Eugène d’Estimauville de Beaumouchel >
Le juriste Azimuddin Hussain s’est fait connaître l’an dernier pour avoir associé la Loi sur la laïcité de l’État aux lois raciales de Nuremberg et à l’internement des citoyens canadiens d’origine japonaise lors de la seconde Guerre mondiale.
Justin Trudeau vient maintenant de le nommer juge à la Cour supérieure du Québec, le même tribunal où s’est déroulé le procès de la loi 21 en première instance, dans le cadre duquel il a tenu ces propos délirants.
La sacro-sainte Charte
Il représentait alors la Coalition Inclusion Québec, lobby qui tente de faire invalider la loi en invoquant la Charte de Trudeau père, Charte imposée au Québec et jamais formellement acceptée par nos chefs d’État (y compris libéraux), faut-il le rappeler. Le rapatriement a d’ailleurs été entaché de sérieuses irrégularités qui mettent en doute la légalité même de la Loi constitutionnelle de 1982.
[C]ette horreur constitutionnelle fabriquée sans nous, contre nous, dans notre dos!
Le paradoxe ici, c’est que des militants multiculturalistes et anti-québécois remettent en cause la légitimité de la clause dérogatoire, utilisée avec raison par la CAQ pour protéger sa loi de la Charte trudeauiste, alors que cette Charte n’aurait probablement jamais été adoptée si Pierre Eliott Trudeau et Jean Chrétien ne s’étaient pas pliés à cette exigence des provinces anglophones, qui voulaient ainsi préserver le principe de suprématie parlementaire hérité de l’Empire britannique.
Il y a un autre paradoxe : alors que Justin Trudeau affirme exécrer la clause dérogatoire comme son géniteur, ce dernier est le seul premier ministre canadien à l’avoir invoquée pour déroger à l’ancêtre de l’actuelle Charte canadienne des droits et libertés, la Déclaration canadienne des droits adoptée en 1960. Il s’agissait d’un contexte très particulier, celui de la Crise d’octobre 1970. Cela a permis d’effectuer près de 32 000 perquisitions sans mandat et d’arrêter plus de 500 citoyens dont le seul crime était de soutenir l’indépendance du Québec. Plusieurs ont été torturés derrière les barreaux.
Magistrature & magouillage
Les libéraux sont depuis longtemps devenus maîtres dans l’art de nommer des activistes multiculturalistes, fédéralistes et centralisateurs en tant que juges siégeant dans les différents palais de justice du Québec. L’objectif est double : donner un coup de pouce aux fidèles amis du Parti et tenir en laisse le gouvernement démocratiquement élu par cette province réputée intolérante et réfractaire à l’utopie postnationale du Canada.
La liste complète des actions plus ou moins légales de la mafia des juges rouges et de leurs complices libéraux serait trop longue à faire. Il suffit ici de donner quelques exemples relativement récents :
- Le juge qui présidait le procès susmentionné, et qui a charcuté la loi 21 et affaibli la compétence exclusive du Québec en éducation en statuant que l’interdiction des signes religieux ostentatoires ne s’appliquait pas aux commissions scolaires anglaises, se nomme Marc-André Blanchard. Comme par hasard, ce Blanchard est aussi un… donateur libéral!
- Lorsque les intégristes religieux ont initialement tenté d’obtenir une injonction pour bloquer l’application de la loi, un panel de juges de la Cour d’appel du Québec les a déboutés. Mais une des trois juges était de toute évidence très remontée contre la loi. Il s’agissait de nulle autre que l’ex-juge en chef du Québec, Nicole Duval Hesler. Celle-ci a fait l’objet d’une plainte devant le Conseil de la magistrature pour sa proximité avec la Lord Reading Law Society, un lobby juridique juif qui attaque justement la loi 21 en cour (et même la loi 101 à une époque). Le plaignant, l’historien Frédéric Bastien, arguait qu’elle aurait dû reconnaître ce conflit d’intérêt et se récuser. Au lieu de défendre son intégrité, la juge Duval Hesler a préféré mettre fin à sa carrière, sachant pertinemment que le gouvernement Trudeau allait pouvoir choisir son successeur.
- L’homme qui fut en charge de choisir la nouvelle juge en chef du Québec est le ministre fédéral de la justice, l’honorable David Lametti. Lametti a été mis sur la sellette il y a quelques mois, lorsque l’existence de la Libéraliste a été révélée au grand jour. Cette dernière est un fichier servant à vérifier les allégeances et les dons politiques faits par les candidats à la magistrature. Le ministre nous jure maintenant que la consultation de ce fichier ne fait plus partie du processus de sélection…
- L’illustre devancier de Mme Duval Hesler, le juge en chef Michel Robert, s’est démarqué par son exceptionnelle franchise. Il a ainsi admis que les avocats souverainistes étaient systématiquement exclus de la magistrature fédérale, et ce alors qu’il était toujours en poste. Il a précisé qu’il trouvait ce type de discrimination tout à fait légitime!
Aucune transparence
Un des problèmes fondamentaux réside dans l’opacité quasi totale du processus de nomination des juges fédéraux. Or la lumière du soleil est le meilleur désinfectant.
Au Québec, les règles ont été assainies depuis le scandale dit des post-its, qui est né après les révélations de l’ancien ministre de la justice Marc Bellemare. L’ex-député du PLQ avait déclaré sous serment que le gouvernement Charest plaçait un mémo sur chaque CV pour déterminer si l’aspirant magistrat était un bon libéral ou un méchant péquiste.
Ce manque de transparence va de pair avec le non-respect du principe de séparation des pouvoirs, pourtant considéré comme fondamental en démocratie libérale.
Aux États-Unis, la séparation des pouvoirs est strictement respectée : si le président nomme les juges fédéraux, les candidats sont interrogés lors d’audiences publiques devant le Sénat, et les élus peuvent apposer leur veto ou même refuser de tenir un vote. Les juges fédéraux sont seulement habilités à entendre des questions relevant du droit fédéral (dont la constitution), à moins qu’une décision de la Cour suprême d’un État soit-elle même portée en appel devant la Cour suprême des États-Unis. Quant aux juges nommés par les États, ils entendent tout naturellement des causes portant sur les lois de l’État en question.
Au Canada, où règne un ordre constitutionnel confus et un fédéralisme paternaliste, non seulement le bureau du premier ministre agit-il dans l’obscurité et sans l’aval des députés ou des sénateurs (alors que nous sommes censés vivre dans un régime parlementaire, contrairement à nos voisins du Sud), mais les magistrats ainsi choisis ont le pouvoir d’interpréter et de casser les lois fédérales aussi bien que celles des provinces.
Une exception
Il existe cependant une exception (récente) : le processus de sélection des juges à la Cour suprême est plus ouvert qu’il ne l’était. L’exécutif s’est maintenant engagé à consulter l’opposition officielle, par exemple.
Plus important encore, en 2019, Ottawa et Québec ont conclu une entente administrative reconnaissant la participation du Québec dans la nomination des juges québécois de la Cour suprême : trois sur neuf d’après la Loi sur la Cour suprême, représentation qui bénéficie d’un statut constitutionnel.
En gros, un conseil de 8 membres (certains nommés par Québec, d’autres par Ottawa ou par des groupes de la société civile) présente une liste de 3 à 5 noms et le fédéral doit normalement faire son choix parmi ces noms.
Cette solution est loin d’être parfaite, entre autres parce que Québec ne nomme pas la majorité des membres et que le premier ministre du Canada peut théoriquement faire fi de cette liste, mais il s’agit d’un précédent majeur d’un point de vue historique et politique.
Pour la première fois, le chef du gouvernement fédéral jette du lest et décentralise ce pouvoir qu’il possédait sans partage. En fait, Trudeau s’est piégé en acceptant ce compromis, comme un chroniqueur canadien anglais l’avait fait remarquer à ce moment.
Si le fédéral accepte ce principe pour les Pères Noël québécois d’Ottawa, il devra logiquement l’étendre aux tribunaux inférieurs (Cour supérieure et Cour d’appel), ce qui serait en soi un gain non négligeable.
Dans les faits, il serait fort probablement possible pour une province déterminée d’aller chercher encore plus de pouvoirs dans la sélection de ces juges qui entendent relativement peu d’affaires à portée pancanadienne. C’est encore plus vrai dans le cas du Québec, qui a une tradition civiliste unique au Canada.
Chose certaine, cette approche rendrait beaucoup moins probable la nomination de fanatiques multiculturalistes et de donateurs du Parti libéral à titre de juges au Québec. Le statu quo a assez duré.
Source: Lire l'article complet de Horizon Québec Actuel