La “trêve des confiseurs”
Laissons des expressions comme “jamais auparavant”, “sans précédent”, “du jamais-vu”, “époque sans pareille”, “événement unique dans l’Histoire” et autres banalités dites et redites du genre. Plus rien ne convient à ce que nous vivons. Dans cette période des “fêtes”, entre Noël et Jour de l’An, que nous appelions in illo tempore non suspecto du tout “la trêve des confiseurs” en en faisant “tradition”, où rien ne se passait que du bon temps, où l’on prenait son temps et le temps d’une trêve, – aujourd’hui aucun temps n’est plus disponible pour cette sorte d’apaisement.
Je parle pour la France et ses échéances électorales, mais aussi pour ses dirigeants-bouffe face à Covid, qui est bien plus qu’en 2020 ‘personne de l’année’, transgenre et féminimasque (nouvelle recrue du non-genre féminisme-masqulin) qui transcende les genre ; je parle de la “ceinture de feu” (Ukraine, Biélorussie, OTAN, etc.) autour de la Russie, prête à exploser, autour de laquelle cliquètent comme des chenilles de char des bruits de Guerre Mondiale ; je parle de l’incroyable ‘Mister Biden’ et de sa besogne d’effondrement que nous décrit Orlov ; je parle du week-end de Noël, confiseurs ou pas mais sans aucun doute déchaînement et protestation antivaxx, ou anti-Covid, à travers le monde, parfois avec accents et parfums de Fronde… J’en passe sans nul doute mais cela me suffit pour me permettre de vous dire qu’il y a 30 ans, 40 ans, 50 ans, cette période de “trêve” était vraiment sacrée, et nous n’avions, nous autres gens de l’information par la communication, qu’à explorer et racler anxieusement nos fonds de tiroir pour trouver quelque sujet d’article dans l’air du temps. Mais aujourd’hui, quel rythme ! Quelle puissance, quel bouleversement ! Quelle belle allure, d’ailleurs…
Comprend-on ce que je veux dire lorsque je prends à mon compte cette remarque que, désormais et d’une façon impitoyable, « les événements mènent les hommes plus que les hommes ne font les événements ». Certains croiraient qu’il en fut toujours ainsi mais je parle ici de perception et de communication qui sont les outils dont nous disposons pour mieux mettre à profit nos connaissances dans les temps qui nous sont impartis. Et alors, il n’en fut pas “toujours ainsi”, bien au contraire.
Cette situation des rôle entre maître des temps et figurants du spectacle, entre causes premières et effets, directs ou indirects, à la dérive, est une chose complètement inédite, hors de toute hypothèse sur notre passé, hors de toute prévision possible pour notre avenir. Les prémisses de cette formidable révolution du temps lui-même nous avaient été signalées, par pure inversion et sans que nous en réalisions rien bien entendu, lorsque nous apprîmes que les imposteurs qui proclamaient avoir la maîtrise des temps de l’Histoire avaient décrété sans la moindre vergogne, pure arrogance fardée en ce terrible hybris que les Anciens dénonçaient comme le pire des vices, qu’ils étaient effectivement les maîtres des temps (plus récemment, on parle de “maître des horloges”, déjà le caquet rabaissé) :
« Nous sommes un empire maintenant et quand nous agissons nous créons notre propre réalité. Et alors que vous étudierez cette réalité, – judicieusement, si vous voulez, – nous agirons de nouveau, créant d’autres nouvelles réalités, que vous pourrez à nouveau étudier, et c’est ainsi que continuerons les choses. Nous sommes [les créateurs] de l’histoire… Et vous, vous tous, il ne vous restera qu’à étudier ce que nous avons [créé]. »
C’est ce qui me fait écrire à propos des “temps-devenus-fous”, cette expression forgée par l’évidence tout en vous faisant vous demander si l’expression ne signifie pas que les temps sont “devenus-fous” pour nous essentiellement sinon seulement, nous acteurs-figurants des choses, parce que nous découvrons, comme le roi sa nudité, que nous n’y contrôlons rien ; et vous faisant vous demander si l’expression ne signifie pas qu’en fait les temps nous paraissent être “devenus-fous” parce que les événements, comprenant jusqu’où va notre folie, nous les ont retirés complètement de notre maîtrise et de notre contrôle, et qu’ainsi ils nous paraissent être “devenus-fous” parce que notre regard dégagé de tout lien créateur les observe désormais avec notre folie bien visible et incontestable. Les “temps-devenus-fous” ? C’est nous qui sommes fous et ainsi croyant qu’ils le sont, par amertume et vanité blessés, parce qu’on s’en est saisi pour les mettre hors de nos mains et de nos ambitions devenues si piètres.
Je parlais au début de la “trêve des confiseurs” qui faisait “tradition”… Ainsi comprend-on que cette sorte de “tradition” d’occasion mercantile, recomposée comme l’on fait retape, à l’aune de la modernité, pour faire faire marcher le commerce des cadeaux durant la “trêve des confiseurs”, – l’on comprend que les événements libérés de nos sottises n’y prêtent aucune attention. Ils savent que ce sont des “traditions” filoutés par les marchands du temple et des temps de la modernité, les “traditions” revues par l’imposture des Philistins modernes-tardifs, néocapitalistes d’argent et de corruption, fauteurs de guerre, et qu’alors il est temps de les envoyer valser. Les événements ont décidé qu’il est temps, – pas fous du tout, ceux-là, – de nous placer devant le spectacle de la dévastation que nous avons apportée au monde.
« Regarde, ô Fils de l’Homme misérablement déconstruit et réifié en “dernier homme”, regarde ton œuvre et mesure le poids qui écrase ton âme attristée ! »
Ainsi sommes-nous placés devant deux substances du temps qui s’est recomposé selon les exigences de l’impérative transcendance de l’intuition. Notre temps s’est contracté jusqu’à l’infiniment stable du Rien, paralysé, atomisé, comme immobile et comme l’on est mort, et ainsi notre perception courante ne voit plus rien des événements qui bouleversent la métahistoire. Nous sommes paralysés dans un immense cyclone, comme emprisonnés dans le cœur et l’œil de cette formidable catastrophe qui pulvérise notre-civilisation, insensible à cette évidence que cette catastrophe pour nous est une apocalypse en vérité.
Celle-là au contraire, apocalypse vraie et prometteuse, suit un rythme des temps qui en est l’exact opposé.
C’est là que l’on doit placer ces événements qui nous échappent jusqu’à échapper à notre perception. Au contraire, ces temps-là, qui méritent d’être baptisés le Temps comme un des composants de l’univers avec une ambition cosmologique, sont dans une dynamique d’extrême expansion, ils vont au rythme de l’expansion de l’univers qui approche de son point de bouleversement, cet apocalypse dont je parle plus haut, qui est une catastrophe contenant tous les éléments pour une renaissance. Ce Temps en pleine expansion, à un rythme fou, qui précipite tous les événements en plein déroulement et qui se joue de la “trêve des confiseurs” devenu pour l’occasion assez dérisoire, suit effectivement la course de l’univers qui va vers son terme pour mieux préparer la nouvelle naissance, au-delà de la Renaissance qui fut un simulacre sublime dont nous ne vîmes rien de la sublimité, monté pour mieux préparer notre paralysie présente que nous baptisons “les temps-devenus-fous”.
Je pense, humblement mais fermement, qu’il faut nous habituer à ces nouvelles vérités-de-situation, à observer de l’œil goguenard de l’inconnaissance les analyses prétentieuses de la raison-subvertie sans cesse réduites à sa poussière par ces forces qui semblent nous avoir laissés à notre triste destin et qui en vérité préparent cette initiation dont les belles âmes retrouvées trouveront leur poétique métaphysique dans l’intuition dont nos véritables traditions sont le cimier. Nous avons laissé échapper le feu du ciel parce que nous nous sommes pris pour Jupiter-tonnant et que nous n’en étions qu’une ombre pâle, un reflet publicitaire.
(Déjà, je parle au passé de ce que nous étions.)
Le feu du ciel nous a échappés parce que le dieu des dieux n’aime pas les usurpateurs de fortune. Il y a longtemps que nous avons perdu la sagesse d’Ulysse et il se conclut sans la moindre hésitation qu’il nous faudra la réapprendre en reconnaissant d’abord l’horrible perversion de nos prétentions diaboliques. C’est une question de temps.
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