Pascal Gélinas, documentariste, membre de l’Association des communicateurs scientifiques du Québec (ACS) et membre du Regroupement Des Universitaires
Cosignataires:
Nimâ Machouf, PhD, épidémiologiste, Chargée d’enseignement à l’école de santé publique de l’Université de Montréal
Anthony B. Miller, Professor & Department Chair Emeritus, Preventive Medicine & Biostatistics Dalla Lama School of Public Health, University of Toronto
Paul Héroux, PhD, Professeur de Toxicologie et d’Effets Sanitaires des Ondes Électromagnétiques, Faculté de Médecine, Université McGill, Département de chirurgie, Centre universitaire de santé McGill, Membre du Regroupement Des Universitaires
André Fauteux, éditeur, Magazine La Maison du 21e siècle, membre de l’Association des communicateurs scientifiques du Québec (ACS) et membre du Regroupement Des Universitaires
DES UNIVERSITAIRES – Madame Plante, Nous sommes nombreux à croire qu’un monde dirigé majoritairement par des femmes serait plus pacifique, plus écologique, plus humain. Malheureusement, en tant que première mairesse de Montréal, vous minez cet espoir avec votre projet de Laboratoire de l’innovation urbaine, où la 5G serait installée dans un périmètre entourant le Quartier des Spectacles, pour ensuite s’étendre à toute la ville. Vous y voyez l’Avenir avec un grand A, et vous voulez ainsi paver la voie à toutes les villes du Québec. Pourtant, vous procédez ainsi sans consultation publique, mais surtout sans étude d’impact sanitaire et environnemental. Est-ce agir en bonne « maire » de famille?
Des risques documentés
Vous ignorez la pétition signée par plus de 25 000 citoyens s’opposant à votre projet. Vous ignorez les appels que lancent depuis des années d’éminents chercheurs du monde entier. Et vous faites fi d’une réalité incontournable : les compagnies d’assurances refusent d’assurer tout dommage sanitaire potentiellement causé par les téléphones portables, les tablettes, le Wi-Fi, les antennes, en fait tout appareil émettant des champs électromagnétiques (CEM), leur attribuant la classe de risque la plus élevée! Elles se fiaient déjà à une abondante littérature scientifique, révisée par des pairs, bien avant l’étude décisive du très réputé National Toxicology Program (NTP) américain publiée en 2018, établissant un lien clair entre le rayonnement des téléphones portables et le cancer. Un lien confirmé la même année par une autre étude réalisée à l’Institut Ramazzini. Au point où aujourd’hui, le NTP a entrepris une nouvelle étude pour élucider les mécanismes qui causent les bris d’ADN.
Hélas, ce qui est évident pour le monde de l’assurance ne l’est pas encore pour nos agences de santé, qui continuent à nier les effets potentiels des rayons non ionisants sous le seuil d’échauffement thermique. Et cela en dépit de centaines d’études qui rapportent des dysfonctions de la reproduction, des problèmes de la mémoire et de l’apprentissage, des dommages à l’ADN, au système nerveux et aux cellules, ainsi qu’une augmentation des cancers, dont le cancer colorectal.
Ironie du sort, en novembre 2020, au moment où vous adoptiez, avec l’accord du parti d’opposition Ensemble Montréal, votre projet de Laboratoire de l’innovation urbaine, une méta-analyse de 46 études concluait que converser avec le cellulaire contre l’oreille 17 minutes par jour pendant 10 ans, soit environ 1 000 heures, augmente de 60 % la probabilité de développer une tumeur au cerveau, dont le glioblastome, le plus mortel. Ce type de cancer a quadruplé en France depuis 1990, selon l’agence Santé publique France.
Les effets délétères des radiofréquences sont bien documentés par les militaires américains depuis 1969. Par contre il n’existe qu’une centaine d’études sur les effets biologiques des nouvelles fréquences millimétriques de la 5G, mais elles sont déjà assez préoccupantes pour qu’il faille impérativement pousser la recherche plus loin. Ces rayonnements peuvent facilement traverser la peau via les canaux sudoripares et les méridiens (trajets d’acupuncture) pour atteindre les organes internes. Ils semblent affecter également la rétine de l’œil et pourraient provoquer une dégénérescence maculaire. Cet ajout progressif des ondes millimétriques de la 5G pourrait tripler le niveau de rayonnement auquel nous serons tous exposés 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.
Principe de précaution
Votre devoir de mairesse serait pourtant d’exiger que soit appliqué le principe de précaution tant que des études indépendantes et impartiales n’auront pas démontré l’innocuité de cette technologie pour les humains et l’environnement. Vous pourriez prendre exemple sur Martine Aubry, maire de Lille en France, qui a déclaré récemment : « Parce que nos doutes persistent tant du point de vue sanitaire que de la sobriété numérique sur le déploiement de la 5G, nous avons voté (…) un moratoire. Il est urgent d’attendre ! » Idem pour la maire de Marseille, Michèle Rubiola, la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian ou celle de Besançon, Anne Vignot. En fait, 38 maires de France demandent un moratoire sur l’installation de la technologie 5G. En Italie, plus de 600 municipalités s’opposent à son déploiement. En Suisse, plusieurs cantons réclament un moratoire. Tout comme Hawaï, la Corse, la Slovénie, le Nigéria, Chypre…
Faire de Montréal une ville « rayonnante »
Vous qui êtes Ambassadrice mondiale pour la biodiversité au sein du Conseil international pour les initiatives écologiques locales (ICLEI), vous invitez les télécoms à installer à Montréal environ 60 000 antennes, soit une à tous les 100 mètres environ. C’est-à-dire partout où les gens vivent ou travaillent. Il faudra couper les arbres dont le feuillage bloque la propagation des ondes millimétriques de la 5G. Pourtant, couplé à l’usage des pesticides et au changement climatique, le rayonnement électromagnétique est un cofacteur du déclin dramatique des insectes pollinisateurs. En Europe, quatre-vingts pour cent des colonies d’abeilles ont déjà disparu. Or quatre-vingts pour cent des espèces végétales dépendent de leur pollinisation.
À Montréal, ces antennes 5G seront situées parfois à quelques mètres de votre chambre à coucher ou de la mienne. Alors qu’une surenchère galopante gonfle le prix des maisons et des loyers, vous risquez de provoquer une perte de valeur des propriétés résidentielles qui seront en façade d’une antenne 5G (jusqu’à 20%, d’après le magazine Realtor)!
Et nos enfants ?
Quant au risque sanitaire, savez-vous que les enfants absorbent deux fois plus de radiations que les adultes, et que les femmes enceintes trop exposées sont potentiellement à risque de fausses couches, ou d’accoucher plus souvent d’enfants souffrant d’obésité, d’asthme, de malformation cardiaque ou du trouble du déficit de l’attention? Vous et moi n’aurons pas été exposés durant toute notre vie au rayonnement électromagnétique. Mais qu’en sera-t-il de nos enfants et petits-enfants?
Carboneutralité et sécurité compromises
Vous qui êtes porte-parole des Villes du monde engagées dans la lutte contre les gaz à effet de serre (GES), vous faites la promotion d’une technologie qui va générer une augmentation importante des GES émis dans l’atmosphère. En Europe, le Haut Conseil pour le Climat nous indique que la 5G augmenterait de 18 à 44 % les émissions de GES du numérique. Alors que vous avez vous-même fixé l’atteinte de la carboneutralité pour Montréal en 2050, ce déploiement n’est-il pas un contresens gênant?
Vous qui êtes signataire de la déclaration du réseau Cities for Digital Rights, vous favorisez une technologie sans fil qui, en raison de la multiplication exponentielle de ses points d’accès, facilitera les cyberattaques, les atteintes à la vie privée et le vol des renseignements personnels. Pourquoi ne choisissez-vous pas la seule technologie pouvant réduire le cybercrime? Une ville intelligente se doit de miser le plus possible sur les communications filaires, la fibre optique notamment, et le moins possible sur les communications sans fil. Selon une association internationale d’ingénieurs en électricité (l’IEEE), les connexions câblées consomment en moyenne dix fois moins d’énergie que la technologie sans fil. Ajoutons qu’elles sont cent fois plus rapides que la 5G, foncièrement plus sécuritaires, et parce qu’elles n’émettent aucun rayonnement, elles sont sans danger pour les humains et l’environnement. C’est le choix qu’a fait la ville de New York en sécurisant le haut débit filaire jusqu’aux logements de plus d’un demi-million de ses résidents, permettant des vitesses parmi les plus rapides du pays, soit un gigaoctet à la seconde.
Des marchands de rêves
Essentiellement, le système de téléphonie 5G ne répond à aucun besoin réel des citoyens. Il nous est imposé par les marchands de cellulaires sous le couvert des normes désuètes de Santé Canada qui n’ont pas été révisées depuis 1998. Que des infrastructures privées utilisent la 5G pour faire fonctionner leur industrie, soit! Mais rien ne justifie dans nos villes cette invasion de nouvelles infrastructures 5G délétères et gourmandes en énergie. Rien ne justifie ce jeu de roulette russe qui se fait sans notre consentement, et en violation de nos droits les plus fondamentaux.
Au terme de cette élection, est-ce rêver en couleur que d’espérer une administration municipale qui se fie résolument à la science, et qui permette aux Montréalais.es de bénéficier d’Internet et des technologies sans fil de façon sécuritaire, en accordant une attention prioritaire aux garderies, aux écoles, aux femmes enceintes et aux personnes âgées?
Liens utiles
https://mdsafetech.org/science/
https://ehtrust.org/science/research-on-wireless-health-effects/
https://www.saferemr.com/2019/07/recent-research.html
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