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Ça se passerait lors d’un voyage dans la famille à l’étranger et peut-être même parfois dans la province : chaque année, des jeunes filles québécoises, nées ici de parents immigrants, subiraient l’excision. Même si la pratique est illégale au pays.
Il n’y a pas de données quantitatives ou qualitatives qui documentent le sujet. Mais entre des murs épais où ne peuvent se coller les oreilles indiscrètes, quand la confiance est là et qu’il y a promesse que la parole ne sera pas trahie, les langues se délient et racontent, assurent les auteures Andrée Yanacopoulo et Luce Cloutier.
La première est médecin et sociologue, la seconde est anthropologue. Ensemble, elles ont écrit Silence on coupe ! Les mutilations génitales féminines au Québec.
« On a recueilli des témoignages, beaucoup de femmes nous ont confirmé que ça se faisait ici. Mais évidemment, puisque c’est interdit, et parce qu’elles ont peur, elles ne l’affirment jamais en public. Il y a un grand silence autour de tout ça », notent les auteures.
Leur ouvrage, paru en 2019, met en lumière la nécessité d’instaurer des mécanismes pour mieux protéger les fillettes québécoises.
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Signalement obligatoire
Le devoir de dénoncer existe néanmoins. Les médecins, mais aussi l’ensemble des citoyens, ont l’obligation de faire un signalement en cas de suspicion, rappelle Nathalie Lamothe, chef de service à la Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) de Montréal, spécialisée dans les abus physiques et sexuels. « Le problème, c’est que c’est extrêmement tabou et caché, dit-elle. On sait que ça se fait encore, mais on a énormément de difficulté à avoir des informations et des données, et on reçoit très peu de signalements, peut-être un ou deux par année. Les parents qui songent à l’excision pour leurs enfants sont conscients que c’est illégal ici, mais même s’ils ont quitté leur pays natal, ils composent encore souvent avec la pression sociale et familiale de leur communauté d’origine. Il faut miser sur la prévention et l’éducation, rappeler que c’est un abus physique et sexuel vraiment très grave, pour lequel on peut être passible d’une peine d’emprisonnement de 14 ans. »
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« S’il faut envoyer des gens en prison et en faire des exemples qui démontrent que c’est criminel ici, faisons-le. Il faut vraiment dénoncer cette pratique. C’est une violence inouïe faite aux corps des femmes, une violence qui est inutile et qui n’engendre que douleur, peine et souffrance. Au nom du multiculturalisme, on détourne le regard. Certains ont une approche très psychologisante et prétendent que c’est leur culture, que c’était bien vu dans leur pays d’origine. Il faut absolument répliquer à ça qu’il y a des pratiques néfastes, insupportables, et qu’il faut les combattre », insiste Mme Cloutier.
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« Toujours une dévalorisation du corps des femmes »
Les motifs pour lesquels on pratique les MGF varient d’une région géographique à une autre.
« C’est toujours une dévalorisation du corps des femmes. On coupe sous prétexte que ce sera plus hygiénique, ou plus esthétique. Dans certaines cultures, c’est un rite de passage, tandis que pour d’autres, c’est associé à des croyances comme, par exemple, celle qui prétend que si le clitoris entre en contact avec le pénis, l’homme pourrait perdre sa virilité. On donne toutes sortes de sens à cette pratique, qui est parfois exercée sur de très jeunes bébés. Les jeunes filles découvrent alors plus tard ce qui leur a été fait », expose Luce Cloutier.
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>>> Lire l’article complet de Karine Tremblay
Pour en savoir plus :
Silence, on coupe ! Les mutilations génitales féminines au Québec – Préface de Djemila Benhabib
Voici ce qu’a vraiment dit Justin Trudeau sur la « barbarie » de l’excision
La mutilation génitale féminine/excision | Les soins aux enfants néo-canadiens
Source: Lire l'article complet de Horizon Québec Actuel