‘Omicron’ et communication
• Textes du 27 novembre 2021. • La crise-Covid ne cesse de s’enfoncer dans un marigot d’événements qui repoussent une échéance de plus en plus improbable et aggrave les conditions politiques. • Il y a l’arrivée d’un nouveau-venu, le variant ‘Omicron’ dont, comme d’habitude, on ne sait rien et qui peut réserver le pire. • En France, la troisième “dose”, dite aussi “rappel” ou “boost”, ne soulève guère d’enthousiasme et met en évidence l’épuisement des arguments et la lassitude du public. • Contributions : dedefensa.org et Arnaud Benedetti.
D’abord, il y a l’alarme devant l’arrivée du dernier-venu parmi l’enchaînement des ‘variants” du virus : le ‘B.1.529’, prestement renommé ‘Omicron’, 15e lettre de l’alphabet grec, certainement mieux adapté aux exigences de la communication-rassurante et -heureuse (chose essentielle dans une pandémie, bien plus que les lits de réa’ et une cohérence de sincérité des autoriutés). Identifié d’abord dans deux pays africains, le Botswana et l’Afrique du Sud, on l’annonce désormais dans divers pays européens.
Le ton général auquel invitent les fiévreuses polémiques en courts est d’une extrême gravité, comme dans ‘ZeroHedge.com’ ; certains laissant croire qu’ils jugeraient ‘Omicron’ comme la source possible de “la mère de toutes les pandémies” avec ses divers et exceptionnels caractères, d’autres notant cet panique comme une circonstance bienvenue pour que le corps médical-tyrannique reprenne un peu de prestige même s’il alimente sans s’en apercevoir les enchaînements psychologiques d’une certaine inéluctabilité due à son impuissance et à ses errements dans les innombrables querelles le sexe des anges-virus, accompagnés d’un effort de censure de plus en plus ferme contre les voix discordantes… Beau spectacle du triomphe de la science et de la démocratie réunies en une cause évidemment commune.
« Considéré comme la variante la plus fortement mutée du coronavirus jusqu'à présent, [‘Omicron’] présente 32 mutations dans la protéine de pointe et 50 au total. Plus précisément, les scientifiques ont mis en évidence qu’il y a 10 mutations contre 2 dans la variante Delta concernant le domaine de liaison aux récepteurs, qui est la partie du virus qui établit le contact initial avec les cellules. »
On comprend que, dans l’actuel climat de tension, de pression, d’échanges fiévreux et d’hypothèses innombrables, entre “police de la pensée-sanitaire”, cercles de la raison et “complotistes” de toutes les sortes, l’intrus soit apprécié comme une catastrophe potentielle, ou comme un obstacle de plus aisément contrôlable par la dextérité des professeurs, ou comme une manœuvre de plus des puissances cachées. Les projections et les scénarios ne manquent pas, ils vont dans tous les sens.
Pour l’heure, c’est l’attente des résultats des premières enquêtes et interrogatoires dans les locaux scientifiques et la laboratoires adéquats, lez vertueux Pfizer en tête, pour savoir comment on pourra traiter ‘Omicron’, et si on pourra le traiter avec l’arsenal actuel qui a déjà tant de mal à s’affirmer sur le champ de bataille pour lequel il a été développé. Voici, pour nous faire patienter, quelques précisions autour de la question la plus angoissée (‘Omicron’ sera-t-il neutralisé, ou bien faudra-t-il un nouveau vaccin ?)
« [Vincent Enouf, directeur adjoint du centre de référence des virus respiratoires de l’Institut Pasteur] signale que l’Omicron a des mutations qui “pourraient lui permettre de mieux diffuser, de mieux se fixer à nos cellules et de mieux nous infecter”.
» “Mais le plus inquiétant, c’est qu’il pourrait engendrer une baisse d’efficacité de nos vaccins. On peut très bien imaginer qu’une partie des anticorps que nous avons développés ne reconnaissent plus ce virus et le neutralisent mal”, indique-t-il en ajoutant que cela reste encore à vérifier.
» Son point de vue est partagé par l’Agence britannique de sécurité sanitaire selon laquelle ce variant, qui comprend un grand nombre de mutations de la protéine de pointe, pourrait “modifier le comportement du virus vis-à-vis des vaccins” et qu’une “enquête plus approfondie est nécessaire”.
» “S’il s’avère qu’il diminue beaucoup l’efficacité vaccinale, on pourrait même devoir refaire de nouveaux vaccins spécialement pour ce variant”, a expliqué à 20 Minutes le chercheur en immuno-oncologie Éric Billy. »
L’on comprend aisément que nous sommes qu’au début d’une longue litanie d’avis concordants, divergents ou contradictoires, comme c’est de plus en plus le cas chaque fois qu’apparaît un élément nouveau dans la crise-Covid. Ainsi, et quoi qu’il en soit d’‘Omicron’, qu’il faille ou non s’en alarmer, la crise-Covid est devenue un véritable monstre au tentacules sans nombre, visqueux et indomptable, qui laisse voir tant d’excès, dans tous les sens et dans “tous les camps“ ; l’ensemble ne faisant que s’embrouiller un peu plus, se perdre un peu plus profondément dans ce que nous décrivions dans notre ‘chapô’ comme “un marigot d’événements”.
Le texte ci-dessous, que nous empruntons à ‘Figaro-Vox’ de ce 26 novembre, est d’un maître de l’analyse, du langage, et surtout du climat de la communication. Après la dernière “vague” de mesures annoncées par l’excitant monsieur Véran, ci-devant ministre de la Santé, Arnaud Benedetti décrit à merveille, par petites touches, l’espèce de climat d’engourdissement paradoxalement hostile et soupçonneux qui pèse sur la société française, faux climat et faux assoupissement marquant essentiellement cette sorte de sur-place ou de mythe de Sisyphe sanitaire, nième “vague” et nième “variant” recommencés. Ainsi les mots d’“épuisement” et de “lassitude” ont-ils parfaitement leur place dans une phrase comme celle-ci :
« Car à terme, ce qui guette les gouvernants n'est-ce pas in fine l'épuisement de leurs arguments à l'épreuve de la lassitude montante des opinions. »
… Mais, à terme justement, l’on sent bien que ces mots marquant une sorte d’abandon grandissant peuvent bien plus mener à l’exaspération soudaine qu’à l’apaisement par habitude.
On dit volontiers, et avec bien des raisons, qu’il y a un comportement moutonnier chez les citoyens vaccinés, ou bien en voie de l’être, ce que Benedetti nomme « l’accommodement quasi-moutonnier qu'il suscite dans un modèle de société ». Mais les montons qui s’emploient en général à paître montrent une placidité et une tranquillité qu’on ne voit guère dans le troupeau français, accablé des pressions de tant de bergers agités, communicant à tout bout de champ, se contredisant, se répétant, recherchant avec suspicion et acharnement des traces « de “complotisme”, catégorie fourre-tout qui autorise à disqualifier tout esprit critique ». A les voir paître dans une telle danse de saint-Guy champêtre, on en arrive à penser que les moutons pourraient finir par les envoyer paître. On le comprend aisément à la former presque oxymorique du titre que le chroniqueur a donné à son texte : « Le gouvernement va devoir faire face à la lassitude de l'opinion » ; la “lassitude”, sentiment d’abandon et de découragement certes, mais “faire face” signifiant qu’il va falloir affronter quelque chose au contraire de violent… C’est bien la marque de cette étrange crise-Covid, que certains considéreraient comme une immense manœuvre d’encadrement et de contrôle, et qui se réalise de telle manière que la tension ne cesse de croître, et la colère contre l’encadrement et le contrôle déjà bien présent dans leur immonde “monde d’avant”, avant que ne soient professionnellement réalisés cette nième tentative d’encadrement et ce contrôle qu’on ne cesse d ‘établir depuis des années, des décennies, etc..
Au reste et comme d’habitude, une petite surprise sans surprise pour le week-end : les “moutons” sont de sortie en Australie :
« Une nouvelle série de manifestations contre la vaccination obligatoire contre le virus Covid a touché l’Australie, avec des centaines de milliers de manifestants dans des dizaines de villes. Des images aériennes montrent des foules immenses bloquant les rues des centres… »
…Avec la perle du jour en guise de dégustation, concernant l’évaluation évidemment et éminemment scientifique de l’ampleur statistique de la foule : 9 000 manifestants selon la police, 150 000 selon les organisateurs. On arrivera un jour à 0 manifestant pour la police et toute l’Australie dans la rue pour les manifestanbts : belle opération de contrôle.
(Ci-dessous le texte, ‘Figaro-Vox’ du 26 novembre 2021, de Arnaud Benedetti, rédacteur en chef de la ‘Revue politique et parlementaire’, professeur associé à Paris-Sorbonne, auteur de ‘Comment sont morts les politiques ? Le grand malaise du pouvoir’, éditions du Cerf, novembre 2021)
dedefensa.org
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Faire face à la lassitude de l'opinion
Le narratif de l'épidémie n'en finit pas ; il revient comme une deuxième peau dont nous ne parviendrions pas à nous défaire. Le pire dans cette affaire est l'accommodement quasi-moutonnier qu’il suscite dans un modèle de société où le sanitaire, celui de la peur en l'occurrence, dicte et commande, quand bien même en viendrait-il à produire nombre de contradictions que les exécutifs s’efforcent de dissimuler sous une communication anxiogène.
L’immédiateté permanente à laquelle nous sommes exposés neutralise capacités de réflexion, mémoires, et vigilance. Tout file au point de brouiller les certitudes d'hier enfouies dans une histoire perdue. Il est loin, et peut-être n'a-t-il jamais existé le temps où, péremptoirement, optimistes doctes médecins et politiques professaient l'idée que le tout vaccinal vaincrait définitivement l’épidémie. Ceux-là jureront aujourd’hui qu’ils n'ont jamais prononcé de ces mots définitifs mais le moment viendra où une histoire scrupuleuse restaurera l’enchaînement des faits.
À ce stade, tout est encore trop tôt, tant les “vagues”, – sémantique au demeurant révélatrice de notre inconfort à définir ce que nous traversons – se succèdent pour conformer médiatiquement les opinions aux messages et autres injonctions de leurs maîtres du moment.
Les dernières annonces gouvernementales s’inscrivent dans ce contexte de faux-semblants. Non que la reprise épidémique ne soit au rendez-vous mais il n'en demeure pas moins qu’il faudrait aussi s’interroger sur la nature et la portée de son impact, – ce qui manifestement n’est pas envisageable, sauf à prendre le risque d'être suspecté de “complotisme”, catégorie fourre-tout qui autorise à disqualifier tout esprit critique, y compris celui qui s'efforcerait d'interroger rationnellement des choix qui se prétendent rationnels mais qui sont avant tout politiques, ce qui ne signifie en rien qu'ils résultent d'une quelconque rationalité.
Après tout, que le passe sanitaire soit d’abord un instrument coercitif de contrôle social et non pas une mesure de protection sanitaire, le fait est peu contestable, même s'il habille par l'incitation vaccinale pour chacun d'entre nous à se ranger sous le parapluie de la vaccination dont on n'ignore plus dorénavant qu'il n'exclut pas plus de contaminer que d'être contaminé. À se reporter au triomphalisme du début de l'aventure des vaccins, voici quelques mois, force est de constater que l'humilité, désormais au rendez-vous, s'est trouvée un argument rhétorique, – la fameuse “limitation des formes graves”, dont on ne peut que souhaiter qu'elle ne soit pas exclusivement un effet pour rhéteur en difficulté. Car à terme, ce qui guette les gouvernants n'est-ce pas in fine l'épuisement de leurs arguments à l'épreuve de la lassitude montante des opinions qui ont assisté depuis des mois à la défaite de bien des certitudes et à la fragilisation grandissante de la doxa d'un biopouvoir qui a montré bien peu de prudences dans ses assertions instantanées ?
Tout se légitime au fur et à mesure des évolutions pandémiques au tamis d'une science instantanée qui a montré qu'elle avançait en tâtonnant, mais qui trop souvent aura communiqué par affirmation, contaminant ainsi une parole et une action publique aux prises aux aléas d'un virus qui se joue des hommes et des savoirs.
Les dispositions prises par l'exécutif pour faire face au rebond épidémique suscitent en conséquence le sentiment d’un nième “barrage contre le Pacifique”, comme si à défaut de refermer à nouveau la société il s'agissait d’enfermer d’abord les individus dans un carcan renforcé de contraintes individuelles. La société continue à fonctionner, sous réserve que nous fassions le deuil d’une partie de nos libertés et de notre libre arbitre.
Ainsi faut-il comprendre le choix des émetteurs pour délivrer aux Français les dernières mesures de l’exécutif : le ministre de la Santé est tout autant un bouclier qu’un fusible au cas où… Alors que la précampagne présidentielle s'accélère, le chef de l'État s'est bien gardé, avec sagesse, de toute prise de parole, comme s'il se réservait sur un sujet dont l'escalade apparaît à chaque nouvelle séquence bien plus communicante qu'argumentative. Laisser Olivier Véran communiquer c’est laisser le ministre tout autant aux imperfections de sa com’ qu’aux incertitudes d’une action qui parfois donne l'impression de se rapprocher toujours plus du pied du mur…
Arnaud Benedetti
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