Subitement je sors de mon rêve, dommage, cette belle et grande fille avec ses yeux d’aigue-marine laissait passer une vague espérance, comme cette lueur spectrale à travers l’occultant de la lucarne. Levé, je vais ouvrir la fenêtre pour voir le jour, quand j’entends l’eau des sanitaires couler avec fracas dans la salle de bain. J’y cours, allume, merde, pas de lumière ! Quelqu’un est là, pourtant, qui se douche ! Impossible ! Je retourne à mon chevet pour voir l’heure, clic ! pas de lumière non plus ! Dès lors, je comprends que je suis encore en train de rêver. Je ferme les yeux pour jouer le jeu, me rendormir, rêver peut-être, et m’éveiller vraiment à la fin, lorsque des fulgurations éblouissantes, rouges, bleues, vertes, d’une totalité écrasante, se mirent à clignoter sans arrêt, et sur ces plaques unidimensionnelles des flashs publicitaires jaillissent : ASTRAZENECA, PFIZER, MODERNA, l’un après l’autre, sans cesse…
Affolé, je rouvre les yeux mais ça reste pareil, l’espace dans la chambre est le même que celui dans ma tête, je suis à jamais dans l’a priori de l’esprit, impossibilité d’en sortir, la déraison pure sans remède ! Mais les catégories apothicaires seraient elles aussi des formes universelles de l’entendement ? COMMENT EST CE POSSIBLE ? Solipsisme et Big Pharma seraient donc ensemble le Summum et l’Ultimum ? Il faut que j’aie été piqué à mon insu ! Quand ? Où ? Cette ordure dans les sanitaires ? Je devins un hurlement démentiel : au secours ! O Dieu pitié ! Lavez mon sang, éteignez les néons de ces éons éternisés en moi !
Parce que subsistait, ténue, infinitésimale, sous l’absoluité de l’horreur, l’intuition de l’autre Mort, la vraie, la délivrance, vague lueur aigue-marine qui s’étendit doucement pendant des siècles d’enfer, puis envahit mon esprit tout entier, et je m’éveillais pour de bon à la réalité.
Est-ce bien sûr ?
Félix Niesche
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