Le gouvernement Legault a confirmé son intention de fixer à 70 000 le nombre d’immigrants que le Québec accueillera l’an prochain, dans le cadre d’une opération de rattrapage. Cette décision s’ajoute à son refus constant d’acquiescer à la demande du Parti Québécois pour que 100 % des immigrants économiques maîtrisent déjà le français à leur arrivée.
Puisque la CAQ s’entête à ne pas imposer de critères fermes sur la maîtrise du français, environ 23 000 immigrants sur les 70 000 ne maîtriseront pas le français.
Or, ce sont les chiffres sur la francisation à long terme des immigrants allophones qui expliquent le mieux le recul du français à Montréal. Sur 23 000 allophones reçus, environ le tiers s’inscriront en francisation. Sur ce tiers, 90 % n’atteindront pas un niveau suffisant pour travailler en français, nous révélait la vérificatrice générale en 2017. C’est pourquoi, au Québec, environ 45 % des immigrants s’intégreront en anglais, alors que les anglophones ne représentent que 8 % de notre population.
Un modèle d’échec
Nous sommes donc ici devant un modèle d’échec de l’intégration linguistique et culturelle. Or, cette hausse des seuils orchestrée par la CAQ est fondée sur le raisonnement simpliste et erroné que la solution miracle à notre pénurie de main-d’œuvre réside dans une nouvelle hausse des seuils. Il s’agit du même raisonnement que celui utilisé par Jean Charest lorsqu’il avait augmenté les seuils de 35 000 à 50 000 en moyenne. Est-ce que cette hausse a réglé le problème? Pas du tout. Comme le révèlent plusieurs études, l’immigration n’a qu’un impact marginal sur la pénurie de main-d’œuvre, parce qu’un travailleur est aussi un consommateur et parce que l’accueil nécessite également de la main-d’œuvre.
Cette réalité est présentement aggravée par une crise du logement aux quatre coins du Québec, alors que les besoins en main-d’œuvre se font surtout sentir en région. Se loger est une barrière supplémentaire à surmonter, en plus de celle de la langue. L’augmentation des seuils ne tient pas compte de ce contexte, alors que le gouvernement échoue déjà largement quant à ses cibles de régionalisation (seulement 21 % s’y installent).
La CAQ devrait d’abord mener la bataille de la crise du logement et celle auprès du fédéral pour traiter équitablement les milliers d’immigrants déjà au Québec, mais en attente d’un permis de travail ou d’une résidence permanente depuis des années.
Ce refus d’exiger le français avant l’arrivée, malgré ses conséquences évidentes, ne devrait cependant surprendre personne. Pour citer François Legault lui-même, « le Québec a accordé trop d’importance à la connaissance du français dans le processus de sélection des immigrants ». Non seulement cette vision est dangereuse pour l’avenir du français, mais elle est également erronée pour les PME en région qui ont des besoins urgents.
La vision du Parti Québécois
Au Parti Québécois, nous avons une tout autre vision pour l’avenir. Nous croyons que la maîtrise du français par 100 % des immigrants économiques, conjuguée à une régionalisation beaucoup plus efficace et organisée, est déterminante pour réussir l’intégration et combler les postes vacants. Nous croyons que les seuils d’immigration devraient être fixés en fonction de la capacité d’accueil réelle de notre société, et que le plan pour contrer la pénurie de main-d’œuvre devrait être plus intelligent et complet qu’une simple hausse des seuils.
Surtout, nous constatons que cette augmentation sans critères fermes sur le français – qui s’ajoute à d’autres décisions indéfendables, comme l’agrandissement du cégep Dawson – fait malheureusement du projet de loi 96 sur le français de la pure poudre aux yeux.
Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti Québécois
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