L’auteur est éditeur de Baraka Books
Il se passe sous nos yeux une grave injustice à laquelle le Canada participe, mais dont il possède la clé d’une solution rapide. Il s’agit du cas de M. Jérôme Bicamumpaka, ancien ministre des Affaires étrangères du Rwanda, qui été acquitté en 2011 des chefs d’accusation qui pesaient contre lui par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR).
Son épouse, Jeannine Hakizimana et ses enfants, aujourd’hui adultes, habitent Montréal depuis plus de 20 ans, mais le Canada refuse de lui permettre de rejoindre sa famille.
Le Canada a appuyé la création de ce tribunal pénal depuis ses débuts en 1995. Des Canadiens de renom y ont participé pleinement, dont Mme Louise Arbour, procureure en chef de 1996 à 1999. Des avocats québécois et canadiens, en raison de leur connaissance du droit civil et du droit coutumier, y étaient nombreux, du côté de la défense et de la poursuite.
Jérôme Bicamumpaka a été arrêté au Cameroun en 1999, justement sous les instructions de la procureure d’alors Mme Louise Arbour. Il a été transféré à Arusha, en Tanzanie, où il a passé 12 ans en détention préventive en attendant son procès. Quand son procès a enfin eu lieu, le Tribunal l’a acquitté, reconnaissant qu’il n’était même pas au Rwanda lorsque les actes dont il a été accusé ont été commis. Ses preuves étaient irréfutables. En effet, il était notamment à New York dans le but de plaider en faveur d’un cessez-le-feu devant l’ONU. Bref, il avait été accusé à tort.
Un homme acquitté par nos tribunaux au Canada est un homme innocent, libre, et il ne court pas le risque de se voir inculper de nouveau, selon le principe non bis in idem. Mais, semble-t-il, pas pour un Africain du Rwanda. Dix ans après son acquittement, Jérôme Bicamumpaka est toujours à Arusha, vivant en résidence surveillée, apatride car sans papiers d’identité ou de voyage, et craignant l’extradition vers le Rwanda ou vers un autre pays.
L’épouse et les enfants de Jérôme Bicamumpaka demandent, depuis 2011, que le Canada applique sa politique de réunification des familles. Mais ils heurtent un mur de refus de la part du gouvernement du Canada.
Pourtant, le Tribunal pénal international pour le Rwanda (aujourd’hui appelé le Mécanisme international appelé à exercer les fonctions résiduelles des tribunaux pénaux) a été créé par le Conseil de sécurité de l’ONU et relève toujours du même Conseil. Les plus grands principes de justice devaient guider ce tribunal. Ce ne serait pas une « Justice des vainqueurs » disait notamment l’américaine Madeleine Albright et Mme Arbour lors de la création du tribunal. Le Canada y a cru, fortement, tout comme les États-Unis, la Belgique, la France et d’autres. Du moins officiellement.
Or, force est de constater que le Canada ne respecte pas les jugements rendus par ce tribunal.
Question : Est-ce que l’appui du Canada – et celui des autres pays – au TPIR était conditionnel à ce qu’il n’y ait pas d’acquittés? (Il y en a eu plusieurs.) Que les procès ne seraient qu’une étape précédant l’incarcération à vie des accusés?
Si c’est le cas, ce n’est pas de la Justice qu’on parle mais d’une cruelle parodie.
Lors de la création du TPIR, on le comparait à celui de Nuremberg. Cette comparaison avec Nuremberg, quoique boiteuse sur tant de plans, nous rappelle tout de même que le célèbre Tribunal d’après-guerre a acquitté plusieurs personnes, qui ont quitté le tribunal sur-le-champ, libre de circuler là où ils voulaient.
Selon nos informations, le dossier de Jérôme Bicamumpaka et de sa famille est devant le ministre de la Sécurité publique, M. Marco Mendicino.
L’heure est venue pour le Canada de l’accueillir, de permettre la réunification de sa famille et de réparer une injustice criante.
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