s’étendant de Lisbonne à Vladivostok. Voici comment Poutine l’a résumé dans un discours en 2012 :
« La Russie est une partie inaliénable et organique de la Grande Europe et de la civilisation européenne. Nos citoyens se considèrent comme des Européens… C’est pourquoi la Russie propose d’avancer vers la création d’un espace économique commun de l’Atlantique à l’océan Pacifique, une communauté désignée par les experts russes comme “l’Union de l’Europe” qui renforcera le potentiel de la Russie dans son pivot économique vers la “nouvelle Asie” ».
À l’époque, Poutine ne s’est pas rendu compte que Washington ferait tout ce qui est en son pouvoir pour bloquer une intégration plus poussée, réalisant que l’« harmonisation » économique de l’Europe et de l’Asie (sous la forme d’une zone de libre-échange) représentait une menace existentielle pour le modèle mondial « unipolaire ». Voici comment l’analyste politique Jack Rasmus résume la situation dans un article de Counterpunch :
« Derrière les sanctions se cache l’objectif des États-Unis de chasser la Russie de l’économie européenne. L’Europe devenait trop intégrée et dépendante de la Russie. Non seulement son gaz et ses matières premières, mais les relations commerciales et les flux de capitaux monétaires s’approfondissaient sur de nombreux fronts entre la Russie et l’Europe en général avant la crise ukrainienne qui a servi de couverture à l’introduction des sanctions. L’intégration économique croissante de la Russie avec l’Europe menaçait les intérêts économiques à long terme des capitalistes américains. D’un point de vue stratégique, le coup d’État précipité par les États-Unis en Ukraine peut donc être considéré comme un moyen de provoquer une intervention militaire russe, c’est-à-dire un événement nécessaire pour approfondir et étendre les sanctions économiques qui finiraient par rompre à long terme les liens économiques croissants entre l’Europe et la Russie. Cette rupture, à son tour, garantirait non seulement que les intérêts économiques des États-Unis restent dominants en Europe, mais ouvrirait également de nouvelles opportunités de profit pour les intérêts américains en Europe et en Ukraine également… ».
Hillary Clinton est allée jusqu’à prétendre que la tentative de Poutine de créer une zone de libre-échange s’étendant sur les continents était en fait un effort pour « ré-soviétiser la région »… « Ne nous y trompons pas », a-t-elle dit. « Nous savons quel est l’objectif et nous essayons de trouver des moyens efficaces de le ralentir ou de l’empêcher ».
Cela permet d’expliquer pourquoi les États-Unis ont déployé tant d’efforts pour empêcher Nord Stream de transporter du gaz naturel de la Russie vers l’Allemagne. Le gazoduc crée des enchevêtrements économiques qui renforceront les relations entre l’UE et la Russie tout en sapant la primauté régionale des États-Unis. Les responsables américains craignent que le renforcement des liens entre Moscou et l’Europe n’entraîne à terme l’abandon du dollar américain, ce qui mettrait un terme à son noble rôle de monnaie de réserve mondiale. En fait, il est très probable que Washington ait concocté la crise actuelle en Ukraine dans l’intention explicite de saboter Nord Stream qui est toujours dans les limbes en raison de l’ingérence incessante des États-Unis.
Il semble que l’objectif primordial de la politique des États-Unis en Ukraine soit d’empêcher la poursuite de l’intégration économique de l’Asie et de l’Europe. Les États-Unis veulent contrôler le flux d’énergie d’Est en Ouest, ils veulent établir un péage de facto entre les continents, ils veulent s’assurer que ces transactions sont effectuées en dollars américains et recyclées en bons du Trésor américain, et ils veulent se placer entre les deux marchés les plus prospères du siècle prochain. L’Ukraine est un pont terrestre essentiel qui relie l’UE à l’Asie centrale. Washington a l’intention de contrôler ce pont afin de pouvoir continuer à projeter sa puissance vers l’est.
Question 7 – Que veut Poutine ?
Poutine a été totalement transparent sur ce qu’il considère comme les intérêts nationaux de la Russie, en fait, tout est exposé clairement dans un document officiel de l’État de 2013 intitulé « Concept de la politique étrangère de la Fédération de Russie ». Ce court extrait reprend ce que Poutine a dit publiquement à de nombreuses reprises dans le passé.
« La Russie veut un système stable et durable de relations internationales fondé sur le droit international et les principes d’égalité, de respect mutuel et de non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Ce système vise à assurer une sécurité fiable et égale à chaque membre de la communauté internationale dans les domaines politique, militaire, économique, informationnel, humanitaire et autres ».
C’est écrit noir sur blanc. Le point de vue de Poutine sur la sécurité mondiale est largement déterminé par sa connaissance de l’histoire de la Russie et par ses rapports avec la politique étrangère impulsive et autoproclamée des États-Unis, qui balaie d’un revers de main les lois et traités internationaux qui empêchent Washington d’imposer unilatéralement sa volonté où et quand bon lui semble. En revanche, Poutine est favorable à un système « fondé sur des règles » qui défend les intérêts de sécurité de toutes les nations de manière égale et sans préjudice. Voici d’autres extraits du même document :
« L’étape actuelle du développement mondial se caractérise par de profonds changements dans le paysage géopolitique, largement provoqués ou accélérés par la crise financière et économique mondiale. Les relations internationales sont dans un processus de transition, dont l’essence est la création d’un système polycentrique de relations internationales. Ce processus n’est pas facile. Il s’accompagne d’une augmentation des turbulences économiques et politiques aux niveaux mondial et régional. Les relations internationales deviennent de plus en plus complexes et imprévisibles.
La capacité de l’Occident à dominer l’économie et la politique mondiales continue de diminuer. Le pouvoir mondial et le potentiel de développement sont désormais plus dispersés et se déplacent vers l’Est, principalement vers la région Asie-Pacifique. L’émergence de nouveaux acteurs économiques et politiques mondiaux, les pays occidentaux tentant de préserver leurs positions traditionnelles, renforce la concurrence mondiale, ce qui se manifeste par une instabilité croissante dans les relations internationales …
Avec la tendance à la décentralisation du système mondial de gouvernance, la gouvernance régionale apparaît comme une base pour le modèle polycentrique du monde (avec l’ONU comme autre fondement), reflétant la diversité et la variété du monde. Les nouveaux centres de croissance économique et de pouvoir politique assument de plus en plus la responsabilité de leurs régions respectives. L’intégration régionale devient un moyen efficace d’accroître la compétitivité des États participants …
La Russie est pleinement consciente de sa responsabilité particulière dans le maintien de la sécurité dans le monde, tant au niveau mondial que régional, et est déterminée à agir conjointement avec tous les États intéressés pour relever les défis communs. La Russie s’efforcera d’anticiper et de prévenir les événements et restera préparée à tout scénario dans les affaires mondiales ».
Il s’agit d’un compte rendu bref mais assez précis de l’histoire récente. Oui, la crise financière a laissé les États-Unis dans une situation économique difficile, avec des marchés boursiers artificiellement soutenus par des injections massives de liquidités de la part des banques centrales, tandis que l’inflation continue de grimper et que la dette nationale explose pour atteindre 30 000 milliards de dollars. Ce ne sont pas des signes de force, ce sont des signes de faiblesse, d’incompétence et de corruption. Et ce n’est pas tout.
Pendant que Washington poursuit ses conflits contre-productifs en Afghanistan, en Irak, en Syrie et en Libye, d’autres centres de pouvoir se renforcent progressivement, créant un « système polycentrique de relations internationales » qui remplacera inévitablement l’ordre mondial unipolaire tout en accélérant le rythme du déclin des États-Unis.
À l’heure actuelle, les États-Unis sont engagés dans la tâche désespérée d’essayer de revenir à l’époque de l’après-guerre, lorsque le monde était en ruines et que les États-Unis étaient les seuls en ville. Cet effort a pris une nouvelle dimension, plus inquiétante, alors que des politiciens désespérés et leurs manipulateurs provoquent imprudemment la Russie, dotée de l’arme nucléaire, sur un terrain qui n’a aucun intérêt stratégique vital pour les États-Unis. Nous ne pouvons qu’espérer que les esprits plus calmes l’emporteront.
Enfin, ce que souhaite Poutine, c’est une transition pacifique de l’ordre actuel, obsolète et dysfonctionnel, vers un nouveau système qui assure mieux une sécurité fiable et égale pour tous les membres de la communauté internationale. Nous pensons que c’est un objectif qui mérite d’être poursuivi.
source : The Unz Review
traduction Réseau International
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