par Pr Chems Eddine Chitour.
«À vous qui êtes appelés à nous juger, le but : l’indépendance nationale par : la restauration de l’État algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques. Le respect de toutes les libertés fondamentales sans distinction de race et de confession. (…) Algérien ! (…) Ton devoir est de t’y associer pour sauver notre pays et lui rendre sa liberté ; le Front de libération nationale est ton front, sa victoire est la tienne.»
(Appel du 1er Novembre)
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L’Algérie va célébrer le 67e anniversaire de la glorieuse Révolution du 1er Novembre 1954. On le sait. Avec un rituel de métronome, chaque année nous réchauffons une symbolique à laquelle les jeunes qui, sans être éduqués dans le culte de la patrie, ont, au fond d’eux-mêmes, le «feu sacré» qui attend de s’exprimer. «La révolution se fera même avec les singes de la Chiffa», disait l’architecte de la Révolution, Mohamed Boudiaf. Avec toujours le même scénario et rituellement, on présente une révolution qui, en son temps, avait marqué l’Histoire dans le mouvement de décolonisation du Tiers- Monde. Des thèses étaient soutenues aux États-Unis sur la Révolution. Même le film La Bataille d’Alger a beaucoup inspiré les États en lutte pour leur indépendance.
Qui étaient ces révolutionnaires sans armes, sans moyens, sans troupes, face à une colonisation qui paraissait durer mille ans ? De simples citoyens autour de la trentaine d’âge, formés à la dure école de la vie et qui avaient une conviction gravée dans le marbre. Cette détermination sans faille vis-à-vis de l’adversaire commun était nécessaire et toutes les manœuvres du pouvoir colonial pour atomiser le consensus ont échoué. À l’époque, il n’y avait ni régionalisme ni prosélytisme. Seule la cause de la lutte pour la liberté était sacrée. À bien des égards, la Révolution a sa place dans le panthéon des révolutions du XXe siècle. Elle a surtout à ne pas se comparer aux autres. Elle a sa spécificité, ses douleurs et ses convulsions propres.
Le coût terrible payé pour la liberté
Il est indéniable que le peuple algérien a souffert pendant 132 ans, soit environ soit plus de 48 000 jours de malheur, de sang et de larmes que nous gardons encore dans notre ADN et qui expliquent, dans une large mesure, nos difficultés actuelles . L’Algérien de ce temps, jeune, plein d’idéal, élevé à la dure ou même jeune lettré décida que c’en était trop. Toutes les tentatives mettant en œuvre la lutte politique se sont révélées vaines comme le seront les tentatives assimilationnistes et le zaiimisme . Beaucoup d’historiens avancent que le déclenchement de la Révolution a mâturé depuis les massacres de masse de mai 1945 qui se chiffrent à des milliers d’Algériens qui sont passés de vie à trépas à partir du 8 mai , jour de la libération en Europe et qui fut le début pour le pouvoir colonial , de la libération d’une haine contenue envers l’Allemagne et qui s’est déversée sur un peuple désarmé qui a voulu fêter ce qu’il croyait être le début de la liberté.
Dans un environnement avec une chape de plomb qui paraissait durer mille ans, une vingtaine de patriotes décidèrent du déclenchement de la Révolution. Ce fut l’épopée que l’on racontera encore dans cent ans. En effet, au bout d’un processus de près de 2 800 jours de bombardements, d’exécutions sommaires, de tueries sans nom, l’envahisseur fut chassé du pays. Le tribut payé fut lourd : des centaines de milliers d’Algériens morts, plusieurs milliers de combattants morts, de torturés , des milliers de villages brûlés et plus de deux millions d’Algériens déplacés avec des traumatismes que l’on gère encore de nos jours avec en prime un Sahara abîmé par les essais nucléaires gerboises multicolores qui tuent encore et toujours en différé au même titre d’ailleurs que les mines qui continuent aussi à handicaper des jeunes.
La préparation du 1er Novembre 1954 relatée par Mohamed Boudiaf
Pour parler du déclenchement de la Révolution, qui mieux que Mohamed Boudiaf, acteur de cette épopée ? Nous lui donnons la parole : «Bon nombre de personnes étrangères à ces événements ont écrit et continuent de le faire en déformant par intérêt ou par ignorance les faits attribuant à des gens des rôles qu’ils n’ont pas joués, idéalisant certaines situations et passant d’autres sous silence, refaisant l’Histoire après coup. Le résultat le plus clair de ces manipulations est d’entraîner une méconnaissance d’un passé pourtant récent chez les millions de jeunes Algériens qui n’ont pas vécu cette période et qui sont pourtant avides d’en connaître les moindres détails. Mon propos va donc s’attacher à reconstituer le déroulement des événements de l’année 1954, en m’efforçant de rétablir la vérité historique.(…) «Je suis personnellement convaincu que cette histoire reste à écrire (…) »
« Je ne crois pas qu’il suffit, comme le font certains, de mettre en valeur le rôle de quelques ‘’chefs historiques’’ et de ramener l’Histoire à des individus pour saisir ce qui s’est passé. Les hommes du 1er Novembre, s’ils eurent un mérite, ce fut précisément celui d’être parvenus à exprimer et à mettre en œuvre ce qu’une grande masse d’Algériens pensaient et souhaitaient. Eux-mêmes furent le produit de circonstances, de luttes politiques et il est dangereux de pratiquer le culte des héros (même s’ils sont morts) car c’est là le meilleur moyen de nier le rôle du peuple… C’est dans cette atmosphère de confusion et d’anarchie, que le Comité des cinq (devenu des six, début septembre) travaillait d’arrache-pied pour constituer les premiers commandos, les former en vitesse, les armer et les préparer pour la nuit du 1er Novembre 1954. (…) Dans notre esprit, déclencher une action armée qui n’avait de chance de réussir qu’avec l’adhésion et l’appui des masses nécessitait des noms connus ou tout au moins une tête d’affiche. (…) Cette expérience nous apprit qu’il n’y avait rien à attendre du personnel politique de l’époque. Une tentative auprès des Oulémas n’aboutit à rien.»(1)
Reprenons ici les termes de la proclamation. «But : l’indépendance nationale par :-1. la restauration de l’État algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques ; 2. le respect de toutes les libertés fondamentales, sans distinction de race ni de confession. Parallèlement à la définition politique, deux principes d’organisation furent adoptés : La décentralisation, compte tenu de l’étendue du territoire national, la primauté de l’intérieur sur l’extérieur. Principe juste dans son esprit dans la mesure où il signifia que rien ne pouvait être fait sans l’accord de ceux qui se battaient sur le terrain. Enfin, nous décidâmes d’appeler l’organisation politique : Front de libération nationale (FLN) et l’organisation militaire : Armée de libération nationale (ALN). Pour ce qui est des structures, l’Algérie fut divisée en six Wilayate.»(1)
L’armement était le maillon faible de la Révolution. «Pour les armes et les fonds, poursuit Boudiaf, chaque Wilaya fut chargée de se procurer des fonds par ses propres moyens. Le principal dépôt était dans les Aurès avec à peu près de 300 armes italiennes, achetées dans le courant 1947-48 en Libye (…) Une vingtaine de mousquetons prélevés sur les armes des Aurès furent envoyés sur le Nord-Constantinois, tandis que la Kabylie en recevait une trentaine. «Il ne restait plus qu’à fixer la date du déclenchement. Dans un premier temps, nous avions retenu le 15 octobre. Boudiaf parle de fuites et du travail de sape des centralistes : le Comité des Six reporta la date au 1er novembre sans en informer qui que ce fût.»(1)
Avec le temps, on reste ébahis ! Comment, avec si peu de moyens, la Révolution, partie véritablement de zéro, a pu réussir ? Et pourtant, le résultat est là. Quel est ce feu sacré qui consumait ces pionniers au point de leur faire croire à l’impossible, d’abord en déjouant tous les pièges nombreux? Boudiaf avec sa lucidité a compris que, sans le peuple, rien ne pouvait se faire. De retour au pays, après trente ans d’exil, l’Algérie était en péril , il a cru redonner aux Algériens le goût du combat pour une Algérie de liberté qui mise sur la jeunesse. On sait comment son rêve fut brisé.
Devoir d’inventaire : Qu’avons-nous fait de la Révolution ?
À l’indépendance, nous étions tout feu tout flamme et tirions notre légitimité internationale de l’aura de la glorieuse révolution de Novembre. La flamme de la Révolution s’est refroidie en rites sans conviction pour donner l’illusion de la continuité. Comment peut-on parler de révolution et du «Mach’al» du 1er Novembre à transmettre aux jeunes si ces jeunes sont tenus soigneusement à l’écart du mouvement de la nation ?
La Révolution a été portée à bout de bras par des jeunes pour la plupart et qui ne dépassaient pas la trentaine ! Les héros étaient des gens simples qui ont fait leur devoir sans rien attendre en échange et surtout qui n’ont pas fait des mânes de cette révolution encore un fonds de commerce au nom d’une «famille révolutionnaire» excluant de ce fait les autres, les Algériens car la victoire de l’Algérie doit autant aux glorieux martyrs et moudjahid encore en vie que Dieu les garde , mais aussi à notre diplomatie révolutionnaire aux médecins aux infirmières, à la glorieuse équipe de Foot du FLN , du théâtre bref aux Algériennes et Algériens qui ont chacun apporté leur contribution À bien des égards, eu égard au combat titanesque de ces pionniers qui ont fait démarrer l’Algérie à l’indépendance, nous sommes des nains juchés sur des épaules de géants.
Qu’avons-nous fait après l’indépendance ? Comment avons-nous traversé le temps avec un héritage aussi prestigieux et qu’avons-nous fait ? À l’indépendance, nous tirions notre légitimité de l’aura de la Révolution et beaucoup de pays avaient pour nous de la sollicitude. Cependant, il faut bien reconnaître que le pays était exsangue, les rares cadres qui existaient étaient sur tous les fronts. Je ne suis pas là pour faire un procès, mais beaucoup de choses auraient pu être mieux faites. L’Algérie de 2021, un pays qui se cherche, qui peine à se déployer, qui prend du retard, qui vit sur une rente immorale car elle n’est pas celle de l’effort, de la sueur, de la créativité. C’est tout cela en même temps. Qu’est-ce qu’être indépendant quand on dépend de l’étranger pour notre nourriture, notre transport, notre habillement, notre vie quotidienne ? Pendant vingt ans, de 1999 à 2019, nous avons gaspillé une rente de 1 000 milliards de dollars qui aurait pu nous permettre de sortir du sous-développement. L’Algérie se contente de consommer ce qu’elle ne produit pas. La devise néolibérale «ne pensez pas, dépensez !» a trouvé en Algérie une brillante application.
Le FLN a rempli sa mission historique
Avons-nous été fidèles au serment du 1er Novembre ? Cette question, nous devons nous la poser chaque fois que nous devons contribuer à l’édification du pays par un autre djihad par ces temps incertains. Cependant, il faut bien reconnaître que la génération post-indépendance reste peu informée de la réalité de cette Révolution, de la bravoure d’hommes et de femmes qui ont révolutionné le concept même du combat libérateur. Trois Algériens sur quatre sont nés après l’indépendance. Ils n’ont qu’un lointain rapport avec l’Histoire de leur pays.
La jeunesse ne s’intéresse pas à son passé qu’on lui a très mal enseigné. Elle se retrouve, soixante-sept ans après, déboussolée et déstabilisée par les questions identitaires. En son temps, le défunt président Mohamed Boudiaf affirmait que, justement, la «mission du FLN s’est achevée le 3 juillet 1962», au lendemain de l’indépendance de l’Algérie. En réalité, beaucoup pensent qu’il est grand temps de remettre ces trois lettres, symboles du patrimoine historique national, au panthéon de l’Histoire. Le FLN donne l’image d’une coquille vide qui s’est démonétisée au cours du temps.
Le FLN historique, le FLN moteur de la révolution de Novembre doit faire l’objet de toutes les attentions. Il ne devrait pas constituer un fonds de commerce pour tous les professionnels de la politique. Pourtant, le FLN doit être un marqueur indélébile de la dignité et de l’Histoire de l’Algérie, il doit être revendiqué par toutes les Algériennes et tous les Algériens, sans exception, et non par uniquement la famille révolutionnaire qui s’intronise comme seule dépositaire de l’immense Révolution algérienne.
Pour un récit national du XXIe siècle
Nous sommes au XXIe siècle. Notre pays a atteint l’âge de raison. Il n’est pas normal que, près de soixante ans après l’indépendance, nous ne puissions pas nous reconnaître en tant qu’Algériens avant tout. De fait, le premier des chantiers est celui du récit national. Nous devons, à l’instar de toutes les nations, avoir des icônes fondatrices du récit national. Il en est ainsi de la destinée manifeste des Américains, de Jeanne d’Arc en France, voire d’un mandat de Dieu pour le peuple élu. La difficulté d’ouvrir le dossier de l’identité des Algériens dans ce XXIe siècle de tous les dangers. Cette quasi-errance ouvre un boulevard à tous ceux tentés par l’aventure de fracturer un pays que 132 ans de colonisation abjecte n’ont pas pu réaliser. Il n’est que de voir que pour des raisons bassement électoralistes, des hommes politiques de l’Hexagone se permettent, toute honte bue, d’affirmer que c’est le pouvoir politique en France qui a donné une existence à l’Algérie après l’invasion sanguinaire de 1830.
Dans une de ses conférences, Ernest Renan décrivait la nation ainsi : «Une nation est une âme, un principe spirituel. Deux choses qui, à vrai dire, n’en font qu’une, constituent cette âme, ce principe spirituel. L’une est dans le passé ; l’autre dans le présent. L’une est la possession en commun d’un riche legs de souvenirs ; l’autre est le consentement actuel, le désir de vivre ensemble, la volonté de continuer à faire valoir l’héritage qu’on a reçu indivis.»
De mon point de vue, le fait de différer constamment la question qui est de définir le projet de société et s’interroger sur ce que c’est qu’être Algérien au XXIe siècle est porteur de danger. Quels sont nos fondamentaux culturels et cultuels ? La quête d’un récit national consensuel, qui fait siens aussi bien Massinissa que Jugurtha que l’Émir Abdelkader et qui se réfère à un Islam de 1 400 ans fait de tolérance, est un chantier qui attend toujours d’être ouvert tant il est vrai que l’aboutissement à un vivre-ensemble au nom d’une algérianité assumée qui coupera la route à l’aventure de ceux qui cherchent leur légitimité soit auprès de l’ancien colonisateur ou d’une sphère moyen-orientale installée dans les temps morts. Nous irons alors à la conquête du savoir ayant des racines assumées et des ailes pour prendre notre envol et apporter notre part à la civilisation humaine. Plus que jamais, nous appelons de nos vœux un aggiornamento qui nous permettra de rentrer enfin dans ce XXIe siècle de tous les dangers.
La réalité du monde que nous devons métaboliser dans nos actions
Malgré des efforts du gouvernement actuel, l’Algérie peine toujours à se redéployer dans un environnement mondial de plus en plus hostile. La situation actuelle est profondément dangereuse. Le monde a profondément changé. Des alliances se nouent, d’autres se dénouent. Quoi qu’on dise, les regards sont braqués sur l´Algérie. Nous ne sommes pas à l’abri d’un tsunami, nos frontières sont de plus en plus vulnérables. Le plus grand pays d’Afrique avec 2 383 742 km2 fait des envieux Un adversaire invisible du fin fond d’une salle climatisée peut démolir le fonctionnement d’un pays en s’emparant des codes informatiques des différents organes de fonctionnement. Cette guerre sans mort, cette guerre de quatrième génération fait appel à la maîtrise des nouvelles techniques. Il faut croire l’ANP quand elle déclare qu’elle déjoue des milliers de piratages. Nous n’avons pas compris qu’il faut changer totalement de logiciel. La guerre classique fait partie de l’Histoire. Les vrais combats sont ceux de l’intelligence la bravoure et le dévouement sont certes importants et déterminants si le pays est uni de Tizi Ouzou à Tamanrasset , et de Tlemcen à Tebessa comme le martelait Cheikh Nahnah
Doit-on continuer à regarder dans le rétroviseur alors que le monde avance et n’a que faire de nos états d’âme? Doit-on continuer à nous lamenter en comptant les points des coups reçus ou sommes-nous déterminés à nous battre avec les armes du XXIe siècle ? Il est temps de ré-étalonner notre rapport au monde. Un maître-mot : le savoir. Si nous décidons de donner une visibilité à l’Algérie pour qu’elle ne devienne pas une zone grise, les rodomontades sans lendemain n’ont plus cours. Pour ce faire , nous devons laisser l’idéologie en dehors de l’école et de l’université. Nous prendrons acte de notre retard et de prendre rendez-vous avec l’Histoire et se mettre au travail autour d’un projet, celui d’une Algérie du futur qui donne sa chance et où ceux qui ont une valeur ajoutée la mettraient au service du pays, barrant la route à tous ceux tentés par l’aventure et qui croient trouver dans l’adoubement à l’ancienne puissance une façon de rendre service au pays. Cruelle erreur ! On sait ce que c’est que la démocratie aéroportée pour des pays vulnérables. Un exemple récent : l’Afghanistan. Comme sont tentés par l’aventure de combats d’arrière-garde ceux qui s’arriment à la sphère moyen-orientale, autrement plus féroce, contre l’Algérie qui refuse de rentrer dans leur rang.
Il vient que l’Algérie ne peut pas rester en marge du développement de la science et de la technologie. Elle devrait consacrer une attention soutenue pour maîtriser les sciences. Nul doute que les progrès auront fait un bond gigantesque pour améliorer notre vie ou notre environnement. De la fusion nucléaire aux nano-aliments en passant par les plantes éternelles, la médecine réparatrice, les nouveaux matériaux capables de donner de bons rendements énergétiques, toutes les innovations sont autant de chantiers qui voient les applications envahir notre quotidien. Les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple), nés autour de l’an 2000, totalisent 700 milliards de dollars. À titre d’exemple, nous rapportons une réflexion sur le web de demain : «La vision du web, selon Mark Zuckerberg, consiste donc à ne plus simplement être le spectateur d’un contenu, mais à devenir soi-même un acteur immergé à l’intérieur d’un univers où tout, ou presque, deviendrait possible grâce à la réalité virtuelle. À l’avenir, via des hologrammes, j’aurai l’impression que nous sommes au même endroit, même si nous sommes à des centaines de kilomètres l’un de l’autre…» Pour concrétiser cette vision de ce monde où réalités virtuelle et augmentée deviendraient la nouvelle norme, le patron de Facebook s’est donné les moyens : plusieurs milliards de dollars, une équipe de 10 000 salariés rassemblée dans le Facebook Reality Labs, pour s’atteler à la construction de cet univers virtuel.
Le campus de l’intelligence de Sidi Abdallah avec une ambition et des moyens
Le monde a profondément changé. Devant les défis scientifiques complexes, les nuages qui s’accumulent du fait de nouvelles guerres dites de quatrième génération, où nous ne voyons pas l’adversaire qui, généralement, est difficile à déceler. La seule parade est de mettre des stratégies préventives très résilientes et pouvant répondre rapidement. Nous devons relever les défis du futur. C’est d’abord les changements climatiques, l’énergie, l’eau, l’environnement, mais pas seulement. Nul doute qu’une vision d’avenir bien maturée et qui mobilise toute la communauté scientifique ne peut être que bénéfique pour l’avenir de notre pays. De ce fait, il est urgent de former une élite capable de rendre coup pour coup par nécessité vitale. Il serait présomptueux d’en attendre des résultats dans un futur immédiat.
Nous ne pouvons entrer dans le développement d’une parade efficace par effraction, c’est une lente maturation, ce sont des nuits blanches, c’est une autre révolution qu’il faut mener en rassemblant toutes les opportunités pour déceler l’élite à tous les niveaux. Quelle que soit la santé financière du pays, il faut mettre en place un campus de l’intelligence à Sidi Abdallah. Ce campus devrait pouvoir avoir toutes les sollicitudes en termes de moyens. L’élite formée dans de bonnes conditions devrait pouvoir permettre de donner la pleine mesure de son talent en étant sécurisée du point de vue de l’emploi. Pour être en phase avec la réalité du monde, notamment pour investir les nouvelles disciplines qui interviennent dans la cyber-sécurité, il nous faut former chaque année des dizaines de milliers d’informaticiens, d’ingénieurs en intelligence artificielle. Les écoles d’intelligence artificielle et de mathématiques devraient être complétées par les autres concernant les autres domaines. C’est le cas de l’informatique, de la robotique, de l’électronique, de la transition énergétique (ITEER)…
Ce que devraient être nos relations avec nos partenaires
Partant de la citation attribuée à Winston Churchill mutatis mutandis, nous pourrons dire : l’Algérie n’a pas d’ennemi, elle n’a pas d’ami, elle n’a que des intérêts permanents. Ceci nous amène, pour reprendre l’expression de Halim Ben Atallah, ancien ministre, à ré-inistialiser en permanence nos relations. Nous sommes un pays méditerranéen, il est normal d’être attentif à nos voisins dans l’égale dignité de nos peuples. La realpolitik nous l’impose, à moins de continuer pendant 100 ans en vain à revendiquer une reconnaissance qui ne viendra jamais. Il n’est que de voir comment la zemmourisation a mis à nu les convictions intimes du corps social français et on apprend que 61% des citoyens sont racistes. C’est dire s’il y a loin de la coupe aux lèvres s’agissant d’une réconciliation à l’ancienne qui n’a plus cours dans un monde où la force économique, scientifique et militaire est toujours en filigrane dans toute discussion.
La Révolution tranquille du 22 février 2019
Le sursaut salvateur du 22 février 2019 a permis de donner un coup d’arrêt à la gabegie. Difficilement, le pays se remet au travail, mais la conjoncture internationale du fait de la chute drastique des prix du pétrole, conjuguée à la pandémie, a fait que tout était à refaire. Comment mettre en place des institutions qui résistent aux hommes, où les libertés sont consacrées, ainsi que l’alternance devant une attente sociale impatiente en termes de niveau de vie avec toujours la mentalité de l’État-providence et, par-dessus tout, une opposition qui attise les rancœurs et qui, objectivement, ne reconnaît pas les efforts faisant passer, de mon point de vue, les droits légitimes de liberté, d’expression bien avant les droits obligatoires d’une vie décente, d’un emploi, de manger à sa faim, d’avoir un toit, de se soigner et d’être éduqué ?
Je pense honnêtement que faire tourner le pays avec une rente de 22 milliards de dollars en 2020 a été une prouesse au vu des multiples contraintes toujours actuelles. Il paraît cependant naturel d’aller par le dialogue à plus de synergie car les défis mondiaux actuels ne prennent pas en compte nos états d’âme. C’est à nous de mettre en place inlassablement le dialogue avec un seul mot d’ordre : l’Algérie avant tout, pour reprendre une expression du président Boudiaf, l’un des architectes de la glorieuse révolution de Novembre.
Conclusion
En cette veille du déclenchement de la révolution du 1er Novembre, l’Algérie que nous appelons de nos vœux sera celle que l’on construira, toutes tendances confondues. Une seule exigence : l’amour de l’Algérie. La vraie identité des Algériens est ce droit et ce devoir de «vivre ensemble, que l’on soit de l’est ou de l’ouest, du nord ou du sud». Le 1er Novembre de papa appartient à l’Histoire ; par contre, l’esprit de Novembre, qui a fait que des jeunes, par leur sacrifice suprême, ont arraché l’Algérie des griffes du pouvoir colonial, doit être toujours en nous. Nous devons le ranimer chacun de nous en donnant l’exemple de l’abnégation. Pour cela, seul le parler vrai, l’honnêteté et le travail permettront à nos aînés de se reposer enfin, sachant que le flambeau est définitivement entre de bonnes mains. Le monde a changé. Les chaos libyen et malien sont à nos portes. Les loups attendent la curée Il faut savoir ployer pour ne pas rompre les partis actuels seraient utiles en incitant les Algériens à travailler, s’instruire ; bref, être une nouvelle Révolution, celle de l’intelligence.
Inventons un nouveau 1er Novembre mobilisateur qui puisse répondre aux défis du siècle concernant la sécurité alimentaire, le problème de l’eau, des changements climatiques et par-dessus tout le défi de l’énergie, tant il est vrai que cette rente n’est pas au service du développement. Il est plus que temps de freiner cette hémorragie et de comprendre que notre meilleur coffre-fort est notre sous-sol. Dans un monde de plus en plus dangereux à la fois sur le plan des éléments naturels — notre pays étant vulnérable aux changements climatiques —, mais aussi sur les plans économique, financier et militaire, que devons-nous faire ? Il nous faut «moderniser» le 1er Novembre qui doit être décliné avec les outils du XXIe siècle. Pour faire court, la révolution de Novembre devra être réappropriée par la jeunesse. Il nous faut chaque fois réinventer le sens de l’indépendance nationale.
Le nouveau langage n’est plus seulement celui des armes, mais celui de la technologie du Web2.0. Il faut, avec l’argent de la rente, mettre en place un développement durable à marche forcée. Une révolution de l’intelligence est certainement la solution. Seul le parler vrai permettra à l’Algérie de renouer avec ce nationalisme qui, contrairement, n’est pas passé de mode, c’est un puissant stimulant. À côté de la légitimité révolutionnaire de nos aînés moudjahidine, le moment est venu de faire émerger la légitimité de la compétence, du neurone, celle capable de faire sortir l’Algérie des temps morts. Si on ne fait rien pour revitaliser le 1er Novembre, cette symbolique disparaîtra alors que nous avons besoin plus que jamais d’un ciment fédérateur qui puisse assurer ce désir de vivre ensemble.
Nous devons nous référer à nos aînés, à leurs formidables courage et détermination, pas pour en faire un fonds de commerce qui, près de 60 ans après l’indépendance, structure encore la société oubliant que la majorité des Algériens nés après l’indépendance n’ont qu’un lointain rapport avec la Révolution qui n’est pas explicitée en termes de défi à perpétuer pour porter haut et fort une nouvelle révolution de Novembre 2.0. Plus que jamais, la transition énergétique devrait être à l’honneur et il ne faut surtout pas croire que le baril à 80 $ va durer. Ce serait une tragique erreur d’arrêter de mettre en œuvre les chantiers lancés de la transition énergétique, de la locomotion électrique de l’hydrogène vert, de la plantation proposée de 1 milliard d’arbres à croissance rapide pour développer le bois, énergie capable de nous permettre de freiner cette course vers l’abîme qui nous fait consommer près d’un milliard de m3 de gaz par semaine pour un prix actuel de 400 millions de dollars.
Comment survivre et ne pas devenir une zone grise ouverte à tous les vents ? En son temps, Boumediene avait mis l’Algérie en chantier autant de « grain à moudre à la jeunesse des années 70 qui a perpétuer à sa façon modestement la glorieuse Révolution de Novembre. C’est cette utopie des années 70 qui a fait que le Service national a été le creuset du vivre-ensemble et du faire- ensemble qui a fait que ma génération s’est trouvée engagée dans les différents chantiers du pays qui sont le barrage vert – que l’on veut revitaliser en 2021 —, la construction des mille villages agricoles pour remplacer les milliers de villages détruits au napalm. La nationalisation du pétrole qui fait que les complexes de GNL, de pétrochimie actuels, les 22 millions de tonnes de raffinage actuels datent de cette époque.
J’emprunte à Saint-Exupéry sa vision de l’engagement : «Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose. Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer.» Mutatis mutandis, nous devons faire naître au sein de la jeunesse cette utopie ce désir d’être utiles et d’être acteurs de leur destin, ce désir de construire, de se sentir responsable de l’avenir du pays et ceci par des chantiers permanents.
Une nouvelle révolution du 1er Novembre 2.0 permettra de former une élite scientifique pour la lutte permanente contre le stress hydrique et les changements climatiques. Il s’agira aussi de développer le Sud dans ses multiples dimensions, en développant l’agriculture saharienne, en créant des villes nouvelles. Bref, autant de chantiers avec un plan Marshall pour l’hydrogène vert qui créeront une nouvelle utopie. Cette Algérie nouvelle tant rêvée devrait, avant toute chose, parler d’une seule voix et prôner plus que jamais le dialogue partant du fait qu’il n’y a pas de patriote plus patriote que les autres, que nous n’avons pas de patrie de rechange ou de repli hic et nunc (ici et maintenant), nous devons trouver en nous les modes d’entente sur les fondamentaux du pays. Un pays en ordre de marche ira avec moins de difficultés à affronter les challenges qui l’attendent. Nous ne pouvons avoir meilleure preuve de fidélité aux messages de Novembre.
Pr Chems Eddine Chitour.
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Source : Lire l'article complet par Réseau International
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