Défi cosmique
20 janvier 2022 – La chronique ‘du jour’ (d’hier) de Dimitri Orlov tombe fort bien pour me relancer dans un projet pourtant évident que j’avais pourtant laissé de côté. J’ai vu le film « Don’t Look Up » assez rapidement après sa diffusion-Netflix, sans doute le 26 ou le 27 décembre 2021 ; aussitôt, je m’étais chuchoté que ce film méritait quelque réflexion. Le constat immédiat était effectivement qu’il méritait qu’on s’y attachât parce qu’il constitue une énigme par rapport à la matrice (américaniste) qui l’a produit, aussi bien par son intrigue satirique que par les perspectives qu’il donne à cette intrigue, – tout cela, comme l’a bien vu Orlov :
« Il est intéressant de noter que, dans son effort de mettre en évidence tous les maux de la société américaine, ce film n’essaie pas du tout d’indiquer une voie vers la guérison et un avenir meilleur, se débarrassant ainsi de la perspective optimiste que Hollywood considérait auparavant comme obligatoire : il n’y a même pas l’ombre d’une fin heureuse… […]
» Avant que vous ne vous imaginiez que je suis une sorte de voix solitaire qui crie dans le désert, laissez-moi vous rassurer : parmi les nombreux critiques de ce film, plusieurs ont mentionné qu’il leur avait laissé un sentiment de vide, un sentiment d’échec et d’égarement dû à l’absence de sens et à la stupidité de tout ce qui leur était montré. En effet, l’absence totale de perspective positive et optimiste dans le film est peut-être sans précédent dans le cinéma américain grand public, qui exige impérativement une fin heureuse. Encore une fois, n’oubliez pas que le film est sorti précisément la veille de Noël, le 24 décembre 2021, la fête familiale de l’année où l’on se sent bien ! Qu’est-ce que c’est ? Un acte de terrorisme culturel ? »
De même, je n’ai ressenti à aucun moment, également de la même façon qu’Orlov, que ce film constituât un argument pour la sublime et grandissime cause écologique, pour un effort formidable et collectif de sauvegarde de la planète (et du reste, c’est-à-dire nous, les autres et moi), comme cela a été en général ressenti par les belles âmes vivant dans leur simulacre.
(Cette vertueuse façon de voir et d’entendre a été largement exposée lors d’une soirée du ’28 Minutes’ de Arte qui fut une débauche dionysiaque, une bacchanale des satyres femelles et vertueuses du camp du Bien ; je crois [impossible de vérifier, la Belgique est privée d’accès aux archives, ou est-ce un complot contre moi seulement ?] qu’il s’agit de la soirée du 11 janvier.)
Effectivement, si cela constituait une démonstration a contrario et ad absurdo pour la cause écologique, cela montrait essentiellement que rien ne pourrait être fait avec ce Système que, par ailleurs, les écolos-mondains ne cessent de chérir et d’acclamer, – ces gens “chérissant les causes des effets qu’ils maudissent”, comme disait une des versions de ce que disait Bossuet… D’accord avec Orlov, moi-même selon l’idée plus précise que cette éventuelle catastrophe environnementale, comme les autres, est le produit du Système et ne pourrait être évitée, si elle existe, que par la liquidation de ce Système, – puisque l’action du Système ne serait qu’une nième version de l’incendiaire déversant du kérosène déguisé en eau sur l’incendie.
« Presque tous les critiques que j’ai lus sont tombés dans le piège de penser que ce film promeut l’agenda écologique à la mode. D’une certaine manière, ils ne comprennent pas que la promotion d’un programme écologiste par le biais d’un film catastrophe dont la fin est absolument désespérée et où toute vie sur la planète meurt est un non-sens évident. Au contraire, ce film (ou, plus précisément, sa fin apocalyptique) véhicule un message anti-environnemental des plus franc : étant donné la fin inévitable de toute vie sur Terre, à quoi bon essayer de sauver l’environnement ? »
Au-delà, et ayant écarté toutes les autres interprétations (y compris, celle inratable d’en faire une satire antiTrump : la présidente, jouée par Meryl Street, est beaucoup plus une caricature de ce qu’aurait été [et sera peut-être ?!] Hillary Clinton à la Maison-Blanche, que de Trump), Orlov conclut sans conclure. La fin, cette lettre de l’“État-profond”, nous disant : “Désolé, les gars, nous avons merdé, tout s’effondre et nous n’y pouvons rien”, est peut-être le vrai sens du film mais il ne nous dit pas pourquoi le film a été fait, – pourquoi l’on a laissé faire ce film, parce qu’il n’est en rien dans les habitudes de l’“État-profond”, alias le Système, de nous dire qu’il s’est trompé, parce qu’il ne se trompe jamais, parce qu’il se désintègrera en clamant qu’il est plus fort et plus solide, et plus intégré que jamais, car l’on ne déconstructure pas un déconstructurateur en train de se déconstructurer ! Non mais..
Quelques mots de la lettre de l’“État-profond” recueillie par Orlov :
« Chers citoyens de l’humanité civilisée qui croit encore que les États-Unis sont le centre du monde et la riche Shining City on the Hill (de dollars US de plus en plus sans valeur) : apparemment, nous avons tous ensemble approché le bord d’un abîme et sommes sur le point, peut-être dès cette année, de nous y effondrer. Pourquoi cette triste fin est-elle arrivée, malgré le fait que nous, vos dirigeants intrépides, maîtres du dollar américain, serviteurs dévoués du Prince de ce Monde, avons tenu tous les leviers de la gouvernance mondiale entre nos mains à partir de 1991, lorsque l’URSS a cessé d’exister ?
» Comment avons-nous réussi à nous planter à ce point en seulement 30 ans ? La réponse est : parce que nous sommes devenus une bande de dégénérés. À quoi ressemble notre dégénérescence ? Pour plus de détails, voir notre film ‘Don’t Look Up’. Il s’agit d’une exposition honnête du genre de monstres dégénérés que nous sommes devenus, y compris les militaires, les politiciens, les scientifiques, l’élite des médias… Nous sommes tous des monstres – des monstres dégoûtants, dégénérés, répugnants! »
Comme on voit, et comme on le comprend bien en raison de son talent de satiriste, Orlov termine par une pirouette qui n’est pas la résolution de l’énigme : pourquoi, dans les locaux d’une des puissances du système hollywoodien de communication, a-t-on fait ce film qui est une parabole décrivant l’effondrement catastrophique du Système (et du reste, nous compris) du fait de l’activité catastrophique du Système ? Je ne peux accepter l’idée d’une volonté délibérée, comme fait Orlov au nom de la satire, mais qui justement reste une satire.
Pour mon compte, ma principale réaction devant ce film fut qu’il s’agissait d’une description parfaite du processus constant de schizophrénie psychopathique dans lequel vit le Système, c’est-à-dire le monde lui-même, dans ses pratiques, ses directions, ses puissances, avec dans ses marges incertaines une “dissidence” qui, – tout en poussant dans le même sens de l’autodestruction, bien entendu, dans la mesure de ses moyens, – ne fait que répéter, incrédule :“Mais comment peuvent-ils se conduire comme cela, vers leur perte, leur autodestruction ?”
Car le plus impressionnant est effectivement cette façon extraordinaire, non pas de mettre en doute la nouvelle de l’arrivé de la comète et de la destruction universelle qu’elle nous promet dans les six mois, mais bien d’accueillir cela en disant : “Bon d’accord, on va voir le problème [on va “évaluer et aviser”], mais en attendant il y a la question des élections… On se reverra, certainement !”. A aucun moment, les porteurs de la terrible nouvelle ne sont dénigrés, ridiculisés, mis en cause, ni ne rencontrent le moindre scepticisme. Tout le monde prend assez vite la chose pour du comptant puis l’éjecte sur les marges, c’est dans six mois, et la vie continue, à toute vitesse, selon les nouvelles du jour qui sont nécessairement les plus importantes selon la logique médiatique…
Par exemple, comme ‘Wikipédia’ nous fait le résumé du film, ici un extrait où l’on voit l’entremêlement dérisoire des incidences accessoires où tente de s’imbriquer la tentative de la réalité catastrophique, – mais il n’y a pas de fissure dans ce bloc de certitudes successives dans sa marche vers l’autodestruction :
« …Accompagnées du Dr Teddy Oglethorpe, chef du Bureau de coordination de la défense planétaire de la NASA, Dibiasky et Mindy [les deux scientifiques ayant identifié la comète] présentent leurs conclusions à la Maison Blanche. Ils se heurtent à l’apathie de la présidente Janie Orlean et de son fils, le chef de cabinet Jason.
» Oglethorpe incite Dibiasky et Mindy à fuiter la nouvelle aux médias, ce qu'ils font dans un talk-show fameux du matin. Lorsque les animateurs Jack Bremmer et Brie Evantee traitent le sujet de manière frivole, Dibiasky perd son sang-froid et fulmine à propos de la menace, suscitant de nombreuses moqueries en ligne. Le petit ami de Dibiasky la dénonce publiquement tandis que Mindy reçoit l'approbation du public pour son ‘look’ attractif. La nouvelle de la menace de la comète ne retient guère l'attention du public et est démentie par la directrice de la NASA [alors que les techniciens de la NASA ont confirmé l’existence de la comète], une donatrice importante de la présidente Orlean sans aucune formation astronomique [elle est anesthésiste]. Lorsque Orlean est impliquée dans un scandale sexuel avec son candidat à la Cour suprême, elle décide de détourner l’attention et d’améliorer son indice de popularité en confirmant la menace de la comète et en annonçant un projet pour frapper et détourner la comète à l’aide d’armes nucléaires. »
Nous ne savons pas ce que signifie ce film, ce qu’il dénonce, pourquoi il est fait comme un écorchement, un dépiautage du fonctionnement du Système par le fait des choses absolument catastrophiques qu’il met à nu et à jour parallèlement. Le producteur, scénariste et réalisateur lui-même donne une explication renvoyant à l’hypothèse écologique, – la crise climatique censurée par la presseSystème, quelle galéjade ! Comme si l’on pouvait faire l’impasse sur Greta Thunberg, non mais ! Cette hypothèse que nous avons écartée, parce que rien ne montre qu’elle soit fondée en aucune façon, sinon les belles pensées du camp du Bien… Même s’il a fait un film étonnant parce qu’iconoclaste, Adam MacKay a aussi planté sa tente dans le camp du Bien, comme il y a des camps de migrants et qu’on a une garantie à prendre en même temps qu’une conviction facile.
« Ce film est né de ma terreur grandissante à l'égard de la crise climatique et du fait que nous vivons dans une société qui a tendance à la placer au quatrième ou cinquième rang des nouvelles, voire à nier qu'elle existe, – et à quel point cela est horrible mais en même temps absurdement drôle. »
Et ceci, la question posée : pourquoi cette comète, une comète, représente-t-elle la parabole de la catastrophe climatique, alors que rien ne le dit expressément ? Pourquoi pas parabole de notre folie du Covid ? Pourquoi pas parabole de notre politique hyper-psychopathique contre la Russie sollicitant l’achèvement par l’anéantissement nucléaire réciproque ? Pourquoi pas parabole de notre recherche d’un quatrième, cinquième, sixième sexe par transgenristes en folie rassemblés dans un goulag sociétal, à côté des migrants et de Djokovic dans les camps australiens ?
Voici comment le réalisateur MacKay en est venu à choisir la comète pour paraboliser (l’ai-je bien écrit ?) la crise climatique, toujours selon ‘Wikipédia’ :
« J'ai commencé à parler à de nombreux scientifiques [du climat]. J'ai continué à chercher de bonnes nouvelles, mais je n'en ai jamais eu. Tout ce que j'entendais était pire que ce que j'entendais dans les médias grand public. J'ai donc discuté avec [David Sirota, scénariste], et nous nous sommes dit tous les deux : “Comment est-il possible que les médias n'en parlent pas ? Qu’on repousse cette affaire en dernière page ? Qu’ils n’en fassent pas leurs manchettes en première page ?” Et Sirota a juste dit avec désinvolture, “C'est comme si une comète se dirigeait vers la Terre et qu’elle allait tous nous détruire et que personne ne s’en souciait”. Et j’ai bondi aussitôt : “Voilà, c’est ça, on tient notre truc !”. »
Levez-vous, ô “forces mystérieuses, hautes & supérieures” !
…Néanmoins, je donne au réalisateur MacKay une chance de s’échapper au moins un instant de l’étouffante concentration du camp du Bien avec, dans la première citation ‘Wiki’ que j’ai faite, son « à quel point cela est horrible mais en même temps absurdement drôle »… Sa notable pensée conformiste se nuance d’une remarque qui le libère et nous ramène sur le territoire incroyable de contraste entre la catastrophe et le dérisoire grotesque de l’humain, de la tragédie-bouffe ; et tout cela, dis-je, nous renforçant dans la perception qu’il y a un mystère dans l’idée, dans la conception et dans la réalisation de ce film, venu du cœur brûlant de la communication de l’“usine à rêves” du Système, et pourtant décrivant la raison générale et indubitable de l’effondrement du Système dans l’atrocité satanique du Système lui-même. Venu du cœur du simulacre du Mordor, il nous expose d’une façon absolument claire la vérité-de-situation de l’effondrement du Système.
Sans avoir besoin de « sacrifier un jeune bouc sans tache au lever du soleil au sommet du mont Garitzim ou au temple de Jérusalem, […] [de me] frictionner avec de la purée d'ail tous les matins, […] [de] recopier le passage sur une feuille le passage ou Jesus envoi les pourceaux possédés dans la mer puis boire une infusion de ce document » (ah, esprit fort perché sur le ‘forum’ adéquat, que vous me fatiguez, que vous me gonflez enfin) ; sans besoin, poursuis-je, de tout ce bazar qui fait anathème sur les ténèbres des premiers temps pour mieux savourer la lumière des temps présents quoique temps-devenus-fous, je n’irais pas au terme de cette exploration étonnée sans mentionner mon hypothèse favorite des “forces mystérieuses, hautes & supérieures” qui agissent, font les événements, interfèrent sur nos prétendus-actes pour mettre les leurs en bonne place, et ainsi nous conduire au terme convenable de l’Effondrement du Système (GCES). Ô esprit fort et mis à part “la purée d’ail tous les matins”, comment expliques-tu, comment justifies-tu l’absolu bordel, chaos et désordre, barbarie épouvantable et déraison funeste des choses essentielles, comment expliques-tu et justifies-tu que l’on en soit là où se trouve le monde ? L’obscurantisme, dis-tu ? Le fascisme ? Le complotisme ? Passons outre s’il vous plaît et laissons l’esprit fort « jouer avec cette poussière », il s’agit d’affaires d’une extrême gravité.
Car c’est un fait que certains aimeraient expédier à la poubelle avec un mépris comme seules les Lumières savent avoir pour toute la sagesse qui les a précédés et dont ils sont les rejetons monstrueux qui ont trahi cette sagesse, c’est un fait qu’il me faut appréhender avec ma raison acceptant l’irrationnel comme éternelle Vérité du monde le mystère d’un artisan du cinéma voulant défendre une catastrophe à venir “qui fait fureur” (la catastrophe climatique) en exposant dans sa complétude le pot-aux-roses des dédales monstrueux d’un Système à l’agonie dont est comptable cet artisan ; lequel “pot-aux-roses des dédales” constitue la cause première de cette “catastrophe” et de toutes les autres, c’est-à-dire la Grande Crise soi-même. Je sais que la phrase est longue et qu’il faut la relire avec toute sa raison pour en distinguer la logique, mais il importe pour cela, comme écrit notre remarquable, opiniâtre et sublime commentateur “J.C.” parlant de la raison, observer qu’« il s’agit de la raison “divine”, à mille lieues de la raison “humaine” (et rien qu’“humaine”) des modernes » (‘forum’).
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